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PESTE DE LYON EN 1628 ET 1629.

Le récit que Papon (1), dans son traité de la Peste ou Époques mémorables de ce fléau, a fait de la célèbre peste qui désola Lyon en 1628 et 1629, nous semble offrir assez d'intérêt pour mériter d'être inséré dans notre recueil, surtout en ce moment où plusieurs personnes se livrent avec ardeur aux recherches d'histoire locale. Nous eussions voulu faire précéder ce récit de celui des ravages que le même fléau a exercés dans cette ville à d'autres époques; mais le temps et l'espace nous manquant pour exécuter aujourd'hui ce projet, nous nous contenterons de signaler les six principales pestes dont notre cité s'est vue affligée, et d'indiquer les sources où l'on pourrait puiser, si l'on désirait avoir sur ce sujet de plus amples notions.

(1) Jean-Pierre Papon, oratorien, né au Puget de Téniers en 1754, et mort à Paris en 1803, était préfet général du collége de la Trinité de Lyon en 1765, époque à laquelle il publia son Art du poète et de l'orateur. Il y avait eu long-temps auparavant, au même collége, un jésuite nommé Jean Papon, sans doute de la même famille, qui y professait la rhétorique, et y prononça, en latin, le 20 février 1643, l'oraison funèbre du cardinal de Richelieu, qu'il dédia ensuite au frère de ce ministre, Alphonse du Plessis, archevêque de Lyon.

Tome X.

II

La peste de Lyon la plus ancienne paraît être celle dont parle Grégoire de Tours, ch. IV, 1. 31. Elle doit être placée à l'année 571, comme elle l'a été par Dom Bouquet, Recueil des hist. de Fr., t. II, p. 219, et non à l'année 593, comme l'a écrit le P. de Saint-Aubin, Hist. de Lyon, p. 254, et encore moins à l'année 597, comme l'a cru M. Delandine, Alm. de Lyon pour l'an VI, p. xxviij. Elle fut des plus terribles, et s'étendit sur les villes de Bourges, Châlons et Dijon, qui, ainsi que Lyon, en furent, en quelque sorte, dépeuplées : valdè depopulata sunt, dit Grégoire de Tours.

La seconde eut lieu eu 1564. Elle enleva plus de la moitié des habitans. Consultez Paradin, Mém, de l'hist. de Lyon, p. 386; Rubys, Hist. véritable de Lyon, p. 404; le même, Privileges des hab. de Lyon, p. 30, et le P. de Saint-Aubin, p. 254.

La troisième régna pendant les années 1581 et 1582. Voyez Rubys, Hist., etc., p. 430; le P. de Saint-Aubin, p. 258-259; les Archiv. du Rh., t. VII, p. 114, etc.

La quatrième est celle de 1628-1629 dont on va lire le récit. Papon, en le composant, avait, à ce qu'il parait, sous les yeux le Lyon affligé de contagion, par le P. Jean Grillot, de la compagnie de Jésus, Lyon, Fr. de la Boutiere, 1629, in-8,° (publié d'abord en latin sous le titre de Lugdunum lue affectum et refectum); le traité du P. Théophile Raynaud, de Martyrio per pestem, 1630, in-80.; celui des Causes, des accidens et de la cure de la peste, par Senac, 1744, in-4.° et le Mercure françois, tom. XV, p. 2 et suiv.

La cinquième arriva en 1638. Voyez le P. Ménestrier, mss. de Lyon, n°. 1358 du catalogue de M. Delandine. La sixième et dernière semble être celle de 1642. Le

fléau cessa tout-à-fait, cette année, comme le remarque le P. de Saint-Aubin, p. 262. Cependant, comme on réimprima plus tard, en 1644 et en 1670, l'ouvrage intitulé l'Ordre public pour la ville de Lyon pendant la maladie contagieuse (par G. Chevalier), il semblerait qu'à ces deux époques on avait eu des motifs de concevoir quelque crainte du retour de cette fatale calamité. On ne dut pas non plus être sans inquiétude ni négliger de prendre les précautions convenables, lors de la fameuse peste de Marseille en 1720.

EXTRAIT du traité De la peste, ou Époques mémorables de ce fléau et des moyens de s'en préserver, par J. P. Papon, ci-devant historiographe de Provence Paris, imprimerie d'Egron, an VII (1800), 2 vol. in-8.o, tom. I, pag. 165-185.

« La ville de Lyon avait trop de rapports avec l'Italie (1) pour ne pas recevoir la contagion que devaient lui transmettre les voyageurs et le commerce. En effet, elle y fut apportée par des soldats venus de cette contrée, à la fin de septembre 1628, lorsque l'automne semblait avoir ramené les beaux jours du printemps (2). Le ciel était pur,

(1) C'est après avoir parlé de la peste à laquelle Milan était alors en proie, et sur laquelle Manzoni a rassemblé tant de curieux détails dans son roman des Fiancés, que Papon donne ceux qui suivent sur la peste de Lyon.

(2) Il existe une inscription consacrée à l'une des pie mières victimes de la contagion; elle se lit à Fontanières, près de Ste-Foy-lès-Lyon, à l'angle d'un mur de terrasse, sur une pierre qui paraît avoir été surmontée d'une croix, et elle est conçue en ces termes :

« A la gloire de Diev. Dame Estiennette Nalot a faict

un petit vent frais purifiait l'air, et les rayons du soleil répandaient sur la ville et la campagne une chaleur bienfaisante qui ranimait la nature. La maladie se fut à peine déclarée que la frayeur s'empara des habitans. Chacun ferme sa boutique et ses magasins, emballe son argenterie et ses effets les plus précieux, commande des charrettes pour le transport des hardes, fait ateler des chevaux, ou loue des voitures, et hâte, par ses vœux et son activlté, le moment heureux où il pourra quitter une ville pestiférée. Ceux qui ont des maisons de campagne s'y retirent, croyant y être à l'abri de la contagion ; les autres cherchent un asile dans les villes, les villages et les hameaux voisins; mais, dans beaucoup d'endroits, on refuse de les recevoir; et ces familles errantes se voyant repoussées partout avec une dureté désespérante, trouvent à peine, à force de prières, de supplications et d'argent, des hommes qui veuillent les recevoir. Quelques-uns, après avoir erré de village en village, tantôt accablés d'injures, et quelquefois chassés à coup de pierres par les habitans, s'en retournent tristement à la ville, où ils sont mal reçus de leurs parens, et finissent et finissent par mourir dans un abandon plus cruel que la mort, puisqu'ils sentent qu'ils l'ont méritée en prenant la fuite les premiers. Il y en eut qui, après avoir eu la barbarie de laisser à la ville leurs femmes et leurs enfans au milieu des pestiférés, périrent dans l'abandon à la campagne, au lieu que leurs femmes et leurs enfans échappèrent à la maladie.

»eslever ceste croix honorant la memoire de sieur Iehan „Prvdomme, son mary, dvqvel les os reposent soubs » icelle, qui deceda en ce liev de la maladie contagievse "le 7. octobre 1628. 1629. »

e

Elle était accompagnée de circonstances qui méritent d'être remarquées. Les lieux infects, les maisons pleines d'immondices, étaient, pour ainsi dire, des lieux de sûreté. Les rues étroites, les logemens resserrés, les quartiers étouffés, ces lieux si propres à recevoir les impressions de la peste, en préservaient ; au lieu que les collines, les lieux aérés, les jardins agréables y étaient plus exposés (1); enfin les maisons vides d'habitans, et où, par cette raison, l'air devait être corrompu, s'étaient changées en demeures saines, et tel

(1) Cependant il paraîtrait que la Croix-Rousse en fut exempte. On voyait autrefois, à la montée de la Grande Côte, au-dessus de la rue Neyret, sur la porte d'entrée d'une maison, une petite statue de Saint Roch, dans une niche, avec cette légende: Ejus præsidio non ultra pestis 1628. La statue a disparu pendant la révolution et dernièrement en renouvelant l'inscription, on a retranché les mots ejus præsidio.

Cette inscription, ainsi que celle dont nous avons fait mention dans la note précédente, ne sont pas les seuls monumens qui aient été destinés à rappeler le souvenir de la peste de 1628 on lit dans Pernetti, Lyonn. dignes de mém. tom. II, pag. 78, que « Noble Claude des " Couleurs, ex-consul, bourgeois de Lyon, fonda (le » 19 mai 1630) une chapelle dans le territoire de Champ» verd, pour aider à la piété des citoyens que la peste " avoit chassés de la ville, et qui habitoient ce canton "; et le P. Ménestrier, Eloge histor., liste des prévôts des marchands et échevins de Lyon, année 1659, rapporte une inscription que le consulat de cette année fit mettre au-dessous d'une statue de N. D., placée dans la chapelle du pont de Saône, pour l'accomplissement d'un vœu la ville avait fait durant la grande peste.

que

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