nis de fermoirs (fermoyes, fermaux, fermouers, etc.), dont le nombre variait depuis un jusqu'à quatre, et qui étaient en or, en vermeil, en argent, en cuivre et même en fer. Ces fermoirs étaient en général émaillés et armoiés aux armes du propriétaire des livres, ou même ornés de figures. Ainsi le catalogue cité plus haut fait mention d'un livre « où ya à chascun fermouer ung prophète esmaillé.>> Les fermoirs étaient souvent remplacés par de simples agrafes (mordans) qui s'attachaient à des boutons (pipes) de métal placés sur la couverture. Pour protéger ces riches reliures, on les recouvrait en général d'un sachet, d'une bourse ou housse en cuir, en étoffe de soie ou en étoffe commune. Ces housses étaient souvent elles-mêmes ornées de perles et de broderies. En outre, les livres précieux étaient renfermés dans des coffres richement ornés. - Skelton, poète lauréat de Henri VIII, a laissé une description poétique de la reliure d'un livre. « Les fermoirs brillaient, la marge était toute sillonnée de filets d'or et peinte de diverses manières; on y avait représenté des guêpes, des papillons, des plantes, des fleurs. Un homme malade aurait recouvré la santé en voyant cette belle reliure, ce beau livre couvert d'or et de soie; ces fermoirs d'argent fin valaient mille livres ; la vignette était éclatante de pierres précieuses et d'escarboucles, et chaque autre ligne d'Aurum mosaicum. » Grollier, trésorier de France et ambassadeur à la cour de France sous François Ier, avait rassemblé une magnifique bibliothèque dont une partie passa en Angleterre. « J'en ai eu pour ma part, dit Vigneul-Marville dans ses Mélanges, quelques volumes à qui rien ne manque, ni pour la bonté des éditions de ce temps-là, ni pour la beauté du papier et la propreté de la reliure. Il semble, à les voir, que les Muses qui ont contribué à la composition du dedans, se soient aussi appliquées à les approprier au dehors, tant il paraît d'art et d'esprit dans leurs ornements: ils sont tous dorés avec une délicatesse inconnue aux doreurs d'aujourd'hui : les compartiments sont peints de diverses couleurs, parfaitement bien dessinés, et tous de différentes figures dans les cartouches se voit d'un côté, en lettres d'or, le titre du livre, et au-dessous, ces mots qui marquent le caractère si honnète de M. Grollier, Jo. Grollerii el amicorum; et de l'autre côté cette devise, témoignage sincère de sa piété : portio mea, Domine, sit in terra viventium. « Le titre des livres se trouve aussi sur le dos entre deux nerfs, comme cela se fait aujourd'hui; d'où l'on peut conjecturer, que l'on commençait dès-lors à ne plus coucher les livres sur le plat dans les bibliothèques, selon l'ancienne coutume qui se garde encore aujourd'hui en Allemagne et en Espagne, d'où vient que les titres des livres reliés en vélin ou en parchemin, qui nous viennent de ces pays-là, sont écrits en gros caractères tout le long du dos des volumes. >> On conserve au British Museum un exemplaire du Nouveau Testament (édition de Tyndall), qui a appartenu à Anne de Boleyn, comme le prouve le nom de cette princesse écrit ainsi en grandes lettres rouges, sur les tranches du livre: Anna en haut, regina au milieu, Angliae en bas. La reliure est en maroquin bleu. On conserve encore dans le même établissement une Bible française imprimée à Lyon en 1566, et qui a appartenu à la reine Élisabeth. Sur la couverture se trouve un ovale d'un décimètre de diamètre, renfermant un portrait en miniature d'Elisabeth, entouré de ces mots : Elizabeth, Dei gratia, Angl., Franc. et Hib., regina. Les livres de cette princesse étaient en général reliés avec un grand luxe, comme le montre l'inventaire de son trésor, fait la seizième année de son règne. On y remarque surtout le Golden Manual of prayers, relié en or massif, et qu'elle portait suspendu à sa ceinture par une chaîne d'or. Sur un des côtés est représenté le jugement de Salomon; sur l'autre le serpent d'airain entouré des Israélites blessés. Ce livre, dans l'inventaire, est évalué 150 livres sterling. On conserve à la bibliothèque Bodléienne, à Oxford, une traduction anglaise des épîtres de saint Paul, couverte d'une reliure brodée, exécutée par la même princesse, dans le temps qu'elle resta en prison à Woodstock, sous le règne de sa sœur Marie. La couverture en soie noire est couverte de devises. On lit en haut : Coelum patriæ. Scopus vitæ xPvs. Christo vive. Au milieu un cœur, entouré des mots : Eleva cor sursum ibi ubi e. c. (est Christus). De l'autre côté : Beatus qui divitias scripturæ legens, verba vertit in opera. Et au centre, autour d'une étoile : Vicit omnia pertinax virtus e. c. Dans la seconde moitié du seizième siècle, les édits contre le luxe avaient défendu toute espèce de dorure; mais par déclaration royale du 16 septembre 1577, Henri III excepta de cette prohibition la dorure des livres. Il ne permit toutefois que la dorure de la tranche, des filets d'or et une marque au milieu du plat. « A cette époque, dit Géraud, on avait déjà perfectionné au plus haut degré les reliures en cuir à filets et ornements d'or et de couleur; la Bibliothèque du roi possède en ce genre des reliures de l'époque qui servent encore aujourd'hui de modèles. Vers le même temps, la sculpture et la ciselure avaient fait de rapides progrès. Les artistes s'exercèrent sur les reliures, et revêtirent les missels et les autres livres d'église de tablettes en bois, en ivoire, en argent, ciselées avec art et parfois incrustées de pierres précieuses. » On a relié des livres avec toutes sortes de peaux : ainsi, l'on a employé les peaux de truie pour recouvrir les gros livres de plain-chant; et l'on cite même quelques exemples de reliure singulière, dus à des fantaisies d'amateur. Le bibliophile anglais Dibdin raconte qu'un particulier avait fait relier en peau de cerf un traité sur la chasse; qu'un autre fit couvrir d'une peau de renard (en anglais, fox) l'Histoire de Jacques II, par Fox, et que le docteur Askew avait un livre sur l'anatomie, relié en peau humaine. Sous Louis XIV, l'orientaliste Petis de la Croix fut chargé d'acheter, en Afrique, douze cents peaux de maroquin, destinées à la reliure des livres de la Bibliothèque royale; ces achats durent se renouveler souvent. Nous croyons même avoir lu quelque part que Louis XIV, dans ses guerres avec les puissances barbaresques, leur imposa, comme une des conditions de paix, la fourniture d'un certain nombre de peaux de cette nature. Aussi estil à remarquer que les manuscrits et les imprimés de cette époque, conservés à la Bibliothèque du roi, sont, pour la plupart, reliés en maroquin. Quant au prix des reliures, voici quelques notes qui pourront en donner une idée, pour le quinzième et le seizième siècle. Nous extrayons les deux suivantes des inventaires des ducs de Bourgogne : «En 1386, le duc (Philippe le Hardi) paya à Martin Lhuillier, libraire, 16 francs (114 fr. 15 c.), pour couvrir viiij livres, tous romans et Bibles et aultres livres, dont vj seront couverts de cuirs en grains. « 1398. Achat de parchemin, veelin, chevrotin, froncine, 40 f. (285 fr. 35 c.), fermeilles de cuivre, bourdons, cloux de Rouen, cloux de laton et de cuivre, soye de plusieurs couleurs, pour faire chapiteaux, et cuyr de vaches pour faire tirouer, pour convertir en façon de livres, 50 f. 2 s. (362 fr. 45 c.) Dans les comptes de l'Échiquier, on voit que, la dixseptième année du règne de Henri II (1174), les shérifs de Londres payèrent 22 shellings pour faire dorer l'Évangile dont on se servait dans la chapelle royale. On trouve dans le compte de lagarderobe d'Édouard IV, de l'année 1504, les notes suivantes : « Donné à Pierre Baudduyn, libraire, pour relier, dorer et habiller (dressing), un livre appelé Tite-Live, xx shillings; « Pour relier, dorer et habiller le livre de la SainteTrinité, xvj sh. ; « Pour relier, dorer et habiller un livre intitulé la Bible, xvi sh.; « A Alice Claver, soirière, pour une once de soie à coudre, xiv deniers; velours cramoisi, avec dessins blancs, viii sh. la verge (yard); |