Obrazy na stronie
PDF
ePub

remarquables que ses voyages lui avaient apprises, les traditions mythologiques, les mœurs et les préjugés des peuples, ce qu'il avait observé, écouté et senti. Plein de digressions, épique plutôt qu'historique, il brille par la clarté, l'abondance, la marche facile de la narration. Point de critique; le merveilleux ne l'étonne pas; chroniqueur et non juge, il répète, aux Grecs victorieux, avec une fidélité charmante, comment ils ont triomphé.

Sophocle perfectionne la tragédie, et accomplit dans son plus noble accord, l'harmonie de la conception et de la forme, de la pensée et du style. Le sentiment du sublime s'adoucit par une piété mâle, profonde et tendre; héroïque et humain, passionné et moral, noble et pathétique, il marque le point culminant de la civilisation grecque, le beau choix des proportions, l'accord des parties et de l'ensemble. La supériorité grecque se déploie dans les arts qui reproduisent l'homme extérieur; la peinture, la sculpture deviennent l'expression poétique et éloquente des idées et des passions.

Les idées mystiques et symboliques de l'Inde, de la Perse, de l'Egypte, défavorables à la beauté, avaient sacrifié la forme à l'idée religieuse et l'avaient changée en symbole. Les Grecs immolèrent l'idée à la forme, mirent en première ligne la beauté et la réalisèrent complètement leur Jupiter fut le plus majestueux des hommes; leur Apollon le plus beau des jeunes gens. La pensée symbolique rentra dans le sanctuaire, avec l'horrible et le difforme; le tumulte des passions perdit sa laideur. Même chez les écrivains semi-orientaux où le style colossal domine, chez Eschyle et Pindare, une grâce terrible se maintint. Les statues grecques sont calmes; amour, désir, douleur, effroi, se montrent dans un repos majestueux.

Rien de convulsif, rien d'excessif: l'Apollon du Belvédère a vaincu, il est calme; les faunes et les satyres sont des monstres, et ils sont beaux.

Euripide, Aristophane, Thucydide signalent le premier mouvement de la Grèce vers une décadence encore éloignée.

>

Euripide, sophiste d'un talent admirable, donne à la tragédie plus de rapidité et de vie pathétique, moins de vraisemblance et moins de gravité. On lui reprocha l'abus des catastrophes et des surprises, des sentences et des axiomes. Admirable dans l'expression pathétique des passions, (1) peu curieux de ses plans et de la conception de ses œuvres; il prodigua les sentences qui plaisent au vulgaire. Il réduisit le chœur religieux à n'être plus qu'un accessoire; il voulut surtout plaire, surprendre, et émouvoir. L'art commençait à s'épuiser; on osait sourire des vieux dogmes; Euripide suivit le torrent du scepticisme nouveau.

Un homme vivait de son temps, misanthrope brillant, doué de l'imagination la plus caustique et du sens le plus droit, qui voyait la démocratie se perdre et perdre la Grèce ; ennemi des sophistes, charlatans de morale, qui vendant le pour et le contre, et l'art de les soutenir par des syllogismes, anéantissaient le culte de la vérité, c'est-à-dire, toute morale, toute foi, et toute grandeur; il se nommait Aristophane. Il déclara la guerre à ces vices de l'esprit et de l'âme, et dans la flagellation universelle qu'il leur infligeait, il atteignit le talent et la vertu. Il s'acharna sur Euripide et sur Socrate son maître. Les Saturnales pleines de verve, de tristesse et de gaité, qu'il nomma comédie, ont tous les caractères du génie; richesse d'invention,

(4) V. plus bas, Euridipe et Racine.

force dithyrambique, souplesse, richesse, ardeur, éclat, facilité de diction, profondeur de coup d'œil.

Thucydide écarte les fictions, et laisse de côté la chronique des nations étrangères. Il dit les troubles de sa patrie et l'état des partis avec une merveilleuse clarté, une grande ordonnance de plan et de détails, dans un style concis, sombre, élevé, suspendu entre l'éloquence de la tribune et le drame tragique. La douleur que lui inspirent les maux de son pays imprime à son chef-d'œuvre un intérêt grandiose; il crée la forme historique qui a reparu avec Tacite.

Socrate meurt pour avoir professé le culte d'un Dieu unique, blessé les préjugés de son temps, proclamé la vérité morale, attaqué la tourbe insolente et spirituelle qui régnait au théâtre et sur les places publiques. Ce régénérateur de la civilisation Grecque eut Xénophon et Platon, l'un grand écrivain, l'autre homme de génie, pour amis, pour élèves et défenseurs.

Xénophon, qui a peu de profondeur et de grandeur, mêle l'histoire à la poésie et à la morale; c'est le créateur du roman historique, tel que les modernes le connaissent. Platon, qui a donné à la prose grecque une forme aussi élégante et plus riche que Xénophon; s'élevant au dithyrambe et descendant à la conversation naïve; habile dans la controverse captieuse, narrateur admirable, éloquent dans l'exposition des abstractions et dans la peinture dramatique des caractères, est l'expression suprême du génie harmonieux de la Grèce.

Le domaine de la critique, celui de la science et de l'art seront éternellement partagés en deux sphères, dont l'une obéit à Platon, l'autre à son rival Aristote. Les spiritua→

listes seront éternellement platoniciens; les partisans de la critique et de l'expérience reconnaîtront toujours Aristote pour chef.

Finesse, cohérence, et justesse signalent la manière d'Aristote, qui embrassa tout et sût tout éclaircir, tout placer dans son rang et dans son ordre esprit encyclopédique et lumineux, qui fonda l'enseignement systématique, classa les connaissances acquises, et posa les fondements de la critique.

Les œuvres d'Isocrate offrent le dernier raffinement du langage. Démosthènes, au contraire applique la sévérité de la dialectique à la discussion des affaires. Isocrate est artificiel; Démosthènes est un artiste.

Les mœurs avaient changé, les derniers vestiges de la rudesse héroïque avaient disparu. Une comédie douce et indulgente naquit et s'empara de la vie privée. Ménandre, le plus parfait et le plus pur de ces poètes, reproduisit avec une élégance presque idéale la réalité, le présent, les caractères humains; ensuite l'art dramatique, qui manquait de matériaux, périt épuisé. Dernier poète original de l'Attique, dernière expression de la civilisation antique, Ménandre couronne cette brillante carrière de trois siècles.

La création perd ensuite sa force et son énergie: poètes et savants réunis à la cour de Ptolémée, peintres et sculpteurs, copistes de Phidias et de Zeuxis, bibliothécaires et commentateurs, poètes didactiques, élégiaques et idylliques, continuent la gloire Grecque, par de petits tableaux de genre, des épigrammes et des églogues, des anthologies et des scholies. La poésie se perd en un mécanisme ingénieux, l'éloquence en un jeu de paroles. Les arts, la plus belle gloire des Grecs, brillèrent longtemps encore.

Ce fut donc vers la beauté et l'harmonie de la forme que le goût hellénique fut entraîné. Exactitude de proportions, perfection d'ensemble, ordre dans la richesse, tel est l'art grec : éminemment fini, lucide, plastique. Statuaires et poètes, peintres et orateurs tendent vers le même but, vers la beauté. La magnificence asiatique, le luxe monstrueux des Hindous, la monumentale exagération de l'Egypte, s'harmonient, se modèrent et se régularisent. Dans la conduite de la vie active, comme dans la science et les arts, une vive clarté de perception guide les héros, les orateurs et les poètes de la Grèce antique.

Cette prépondérance de la forme physique et de la beauté extérieure, firent naître des mœurs nues sans être austères ; les dieux grecs, actifs, héroïques, aventureux, ont manqué du type idéal de la vertu. La Grèce devait à l'Asie, sinon l'esclavage, au moins la réclusion des femmes. Les Etaïres (1), prêtresses de la beauté et de la grâce, avaient rang près de la matrone et de la vierge. La constitution démocratique, nourrissant les émotions de partis, armant les citoyens contre les citoyens, donnant aux passions politiques une puissance exagérée, acheva d'isoler les femmes dont l'avilissement produisit un genre d'immoralité spéciale, une dépravation fatale dont la trace se retrouve trop souvent chez Aristophane, et même chez Platon.

S VIII.

Polythéisme romain.

L'originalité réelle n'est le partage d'aucune race;

c'est

(1) V. plus bas, Les Étaïres grecques.

« PoprzedniaDalej »