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ment de résistance héroïque; la véritable source du gễnie de Corneille était le catholicisme de l'Espagne. Les Italiens, les Portugais, les Espagnols, les Provençaux, lés Français de l'Occident, quoique imprégnés de l'ancienne civilisation romaine, ont cédé à la civilisation biblique, et leur littérature offre un curieux compromis entre ces deux influences. Les peuples du nord, à peine romains avant le moyen-âge, à peine ébauchés lorsque la civilisation chrétienne s'empara d'eux, se sont livrés encore plus entièrement à l'éducation de la Bible: ils l'ont fait passer dans leur propre langue, et de presque toutes ses paroles ils ont fait des lois et des proverbes.

ble

En Allemagne et en Angleterre tout le monde sait la Bi

par cœur; et vous êtes étonné d'entendre dans la conversation journalière, au Parlement, au théâtre, une foule d'allusions bibliques que vous auriez cru mortes avec Cromwell ou avec les anabaptistes de Munster. Je ne parle pas des travaux sans fin que l'érudition allemande et hollandaise, bénédictine et franciscaine, a consacrés à la Bible; des recherches infinies tentées par les savants sur la géographie, l'histoire, la philosophie, la philologie bibliques. Les titres seuls de ces ouvrages rempliraient un volume.

S II.

La Bible, considérée comme monument historique.

Supposez que la Bible ne fût pas connue de l'Europe, que ce ne fût pas la première pierre d'attente et la clé de voûte de toutes nos religions; la première base de tous nos codes chrétiens : qu'un orientaliste la découvrit, qu'il

la traduisît, l'expliquât, la commentât, comme AnquetilDuperron a commenté le Zend-Avesta ; —que ce tableau si grandiose et plus qu'homérique vînt à se développer toutà-coup devant nous; Moïse, l'Egypte antique, les vieilles monarchies asiatiques, le Tabernacle saint, et la marche dans le désert, et les Machabées, et les Prophètes; cette épopée, ces annales, code de lois, manuel théurgique, le vieux monde, la primitive civilisation dans un seul livre! Certes, les savants pousseraient un long cri d'étonnement et de joie.

Et quelle civilisation! la première qui, du fond de l'Asie idolâtre ait proclamé l'unité de Dieu! Une civilisation née dans le désert, pleine de barbarie, et dont l'énergie ardente embrassait à la fois et contenait dans son sein la puissance de la démocratie, celle de la vie guerrière, la grandeur du patriarchat, l'élévation de la théocratie, et l'élan de la vie nomade civilisation destinée à durer peu, et à laisser une trace ineffaçable. Elle a roulé comme la lave dans un sillon que les âges ne combleront pas. Longtemps ignorée, elle n'a influé en rien sur le développement hellénique; mais après dix siècles elle a reparu avec le Christ; elle a jailli de nouveau et rempli le lit que laissait vide et désert la société païenne disparue; elle est revenue modifier nos mœurs modernes.

La Bible représente toute cette civilisation; la Bible, que je ne veux considérer que sous son point de vue purement humain. C'est un livre plus historique que Thucydide et Hérodote, parce qu'il offre un miroir plus complet non seulement des événements, mais des mœurs, des préjugés, des lois, des crimes et des rites nationaux. La raillerie semble impossible, auprès de ce monument de granit, étranger à toute la société grecque et romaine, et qui reste

seul debout dans le désert du passé asiatique, dans la nuit de l'antiquité orientale.

Je ne vois pas, en effet, de pierre milliaire plus importante dans les annales de la civilisation que l'histoire du peuple hébraïque. La promulgation de la loi sur le mont Sinaï est le premier chaînon auquel se rattachent toutes les lois et toutes les sociétés organisées par le christianisme. Avec Moïse, la vie sauvage finit en Orient. Pour la première fois, une assemblée d'hommes prête l'oreille à une grande vérité philosophique, exprimée sans mystère et sans voile. Le panthéisme, qui doit régner sur tant de siècles et de nations, reçoit d'avance le coup mortel qui l'étendra mort. L'existence d'un Dieu sans forme, sans commencement, sans fin, non limité dans l'espace, est annoncée au peuple du globe le plus matérialiste, le plus obstiné, le plus sensuel : cet éclair inattendu sillonne l'obscurité et élève la Judée barbare au-dessus de l'Egypte savante. Jusqu'à l'époque dont nous parlons, ce mot puissant, unité de Dieu, a bien pu être prononcé à voix basse; alors seulement il éclate dans sa majesté, dans sa moralité.

Jamais, avant Moïse, on ne l'avait dit, à ciel découvert, devant une nation, devant une armée fanatique Aussi voyez; cette révélation se fait à coups de tonnerre.

A ce principe immense, Moïse rattache toutes les exigences de la conscience, tous les scrupules de la vie morale, tous les actes du culte, tous les ressorts du gouvernement. Imparfaite à nos yeux, moulée sur les besoins et les idées de ces hordes âpres, tenaces et sanguinaires, la législation fondée par Moïse sur l'unité de Jéhovah constitue à elle seule la plus grande révolution des temps anciens. Vous que les destinées humaines intéressent, lisez donc la Bible, et lisez-la telle qu'elle a été écrite autrefois; scul

ptée dans le roc ou gravée dans le bronze, en caractères profonds, et durs comme le peuple juif; vous y connaîtrez cette mission Mosaïque, si mal jugée par la frivolité. Quand le globe était peuplé de sauvages et d'anthropophages, d'hommes qui adoraient le bœuf de leur étable et les fruits de leurs jardins; quand l'idolâtrie la plus grossière couvrait le monde, il y a trente-deux siè cles de cela, il sortit d'un horrible désert, un de ces hommes qui changent le monde moral et les nations. L'instrument de son œuvre fut un peuple barbare, puissant par l'obstination et l'audace; il l'asservit à cette loi religieuse du Pentateuque, loi qui, en fondant la loi chrétienne, a préparé nos annales. Cet homme était Moïse. La seule trace qui reste de lui et de son armée, c'est la Bible.

S III.

De l'Exégèse et des traductions de la Bible.

La critique sacrée, ou l'Exégèse biblique, a quelque chose de colossal et d'énorme; mysticisme, elle se perd dans les profondeurs de l'inconnu; grammaire, elle descend aux minuties infinies et subtiles de l'étude des mots; elle pèse une virgule, commente un accent, calcule le nombre des syllabes; elle n'a pas de bornes. Pour elle tout est divin et infini. Les luttes acharnées des controversistes ont épaissi les nuages qui flottent sur ce sanctuaire.

Avez-vous jamais mis le pied dans une bibliothèque monacale? Avez-vous ouvert un de ces volumes sans nombre, écrits dans tous les langages, non pas de l'Europe, mais du monde civilisé? Le calviniste et le socinien, le jacobin et le cordelier, le jésuite et l'augustinien, ont des explications diverses pour chaque passage biblique. Corporations rivales, écoles de philosophie, intérêts de nations, différences de dialecte, redoublent l'obscurité. On ferait un excellent livre intitulé les Destinées de la Bible. Quelles difficultés se présenteraient à l'auteur; Difficultés historiques, métaphysiques, grammaticales, palæographiques! A peine quelques rares manuscrits viennent-ils en aide à l'hébraïsant; ces manuscrits, on les thésaurise. Ce n'est point assez de connaître l'hébreu moderne avec les points, postérieurs au neuvième siècle; il faut savoir l'hébreu ancien, écrit sans points, c'est-àdire sans voyelles. Il faut comparer mille versions, en arabe, en syriaque, en cophte, en grec, en grec hellénistique, en chaldéen, en latin barbare, en saxon, en gothique, en persan. Voici les rêveries contradictoires de la kabbala; le thalmud, la massore; rabbins, pères grecs et latins, commentateurs redoublant le chaos et aggravant la dissonance; telle censure de l'Église opposée à telle approbation d'un concile; le sens littéral; le sens mystique; le sens théologique ou latitudinaire; les jugements d'un pape comme individu; ceux d'un autre pontife, comme inspiré du Très-Haut et représentant Jésus-Christ; les variations de la tradition; les obscurités de cette tradition; les altérations des manuscrits et les traductions fautives ou équivoques... L'imagination effrayée, recule.

Au lieu de considérer la Bible sous le point de vue con

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