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rations à tous les cieux. Il voyagea donc; il vit la France, Mtle et l'Allemagne. L'Angleterre fixa son attention d'une manière toute spéciale. Les distinctions aristocratiques de la nation anglaise, ses formes de gouvernement, son rouage constitutionnel, le seul qui ait jamais bien fonctionné, déterminèrent cette préférence.

A son retour, appelé par sa naissance à siéger à la Chambre des magnats, Széchény parut à la tête d'un parti nouyeau et jeune comme lui. Procurer à son pays les bienfaits de la Révolution française, tout en évitant la tache de sang qui lui souille le front: telle fut sa préoccupation constante. Pamphlets, discours, souscriptions, il mit tout en œuvre pour arriver à ce but. Ses efforts désintéressés ne furent pas inutiles, et grâce à qui? à M. de Metternich. L'habile diplomate vit dans ces idées, si redoutées à Vienne, le moyen d'affaiblir la nationalité des Hongrois, et partant il leur fit bon accueil. Il y fut pris. L'adoption de la langue magyare, substituée dans les régions officielles à la langue latine, donna au mouvement une impulsion rapide. Proscrite d'abord comme séditieuse, cette langue, si riche et si pleine, reparut dans les jugements, dans les commandements militaires et sur les monnaies.

On se souvient encore de la séance dans laquelle cette révolution s'opéra. L'orateur Magy Paul venait de s'écrier: « S'il est vrai que la Constitution proscrive l'usage de notre langue, je dirai sans hésiter : :- Meure la Constitution, plutôt que la nationalité. » Le comte Széchény se leva. L'éclat de son nom, ses opinions bien connues et ses écrits dont chaque page était un événement, excitaient le plus vif intérêt.

« Voilà, dit-il, un trait qui me confond. Je me résigne enfin à faire cause commune avec ceux que depuis quinze ans j'appelle les calomniateurs de mon pays. Oui, la Hongrie est un pays ingouvernable; ils ont raison de le dire, et les bienfaits dont la comblent ses maîtres ne sont payés que par l'ingratitude. »

Quelle fut, à ces paroles, la surprise de l'auditoire ! Néanmoins le mot de trahison répugnait à sortir des lèvres et à frapper au visage le transfuge audacieux. On écouta la suite en frémissant:

« Voilà dix millions d'hommes qui réclament le droit de s'exprimer dans leur langue, de faire des lois intelligibles, et non des oracles sibyllins, rendus dans un idiome mort et obscur: quelle insolence! >>

A ces paroles ironiques, où la pensée de l'orateur jaillit acérée, comme le clou d'or de Salomon; à ce geste qu'il déploie, à cette burlesque apologie du cabinet autrichien, les applaudissements éclatent avec fureur, et les sabres agités font retentir le parquet du Landshaus. L'orateur termine en souscrivant pour une somme de 150,000 fr., destinée à la fondation d'un Institut national.

Les événements avaient marché, et la révolution du 12 mars s'était accomplie. Le 11 septembre 1848, au moment où la Hongrie, après avoir épuisé toutes les voies de conciliation, se jetait dans la dictature et les bras de Kossuth, une facheuse nouvelle se répandit. Etienne Szécheny avait cherché la mort dans les flots de l'Elster. Le découragement s'était emparé de cette grande âme. Tous ses efforts pour le maintien de la paix et la prospérité de la Hongrie aboutissaient à une guerre sanglante. Longteraps, comme la colonne lumineuse, il avait marché à la tête de son peuple, et l'oubli était sa récompense. Széchény fut sauvé; mais il resta atteint d'aliénation mentie. De la même manière finit, l'an dernier, au mois C'août, Méhémet-Ali, le régénérateur de l'Egypte. Serait

ce donc le sort des hautes-intelligences de notre époque? N'ont-elles que le choix de vaincre les événements on de se briser à leur choc? Et, du reste, les révolutions, aujourd'hui plus que jamais, passent sur les hommes, impitoyables comme le char de l'idole de Jagernah, dont les roues écrasaient ses adorateurs.

La période parlementaire est close; une seconde s'ouvre, agitée, brillante; les armes et les discussions se mêlent, et l'Europe, qui se croyait vieille, est étonnée de produire à l'Orient des enfants pleins de vigueur et de sève.

Deux hommes vont maintenant occuper la scène : l'un, soldat intrépide, habile toutefois à manier la parole; l'autre, éloquent orateur, sachant passer de la tribune aux champs de bataille, et affrontant aussi bien les balles que les interruptions; Joseph Jellachich, le ban de Croatie, et Louis Kossuth, le dictateur magyare.

Vous est-il arrivé, lecteurs, de prendre place à une table d'officiers? Là, pendant que circulaient à la ronde vins d'ancienne date et propos joyeux, vous aurez remarqué le roi du festin. Que d'entrain et de franche gaieté ! quelle bonne humeur intarissable lui sont nécessaires pour se maintenir à son rang! Eh bien! créez un idéal en ce genre, et vous aurez sous les yeux Jellachich à vingt-deux ans.

Né à Pétervardein, le 16 octobre 1810, de père et de mère croates, Joseph Jellachich, baron de Buszin, fut présenté à l'empereur François II, et placé, par sa protection, dans l'Académie thérésienne, Doué d'une vive intelligence. et d'une mémoire exacte et tenace, Jellachich fit de rapides progrès dans l'étude des langues vivantes. Tontefois, la science militaire et les connaissances qui s'y rattachent furent ses études favorites. A dix-huit ans, préparé par tous les exercices du corps à la rude existence du soldat, i entrait au service. Il fut bientôt l'âme du régiment. D'une constitution de fer, il ne reculait ni devant les travaux, ni devant les plaisirs plus fatigants encore. Le soir, toujours le dernier à table, il était, au point du jour, le premier en selle. Personne n'était plus esclave du règlement, plus sévère sur la discipline; personne aussi plus prompt à entreprendre quelque folle équipée. C'est au milieu de cette vie tumultueuse qu'il composa ses chansons militaires, en particulier sa chanson de garnison, si connue et chantée de si bon cœur dans toute l'armée autrichienne. Satire en couplets du vieux système militaire, on y sent percer l'espérance d'un autre avenir. Ce chant a quelque chose d'éclatant et d'allègre, comme la fanfare du clairon. Les autres poésies de Jellachich sont d'un caractère bien différent. Cinq années de folie avaient épuisé sa vigoureuse constitution. Il fut attaqué d'une maladie dont on crut qu'il ne relèverait pas. Sur le lit de donleur, se laissant aller aux inspirations de sa jeune âme souffrante, il exhala dans un beau langage d'amers regrets pour une existence si brusquement tranchée, et qu'il avait rêvée si glorieuse.

Ses désirs devaient être accomplis. En 1830, Jellachich, revenu à la santé, fut nommé capitaine-lieutenant d'un régiment de hulans. La révolution de Février le trouva colonel de frontière dans la Croatie. Il avait su gagner le cœur des soldats, et régnait dans sa tente, comme l'empereur à son palais de Schonbrunn.

Les colonies frontières, qui s'étendent de l'Adriatique aux confins de la Russie, se trouvent, par suite de leur organisation, sous la direction immédiate des chefs militaires; ils y sont à la fois officiers, administrateurs, et l'autorité du colonel est en quelque sorte illimitée. Nonseulement il dirige les travaux et commarde les expédi-

tions, mais il surveille l'intérieur des familles, et désigne souvent aux jeunes filles les époux qu'elles doivent choisir. Grâce à ses relations avec Louis Gay et à la cour alors retirée à Inspruck, Jellachich se vit, au mois de mai, promu au bannat de Croatie, ancienne dignité qui répond au titre de gouverneur. Les circonstances lui étaient favorables; son ambition fut à la hauteur des circonstances.

Nous ne décrirons pas la marche de Jellachich. Entré en Hongrie avec l'apparence et les ovations d'un triomphateur, il en sortit d'abord par une fuite mal déguisée; mais bientôt il prenait sa revanche sous les murs de Vienne, et devenait dans l'Europe le sujet de toutes les conversa

tions. Alors quelques biographes complaisants levèrent en sa faveur le voile de l'avenir. - «Comme a commencé Hapsbourg, disait l'un d'eux, ainsi commence Jellachich. » Ces exagérations tombèrent pendant la campagne de 1849, dont les résultats furent l'œuvre d'autres généraux. La carrière de Jellachich est-elle terminée? Nous ne pouvons le prévoir; l'avenir est si gros d'événements, pour qui regarde à l'orient et au nord de l'Europe!

Jellachich est petit de taille, mais bien fait et robuste; son front est développé et presque chauve, ses yeux noirs et perçants s'animent aisément; un sourire mélancolique est l'habituelle expression de sa bouche.

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César, dit Plutarque, était né pour la guerre. Mais il! eût occupé après Cicéron la première place au forum et dans le sénat. Un jugement analogue peut être porté sur Jellachich. Avec de grandes vues et un style original pour les rendre, il se serait distingué parmi les orateurs de la Diète hongroise, et n'y eût cédé qu'à Louis Kossuth, dont l'existence offre également plus d'une ressemblance avec celle de l'illustre chevalier romain.

Comme Cicéron, Kossuth fut appelé par son talent à un rang dans lequel il n'était pas né; sa parole fut, pendant une année entière, l'âme et le souffle de son pays. On l'a vu enfin, comme l'orateur de Rome, obligé de fuir, avec sa femme et ses enfants, pour échapper au fer de ses vainqueurs. Arrêtons-nous devant cette grave et douce figure, dont le regard extatique vous aura sans doute frappé (1). Louis Kossuth est d'origine slovaque. De bonne heure son penchant l'entraîna vers les Magyars. Sans fortune et (1) Voyez son portrait, dans notre livraison d'octobre dernier.

1

sans illustration de naissance, il vint à Presbourg au sortir de l'Université de Raab, s'attacha comme secrétaire à l'un des membres de la Diète (1), et y entra bientôt luimême, député par le comitat de Marmaroch. C'était en 1836 M. de Metternich venait d'enlever aux Hongrois la liberté de la presse; il avait également interdit les journaux lithographiés aux frais du baron de Vessélény. J riait à Vienne de sa victoire, quand elle lui fut enlevée par Kossuth. Celui-ci entreprit de sténographier les séances. de la Diète. Le soir il en résumait les discussions avec des avocats, qui allaient, munis chacun d'un manuscrit, défi

(1) « Chaque député, dit M. de Langsdorf, a avec lui et auprès de lui, dans la salle même de la Diète, deux ou trois secrétaires nommés par les comitats et chargés de les tenir au courant des travaux de l'Assemblée. Cette population jeune et remuante assiste aux séances, prenant part à toutes les délibérations au moins par ses cris, par ses marques d'approbation et d'improbation. » C'est un parterre confondu avec les acteurs, et qui, comme le chœur antique, exprime sur les événements sa manière de voir.

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se laissait aveugler par sa haine invétérée contre l'Autriche. Pour tenter une conciliation, cent trente membres de la Diète se rendirent à Vienne. Ordre leur avait été enjoint de quitter la ville dans les quarante-huit heures si l'empereur ne désavouait pas Jellachich, et s'il ne lui commandait de déposer les armes qu'il avait prises en son nom. D'un autre côté, on faisait à Pesth des préparatifs pour proclamer l'indépendance, dans le cas où il ne resterait plus à ses champions d'autre ressource: la dictature devait être confiée à Kossuth.

Durant quelques jours, les esprits flottèrent dans une cruelle indécision. Le 11 septembre, enfin, l'arrivée des députés fut à peine signalée, qu'une foule avide couvrit les quais de Bude et de Pesth. A l'apparition du bateau à vapeur, toute incertitude cessa. Les couleurs hongroises avaient remplacé le drapeau jaune et noir de l'Autriche; et la plupart des députés se tenaient sur le pont, ayant à leur chapeau des plumets rouges. Fermes et tristes au milieu des employés du gouvernement qui revenaient avec eux, par leur contenance et des signes de tête négatifs, ils eurent bientôt fait connaître la vérité. La foule se porte alors au Landhaus; le ministère donne sa démission et charge Kossuth d'en former un nouveau.

Kossuth avait fini sa tàche de légiste, et assumait le rôle guerrier qui devait lui être fatal. Plus de repos pour Ini; son corps est épuisé, mais son âme de fer lui communique une vigueur incroyable. Retiré à Szégédin, tandis que Windisgraetz et Jellachich envahissaient la Transylvanie, il organise la défense avec des prodiges d'activité. -La Hongrie se trouvait dépourvue de soldats. A la voix de Kossuth et sous la pression du danger, on en voit surgir du sol par enchantement. Quarante-neuf bataillons (honved) sont créés, les gardes nationales se lèvent en masse, les unes pour la défense des villes, les autres pour marcher à l'ennemi. C'est dans leurs rangs que paraissent «les volontaires jusqu'à la victoire», sorte de corps francs dont le nom révèle la mission. Elle n'est point de combattre en ligne régulière, mais de harceler l'ennemi, de lui couper la route, d'intercepter les convois et dépêches, de fondre sur les petits détachements; de nuire enfin par tous les moyens possibles à l'armée autrichienne. Voici des guérillas d'un autre genre, les terribles czikos (ou dompteurs). — A les voir, debout sur leurs étriers, lancer le Jasso, au plus fort de la course de leurs chevaux presque sauvages, vous les croiriez accourus des pampas d'Amérique. Malheur à qui rencontre le cziko! la fuite est inutile, le combat dangereux. Armé de sa longue corde, il atteint son adversaire à distance, l'enlace et le frappe d'un croc de fer, dont les blessures sont horribles.

Kossuth semble se multiplier; tantôt il court de village en village appeler les paysans aux armes, tantôt il se trouve en face de la mort ou de la captivité, et n'échappe que par un bonheur inouï; tantôt enfin un navire armé en guerre le transporte à Pesth, à Comorn, partout où sa présence est nécessaire.

« A peine, dit une correspondance à laquelle nous em«pruntons ce récit, le palais flottant de l'agitateur a-t-il «abordé, que de tous côtés accourent les populations en« thousiastes; le glaive rouge et la croix rouge en tête, le « clergé paraît suivi du peuple, qui entoure Kossuth. Alors «il se fait un grand silence, et dans une improvisation « rapide et saisissante, l'apôtre de l'indépendance prêche « la guerre sainte, exalte la mémoire des morts, bénit au « nom de la patrie les flancs qui les ont portés, et promet « la victoire aux Hongrois, parce que le Seigneur et son « épée sont avec eux. »

Pendant que sa parole circulait en Hongrie, comme un sang chaud dans les artères, les armées magyares étonnaient l'Europe par leurs bulletins de victoire (1). Les noms des généraux qui les commandaient étaient devenus populaires en France, en Angleterre et aux États-Unis; les biographes disaient jusqu'aux moindres circonstances de leur vie, et de tous côtés, la gravure reproduisait leurs traits et leurs costumes. C'étaient le vieux Dembinsky, ce général de l'Arioste, qui ne connaissait pas l'impossible, et voulut résister jusqu'à son dernier homme, se confiant pour le reste à Dieu et à son étoile; Bem, l'amant de l'inconnu, qui demanda la vie au cercueil (2); si froid dans ses conceptions stratégiques, et si impétueux dans l'attaque, la main sur le col d'un canon, l'œil calme et profond dans sa limpidité, pareil en son attitude à l'Hercule Farnèse; Goergey, mémorable par sa fameuse retraite, et qui regrette peut-être, au milieu de ses travaux chimiques, de n'être pas tombé sous les murs de Comorn (3); Perzel, dit le Français d'Orient; Aulich, Klapka, etc.

Au mois de juillet 1849, la guerre de Hongrie était devenue une question du plus haut intérêt, et que chaque parti envisageait suivant ses opinions et ses espérances ultérieures; mais quand arriva le dénoûment, quand les Magyares succombèrent, il n'y eut plus pour eux, dans toute la France, que les sympathies dues au courage malheureux. La Turquie leur ouvrit ses portes, le pavillon britannique les couvrit aux Dardanelles, et l'empereur d'Autriche, et le czar lui-même, laissent enfin la clémence désarmer la victoire.

« Cette guerre a été malheureuse, mais peut-être né« cessaire, comme un duel que prescrit l'honneur aux « dépens de la raison. Les seuls avantages qui pouvaient « en résulter, c'étaient pour la Hongrie le maintien de « son ministère national et la fixation des droits et des « devoirs de l'Autriche à son égard. Quant à une séparation « complète, quant à l'érection de la Hongrie en républi« que libre, elles n'ont été amenées et ne pouvaient l'êa tre que par le désespoir de la résistance. La Hongrie et « l'Autriche n'ont, en effet, aujourd'hui de signification « politique, que comme obstacle aux agrandissements de «la Russie. C'était la pensée de Napoléon. Mais, au lieu « de s'unir dans ce but commun, ces deux puissances se << sont affaiblies par une guerre à outrance, et cela, lors« que la Russie devient plus que jamais menaçante de <«< parole et d'attitude! Si les vastes projets des czars se « faisaient jour les armes à la main, l'Autriche et la Hon«< grie seraient-elles refaites pour la lutte?

«< Deux guerriers se rencontrèrent de nuit, et se firent « de cruelles blessures. Le jour vint, et, avec le jour, « l'ennemi, qui les acheva sans peine. Ils étaient du même << camp et se reconnurent trop tard ! »

Ces paroles sont d'un homme d'Etat, qui les prononçait hier devant nous. Nous les citons sans les juger.

FIN DE LA HONGRIE.

H. DAVID.

(1) Un des exploits de Kossuth fut, dit-on, l'enlèvement de la fameuse couronne de saint Étienne, que l'Autriche n'a pas retrouvée encore (Voir l'histoire de ce palladium dans le Musée de decembre). Nous donnons aujourd'hui cette couronne, dessinée d'apres nature. Tout le fond est en or massif. Tous les ornements sont en pierreries. La croix du sommet a été ployée dans la précipitation des nombreux déplacements qu'a subis le diademe. (2) Il s'était échappé de Vienne enfermé dans une bière. (3) Voyez son portrait dans notre numéro d'octobre dernier.

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LA PIERRE DE TOUCHE, OU A QUELQUE CHOSE MALHEUR EST BON (4). COMÉDIE-PROVERBE EN DEUX ACTES.

ACTE DEUXIÈME.

Même décor qu'au premier acte. SCENE Ire.

M. de VÉRAC, MARTIN. Tous deux rentrent en courant. VERAC après MARTIN.

M. DE VERAC. Je te rattrape enfin, drôle! Me diras-tu ce que signifie...

MARTIN, essoufflé et décontenancé. Monsieur lé baron, épargnez-moi cetté douleur !

M. DE VERAC, sévèrement. Au fait! mon cheval est-il sellé?

MARTIN, Suppliant. Qué monsieur lé baron mé pardonné! mon engourdissément a tourné en paralysié.

M. DE VERAC. C'est pour cela que tu cours si bien? Trève de mensonges! pourquoi ne m'as-tu pas obéi?

MARTIN. C'est qué... c'est qué... (A part.) Je n'osérai jamais... Il lé faut pourtant... (Haut, avec effort.) Eh bien, c'est qué lé tonnerre est tombé sur moi, et va tomber sur vous-mêmé!

M. de Vérac. Tu as reçu de mauvaises nouvelles? (4) Voyez le numéro de février dernier.

MARTIN. Très-mauvaises.

M. DE VERAC. De mon oncle?
MARTIN. Dé votre onclé.

M. DE VERAC, inquiet. Il est malade?

MARTIN. Il sé porte à merveillé... c'est vous qui êtés maladé. Mouvement de Vérac.) Jé vous en conjuré, monsieur, écoutez-moi avec patiencé, céla démandé des précautions oratoirés.

M. DE VERAC. Je ne suppose pas que tu te moques de moi. Je te donne cinq minutes. Allons, vite. (Il s'assied.)

MARTIN, à part, le regardant attentivement. Qui croirait qu'un si bravé gentilhomme est ruiné, qu'uné si bonné miné cache un mal incurablé? (S'approchant de lui avec compassion.) Comment vous trouvez-vous en cé moment? M. DE VERAC. D'une humeur massacrante!

MARTIN. Calmez-vous, monsieur! jé parlé dé la santé. M. de Vérac, stupéfait. De la santé!

MARTIN. Oui, qu'éprouvez-vous..... intérieurément? M. DE VÉRAC. Une furieuse démangeaison de te bâtonner, si tu continues...

MARTIN. Dé grâcé, monsieur, calmez-vous! Ces émotions vous séraient fatalés... Permettez-moi dé vous tâter lé pouls... Né sentez-vous pas... du côté gauché... quelqué chosé commé... des palpitations?

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