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originel et même des autres péchés, si elle pouvait en avoir commis quelques-uns; afin qu'ayant recouvré dans l'innocence la dignité de la première création, la nature divine pût s'unir à la nature humaine purifiée de toute souillure. Il ajoute que, bien loin de souffrir quelque atteinte dans sa virginité par la conception et l'enfantement, cette mère de Dieu fut élevée à un degré d'honneur d'autant plus parfait que sa conception était plus miraculeuse; Dieu avant ajouté à l'honneur de la virginité qu'elle avait conservée, celui de la fécondité, par un miracle dont lui seul possède le secret. Il enseigne que l'union personnelle des deux natures en Jésus-Christ s'est accomplie sans mélange ni confusion; elles sont demeurées substantiellement les mêmes après comme avant l'union. Quoique l'incarnation soit l'ouvrage des trois personnes de la Trinité, la seconde seule s'est incarnée; quand on dit de JésusChrist des choses qui paraissent incompatibles, il faut l'expliquer par la distinction des natures, en attribuant à l'humanité les faiblesses humaines, et à la divinité, la majesté des opérations divines. Il dit qu'encore qu'il n'ait pas été consommé, le mariage de la sainte Vierge avec saint Joseph ne laissait pas d'être véritable, parce que l'essence du mariage consiste dans l'union des volontés et le consentement mutuel des époux. Il apporte l'exemple de sainte Cécile et de Tiburce, qui de concert vécurent dans le célibat après le mariage.

Lettres.

Il reste d'Arnoul un grand nombre de lettres, écrites avec élégance; nous en mentionnerons seulement quelques-unes, choisissant de préférence celles qui ont trait à l'histoire de son temps.

A saint Thomas de Cantorbéry. — Vivement affligé de la division qui existait entre le roi Henri II et saint Thomas de Cantorbéry, il écrivit à ce pieux archevêque une très-longue lettre, où, après lui avoir donné des avis sur la manière dont il devait se conduire pour recouvrer les bonnes grâces de son souverain, il lui dit : « Pour moi, je vous servirai fidèlement et avec affection, sachant que vous sacrifiez votre fortune et votre personne pour l'intérêt de vos frères; mais il faudra d'abord témoigner que je vous suis contraire, parce que si je paraissais votre ami, je ne serais ni cru ni écouté. La dissimulation sera un moyen de vous servir plus utilement. » Dans une lettre adressée au pape Alexandre III, il l'assura que la puissance séculière n'avait eu aucune part à l'élection de cet archevêque, et que ses mérites seuls l'avaient porté sur le siége de Cantorbéry. A Henri II d'Angleterre. Le zèle qu'il avait témoigné pour la défense du saint archevêque de Cantorbéry lui avait fait perdre la faveur du monarque anglais; quoique déjà avancé en âge, Arnoul lui écrivit pour lui redemander sa bienveillance. Il le fait souvenir que tant qu'il avait suivi ses conseils il avait été obéi et respecté de ses sujets, et que son royaume s'était maintenu dans une tranquillité parfaite, parce qu'alors la

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raison, lajustice et la miséricorde dirigeaient toutes ses actions; mais que depuis qu'il s'était livré aux conseils des flatteurs, il n'avait connu d'autres lois que sa volonté, ou plutôt qu'il avait subi la volonté des autres, en croyant accomplir la sienne. Il leur représente que Dieu n'a donné aux rois la puissance et les richesses que pour la garde et la défense des peuples, et non pour user de violence contre eux.

A Gilles, archevêque de Rouen. — Gilles, archevêque de Rouen, avait prié Arnoul de recueillir les lettres qu'il avait écrites à diverses personnes. Arnoul lui répondit que ce n'était qu'avec peine qu'il lui accordait sa demande, dans la crainte de s'attirer le mépris du public, qui ne manquerait pas de accuser de vanité et d'aveuglement en publiant des lettres qui ne méritaient pas de voir le jour. Comme il n'en avait conservé aucune copie, i fut obligé de redemander les originaux. Il convient que les lettres qu'il avait écrites dans sa jeunesse étaient d'un style plus châtié, plus limpide, plus élégant, plus sententieux; mais que, dans un âge plus avancé, il s'était moins appliqué à'orner ses lettres de figures qu'à les rendre utiles, comme il convenait à un évêque, qui ne doit jamais oublier la fin de sa vocation. Il ajouté que, dans la vieillesse, l'esprit est plus lent et moins fécond, surtout quand il s'agit d'écrire à des personnes élevées, ou de traiter sérieusement des questions d'af

faires.

Aux évêques d'Angleterre. Nous avons dit ailleurs qu'aussitôt qu'il eut appris la promotion d'Alexandre III, l'évêque de Lisieux lui adressa une lettre de félicitation, dans laquelle il le reconnaît pour le vicaire de saint Pierre, l'évêque et le pasteur de tous ceux qui portent le nom de chrétiens. Alexandre, sensible à cet acte de bon vouloir, en remercia Arnoul, en le priant de lui continuer ses soins auprès du roi d'Angleterre, des évêques et des seigneurs du pays. Arnoul écrivit donc aux évêques anglais, pour leur faire connaître la canonicité de l'élection d'Alexandre III. Il en détailla toutes les circonstances, en les rapprochant de celles qui signalèrent l'élection de l'antipape Octavien. On trouvait réunies dans Alexandre toutes les qualités personnelles nécessaires à un pape, de la naissance, du savoir, l'assemblage de toutes les vertus. Elu dans les règles, il fut ordonné par l'évêque d'Ostie, à qui cette consécration appartient de droit. Il fut reconnu par les cardinaux et par les évêques qui remplissaient les fonctions de légats auprès des diverses nations. Toute l'Eglise jouirait d'une paix complète, si Octavien ne s'était mis sous la protection de l'empereur Frédéric, qu'il savait disposé à le soutenir. En effet, ajoute Arnoul, ce prince saisit avec empressement cette occasion, tant cherchée par ses prédé cesseurs, de soumettre l'Eglise romaine à leur empire; c'est pour cela qu'ils ont favorisé les schismatiques et excité des séditions dans Rome. Il montre ensuite qu'on ne pou

vait reconnaître Octavien pour pape, puisqu'il n'avait été élu que par un évêque et deux cardinaux; qu'il avait pris de luimême les ornements pontificaux, avait employé la violence pour s'asseoir le premier dans la chaire pontificale, et s'emparer du palais; qu'il n'avait été consacré qu'en pré sence d'un petit nombre de personnes, et par des évêques mendiés de tous les côtés. Aussi, manquant de confiance en sa cause, il avait constitué l'empereur arbitre absolu de sa destinée; en recevant, par l'anneau et le bâton, l'investiture de ses mains, il avait fait triompher l'empire du sacerdoce. C'est donc en vain qu'on faisait valoir pour son élection le concile de Pavie, puisque les évêques n'y avaient eu aucune liberté, qu'on n'y avait produit que des mensonges, et qu'on n'avait pu y rendre valide une élection vicieuse dans son principe. Il oppose à ce conciliabule les assemblées tenues en France pour la réception du pape Alexandre, et il dit à cette occasion « Béni soit Dieu qui, comme toujours, a accordé à l'Eglise de France la grâce de reconnaitre la vérité, et de ne pas s'écarter du chemin de la justice! » Enfin, il dit aux évêques d'Angleterre que, bien que le roi eût reconnu dès le commencement le pape Alexandre, cependant il ne voulait publier d'édit à ce sujet qu'après les avoir consultés.

A Arnauld, abbé de Bonneval. Ce que dit l'évêque de Lisieux dans sa lettre à Arnauld, abbé de Bonneval, sur le sacrifice de la messe, mérite d'être rapporté. « On ne peut rien offrir de plus précieux que JésusChrist, rien de plus efficace que ce sacrifice, rien de plus utile à celui qui l'offre et à celui pour qui il est offert, à moins que l'indignité des persones ne le rende inutile par l'opposition de leurs moeurs à la dignité de ce sacrifice. Il faut que celui qui l'offre ait les mains pures, de peur que celui qui est digne de toute vénération ne soit immolé pour un vil prix; mais il faut aussi que celui pour qui

est offert en reconnaisse la valeur par sa foi, qu'il l'aime, qu'il le désire, qu'il en fasse un sacrifice de propitiation, qui lui donne confiance d'obtenir de Dieu grâce et miséricorde. Par la réunion de ces dispositions saintes dans les deux parties, le sacrifice est utile à l'un et à l'autre, et il arrive que ceux qui l'offrent pour les autres l'offrent aussi pour eux-mêmes. Qu'il est grand ce bienfait qui profite à celui qui le reçoit et à celui qui le donne! Quelque étendue que soit la charité du prêtre envers certaines personnes, le sacrifice qu'il offre est tout entier pour tous, et tout entier pour chacun. Quoique communiqué à plusieurs, son intégrité n'en est pas divisée, ni sa vertu diminuée parce qu'un grand nombre y participe. Il est tout à vous et tout à moi. Je l'ai offert tout entier pour vous, et je l'ai néanmoins réservé tout entier pour mon utilité particulière. »

Poésies d'Arnoul. L'évêque de Lisieux s'occupait quelquefois de poésies, et plusieurs de ses poëmes sont arrivés jusqu'à

nous. Le premier est sur la nativité de JésusChrist, et les autres sur différentes matiè res qui n'ont que peu ou point de rapport à la religion, comme sur le changement des saisons, sur le retour du printemps; celui qui est adressé à deux jeunes amants pèche par trop de liberté; c'est apparemment un des fruits de la jeunesse de l'auteur. Arnoul composa aussi diverses épitaphes, entre aufres, pour le roi Henri, pour l'impératrice Mathilde, pour Algar, évêque de Constance, et Hugues, archevêque de Rouen L'épigramme sur Jésus-Christ attaché à la croix est en quatre vers élégiaques. Dans une autre, qui couronne ses ceuvres poétiques, il affirme ingénument, en parlant de lui-même, qu'en Normandie il passait pour un poëte célèbre, mais qu'en France on convenait généralement qu'il n'avait pas son semblable. Il est vrai que c'est à son neveu qu'il fait cette confidence, et le titre de poëte qu'il lui donne devait lui faire trouver tout simple ce que nous regardons, nous, comme une exagération. Du reste, son vers a de la dignité, et, quoique plus gêné, le talent s'y révélé comme dans tous ses écrits. Il suffit de parcourir ses ouvrages pour y retrouver partout, sous l'élégance du style, les traces d'un esprit fin, délicat et pénétrant. Ses OEuvres ont été imprimées dans la Bibliothèque des Pères.

remarquable par l'austérité de sa vie, par ARNOULD, célèbre prédicateur flamand, la singularité de son costume, mais plus encore par son savoir et le succès de ses prédications. A l'annonce de la grande croisade, il se sentit inspiré de marcher sur les traces de saint Bernard, pour exhorter les peuples de la France et de l'Allemagne à s'enrôler dans cette sainte milice. Comme il ignorait également les langues romance et tudesque, il prit avec lui Lambert, abbé de Gembloux, qui expliquait au peuple, dans la langue du pays, ce qu'il disait en latin. Les croisés s'étant partagés, les uns pour aller en Palestine, les autres pour aller combattre les Maures d'Espagne, Arnould suivit ces derniers, qui étaient commandés par le comte Arnoul d'Archost. Le principal fruit de leur expédition fut la prise de Lisbonne, qu'ils emportèrent le 21 octobre 1147. Notré prédicateur envoya la relation de ce siége å Milon, évêque de Térouane, dans une lettre que dom Martenne a publiée au tome 1o de sa grande collection, sur deux manuscrits, l'un d'Anchin, et l'autre de Gembloux.

On y voit que l'armée chrétienne, composée de Lorrains, de Flamands et d'Anglais, se rassembla en Angleterre, d'où elle partit le vendredi des Rogations, le 23 mai de cette année-là, sur une flotte de 200 voiles qu'une violente tempête sépara après quelques jours de navigation. Environ cinquante vaisseaux, au nombre desquels se trouvait celui que montait notre auteur, abordèrent le 31 mai dans un port d'Espagne appelé Gozzem. Là, après trois jours de repos, ils s'embarquèrent et touchèrent à un autre port nommé Viver. Ils remirent à la voile le vendredi

avant la Pentecôte, et vinrent débarquer au
port de Fambré, qui n'est qu'à huit milles de
Saint-Jacques en Galice. Ils se rendirent in-
continent à ce lieu célèbre, pour y passer la
solennité. Huit jours après, ils remontèrent
sur leurs vaisseaux, et allèrent attendre le
reste de la flotte à Portugalette, ville située
à l'embouchure du Douro. Pendant onze
jours que dura leur station, l'évêque du lieu
leur fournit abondamment les vivres et les
autres choses dont ils avaient besoin. Enfin,
toute la flotte se trouvant réunie, on fit voile
vers Lisbonne, devant laquelle on arriva le
28 juin, veille de la fête des apôtres saint
Pierre et saint Paul. Dès le même jour, le roi
d'Espagne, Alphonse Henriquès, parut en
vue de la place avec son armée de terre. On
opéra la descente aussitôt, et le 1 juillet,
les faubourgs étaient emportés; mais dans
le cours du mois on livra à la ville plusieurs
assauts, sans obtenir beaucoup de succès.
L'avantage de son assiette, la bonté et la
solidité de ses fortifications, et le courage
des assiégés, menaçaient les croisés d'une
longue résistance, sans même leur promet-
tre une victoire bien certaine. Ces pronos-
ties, loin de les abattre, stimulèrent leurs
efforts et doublèrent leur industrie. Ils ima-
ginèrent de construire deux grandes tours
de bois sur les bords du fleuve, l'une à l'o-
rient de la ville, où les Flamands se logè-
rent, et l'autre à l'occident, occupée par les
Anglais. Outre cela, ils élevèrent quatre
ponts appuyés sur chacun six vaisseaux,
chacun six vaisseaux,
d'où l'on pouvait passer sur les murs de la
place. Les assiégés, dans leurs sorties, rui-
naient une partie de ces ouvrages, mais heu-
reusement ils étaient réparés presque aus-
sitôt. Enfin, après quatre mois de siége, une
mine ayant fait sauter deux cents pieds de
muraille, les croisés, encouragés par le roi
d'Espagne, firent effort pour entrer par la
brèche. Le combat fut vif et opiniâtre, mais
les assiégés, épuisés de fatigues et à bout de
ressources, demandèrent à capituler, le 21
octobre, jour de la fête de sainte Ursule. La
proposition fut acceptée et les conditions
furent que la ville demeurerait au roi d'Es-
pagne, et le butin aux croisés.

Tel est le précis de la relation d'Arnould,
différente de celle de Robert du Mont, adop-
tée par Fleury dans son Histoire ecclésias-
tique. Celle-ci fait attaquer la ville par les
croisés de dessus leurs vaisseaux, tandis
que le roi d'Espagne l'assiégeait par terre.
Notre auteur, au contraire, témoin oculaire
des faits, atteste que les croisés, débarquant
aussitôt après leur arrivée, placèrent leurs
tentes dans la campagne, et firent sur terre,
avec les Espagnols, presque toutes les opé-
rations du siége.

ARNULPHE, évêque de Rochester, sous le
règne de Henri I", était né à Beauvais, vers
l'an 1050. Après avoir été assez longtemps
moine dans l'abbaye de Saint-Lucien à Beau-
vais, voyant qu'il ne pouvait ni corriger ni
supporter certains déréglements, il pensa à
aller s'établir ailleurs; mais avant de faire

cette démarche, il consulta Lanfrane, qu'il
avait eu pour maître à l'abbaye du Bec. Cel
archevêque, qui connaissait ses talents, lu
persuada de venir à Cantorbéry. Il y fut fait
prieur du monastère de Saint-Augustin, par
saint Anselme, successeur de Lanfranc, en-
suite abbé de Burck, et enfin évêque de Ro-
chester en 1114. Il donna dans tous ces offi-
ces des preuves de sa prudence et de sa pro-
bité. Son épiscopat fut de neuf ans et quel-
ques jours, et il mourut au mois de mars
1124, âgé de quatre-vingt-quatre ans.

On lui attribue une Histoire de l'église de
Rochester, connue sous le titre de Textus
Roffensis; il n'en reste qu'un extrait, publié
par Warton, dans son Anglia sacra. Nous ne
connaissons d'Arnulphe que deux lettres as-
sez longues pour mériter le titre de traités.
La première est adressée à Walquelin, évê-
que de Windsor. Dans une conférence qu'ils
avaient eue ensemble à Cantorbéry, Arnul-
phe avait soutenu, malgré les objections de
ce prélat, qu'une femme, coupable d'adultère
avec le fils de son mari devait en être sépa-
rée; et il avait appuyé son sentiment de l'au-
torité des Pères, des conciles, des livres pé-
nitentiels et des usages de l'Eglise. Walque-
lin s'en tenait aux paroles de l'Evangile et de
saint Paul, prétendant qu'elles décidaient en
sa faveur. Contents l'un et l'autre de leurs
preuves, ils s'étaient séparés sans avoir ré-
solu la question. Arnulphe la reprit par écrit,
et prouva que les passages de l'Ecriture al-
légués par Walquelin ne devaient s'entendre
que d'une séparation volontaire entre deux
personnes qui n'étaient pas coupables d'adul-
tère, séparation qui ne pouvait s'accomplir
que sur le consentement réciproque des
deux partis. Venant ensuite aux preuves de
sa proposition, il cite les décrets des conciles
de Mayence, de Verberie, de Tribar, les
épîtres décrétales des papes Innocent et Cé-
lestin I, et la coutume de l'Eglise, qu'on ne
peut, selon saint Augustin, violer sans pé-
ché. Il s'objecte que le mari étant innocent,
il y aurait injustice à le séparer de sa femme
pour une faute commise avec son fils. Mais
il répond que l'homme et la femme n'étant
qu'un corps et qu'une chair par leur union,
ils méritent d'être punis dans ce qui fait
qu'ils ne sont qu'un; car, selon saint Augus-
tin, non-seulement il est permis à un mari
de se séparer de sa femme, lorsqu'elle est
tombée en fornication, mais il le doit même,
de peur qu'à son exemple il ne tombe à son
tour. Cela n'est pas contraire au conseil que
l'Apôtre donne au mari fidèle de demeurer
avec sa femme infidèle, parce que ce conseil
n'impose aucune nécessité au mari; le même
apôtre ayant dit que celui qui s'unit à une
adultère devient un même corps avec elle,
il suit de là que la femme dont il est ques-
tion étant devenue par l'adultère un même
corps avec le fils de son mari; ce mari en
habitant avec elle habitera en même temps
avec sa femme et sa fille. Il cite l'exemple
de David qui ne voulut plus connaitre ses
concubines après qu'elles eurent eu com-
merce avec son fils Absalon.

La seconde lettre d'Arnulphe est une réponse à cinq questions que Lambert, abbé de Munster, lui avait adressées sur l'eucharistie. Voici la première de ces questions: Pourquoi donnait-on alors aux communiants l'hostie trempée dans le sang, puisque Jésus-Christ avait donné à ses apôtres son corps et son sang séparément? Arnulphe répond que Jésus-Christ étant venu pour le salut des hommes, a enseigné à ses apôtres, de vive voix ou par son exemple, ce qui était nécessaire pour la réparation de l'humanité, mais qu'il n'en a pas prescrit la manière, laissant à son Eglise le pouvoir de la déterminer. Ainsi, en ordonnant le baptême, il n'a pas dit: Vous baptiserez de cette façon; vous plongerez une fois, ou vous plongerez trois fois; vous ferez le scrutin; vous consacrerez le chrême; mais il a dit seulement: Allez, baptisez toutes les nations, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. D'où il suit que, pourvu que l'on baptise, la manière de baptiser peut varier, soit par raison de nécessité, soit par raison de décence. La façon d'administrer les sacrements a varié avec les époques et suivant les besoins des temps; les sacrements sont toujours restés les mêmes. Il donne pour raison de la coutume introduite alors, de tremper l'eucharistie dans le sang de JésusChrist, la crainte bien fondée qu'il n'arrivât quelque accident, lorsque le prêtre donnait le calice à une grande multitude. Il ajoute qu'on ne doit pas appréhender d'imiter Judas, à qui le Sauveur donna un morceau de pain trempé, puisque ce fait n'a aucun rapport à la communion eucharistique.

La seconde question était de savoir pourquoi l'on met là quatrième partie de l'hostie dans le calice? Arnulphe répond que la coutume n'est pas de mettre la quatrième, mais la troisième partie de l'hostie dans le calice, parce qu'on la partage, non en quatre mais en trois. Il donne pour raison de cette division en trois parties, que l'hostie qui est sur l'autel doit être consommée par le célébrant, le diacre et le sous-diacre. Le consécrateur prend dans le calice la partie qui lui arrive, et il réserve sur la patène les deux autres parties pour ses deux ministres, s'ils sont présents; dans leur absence, il absorbe l'hostie tout entière. La division de l'hostie en trois peut encore figurer le corps mystique de Jésus-Christ; c'est-à-dire, l'Eglise composée de trois ordres, du clergé, des Veuves et des personnes mariées; ou les trois personnes de la Trinité; ou les trois états de Jésus-Christ, sur la terre, au tombeau et dans le ciel.

Lambert demandait, en troisième lieu, pourquoi l'on recevait le sang de JésusChrist séparément de son corps, et son corps séparément de son sang? Arnulphe répond qu'on le fait ainsi pour imiter JésusChrist lui-même, qui, dans l'Evangile, propose la communion de son corps séparément de celle de son sang. Cependant il ne laisse pas d'être vrai que nous recevons Jésus-Christ tout entier sous chaque espèce,

son sang avec son corps, et son corps avec son sang.

Voici la quatrième question: Reçoit-on, dans l'eucharistie, l'âme avec le corps de Jésus-Christ? Arnulphe, en y répondant, rejette les vaines subtilités que la vanité, plutôt que l'amour de la religion, faisait naître à propos des sacrements. Il veut qu'au lieu de perdre son temps en disputes, on croie sans hésiter que l'eucharistie est le corps et le sang de Jésus-Christ, puisqu'il l'a dit lui-même, et qu'étant la vérité il n'a pu mentir. N'a-t-il pu accomplir, comme toutpuissant, ce qui est au-dessus des lumières de notre raison? Au contraire, c'est même pour cela que l'eucharistie est appelée un mystère de foi, parce que la foi seule en pénètre le secret. C'est donc sans raison que l'on demande si la chair de Jésus-Christ dans l'eucharistie est morte ou immortelle ; si elle est animée, ou si elle ne l'est pas ? La question est aussi oiseuse et aussi vaine que si l'on demandait aux fidèles si l'hostie consacrée où nous voyons toutes les apparences du pain est bien réellement du pain. N'a-t-on pas répondu à tout quand on a dit que Jésus-Christ est tout seul, et qu'il est tout entier dans l'eucharistie ?

A

La cinquième question regarde le sens de ces paroles du prophète: Qui sait si Dieu ne changera pas, et s'il ne pardonnera pas;_s'il Arnulphe fait voir par les paroles du même ne laissera point après lui de bénédiction? prophète Joël, qui précèdent immédiatement celles que nous venons de rapporter, que le changement de Dieu consiste dans le pardon qu'il accorde au pécheur converti. Par la bénédiction qu'il laisse après lui, il faut entendre la paix et la grâce qu'il donne à ceux qui le suivent et qui accomplissent sa volonté.

Ces deux lettres d'Arnulphe sentent le disciple de Lanfranc; elles sont écrites d'un style clair, précis, qui ne manque ni d'élégance ni de solidité. Dom Luc d'Achéry les a insérées toutes les deux dans le tome II de son Spicilége.

ARSENE (saint), anachorète d'Egypte, naquit à Rome vers la fin du Ive siècle, d'une famille alliée à plusieurs sénateurs. Dès son enfance, il se montra plein d'ardeur pour l'étude et pour la pratique de la vertu, et se rendit bientôt habile dans la connaissance des auteurs grecs et latins et de. l'Histoire sainte. Ayant embrassé l'état ecclésiastique, il fut ordonné diacre et vécut longtemps dans la retraite; mais l'empereur Théodose cherchant un gouverneur pour l'éducation de ses enfants, son choix tomba sur Arsène, qui fut élevé à la dignité de sénateur, et nommé tuteur des jeunes princes. L'empereur voulut qu'Arsène eût un grand train et cent domestiques richement vêtus furent attachés à son service. Un jour que Théodose était allé voir les jeunes princes pendant leurs études, il les trouva assis, tandis qu'Arsène était debout devant eux. Il fit de vifs reproches, à ses enfants, les dépouilla,

pour quelque temps, des marques de leur dignité, et ordonna que pendant leurs leçons ils fussent debout et Arsène assis. Mais tous ces honneurs ne remplissaient pas le cœur d'Arsène. Doué d'une âme vive et tendre, et peut-être en secret tourmenté par une passion que sa piété cherchait à étouffer, il ne soupirait qu'après la solitude. Un jour Arcadíus, un des enfants de Théodose, ayant commis une faute, Arsène voulut l'en punir; mais le jeune prince n'en devint que plus indocile et plus opiniâtre. Arsène profita de cette occasion pour quitter la cour; il s'embarqua secrètement sur un vaisseau qui faisait voile pour Alexandrie, d'où il se rendit dans le désert de Scété pour y vivre en anachorète. L'empire romain s'écroulait sous les coups des barbares; le monde était ravagé par tous les genres de fléaux, et ne présentait partout que le spectacle de la plus honteuse barbarie. Dans cet affreux désordre, beaucoup de chrétiens oublièrent ces paroles de l'Ecriture: Il n'est pas bon que l'homme soit seul, et se refugièrent dans les lieux écartés. Lorsque Arsène arriva dans le désert de Scété, et qu'il parla de la cour de Constantinople aux anachorètes depuis longtemps retirés du monde, il jeur causa la plus vive surprise. Dans leur simplicité, ils ne concevaient pas que des hommes s'occupassent à bâtir des villes, à rechercher les pompes et la vaine gloire, ni qu'ils daignassent occuper des trônes; mais ce qu'ils comprenaient beaucoup moins encore, c'était la corruption, la perfidie, l'impiété; ils ne pouvaient s'expliquer les récits d'Arsène. Comme il venait de quitter un monde qui leur était inconnu, et qui ne leur inspirait que des défiances, ils résolurent de le soumettre aux plus rudes épreuves, pour savoir si une vaine curiosité ne l'avait point amené dans le désert. Saint Jean surnommé le Nain, leur supérieur, s'assit avec ses frères pour prendre un peu de nourriture, et laissa Arsène debout, sans faire attention à lui. Cette épreuve devait paraître dure à un homme élevé à la cour; mais elle fut suivie d'une autre plus dure encore. Au milieu du repas, saint Jean prend un morceau de pain qu'il jette à terre devant Arsène, en lui disant avec un air de mépris qu'il peut manger s'il a faim. Arsène se couche à terre et mange dans cette posture. Saint Jean édifié de tant d'humilité, n'exigea plus d'autre épreuve. « Allez, dit-il aux frères, retournez dans vos cellules avec la bénédiction du Seigneur; priez pour nous; cet homme est appelé à la vie religieuse. » Dès lors Arsène prit sa place parmi les Pères du désert. Comme les autres anachorètes, il faisait des nattes et des ouvrages de jonc, se nourrissait de pain noir et couchait sur la terre. Cependant Théodose, affligé de sa fuite, le fit chercher dans tout son empire. Après la mort de ce prince, Arcadius, qui lui succéda, n'oublia pas non plus Arsène, et voulut le rappeler à la cour. Ayant appris qu'il était dans les déserts de Scété, il lui écrivit pour se recommander à ses prières. Dans sa

lettre, il lui offrait de lui abandonner les tributs de l'Egypte, pour être employés aux besoins des monastères et au soulagement des pauvres. Le pieux cénobite se coutenta de répondre à l'envoyé de l'empereur: « Je prie Dieu qu'il nous pardonne à tous nos péchés; quant à la distribution de l'argent, je ne suis point capable d'un tel emploi, étant déjà mort au monde. » De tous les moines de Scété, il n'y en avait point qui fût plus pauvre, plus humble, plus mal nourri et plus mal vêtu que l'ancien gouverneur d'Arcade. Dans une longue maladie, il fut secouru par la charité de ses frères, et transporté dans un logement plus commode que le sien; on le coucha sur un lit fait de peaux de bêtes, un oreiller fut placé sous sa tête affaiblie;un des moines étant venu le voir, se scandalisa de le trouver ainsi couché, et s'écria qu'il ne reconnaissait pas le Père Arsène. Le supérieur demanda alors au moine, qui témoignait sa surprise, quelle avait été sa profession avant d'être cénobite? « J'étais berger, répondit-il, et j'avais beaucoup de peine à vivre. Vous voyez l'abbé Arsène, répliqua le supérieur; il fut le père des empereurs; il avait à sa suite cent esclaves habillés de soie; il était mollement couché sur des lits magnifiques; pour vous, qui étiez berger, vous vous trouviez plus mal à votre aise dans le monde qu'ici. »> Le bon moine, touché de ces paroles, s'humilia et se retira plein de respect pour Arsène. Un des officiers de l'empereur apporta un jour à Arsène le testament d'un sénateur de ses parents qui lui donnait tous ses biens; le solitaire refusa l'héritage en disant : « Je suis mort avant mon parent, je ne puis être son héritier. » Il continua à vivre dans la pauvreté et la mortification; lorsqu'il se ressouvenait des jours qu'il avait passés à la cour des empereurs, il ne pouvait retenir ses larmes, et rien ne pouvait l'arracher à sa selitude, ni le détourner de la pensée de Dieu. Un jour une dame romaine, nommée Mélanie, qui avait quitté Rome pour voir le père Arsène, parut à la porte de sa cellule et se jeta à ses pieds; le serviteur de Dieu lui dit : « Une femme ne doit point quitter sa maison et traverser les mers, pour satisfaire une vaine curiosité. » Mélanie, toujours prosternée, le conjura de se souvenir d'elle et de prier Dieu pour sa sanctification. « Je prie Dieu, lui répondit-il, de ne jamais me ressouvenir de vous. » Il s'agenouilla plein de trouble, et les yeux mouillés de pleurs. Arsène avait un goût si profond pour la retraite qu'il évitait jusqu'à la société de ses frères du désert; il ne leur parlait presque jamais. « Je me suis toujours repenti d'avoir conversé avec les hommes, et jamais d'avoir gardé le silence. » Il recevait néanmoins les avis des plus simples d'entre les moines. « J'ai eu la science des Grecs et des Romains, mais les hommes les plus simples sont plus avancés que moi dans la science de la vertu. Les hommes simples sont ceux qui plaisent à Dieu; car il veut des âmes qui ne soient pas toujours devant un miroir pour se compo

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