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Louis XIV en son lit de justice. 89.
Louise. Modestie, etc. 337.

Loterie. Le tirage. 64.

Marchande de marée. Vanderwerf. 24.
Marie. Vanité, etc. 336.

Marie-Thérèse et les Hongrois. 81.
Marcillac- Larochefoucauld. 5.
Martin, valet. 149, 180.

Maréchal (Le) de Lenain. 193.
Maury à l'imprimerie. 173.
Mazarin (Cardinal de). 41.
Mendiants bretons. 324.
Michel-Ange au Vatican. 57.
Mignard (La Fille de). 257.
Mirabeau à Bicêtre. 205.
Mirbel (Mad. de) peignant. 293.
Modes, 96, 192, 344, 352.
Montdor (Vallée du). 305.

- Cascade de Queuercuille. 305.
Monteil-Amans (Alexis). 220.
Moulin de Gonesse. 88.

- Du Combat à Charenton. 249. Montgolfier. 360.

Montpensier (Mademoiselle de) à Orleans. 353. Donnant son bouquet à Louis XIV. 356.

Napoléon d'Albret. 341.

Nuremberg. Chape de saint Sebald. 296. Oiseaux divers (Huit). 273.

Ours et chiens. Combat. 65.

Ours du Jardin des Plantes. 361.

Pascal (Blaise). 349.

Paskiewich. 32.

Pages se provoquant. 357.

ILLUSTRATIONS (SUITE).

Palais-de-Justice (Quartier du). 85.
Paysage de Ruysdaël. 105.

Pain de Gonesse (Retour du). 261.
Palatine (Princesse). 265.
Pêcheurs de sardines. 328.
Peel (Robert). 352.

Petitionnaires peints par eux-mêmes. 128.
Pique. Paratonnerre des Eduens. 277.
Porteurs d'épreuves. 129.

Place Dauphine (L'ancienne). 241.
Prière du matin. 113.

Ploaré (Clocher de) (Finistère). 321.
-Retable de l'église. 329.

Proverbes en action. Cham. 232, 272.
Pont naturel à Saint-Allyre. 345.
Ragotin trébuchant. 168.

Religion (La) près du condamné. 200.
Rembrandt, par lui-même. 108.
Retz (cardinal de). 41.
Retour du Soldat. 196.
René, Jeanne, etc. 316.

- L'Artiste, etc. 317. Avec sa chèvre. 332. Robert-Estienne. 129.

Rouen (Vue de), en 1805. 33.

Roméo, Juliette, etc. 236.

Roses, pavols, etc., de Van-Huysum. 289.
Ruysdael (Jacques). 109.

Roquette (Porie de la). 204.

Types de prisonniers. 229. 300.
Condamné assassinant. 280.

- Tableau de la Chapelle Saint-Jean. 281.
Viatique à l'infirmerie. 301.

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Saumon-Royal (Ilabitués du). 29.
Saint-Florent-sur-la Loire. 213.
Savaron (Jean). 349.
Sénateur Horville. 364.

Serment des Horaces. David. 233.
Sens. Ancienne cathédrale. 30.
Selkirk à seize ans. 25.

chassant. 53.

servi par son singe. 121.
rêvant. 124.

- soignant son singe. 133.
-jouant. 136.

dans le précipice. 137. - dégradé. 141.

devant Woode-Rogers. 161. Serin livré aux chats. 376. Schleswig-Holstein. Costumes. 377. Sigismond ler et Elisabeth. 80. Soulouque (l'empereur). 61. Sontag, comtesse de Rossi. 224. Soleil dans les ruines. S. Bril. 368. Tao-Kwang, empereur de Chine. 313. Temple de Junon. Paratonnerre. 277. Tombe de l'exilée. Biard. 197. Touze (L'abbé). 284.

Trône impérial de Russie. 225.

Trotza (Roule de), Russie. 268.

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(Couvent de). 269.

Vendangeuse de Capri. 369. Vendange (Toast à la). 56. Vérac et Martin. 180.

-Emilie, etc. 184.

Woodsworth (Le poële). 288.

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La chasse est ouverte depuis un mois. C'est le moment de tirer de notre carnier littéraire un chant de l'Iliade commencée, en décembre 1830, à la gloire du chien cou(1) Voyez les tables des tomes XVI et XVII.

OCTOBRE 1850.

rant et du chien d'arrêt. Prenons le temps d'être plus bref qu'Homère, ce mendiant conduit par un chien boiteux, et procédons par anecdotes, suivant notre usage.

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La semaine dernière, je suivais une chasse à courre avec M. le comte de L...., glorieux débris de l'ancienne vénerie française. Parmi les calèches qui nous accompagnaient, j'en remarquai une, vide en apparence et conduite par un respectable cocher. Je demandai au comte l'explication de cette énigme. Il fit ouvrir la portière de la voiture, et me montra sur les coussins un vieux chien courant, tranquillement étendu. Pur anglais, de taille énorme, il était tellement décrépit et goutteux, qu'il pouvait à peine se remuer. Je regardai avec étonnement l'animal et le veneur...

-Vous voyez mon fidèle serviteur Bobeche, me dit le comte avec un accent d'estime et d'affection; c'est le roi des chiens courants d'Angleterre et de France, et vous jugerez bientôt s'il mérite de nous suivre en équipage!

Ces paroles m'intriguèrent fort, et nous partimes pour le lancer du cerf. Le comte avait une belle meute de soixante-dix chiens. Ses piqueurs et ses limiers, qui avaient fait le bois avec tact, et rembuché la bête au centre de la forêt, nous conduisirent tout droit aux brisées (bran ches cassées pour reconnaître les gîtes). C'est le point de départ capital de toute chasse. Le dernier Condé faisait le bois lui-même avec ses piqueurs. Les rapports examinés et la brisée choisie, les chiens de tête attaquent, donnent la voix, entraînent la meute, et nous voilà tous au galop après la bête, au milieu des fanfares du lancer. Pendant une heure, les cors sonnent le bien aller. Le comte était radieux, et disait à ses chiens: Je suis content de vous. Les chiens auraient pu retourner la phrase, car en cette guerre des bois, ils sont les généraux; les veneurs ne sont que leurs soldats. L'homme, qui commande à tous les animaux, obéit au chien qui chasse avec lui.

J'étudiai une fois de plus cet admirable instinct, cette profonde stratégie, cette héroïque ardeur de l'inimitable bête... Le chien courant a la science de la chasse infuse. C'est lui qui en a révélé à l'homme quelques secrets; car il a gardé la plupart et les meilleurs, l'élève ne pouvant atteindre à la hauteur du maître.

- J'ai vu, nous disait le comte, les chiens sauvages dans les pampas de l'Amérique. Ils ne diffèrent de nos chiens dressés qu'en ce qu'ils sont encore plus habiles. Ils s'appellent et se réunissent pour attaquer leur ennemi. Ils connaissent ses fuites et ses refuites. Ils organisent contre lui des embuscades, des relais, des réserves, qui en apprendraient à nos plus grands capitaines. Ils ont des signaux à la voix aussi multipliés que les incidents de leurs expéditions. D'un coup d'œil, d'un mot, d'un geste, ils se comprennent et ourdissent entre eux les complots les plus diaboliques.

Le comte parlait encore, que deux trompes sonnant l'à-vue, nous emportèrent à gauche. Nos chiens, déjà haletants, le museau à terre, courant toujours, forçant tous les obstacles, suivaient les traces du cerf, comme si elles eussent été dessinées sur le sol.

Tout à coup, leurs voix éparses s'unissent en un seul hurlement, traversé de cris plaintifs. Le cerf pressé a fait tête (car c'est une bravoure qu'il partage avec le sanglier), il s'est retourné contre ses persécuteurs, en a mis quelques-uns hors de combat, et s'est élancé de plus belle, laissant toute la meute en désarroi. C'est ainsi que le général Changarnier sauvait l'armée française à la retraite de Constantine.

-Holà, hé! mes bellots! crie le comte en faisant un signe aux piqueurs. Et une fanfare éclatante, relevant le courage des chiens, les fait passer, en serrant les rangs,

sur le corps des blessés, comme une colonne de braves éclaircie par la mitraille...

Cependant ils devaient payer cet échec. Le chien com pliqué de l'homme n'est plus infaillible. Bientôt les voix se taisent ou aboient sans ensemble... L'un court ici, l'autre là; tous, aflairés, déroutés, relèvent la tête, flairent la brise, interrogent les branches, si flent avec dépit, se regardent stupéfaits, vont et reviennent sur leurs voirs, Un défaut, morbleu! s'écrie le comte en prodiguan! les coups de fouet; la bête a donné change!

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Allons, Bobeche, lui dit le comte en le flattant de la main, donne une leçon à ces conscrits! Le vétéran dresse la moustache, comme un groguard qui sent la poudre, de son lit de douleur.

Les valets de chien le conduisent, clopin clopant, au lieu du défaut, et le mettent en quelques paroles au courant de la difficulté.

-Très-bien, j'y suis, répond Bobéche d'un mouvement de queue.

Puis il goûte la voie du museau, et se livre à des réflexions profondes... Mais les grognements, les allées ef venues des autres chiens troublent sa méditation. D'a frémissement de l'oreille, il signifie qu'on écarte ces étourdis. Les valets lui obéissent et le dégagent de la cohue, à grands coups de fouet. Libre alors, il se remet eð quête, démêle, comme un échieveau, les détours et ruses du cerf, retrouve sa voie et son gite, le relance avec un reste d'ardeur, et se retournant vers la jeune meute, d'un air magistral:

-Voici la trace! aboie-t-il, en avant ceux qui ont encore du jarret!

Il ne s'était pas trompé ! Les chiens relevés partent sur une nouvelle fanfare, et la chasse recommence... Je restais pétrifié d'admiration, tandis que le comte, une larme à l'œil, remettait son vieil ami en voiture...

- N'est-ce pas que c'est sublime? me dit-il en repre nant le courre avec moi. Bobeche en a fait bien d'aues! Ecoutez son histoire.

Quand je le reçus de lord X..., il y a vingt ans, j'avais deux enfants, dont je lui confiai l'éducation.

A Bobêche?

- A lui-même ! C'est lui qui leur a enseigné l'économie, la justice, la sagesse, la reconnaissance, etc., avant de leur enseigner la chasse, qui est le complément de l'homme comme il faut. Voici la leçon d'économie qu'il donnait mon fils cadet, encore au berceau. Il ramessait ses croûtes de pain et ses restes de gâteau, et en faisait une collection dans sa niche. Puis comme ces friandises se desséchaient. il guettait l'heure où l'on servait la bouillie de l'enfant,

s'approchait en tapinois du vase qui en contenait le reste, y trempait délicatement ses croûtes avec sa gueule et se régalait le plus agréablement du monde. Un jour qu'il en voulait à une jatte de lait, à moitié pleine, ne pouvant atteindre le niveau du liquide, il le fit remonter en jetant des pierres au fond, en avala la meilleure part et le laissa dans le même état apparent qu'il l'avait trouvé. - Connaissezvous beaucoup d'hommes d'esprit qui auraient imaginé cela? C'était la leçon de physique de Bobêche sur les corps liquides et solides. Quant à ses leçons de justice, elles n'étaient pas moins remarquables. Mes enfants se battaient, comme tous les enfants des hommes. Bobêche les laissait faire tant que la lutte n'était qu'un jeu. Dès qu'elle devenait un combat, il les séparait avec autorité, et me dénonçait par un grognement équitable celui qui avait abusé de sa force contre l'autre. Mon aîné avait un king's-charles, voleur, capricieux et dévorant comme tous les king'scharles. Quand le jeune frère s'endormait dans son berceau, en maniant ses jouets, il fallait voir Bobêche imposer silence au petit chien et à son maître, et garder la conchette du marmot, comme une sentinelle garde son poste! Un soir que le king's-charles avait déchiré un rìdeau de cette couchette, l'aîné eut beau le protéger et le prendre dans ses bras, il ne put le dérober à la correction de Bobêche, qui glissant sa grosse tête sous les tentures, finit par atteindre et mordre sévèrement le coupable. Autre leçon de juste rigueur (à donner pour exemple aux jurés les plus probes et aux gendarmes les plus consciencieux). Le chat angora de ma cuisinière avait égratigné mon fils en jouant avec lui dans le jardin. Bobêche accourt aux cris de l'enfant, et se met à la poursuite du criminel. Celui-ci lui échappe en gagnant la cime d'un arbre. Croyez-vous que Bobêche se tint pour baitu? Nullement! Il se dit : Le chat descendra tôt ou tard, et il resta en arrêt au pied de l'arbre, l'œil braqué sur sa proie. En vain la cuisinière, tremblant pour son angora, prodigua au factionnaire les appels les plus tendres et les os les plus appétissants, rien ne put le corrompre ni le distraire. Il était encore le soir à son poste; et lorsque le chat, poussé par la faim, se décida à quitter sa position, il ne fut éviter une rencontre où il laissa la moitié de ses oreilles. Inutile d'ajouter qu'il eut désormais un égal respect pour mon fils et pour mon chien.

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Ce méme fils avait atteint l'âge de raison, quand Bobêche lui enseigna la prudence. Un jour qu'ils passaient ensemble à Paris sur le Pont-Neuf, ils se trouvèrent surpris dans un embarras de voitures. Le jeune homine tombe renversé par un cocher maladroit. Le chien, ne pouvant chter celui-ci, s'en prend à son cheval, qu'il mord jusqu'au sang. Le cocher riposte par une volée de coups de fet et le cheval par une ruade, qui envoie Bobèche meurtri à dix pas. Mon fils en fut quitte pour une contusion légère, mais son défenseur paya son courage d'une longue Souffrance. Depuis cette époque, toutes les fois qu'ils re-. Innent ensemble le chemin du Pont-Neuf, Bobêche Sarrête à l'entrée, et dit à son maitre d'un coup d'œil : Ce passage est dangereux; si nous en prenions un autre? Puis, voyant son conseil inutile, il laisse le jeune homme traverser seul le pont, et le rejoint à l'autre bout, par le Pont des Arts ou le pont au Change.

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Vous savez que j'ai fait le tour du monde. Bobêche m'a suivi dans tous mes voyages. La plus belle campagne que nous avons faite ensemble est la chasse des stercoraires, aux iles Feroë.

Cet archipel danois, situé entre l'Islande et les îles Shetland, et composé presque entièrement de rocs inac

cessibles, est célèbre à juste titre par les myriades d'oiseaux, qui nourrissent les sept mille habitants de ce désert maritime. Je m'y rendis avec Bobêche, il y a six ans, à l'époque de la chasse. Voilà une noble guerre, qui n'est pas un jeu d'enfant, comme nos courres du cerf et du chevreuil! Les vogelbergs, où se réunissent les oiseaux, sont des masses de rochers noirs surplombant la mer de quinze cents à deux mille pieds. La tempête y fait grimper jusqu'à trente mètres les vagues, qui retombent en cascades le long des gigantesques assises. Par les temps calmes, on voit des cordons blanchâtres et mobiles entourer les corniches du roc. Ce sont des légions d'innombrables oiseaux, venus de tous les coins de l'Europe pour faire leurs nids dans cet étrange séjour. Ils se tiennent rangés l'un près de l'autre, la tête invariablement tournée vers la mer, les femelles un peu en arrière sur leurs œufs, les måles en avant, ou planant à quelque distance. Une salve d'artillerie ne ferait pas bouger les couveuses. Les naturalistes ont remarqué que tous les vogelbergs regardent l'ouest et le nord-ouest. Les brises du sudouest étant habituelles aux Feroë, les oiseaux, qui aiment à voler contre le vent, ont choisi cette demeure en conséquence. De plus, en cas de raffale violente, ils sont sûrs d'être ramenés à leurs nids. Ils appliquent ainsi le précepte d'Horace : Utile dulci. On voit surtout aux Feroë les diverses mouettes et le perroquet de mer, le pingouin, le guillemot, le cormoran, et le stercoraire parasite. Celui-ci est le tyran de la population, qui vivrait sans lui en bonne intelligence. Il fait une guerre continuelle aux petites espèces; il n'en veut pas toutefois à leur vie, mais seulement à leur pitance. Quand il voit passer une mouette repue de crustacés ou de poissons, il s'élance sur elle et la crible de coups de bec, jusqu'à ce qu'elle le désarme en rejetant ce qu'elle vient de manger. Le stercoraire plonge aussitôt sur cette proie de seconde gorge, la saisit dans sa chute, et l'avale gloutonnement. Il ne dédaigne même pas la nourriture digérée par son ennemi, qui s'en débarrasse alors par un tribut moins coûteux.

J'ai fait, en compagnie de Bobêche, trois chasses avec les fuglemands (preneurs d'oiseaux), la première au filet, la seconde à la perche, la troisième à la corde.

Nous arrivâmes en bateau près des rochers. Des bataillons de guillemots et de pingouins volaient autour de nous avec une confiance étonnante. Ils plongeaient à notre approche, mais si maladroitement, qu'ils se relevaient entre nos rames. Ils s'effrayaient alors et replongeaient plus sottement que la première fois. Ce prologue du drame amusa fort Bobêche, et me fit rire de bon cœur. Cette fois, le péril de l'expédition fut pour le chien. Je le lançai sur les escarpements du roc à la poursuite des oiseaux. Il y fit des évolutions d'une adresse et d'une audace inouïe, gravissant les parois les plus rudes, franchissant les abîmes les plus vertigineux, se tenant suspendu par les pattes à deux cents mètres au-dessus de la mer. Il étrangla ainsi plusieurs centaines d'oiseaux, qui plurent dans notre barque et autour de nous; puis il en amena des milliers à portée de nos filets. Ces filets sont en grand ceux que nos enfants emploient à la chasse des papillons. Nous n'avions, grâce à Bobêche, qu'à les jeter sur des groupes d'oiseaux, dont les têtes s'engageaient dans les mailles de fil de laine.

Je dédaignai cette boucherie facile, et nous chassâmes le lendemain à la perche. La perche est un long bâton terminé par une planchette horizontale. A l'exemple des Féroïens, je m'assis bravement sur cette planchette; mon compagnon me poussa en l'air jusqu'aux galeries du roc,

au risque de me rompre les os; je le hissai à mon tour à ce poste dangereux, et nous abattîmes deux mille oiseaux détournés par Bobêche.

Enfin, je risquai la dernière épreuve, la chasse à la corde. Nous montâmes par des pentes ardues au sommet d'un rocher de trois cents mètres, et nous nous avançâmes jusqu'au point qui dominait à pic cet effroyable abîme, au fond duquel mugissait l'autre abîme de l'Océan. Là, les fuglemands déroulèrent plusieurs câbles de huit à neuf cents pieds, terminés par des siéges comme ceux de nos maçons. Les plus intrépides chasseurs s'installèrent sur ces siéges, et chacun d'eux fut descendu dans le vide par six hommes qui déroulaient le câble sur une poutre. J'avais choisi le plus long, et je me vis bientôt suspendu, entre le ciel et l'eau, sur mille pointes de rocs, qui n'eussent pas laissé à mon corps un lambeau dans sa chute... Je tenais d'une main une petite corde à signaux, pour avertir les fuglemands qui ne me voyaient plus, et, de l'autre, mon filet pour attraper les oiseaux. Si le câble

Stercoraires parasites des iles Féroë.

s'était seulement tordu pendant la descente, je me broyais contre les rochers; s'il s'était accroché dans une fente, je restais en l'air jusqu'à ce que mort s'ensuivît... Arrivé à une première galerie, j'y pris pied en me balançant avec force; j'en informai les hommes avec ma cordelette, et j'y trouvai Bobêche, qui' s'y était rendu sans câble ni siége. Il détourna une armée d'oiseaux, dont nous jonchâmes le pied de l'écueil et la mer, où nos compagnons les recueillaient en bateaux. Puis je me remis sur mon siége, et,

moyennant de nouveaux signes et de nouveaux balancements, je gagnai et explorai les galeries inférieures. Je fis ainsi huit poses, et j'abattis plusieurs milliers d'oiseaux. Enfin, n'en pouvant plus, perdu de vue par mon chien lui-même, voyant les deux tiers du câble déroulés, et menacé d'un choc mortel à chaque oscillation, je me fis remonter au sommet du roc, où j'arrivai sain et sauf, et reçus les félicitations de Bobêche.

Trois de mes compagnons furent moins heureux. L'un reçut une pierre détachée qui lui brisa l'épaule; l'autre perdit l'équilibre sur une corniche, et fut jeté de mille pieds dans la mer; le troisième demeura suspendu, sans pouvoir remonter ni descendre; nous ne le retrouvȧmes que le surlendemain, grâce au flair et au courage de Bobêche. Il était à demi mort de contusions et de faim ; et, quand nous le sauvâmes, il avait à moitié rongé le câble avec ses dents, soit pour se rassasier, soit pour tomber à l'eau. Auprès de veneurs tels que vous et votre chien, dis-je au comte, nous ne sommes que des roquets courant après des moineaux.

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Cependant la fanfare du bat-l'eau nous annonça que le cerf venait de se jeter dans l'étang. Nous y rejoignîmes la meute et les piqueurs. La bête avait . gagné le bord, mais, les reins ployés, la langue pendante, les jambes couronnées, elle ne fit que quelques pas et l'hallali sur pied ful bientôt suivi de l'hallali a terre, quand l'animal, sur ses fins, après s'être acculé une dernière fois contre la meute et avoir chèrement vendu sa vie tomba sous la rage des chiens, qui avaient, do reste, mérité cette victoire.

Bobêche, danssa voiture, répondit à cette dernière fanfare par un aboiement triomphal On lui réserva la meil leure pièce de la curve,, et le pied de la bète fut apporté au comte par les piqueurs et les valets.

Ce tableau fut d'une éclatante solennité. Les, amazones et les calè

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ches arrivaient, bride abattue, par les allées vertes et jaunes. Les chasseurs aux brillants uniformes les escortaient au grand galop, sautant les buissons, les roes et les fossés; les mille échos du bois répétaient les aboiements des chiens, les hennissements des chevaux, les claquements des fouets, les appels des piqueurs, les fanfares étourdissantes du cor.... Le soleil, jetant ses derniers rayons à travers l'or, la pourpre et l'améthyste des feuillages d'automne, étagés sur les coteaux en amphithéâtre,

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