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qu'au XVe et XVI° siècles. Les Amadis n'en sont que le reflet lointain. Le Boyardo, le Pulci, l'Arioste, finirent par les tourner en raillerie; le Don Quichotte de Cervantes leur porta le coup mortel.

Les seuls poèmes vraiment chevaleresques sont les poèmes de la Table-Ronde, où se développent les premiers essais de galanterie. Un platonisme singulier s'y mêle aux idées chrétiennes, aux aventures germaniques, aux merveilles de l'Orient mystique et aux souvenirs des bardes pays de Galles. Le Titurel de Wolfram d'Eschenbach est peut-être le plus remarquable produit de cette combinaison du platonisme chrétien avec les mœurs dures et fortes des Germains et des Normands.

du

Du génie septentrional, transformé en génie chevaleresque et modifié par le conctact de l'Occident avec l'Orient, émanèrent donc une poésie originale, un art original, une littérature chrétienne, septentrionale, encore mal élaborée, et qui suivit une route différente, selon le génie de diverses nations. L'action des études romaines ne cessa point de dominer l'Italie et la France. Le souvenir toujours impérieux d'Aristote et de Platon, celui des subtilités byzantines et des discussions théologiques, éternisées par le génie grec et mises en œuvre par le génie de l'Occident, créèrent la scholastique. Rome, toujours politique et savante dans la gestion de ses intérêts matériels, ramena vers elle toute la chrétienté, dont elle devint le tribunal permanent; les arts chrétiens eurent pour capitale sacrée, pour centre et pour sanctuaire l'antique Rome, qui accomplit ce que n'avait pu faire le christianisme primitif. Le catholicisme se rendit maître de toutes les sectes, en les balançant l'une par l'autre, en équilibrant la Gnose des théosophes, l'inspiration des mystiques, la réalité des Ébionites,

l'idéalité des Docètes, l'ascétisme des uns et la foi pratique des autres. Ce travail fut achevé par la philosophie théologique du moyen-âge, labyrinthe immense, dans les détours duquel de fortes intelligences se plongèrent et se perdirent avec bonheur.

Les monuments les plus précieux du moyen-âge sont les monuments théologiques et poétiques. En première ligne se montre l'Edda scandinave; puis les Nibelungen germaniques, « les Enfants de la Nuit, » Iliade du Nord, « pleine de » sang et de vie, de grandeur et de meurtre, de noces et » de cadavres, » comme dit le chantre antique. Le poète ou les poètes qui ont retravaillé cette tradition scandinave, d'après les mœurs allemandes, nous montrent des héros de fer, des cœurs de bronze, des caractères indiqués d'un mot. Tout est dur, colossal et à vives arêtes; c'est le Nord lui-même. Le poème espagnol sur le Cid vient ensuite; véritable épopée, d'un intérêt bien plus puissant, parce qu'elle suit la réalité historique. Enfin, il ne faut pas oublier les poèmes chevaleresques français, narrations brillantes, variées, surtout ingénieuses.

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L'Arabie, qui ne possédait autrefois, comme nous l'avons dit plus haut, que des chants lyriques dictés par l'orgueil, l'amour et la haine, se complut aux féeries de la Perse, qui elle-même les avait empruntées aux Indiens. Sur

ce modèle furent composées les Mille et une Nuits, chefd'œuvre de l'imagination orientale. La doctrine mahométane, qui emprisonnait la poésie et l'art dans le Koran, amas de la magie, du sabéisme, du gnosticisme et du manichéisme, fragments réunis sans ordre, non sans génie, par une main puissante, repoussa les jeux de l'esprit persan; et tandis que les Ottomans se renfermaient dans le cercle étroit où leur prophète les parquait, le génie plus libre des Arabes se joua dans ces belles et naïves fictions, délices du monde entier, magnifiques et merveilleuses comme le ciel et les fleurs d'Orient les Mille et une Nuits.

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Un siècle et demi s'était écoulé depuis l'hégire, quand la famille des Abassides, en montant sur le trône des khalifes, y porta l'amour des arts et des lettres. Tout-à-coup la civilisation arabe, jusqu'alors endormie, prit un essor inattendu et rapide, et jeta une lueur plus impétueuse que durable, qui projeta sur l'Europe une teinte très-prononcée. Aaroun - Al-Raschid et Al- Mamoun firent de Bagdad la capitale des lettres; leur cour se composa de poètes et de philosophes; les chameaux chargés de livres grecs et persans couvraient les routes qui conduisaient à Bagdad et à Bassora. L'Espagne, conquise par les Arabes, se peupla d'académiciens et de savants. Les caprices de l'architecture mauresque s'élevèrent sur le sol espagnol et dessinèrent sur l'azur du ciel la diversité pittoresque de leurs feuillages taillés dans la pierre. L'étude de la grammaire, de la poésie, de l'éloquence fleurirent à Cordoue, à Grenade, à Séville. L'Orient et l'Occident, confondant leurs goûts dans cette région mitoyenne, firent naître une chevalerie musulmane, un christianisme mêlé d'enthousiasme arabe. Du Ixe au XIIe siècle, le génie subtil et éblouissant des Arabes éclata et s'évanouit. Dans cette

foule de poèmes arabes, dont la liste, conservée à l'Escurial, remplit vingt-quatre volumes, on cherche en vain un poème épique, une comédie, une tragédie : le goût national n'a pas changé; il est resté lyrique et enthousiaste comme au désert.

L'Europe, jusqu'à nos jours, ne connaît que des fragments de peu d'importance de ces grands historiens arabes, dont les orientalistes vantent la simplicité et la sublimité. Leurs philosophes, Averrhoes, entre autres, et Avicene, nous sont plus familiers. Ils n'ont pas été sans influence sur la scholastique et sur la philosophie. Plus ingénieux que profonds, plus subtils que logiques, plus enthousiastes que hardis, ils embrassèrent le culte d'Aristote, et épuisérent à le commenter les forces de leur génie. Dans les sciences naturelles, dont nous ne nous occupons pas ici, ils se montrèrent inventeurs. Ce furent eux qui ouvrirent la route à la chimie et à la physique. Les arts de l'industrie, qui rendent la vie facile et douce, leur doivent beaucoup de découvertes qui attestent la fécondité ingénieuse de leurs esprits. Longtemps avant nous ils se servaient de la poudre à canon et du papier.

Les Persans, dont l'activité intellectuelle avait toujours été contraire au monothéisme de Mahomet, s'écartèrent bien plus que les Arabes de la lettre de sa loi. La Perse conserva d'antiques fictions qui racontaient le combat de la lumière et des ténèbres; elle produisit les poésies religieuses des Soufis qui unirent l'accent de la passion sensuelle à la dévotion la plus exaltée, la double extase de l'âme et des sens.

S XIV.

Les slaves au moyen-âge.

La famille des Slaves, qui comprend la Pologne et la Russie, et qui possède un caractère spécial, compte au nombre de ses idiomes (sans parler du vieux slavon, langue des écritures saintes), le russe, l'illirien, le croate, la langue de la Carinthie et de la Carniole, le bohême, les dialectes de la Haute et de la Basse-Lusace, le polonais, le silésien et le slovaque.

La muse slave, malgré une inspiration naïve, un sentiment de la nature qui ne manque ni de grâce ni de fraîcheur, tient peu de place dans l'histoire intellectuelle. Innocente et gracieuse, elle est privée de force et de variété ; les peuples qui l'ont cultivée, ont été privés d'une nationalité capable de concentrer sous la forme poétique toutes les traditions de leur race.

Les vieilles poésies populaires des Russes joignent la gaîté et la féérie; un mélange de données scandinaves et de souvenirs tartares s'y fait sentir; les Bohêmes possèdent une antique poésie remarquable par l'héroïsme mélancolique. Chez le Serbe, plus méridional, un accent tendre et fier s'allie à une verve plus féconde; l'hymne du pasteur indépendant retentit sur sa Guzlé, instrument à une seule corde. Dans les fragments épiques serbes, l'inspiration pastorale prête à la nature la flamme et la vie poétiques ; les colombes parlent, les coursiers écoutent, les fleuves gémissent, les villes

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