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On vient de me dire que M. de Lilli est fort malade. Je voudrois bien qu'on pût le transporter ici, où j'en prendrois soin comme de mon frere. Voyez avec M. de la Valliere, qui est son ami, si on ne pourroit pas nous le confier.

JE

LETTRE XVII.

Cambrai, 16 août 1712.

E croyois aimer fort tendrement M. le chevalier Destouches, et comme j'aime très peu de gens; mais sa blessure me fait sentir que je l'aime encore bien plus que je ne le croyois. Votre lettre, mon petiț enfant, ne peut me rassurer. Les coups de canon ne font jamais des contusions légeres : la cuisse est pleine de gros vaisseaux. L'escàrre de la contusion ne sauroit tomber sans quelques embarras. La saison est mauvaise; l'air du camp est corrompu: en cet état, il ne peut faire aucune fonction; et par conséquent sa présence à l'armée est absolument inutile pendant qu'on le pansera. D'ailleurs, il y a M. du Magny, M. de Valiere, qui sont très capables et très appliqués. Je conjure notre cher chevalier de venir passer ici les jours les plus importants pour sa guérison. Il s'en retournera dès le moment où il pourra recom

mencer ses fonctions. C'est ne perdre aucune minute pour le vrai service. Allez, mon cher enfant, représenter ceci à M. le maréchal, et prenez bien respectueusement la liberté de lui lire cette lettre: si sa lecture peut contribuer à mon dessein, je voudrois que M. le maréchal eût la bonté d'ordonner à notre chevalier de venir se reposer ici, comme je viens de l'expliquer. En faisant votre cour à M. le maréchal, diteslui avec quel zele je joins toujours dans mes souhaits tout ce qui peut lui faire plaisir et honneur, avec la prospérité des armes du roi et le bien de la France.

Pour notre chevalier blessé, embrassez-le tendrement de ma part, en attendant que je puisse l'embrasser moi-même. Les deux mots qu'il m'a écrits sont bons, et font espérer mieux pour les suites. Je ne prêche point; mais plus j'aime quelqu'un, plus Je lui desire le bien qui me paroît unique à desirer. Je vous ai écrit ce matin par mon courier à pied: j'espere qu'il me rapportera ce soir de vos nouvelles; car il va comme s'il avoit des bottes de sept lieues. Prenez soin de notre blessé: soyez son garde-małade s'il le faut. J'irai le chercher dans mon carrosse jusqu'au camp. Bon jour. Répondez-moi bien précisément sur ce que je vous ai mandé ce matin. La lettre que vous m'avez envoyée est de madame de Beauchamp. Elle a fait un ouvrage de grande éloquence:

vous serez étonné des ressources de son esprit. Joignez toujours à la date de vos lettres l'heure précise où vous les écrivez...

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J'ENVOIE exprès, mon cher fanfan, pour savoir de tes nouvelles; j'en suis en peine. Je ne veux pourtant te faire manquer à aucun vrai devoir, ni à aucune bienséance raisonnable: mais puisque votre régiment sert à l'armée, pourquoi faut-il que vous ne demeuriez pas dans le poste de votre régiment comme les autres colonels? et pourquoi voulez-vous demeurer au quartier général pour vous engager par là à vous trouver à toutes les attaques? Il me paroît que vous devez être à votre régiment comme les autres colonels, et n'aller aux attaques du siege et à la tranchée que comme les autres colonels ont coutume d'y aller de leurs postes. En un mot, c'est beaucoup que, malgré votre jambe ouverte, vous demeuriez encore hors d'ici. Mais au moins il faudroit vous borner à votre poste, à vos fonctions de colonel, et à ce que tous les colonels font pour le siege, en demeurant toujours dans leurs postes. Pensez-y simplement de

A

vant Dieu, et ayez égard à ce que je vous dis, si je ne vous dis rien que de raisonnable. Je veux pour vous les périls de nécessité, et pour moi les peines qu'il est naturel que j'en ressente; mais n'y augmentez rien par un empressement d'ambition et de faste qui ne seroit pas selon Dieu. Réponse nette et précise, mon cher neveu: Dieu soit au milieu de ton cœur, et le possede tout entier! Ces deux mots force et humilité me plaisent. Je prie Dieu qu'ils soient ton partage. Amen.

E

LETTRE XIX.

Cambrai, 18 août 1712.

Jɛ renvoie un exprès, mon cher fanfan, pour te dire que si ta présence au régiment ne t'épargne aucune assiduité à la tranchée, j'aime mieux que tu demeures au quartier général. M. de Puységur ne sera pas incommodé de toi. Tu dois manger souvent ailleurs. Tu n'as point de chaise à toi pour t'adoucir les marches de jour et de nuit avec le régiment. Ta jambe en pourroit souffrir, et elle est un bon titre pour n'être point assidu à ton poste et pour t'en épargner les fatigues; mais ce que je te demande instamment est de n'être pas plus souvent à la tran

chée que les autres colonels, qui sont dans leurs postes avec leurs régiments, et qui satisfont suffisamment au vrai devoir. C'est précisément là-dessus que je demande bonne foi et simplicité, sinon je te renonce. Mille amitiés à M. le chevalier Destouches, dont je suis encore en peine, malgré tout le mépris qu'il a pour sa contusion. La réputation et l'habileté de M. le Dran me rassurent un peu. Le retour de cet envoyé me fera grand plaisir, s'il me rapporte promp, tement deux mots de ta main.

Je voudrois bien avoir une réponse pour le prisonnier dont je t'ai envoyé le mémoire, afin qu'il lui parût que je ne l'ai pas oublié, et qu'il n'a pas tenu à moi qu'il n'obtînt sa liberté.

Bon jour, fanfan; mille choses dans les occasions à MM. les ducs de Mortemart et de Saint-Aignan. Tu ne me dis rien sur M. le duc ni sur M. de Saintrailles.

LETTRE XX.

Cambrai, 21 août.

Tu m'as mandé, mon petit fanfan, que tu aurois au régiment plus de fatigue qu'au quartier général : je m'en tiens à tes propres paroles. Il est vrai qu'il seroit

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