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qu'ils soient à jamais honnis et méprisés par tout jeune homme studieux ou laborieux qui sent un cœur battre dans sa poitrine et l'intelligence remuer son esprit, car comme le dit un livre chrétien: "leur parole n'est qu'un vain son qui "frappe l'air et ne nous touche pas."

Puisque la jeunesse canadienne-française est abandonnée à elle-même; puisqu'elle n'a aucun secours, aucun appui à attendre du gouvernement et de ses indolents concitoyens ; puisque seule elle doit se forger des armes pour défendre, dans quelques années, les intérêts du Canada-français dans les combats constitutionnels que se livreront les partis politiques; puisque seule elle doit se préparer à lutter contre l'industrie et le commerce étrangers; que par l'étude, le travail, les sacrifices, la volonté, l'énergie, le courage, la persévérance, l'union et l'encouragement mutuel, elle se montre digne de l'appui qu'on lui refuse, et capable de suppléer en quelque sorte, par son zèle et son intelligence, aux institutions qui lui manquent et à l'encouragement qu'elle ne reçoit pas.

Ce qu'elle a déjà fait pour le pays et pour la nationalité est une preuve qu'elle peut faire beaucoup quand elle le veut. Et si elle a foi en sa force, si elle se pénètre bien de l'esprit d'association, si elle ne forme qu'un faisceau, et qu'elle marche unanimement dans la même voie, elle changera bientôt sa position, elle culbutera les obstacles, et après avoir battn en brêche la forteresse des préjugés et des griefs, elle arborera sur ses ruines le drapeau national triomphant.

Sir Robert Peel disait un jour à la jeunesse écossaise, et en terminant je le répète avec lui à tous les jeunes Canadiens: "Ne vous effrayez pas des difficultés; mais combat"tez-les et affrontez-les: il n'y a que la première victoire " qui coûte, et un premier succès est toujours garant d'un "second."

J. HUSTON.

1847.

LA FEMME.

Et la femme est si belle et si douce en ses mœurs,
Source de pureté qui nous donne la vie,

Un ange sur la terre à qui Dieu nous confie
Pour faire notre joie et nous rendre meilleurs.

Tu la vois à genoux, auprès de ton berceau,
Lever les yeux au ciel, enfant elle est ta mère ;
Ses larmes, ses soupirs t'éloignent du tombeau;
Dieu prolongeant tes jours exauce sa prière.

Et toi tu te fais homme et sur ton noble front
Rayonne la fierté, l'amour de la patrie.
Au faîte des honneurs on proclame ton nom.
Combien tu dois de soins à ta mère chérie.

Au milieu des plaisirs que t'offre le hasard,
Tu vois encore ta sœur, riante jeune fille,
Enlacée à ton bras, demander ton regard,
Sa beauté plait à tous, son innocence brille.

Vierge tendre et naïve, elle veut ton amour,
Ton amour fraternel qui remplit sa pensée,
Et t'offre sa candeur qui te paie au retour,
Limpide et vivifiante ainsi que la rosée.

Mais la plus sainte chose est l'épouse que Dieu
Te remet à l'autel, entre toutes choisie,

Son pur tressaillement t'anime d'un doux feu.
Tu goutes le bonheur, jouis de sa poésie.

Homme, ô! tu dois l'aimer, tu sais son dévouement,
L'éclat de ses attraits charme ton existence,

Tombe donc à ses pieds et fais-lui le serment
Qu'à son âme soumis elle aura ta constance.

Et toi devenu père, au jour de ton désir,
Qui connais ton devoir en ce moment d'ivresse,
Tu promets au Seigneur d'oublier le plaisir
Pour ceindre ton enfant d'une vive tendresse.

Ah! sème sur ses pas les plus brillantes fleurs,
Orne-la de vertus, épanche le calice

Qui donne tant de joie et remplit de douceurs

La vierge en son printemps pour qu'elle ne périsse.

Car la femme est si belle et si douce en ses mœurs,
Source de pureté qui nous donne la vie,

Un ange sur la terre à qui Dieu nous confie
Pour faire notre joie et nous rendre meilleurs.

CHS. LEVESQUE.

1847.

L'IVROGNE.

C'était un samedi soir, la pluie tombait par torrents... Une femme à haute taille était assise dans une pauvre maison, sur la seule chaise qui restait. Malgré sa maigreur extrême et les traces que la misère et le chagrin avaient empreintes sur sa figure, on reconnaissait encore en elle les vestiges d'une femme aussi belle qu'aimable. Elle chantait à demi-voix, sur un ton doux et plaintif, comme pour calmer les douleurs d'un petit enfant malade dont les cris déchiraient le cœur; à côté d'elle, on voyait une petite fille assise sur le plancher, et dont le regard douloureusement fixé sur sa mère, semblait demander quelque chose. Et la pauvre mère, navrée de douleur, cherchait à sourire à son enfant. Pour cacher les larmes qui roulaient sur ses joues, elle disait à voix basse: "Ma chère enfant, il va bientôt arriver, et "alors ma bonne petite fille aura à souper..."

Un instant après, la porte s'ouvrait pour laisser entrer un enfant dont la bonne mine et la beauté se faisaient jour à travers les haillons dont il était couvert. "Ils n'ont rien "voulu m'avancer, ma chère maman, dit-il avec un ton de 66 désespoir. Ils disent que mon père ne fait que boire, et qu'ils courent risque de ne pas être payés pour ce qu'ils nous ont déjà donné..." Le pauvre enfant, étouffé dans les sanglots, ne put en dire plus long. La malheureuse

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femme reste quelques moments muette de douleur. Enfin reprenant quelque force: "Eh bien! Edouard, qu'allons"nous devenir...? c'est demain dimanche, et nous allons "certainement mourir de faim, à moins que tu n'ailles de "nouveau... (elle n'osait prononcer le mot) chez ton oncle, pour lui demander quelques chelins. Il me semble que, "si tu lui fais connaître l'affreuse misère à laquelle nous sommes réduits, il ne pourra nous refuser..." L'enfant veut en vain cacher la peine que lui cause la proposition de sa mère; ses joues si pâles se teignent tout d'un coup d'un rouge écarlate par la violence qu'il se fait, son bon œil si doux brille d'un éclat inaccoutumé.-" Oh! ma mère, "s'écrie-t-il, que me demandez-vous?... Non, jamais, ja"mais... j'aime mieux mille fois souffrir les horreurs de la "faim... j'aime mieux quêter... j'aime mieux mourir... Oh!

ma mère, je vous en conjure, ne me commandez pas "d'aller chez mon oncle..." Et en proconçant ces paroles, il se cachait le visage entre ses mains, qu'il tenait appuyées sur la table.

Il s'en suivit un long silence, qui ne fut interrompu que par la petite fille: "Maman, dit-elle, vous m'aviez promis "de me donner à souper, lorsque Edouard serait de retour; "je vous en prie, j'ai faim, donnez-moi donc un petit mor"ceau de pain... Vous ai-je donc fait de la peine, chère "petite maman, pour que vous ne m'ayez rien donné à manger aujourd'hui ? je n'en puis plus... Mais pourquoi "donc pleurez-vous ?" La mère, pressant cette chère petite, ne put lui répondre que par ses sanglots... En ce moment, Edouard levait la tête de dessus la table; son visage était revenu à sa paleur naturelle, et cet air de vivacité qu'il avait un instant auparavant, avait fait place à l'abattement; il s'avance vers sa mère, passe ses bras autour de son cou, et l'embrasse avec toute l'effusion d'un bon cœur. "Chère et tendre mère, lui dit-il, pardonnez-moi, "je vous en prie... je ne savais ce que je disais... Oh! "je vous en conjure, ne me faites pas mourir avec ces

"larmes que vous versez et qui me reprochent le malheur

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que j'ai eu d'augmenter vos chagrins par ma désobéis(6 sance. Je pars tout de suite... Après tout, il ne peut toujours me traiter plus dûrement qu'il l'a fait l'autre "jour... Ma mère, ma chère mère, prenez un peu de courage, je vous en conjure; priez pour moi, je vais vous "chercher du pain..."

-"Edouard, répliqua la mère éplorée, en le pressant "contre son cœur, mon Edouard, ce serait avec joie que je "ferais le sacrifice de ma vie, pour exempter la moindre 66 peine à un enfant qui m'a toujours été aussi bon et aussi "soumis que toi, mon cher; tu sais que ce n'est pas pour "moi que je te prie de faire une démarche dont la seule

pensée m'accable autant que toi... mais (en lui montrant

ses petites sœurs,) c'est pour leur amour que tu vas "m'obliger, et que tu vas, encore cette fois, montrer ton "bon cœur pour ta mère."

Un instant après, elle était seule, à genoux, et priait en tenant dans ses bras ses enfants qu'elle arrosait de larmes. Il est impossible de dire combien les instants qui s'écoulaient paraissaient longs à cette mère dont le cœur était à la fois brisé par tant de douleurs... Bien des fois, elle se leva, et ouvrant la porte, elle regardait; mais elle ne voyait que les ténèbres d'une nuit dont l'obscurité était encore augmentée par l'orage qui grondait. Elle prêtait l'oreille au moindre bruit qu'elle croyait entendre... Enfin elle reconnut les pas de l'enfant si cher à son cœur. Il rentre, et cette fois-ci il apportait quelque nourriture. Mais il ne conta pas à sa mère avec quel mépris il avait été repoussé de bien des portes, quelles insultes il lui avait fallu recevoir partout. Il ne lui dit pas dans combien d'endroits on lui avait dit que ça ne convenait pas de donner du pain, qu'on avait tant de peine à gagner, pour nourrir un ivrogne avec ses paresseux d'enfants; il ne lui dit pas quels affronts il avait reçus pour son amour; et combien de fois il avait été forcé de se jeter aux genoux de ceux qui le repoussaient,

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