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Paré en a recueilli une grande partie; mais n'ayant pas été témoin de tous, il a dû s'en rapporter aux auteurs qu'il consultait, et payer le tribut à son siècle, dont il était cependant une lumière : il est bien certain que s'il eût été secondé par les connaissances positives acquises depuis lui, il aurait apprécié à leur juste valeur tous les récits qu'il a répétés, et il aurait donné des explications fondées sur la réalité.

Le travail présent n'a pas pour objet de démontrer que les dessins donnés par Paré sont fabuleux ( l'on admet ordinairement avec trop de légèreté), mais de démontrer leur source, ce qui jusqu'à cette heure n'a jamais été fait complètement.

Afin de faciliter les recherches, je suivrai l'ordre adopté par Paré dans la 6o édition de ses OEuvres, Paris, 1607, in-folio.

Je ferai d'abord observer que cet auteur, qui connaissait tous les ouvrages de ses prédécesseurs, avait bien senti que l'art de guérir ne devait pas être uniquement borné au pansement des plaies et à la prescription vague de quelques évacuans : il aurait été loin d'approuver ce moine moscovite qui les remplaçait par une brosse plongée dans l'estomac pour le nettoyer, ainsi qu'on peut s'en assurer, Journ, des Savans, 1711, p. 470; Journal économique, 1759, août, p. 383; Raymond, Traité des maladies qu'il est dangereux de guérir, p. 229-230. Il était convaincu que l'homme qui se consacre au soulagement de ses semblables doit avoir des connaissances positives en histoire naturelle, soit pour se procurer des médicamens précieux, soit pour reconnaître le danger des substances délétères ou des animaux nuisibles.

Ainsi on doit regarder ce qu'a publié Paré, comme

l'encyclopédie de l'histoire naturelle du xvr siècle. Plusieurs auteurs n'ont en effet pas eu d'autre guide, et le savant jésuite Gaspard Schott, dans son ouvrage intitulé : Physica curiosa, répète toutes les merveilles indiquées par Paré, et les admet comme réelles, sans les discuter et sans en donner de preuves.

Nous commencerons notre examen par le second livre, qui traite des animaux et de l'excellence de l'homme; mais avant, nous rappellerons une exagération qui a donné lieu à un colloque piquant : « J'ai vu, dit un interlocuteur, un chou plus grand qu'une maison. Et moi, dit l'autre, un pot aussi grand qu'une église. » Le premier se moquant, l'autre reprit : « Tout doux, on le fit pour cuire votre chou... » Il n'était cependant question dans l'assertion du premier interlocuteur que d'un fait réel bien connu, mais présenté ou plutôt raconté avec l'exagération assez habituelle aux voyageurs.

On sait en effet que le nom de chou (caulis) est donné áu gros bourgeon terminal des palmiers, dont celui du palmiste franc, areca oleracea, Lin., est employé comme substance alimentaire. Ce palmier, le plus élevé et le plus élégant des arbres de l'Amérique, est la source du chou plus grand, c'est-à-dire plus élevé, qu'une maison.

Parmi beaucoup d'observations exactes consignées dans l'ouvrage de Paré, il en est quelques-unes qui paraîtraient hasardées si la science n'était pas venue les confirmer. L'auteur, en effet, s'en rapportait aux récits des voyageurs, et sa bonne foi ne lui permettait pas de supposer qu'il se trouvait des hommes disposés à se jouer de la crédulité des autres.

Dans la présente dissertation, on acquerra la certitude que si Paré eut pu observer par lui-même tous les faits qu'il raconte, il les aurait appréciés justement,

et il ne s'en serait pas laissé imposer par les idées de son siècle.

P. 59. CHAPITRE VI. Des Mouches à miel.

Cet article de Paré renferme ce que de son temps on croyait des abeilles ; mais les observations modernes ont dissipé les préjugés que l'on avait sur elles.

J'ai été surpris du silence gardé par notre auteur, sur l'assertion suivante, relative aux abeilles, avancée par Pline, et jouissant d'une grande faveur dans l'esprit des alchimistes pour leur recherche du grand œuvre. Mel utilissimum oculis auribus quoque in quo sunt apes immortuæ. Plin. H. N., lib. XXIX, cap. VI. Tormina et melle curantur in quo sunt apes

tuo decocto. Op. cit., lib. xxx, cap. vii.

VII.

immor

Tetris ibi hulceribus et manantibus auxiliantur..... Mel in quo apes sunt emortuæ, cum resina... tricesimoque die resolvunt. Op. cit., lib. xxx, cap. vi.

Les Anciens attribuaient des vertus merveilleuses à cette sorte de miel. Cette opinion régnait encore, il y a peu d'années, chez quelques personnes. Nous avons vu à Dijon deux de nos confrères à l'Académie, Tartelin et Guichard, qui cependant n'étaient point dépourvus d'instruction, répéter des essais pour se le procurer ils fondaient sur la réussite de leurs tentatives l'espoir d'obtenir une panacée merveilleuse.

:

Le premier avait fait construire dans un des petits jardins du jardin de Botanique, donné à l'Académie par M. Legouz de Gerland, un rucher dans lequel se trouvaient plusieurs paniers d'abeilles, pour se procurer ceux qui devaient réaliser les espérances de l'expérimentateur.

Le second avait placé dans son cabinet, dont il entretenait constamment la température au même degré,

deux ruches fermées hermétiquement, et il espérait, au bout d'un temps dont il avait fixé la durée, obtenir le remède incomparable, sur lequel il établissait l'espérance d'une fortune proportionnée à l'immense service qui serait rendu au genre humain. Le secret mis par ces deux individus dans leurs opérations mystérieuses, n'a été que soupçonné pendant leur vie ; mais après leur mort, il a été découvert.

Il est inutile, je pense, de signaler l'insuccès de ces tentatives ridicules, analogues à celle de la recherche du grand œuvre par les alchimistes, et à celle de la formation de l'homoncule dans un matras, par Raymond Lulle. Kircher, Mund. subterran., tom. 2, lib. x1, sect. 2, cap. vi, p. 277-279. Henckel, Flora saturnisans, p. 221. Act. Divion. 1820, p. 332.

P. 61. CHAP. VII. Des fourmis.

Paré, appuyé de l'autorité de Plutarque, dit en parlant des fourmis : « Davantage jamais ne font mal les

«unes aux autres. >>>

Cette assertion était démentie par une observation d'Æneas Sylvius, rapportée par Lycostènes (Prodig: ac ostentor. chronic., p. 476). Il s'agit d'un grand combat de fourmis, dont il avait été témoin l'an 1433, près de Boulogne en Italie; les détails en sont curieux, et je les conserve dans la note ci-dessous (1). On les aura,

(1) Voici ce qu'il dit: In agro enim Bononiensi pirum quamdam aridam ex minoribus formicis, pastus causa, complures ascenderant, supervenere majores non parvo numero, quæ illas partim occiderunt, partim dejecerunt.

Post duas fermè horas, tanta minorum formicarum vis exorta est ut totus ager nigro tectus agmine videretur. Accessere stipatæ omnes, et arboris undique stipitem cir

pendant long-temps, regardés comme une fable; cependant le Journal économique, 1752, juin, p. 39, donne la relation d'une guerre de fourmis dans laquelle les fourmis jaunes furent vaincues par les noires.

Les observations subséquentes d'Huber, Recherches sur les mœurs des fourmis indigènes, ont confirmé celle d'Æneas Sylvius, relative au combat des fourmis amazones, polyergus rufescens, Latr., avec les fourmis noires cendrées, formica fusca, Lin.; combat dont, en 1804, le 17 juin, a été témoin Huber qui a encore décrit la guerre cruelle que les fourmis Hercules, formica herculeana, Lin., font aux fourmis sanguines, formica sanguinea, Latr., qu'elles vont chercher jusqu'aux portes de leur habitation; et celle que les fourmis fauves, formica rufa, Lin., se font entre elles.

Je ne puis quitter l'histoire des fourmis sans rappeler les caricatures basées sur les sauterelles, d'après leur

cumdantes paulatim adscendere cœperunt. Majores formica ubi hostes adesse animadverterunt, conglobatæ supernè pugnam expectaverunt. Postquàm simul acies convenere, commisso prælio majores morsu rabido, modò illas modò istas è minoribus interemere, totasque brevi spatio confecerunt, ut cadentium morientiumque cumulus, ad piri radices non parvus in terrâ succreverit. Sed cùm pertinacius instarent minores, semperque acies aciem premeret, vigintique aut plures unam ex hostibus circumdarent, et à tergo et à fronte pugnantes, undequaque latera confoderent, victæ tamen majusculæ, et ad unum omnes necatæ, illati prius temerè prælii pœnas dedere. Hæc acta sunt spectantibus romanæ Ecclesiæ copiis, cùm Petri Cathedram Eugenius quartus teneret. (Lycosthenès.... Voy. Moufet, ins. Theat, P. 242.)

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