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Que malgré cette amitié tendre
Que j'ai pour des hôtes fi doux :
Je ne fai plus comment m'y prendre,
Pour les pouvoir contenir tous,

Il n'est pas hors de propos de remarquer ici, que cette Ode d'Anacreon fit naître à LYSIS l'idée du commencement d'un Billet doux qu'il écrivit à la belle CHARITE. On trouve ce Billet à la page 289. du 4. Livre de fon Hiftoire. LYSIS y badine fur le double sens du mot Poulet, qui fignifie quelquefois un jeune Coq, & quelquefois un Billet doux. Il déguise la penfée d'Anacreon, & la tourne ainfi felon fes vûës.

Billet de LYSIS à la belle CHARITE.

Depuis que l'Amour, qui eft un des plus légers Oiseaux du monde, eft venu faire fon nid dedans mon fein, il s'eft trouvé fi gros de germe, qu'il a fallu que je l'y aye laissé pondre. Il ini est forti un œuf du ventre qu'il a couvé long-temps, & à la fin il en a fait éclove ce petit Poulet que je vous envoye. Il ne vous contera guéres à élever : il ne faut rien des careffes pour le nourrir que & des baifers. Il eft fi bien inftruit qu'il parle mieux que ne fauroit faire un

Perroquet,

Perroquet, & vous apprendrez aussibien de lui que de moi-même les que je fouffre pour vous, &c.

peines

Voilà ce que c'est que de favoir imiter les Anciens. Quelle agréable idée l'Ode d'Anacreon n'a-t-elle pas fait naître à LYSIS? L'on voit par-là que les Anciens ne font pas feulement la fource du bon & du beau, mais auffi de l'agréable; & qu'à tous égards on doit fuivre ce précepte d'Horace :

Vos exemplaria Graca

Nocturna verfate manu, verfate diurna.

Feuilletez nuit & jour les Auteurs Grecs.

NB. les Auteurs Grecs, dit Horace, car fi on ne fait qu'en lire des imitations ou des copies, on ne parvient jamais à cette beauté qui doit être puifée dans la fource même. Les Livres Modernes fourniffent mille preuves de cette vérité, & je n'en appor terois point d'exemple, s'il ne s'en préfentoit un à ma mémoire extrêmement analogue avec le Billet de LYSIS; & par conféquent, quoiqu'un peu de loin, analogue auffi avec l'Ode d'Anacreon. Ce font des Vers qu'une Demoiselle Françoise ajoûta à la fin d'un C 2

Billet

St. Auguftin.

Billet qu'elle écrivoit à un Miniftre du
St. Evangile de la Haye, où elle est
refugiée. Elle croyoit badiner comme
SAPHO, OU comme ASPASIE;
elle fe trompa.
fi je ne me trompe,
Voici ces Vers.

Ne prenez pas ce Billet
Pour être un petit poulet :
Je fuis la poule qui l'a fait,
Et cela vous doit fuffire.
Vous favez bien en un mot
Que je ne puis vous en écrire,
Car vous n'êtes pas mon cocq.

mais

On ne peut pas nier que cela ne foit très-ingénieux & délicat ; cependant il faut avouer que ce n'est point encore cette mignardife Grecque, dont cette Demoifelle, quoiqu'elle ait beaucoup d'efprit, n'a vu que des Copies.

XVIII. Toute la nuit. ] Je trouve ici deux chofes à remarquer. La premiere queCOLIN veut la nuit. La feconde qu'il la veut toute. D'où l'on peut juger que cet Amant réunit en lui deux chofes prefque incompatibles, la raison & l'amour. Si l'amour, felon la définition qu'en donne un Pere d'Afrique, eft le défir de s'unir à l'objet qu'on aime; il est naturel de ne vouloir perdre au

cun

cun des momens qu'on peut employer à cette union. Si le jour nous eft donné pour vaquer aux affaires & au travail, il eft raisonnable de ne le pas perdre entre les bras d'une Maîtreffe. Ainfi pour s'unir à ce qu'il aime, l'Amant raisonnable doit fouhaiter de n'employer que la nuit; mais il doit fouhaiter de l'employer toute entiere..

Une difficulté fe préfente naturellement fur ce fujet ; c'eft de favoir quelle étendue on doit donner à cette nuit. Si l'on doit, par exemple, fixer fon commencement au moment que le Soleil paffe fous l'autre Hemisphére, & fa fin lorfqu'il reparoît avec l'Aurore. Je ne doute point que les fentimens ne foient partagez fur cette difficulté. Lės uns voudront fans doute que la nuit ne commence qu'à dix heures du foir, & tireront leurs preuves de la coûtume de fe mettre au lit environ cette heure-là, D'autres, dont la pratique eft oppofée à cette coûtume, prétendront qu'on ne doit déterminer le commencement de la nuit qu'environ une heure après les douze heures du foir. D'autres fondez fur ce que ces douze heures s'appellent minuit, diront qu'il faut compter les heures qui fuivent depuis minuit jus C 3 qu'au

qu'au lever du Soleil, & qu'un nombre égal d'heures pris de celles qui auront précédé minuit, étant ajoûté à celles qui ont fuivi jufqu'au lever du Soleil, fera la nuit toute entiere. Mais bien que cela faffe la nuit toute entiere, & que ceux qui le foûtiendront ne foient point d'un fentiment différent de celui que nous avons rapporté d'abord ; on dira qu'il n'eft pas poffible de déterminer ainfi la nuit en queftion, vû la différence des nuits felon les divers Climats & les différentes Saifons. Pour moi, fans entrer plus avant dans la difcuffion de toutes les difficultez qu'on peut faire fur ce fujet, je dirai fimplement que cette nuit doit commencer dès qu'après avoir légérement foupé, la commodité permet qu'on la commence, & j'ofe me flater que tous ceux qui en auront paffé de cette efpece feront de mon fentiment. Qu'on me pardonne cette digreffion, l'importance de la matiére m'y a infenfiblement engagé.

Si cependant l'on trouve que je n'ai pas déterminé cette nuit avec affez de précifion, je veux bien m'en rapporter au R. P. Bonjour, lui qui par fes fupputations admirables a fait voir que le monde a été achevé le 21. d'Avril

&

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