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l'archevêque de Paris, de Beaumont, une pension de 1 200 francs, à condition qu'il ne laisserait point imprimer certaines poésies plus que licencieuses, qui avaient servi à divertir, en particulier, le débauché Louis XV.

DES AUTOGRAPHES.

M. Peignot ne fait remonter le goût des autographes qu'au milieu du siècle dernier1. Nous croyons que ce goût a existé de toute antiquité, et les épigrammes suivantes de Martial montrent quel prix on attachait aux pièces écrites de la main d'un auteur en renom.

«Bibliothèque d'une délicieuse maison de campagne, d'où le lecteur aperçoit Rome dans le voisinage; si, parmi tes poésies plus sérieuses, il reste une place pour ma Muse folâtre, reçois, ne fût-ce qu'au dernier rang, ces sept livres que je t'envoie, corrigés de la main de l'auteur. Les ratures font tout leur prix. Mais toi, à qui je dédie cet humble présent, et qui en deviendras célèbre dans tout l'univers, bibliothèque de Jules Martial, protége ce gage de mon amitié. »

« Vous voulez, Pudens, que je corrige pour vous mes livres de ma propre main. C'est m'estimer, c'est m'aimer trop en vérité, que de vouloir ainsi posséder mes sottises en original 2. >>

' Voyez ses Recherches sur les autographes, Dijon, 1836, in-8. Cette brochure renferme quelques particularités intéressantes.

Épig., 1. vII, 17 et 14.

Voici encore quelques passages qui confirment notre assertion:

Quintilien (1. vi, c. 7), parlant d'une orthographe adoptée par Cicérou et Virgile, ajoute : « Leurs manuscrits autographes en font foi. >>

« Les lettres autographes (autographæ) d'Auguste, dit Suétone (c. 87), montrent que, dans le discours familier, il se servait de plusieurs locutions singulières... J'ai aussi remarqué dans ses manuscrits qu'il ne divisait pas les mots, et qu'au lieu de rejeter au commencement de la ligne suivante les lettres excédantes d'un vers, il les mettait sous les dernières de cette ligne, en les entourant d'un trait. >>

« J'ai eu entre les mains, dit encore Suétone, en parlant de Néron (c. 52), des tablettes où se trouvaient des vers de lui, fort connus et entièrement de son écriture. On voyait bien qu'ils n'étaient ni copiés, ni écrits sous la dictée d'un autre; mais qu'ils étaient le fruit de sa pensée, tant il y avait de corrections et de ratures. >>

Pendant le moyen âge, nul doute que l'on ne recherchât aussi les manuscrits autographes des auteurs célèbres, et quelques-uns même sont venus jusqu'à nous1. Mais à cette époque, où l'instruction et les livres étaient fort rares, l'amateur qui aurait voulu se former une collection d'autographes, se serait vu bien vite obligé d'y renoncer. Lors de la renaissance des lettres, il en fut tout autrement, comme le prouvent les nombreux autographes qui nous sont restés des savants et des hommes célèbres du quinzième et du seizième siècle, et cet usage

Telle est, par exemple, la Bible d'Alcuin, qui a été vendue à Londres, en 1856, pour 1500 liv. st.

de l'Album amicorum, dont il a été parlé ailleurs '. Dès le commencement du dix-huitième siècle, quelques savants avaient réuni de belles collections d'autographes. Nous citerons, entre autres, celle du célèbre bibliophile Uffenbach, mort en 1734. Elle formait soixantecinq volumes in-fo et cinquante-quatre in-4 et était presque uniquement composée de lettres des savants les plus illustres depuis le seizième siècle. Rien n'égalait, du reste, la générosité avec laquelle il communiquait aux gens de lettres les richesses de sa bibliothèque. Ainsi ayant publié, en 1720, in-fo, le catalogue de ses manuscrits, il le fit précéder d'un avertissement, où il offrait aux savants de leur adresser des copies des ouvrages dont ils pourraient avoir besoin; ce fut en partie dans sa collection que Schelhorn puisa les matériaux de ses Amanilales litterariæ 2. Après la mort de son propriétaire, cette collection fut achetée par le philologue J. Christophe Wolf.

Suivant M. Peignot, ce n'est guère que vers 1819 que les collections d'autographes ont commencé à figurer dans les ventes publiques; et depuis cette époque, jusqu'en 1855, il cite vingt catalogues où des collections de ce genre ont été annoncées en France.

Rien de plus variable que les prix des autographes. Des découvertes dans la boutique d'un épicier ou dans

Voyez CURIOSITÉS LITTÉRAIRES, p. 386.

'M. Peignot a donc eu tort de dire ( p. 23 ), dans la brochure que nous avons déjà citée : « Il existait déjà vers la fin du dernier siècle, dans le cabinet des curieux, chez certains bibliophiles, quelques semences de recueils d'autographes; mais on n'en faisait encore aucun étalage; les amis, les visiteurs seuls en étaient instruits; et les propriétaires eux-mêmes ne croyaient pas posséder chose qui un jour exciterait si grande convoit.se.>

des papiers de famille, peuvent rendre commune une marchandise très-rare. Parmi les prix assez élevés qui ont été payés pour quelques autographes, nous citerons seulement les vingt-huit lettres de madame de Maintenon, qui, en 1822, ont été adjugées pour le compte de Louis XVIII, au prix de 14 000 francs, et une lettre de Christophe Colomb, sur sa découverte du NouveauMonde, lettre que le duc de Buckingham a achetée en 1825 pour 825 francs.

Disons quelques mots des auteurs qui ont annoté leurs livres, ou y ont apposé leur signature. On trouve rarement des livres signés par les personnages qui vécurent dans les premiers temps de l'imprimerie. Il n'en fut pas de même au dix-septième siècle. La signature de Jacques-Aug. de Thou se rencontre sur quelques-uns des volumes provenant de sa célèbre bibliothèque; celle de P. Corneille sur quelques exemplaire de son Imitation de Jésus-Christ. Racine a couvert de notes grecques, latines ou françaises, les marges des principaux poètes dramatiques de l'antiquité. La Bibliothèque du roi possède son Euripide et son Aristophane. Baluze a signé des trois mots Slephanus Baluzius Tutelensis la plupart des livres de sa bibliothèque. Les livres de La Monnoie sont reconnaissables à l'anagramme de son nom: A Delio nomen, et à des notes curieuses, écrites en caractères microscopiques.

On trouve rarement des livres portant la signature de J.-J. Rousseau ou des notes de Voltaire 1.

'C. Nodier qui, dans ses Mélanges tirès d'une petite Bibliothèque, s'est assez étendu sur les annotateurs de livres, s'est avisé de faire, en 1829, une spéculation racontée en ces termes au tome LXXV (supplément) de la Biographie Michaud : « Il imagina de vendre ses livres avec les au

La bibliothèque Barberini, à Rome, renferme un grand nombre de livres imprimés, couverts de notes marginales par de célèbres écrivains, tels qu'Alde et Paul Manuce, Scaliger, Léon Allatius, Luc Holstenius, David Hæschel, Barbadori et surtout le Tasse, qui a annoté lui seul plus de cinquante volumes. « Un Platon, de la version latine de Marsile-Ficin, est non-seulement annoté de la main du Tasse, mais encore par son père Bernardo; et il montre à quel point le beau langage et les songes poétiques du philosophe grec étaient étudiés et médités dans cette famille. Les remarques sur la Divina Commedia, qui, malgré l'opinion de Serassi, paraissent authentiques, attestent l'étude profonde que, dès sa jeunesse, le Tasse avait faite des grands poètes, et sa vive admiration... On trouve encore un exemplaire de l'édition de la Divina Commedia de Venise (1477), avec des notes autographes de Bembo 1. »

Christine de Suède avait la manie d'écrire sur ses li vres. On trouve, à la bibliothèque du collége Romain (à Rome), plusieurs livres annotés de sa main, entre autres, un Quinte-Curce, où, à ce qu'il paraît, elle traite fort lestement la conduite d'Alexandre. Il a mal raisonné dans cette circonstance, dit-elle quelque part; et ailleurs : J'aurais, moi, fait tout le contraire ; j'aurais pardonné; et, plus loin encore : J'aurais usé de clémence. Il est per

notations qu'il y avait faites ou qu'il y fit en fort peu de temps, pour le besoin de la cause, ainsi que l'on disait au palais. Comme on ne lui avait jamais connu de bibliothèque bien nombreuse, et que les agitations de sa vie ne lui avaient guère permis de faire beaucoup de notes aux livres qu'il avait en propre, on y eut peu de confiance, et la vente fut loin d'avoir les résultats qu'il s'en était promis. >>

• Valery, Voyages en Italie, 1. xv, c. 23.

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