mademoiselle Clotilde, qui a fait verser à l'Eglise catholique tant de larmes et tant de sang; ne peut-on pas dire qu'il a commencé au moment où le divin Maître annonça qu'il devoit instituer l'Eucharistie ? CLOT. Il est vrai, M.lle Christine; les Juifs furent étonnés et se révoltèrent, quand J. C. leur dit : « Le pain que je vous donnerai, c'est ma chair qui doit être livrée pour vous. Comment, se disoient-ils les uns aux autres, comment peut-il nous donner sa chair à manger? - En vérité, en vérité, je vous le dis, reprenoit le Sauveur, ma chair est véritablement une nourriture, et mon sang véritablement un breu-vage. Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang, demeure en moi et moi en lui. C'est le pain qui est descendu du ciel. Vos pères ont mangé la manne et sont morts, celui qui mange ce pain vivra éternellement.>> Plusieurs mêmes des Disciples du Sauveur furent scandalisés. << Cette parole est dure, disoient-ils : qui peut la comprendre? et ils abandonnèrent le divin Maître, » qui, bien loin de leur observer que ces paroles ne devoient point s'entendre littéralement, mais dans un sens figuré et allégorique, se comme les entendent les calvinistes, contenta de dire à ses Apôtres : « Ceux-ci m'abandonnent; ne voulez-vous point aussi vous autres me quitter? - Ah! Seigneur, s'écria S. Pierre, à qui irions-nous? vous seul avez les paroles de la vie éternelle. >>> Disons de même, mes chères compagnes. Attachons nous inviolablement à JésusChrist. Croyons qu'il est réellement dans l'Eucharistie; c'est lui qui nous en assure. Il ne pouvoit s'expliquer plus clairement; il est la vérité par essence, et celui qui est la vérité même, pourroit-il tromper les hommes ? MÉL. Comment, après des paroles si claires, si positives, peut-on nier la présence réelle ? ADEL. C'est l'orgueil, ma bonne amie, qui fait les hérétiques; ils citent Dieu même au tribunal de leur foible raison. Ils veulent pénétrer un mystère impénétrable. Ils s'égarent dans leurs folles pensées. CLOT. Oui, chère amie, ils s'égarent dans leurs folles pensées; ils osent dire que J. C. n'est point réellement et substantiellement dans l'Eucharistie. Selon eux, l'Eucharistie n'est que l'image et la figure du corps de Jésus-Christ, mais c'est donner à ses paroles un sens forcé, et absolument contraire à son intention; car Jésus - Christ a-t-il dit: Ceci est l'image ou la figure de mon corps ? Non, il a dit expressément : « Ceci est mon corps, mon corps qui est livré pour vous. >> S. Athanase, S. Basile, S. Grégoire de Nazianze, S. Chrysostôme, S. Ambroise, S. Augustin, S. Jérôme, S. Grégoire-le-Grand, tous les saints Docteurs, tous les saints Pères, ont entendu les paroles de Jésus-Christ dans le sens où nous les entendons nous-mêmes. Comme il est facile de s'en convaincre par leurs écrits, et les calvinistes sont obligés d'en convenir, n'estce pas être bien téméraire, bien audacieux, que d'oser croire que l'on entend mieux les divines Ecritures que ne les ont entendues ces hommes si illustres par leur science et par leurs vertus? Peut-on, sur l'autorité de Calvin, abandonner la doctrine universelle et la tradition constante de l'Eglise? Ah! mes chères amies, ils ont contre eux tout l'univers chrétien. Les Grecs, séparés de l'Eglise romaine, ont toujours cru et croient encore la présence réelle. Les luthériens eux - mêmes la croient, et ne rejettent que la transsubstantiation. Expliquez-nous ce mot de transsubstantiation, ma chère Christine? CHRIST. C'est une expression que l'Eglise a consacrée, pour exprimer le changement qui se fait du pain et du vin, au corps et au sang adorables de J. C. Avant que le prêtre ait prononcé les paroles sacramentelles, il n'y a que le pain et le vin; mais aussitôt qu'il a dit : « Ceci est mon corps,>>> le pain est changé en la substance du corps de J. C. Aussitôt qu'il a dit : « Ceci est mon sang, » le vin se change en la substance du sang de J. C. Il est vrai, tous nos sens nous rapportent que le pain et le vin existent encore; mais la foi doit suppléer au défaut de nos sens; nos sens nous trompent quelquefois, et Dieu ne peut nous tromper. Celui qui changea autrefois la femme de Loth en statue de sel, la verge d'Aaron en serpent, les eaux du Nil en sang; celui-là, disent les saints Pères, peut bien changer le pain et le vin, et ils sont convertis effectivement en la substance du corps et du sang de J. C. L'Eglise le croit, la tradition l'enseigne. CLOTIL. Depuis le commencement du monde, c'est encore une comparaison que les saints Pères emploient fréquemment ; depuis le commencement du monde elles sont efficaces, ces paroles d'un Dieu Créateur : « Croissez et multipliez. » Les paroles du Verbe incarné ont la même force; jusqu'à la fin des siècles elles opèreront ce qu'elles signifient. Oui, toutes les fois qu'un prêtre, fût-il le plus méchant des hommes, prononcera, au nom de Jésus-Christ, ces paroles redoutables : « Ceci est mon corps, >> ceci est mon sang, >> il fera descendre sur l'autel le Dieu trois fois saint; le pain et le vin seront changés au corps et au sang de J. C., nous n'en verrons plus que les apparences. Je dis toutes les fois que le prêtre prononcera ces paroles, au nom de J. C.; car, c'est au nom de J. C. qu'il parle et qu'il opère: par lui-même, il ne peut rien; il est comme le reste des hommes, environné d'infirmités et d'imperfections; mais tout foible, tout imparfait qu'il est, J. C. l'a revêtu de son pouvoir en l'honorant du sacerdoce. Après avoir distribué son corps et son sang adorables sous les espèces du pain et du vin, le divin Maître ne dit-il pas à ses Apôtres: << Faites ceci en |