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AU LECTEUR

Lorsque les lettres de « Paul, Apôtre de Jésus-Christ », paraissaient dans les Eglises auxquelles elles étaient destinées, à Thessalonique, à Ephèse, à Corinthe, à Rome, les fidèles les recevaient avec une avidité respectueuse, ils les lisaient en public, ils les commentaient, ils les transcrivaient, ils les passaient aux communautés voisines, ils les traduisaient aussi sans doute, ils essayaient d'en faire la règle de leur vie.

L'intérêt alors inspiré par ces écrits immortels n'a depuis jamais cessé. Et à mesure que, dans la suite des temps, les groupements chrétiens se sont multipliés, bien loin des comités de l'ancien monde gréco-ronain, les Épitres de l'Apôtre des Nations les ont suivis, sans paraître, presque, rien perdre de leur actualité première. Car, si ces écrits ont été provoqués par des incidents passagers se rattachant à la prédication de la religion chrétienne dans un monde juif ou païen, les principes qui règlent ces discussions sont de tous les temps, et il est vraiment intéressant de voir à quel point restent actuelles et pratiques, pour les missionnaires contemporains, ces circulaires du premier et du plus grand des missionnaires catholiques.

A quoi encore tient ce succès?

Sans doute, les Épitres de saint Paul occupent une place à part dans le fond doctrinal du Christianisme; elles exposent, éclaircissent, discutent et tranchent définitivement nombre de questions essentielles, et la théologie y recourra toujours comme à une source d'inépuisable richesse. Mais ce qui donne à ces écrits leur caractère et leur charme, c'est qu'on y retrouve, mieux

qu'ailleurs, une personnalité vivante, un tempérament, un homme: un homme, avec son entrain, sa fougue, son génie, son activité inlassable, son indomptable énergie, son abnégation, ses touchants retours sur lui-même, son humilité, son magnifique amour des âmes, sa tendresse pour ses collaborateurs, sa sincérité profonde, son absolu dévouement à sa vocation pour le compte du Maitre qui le terrassa sur le chemin de Damas.

Les Actes ne donnent pas une idée complète du caractère de l'Apôtre. « On imaginerait en lui, à lire le seul récit de saint Luc, une nature puissante, énergique, capable de rompre et de dompter, mais sans grâce ni tendresse ; les Épîtres achèvent l'ébauche et nous montrent, mêlées à cette force de volonté, les qualités de cœur et d'âme qui rendent aimable. C'est par là que saint Paul se distingue des hommes qui, comme lui, ont mené le monde. L'orgueil et l'égoïsme sont habituels à ces dominateurs, leur personnalite écrasant ou absorbant tout. De tels génies peuvent subjuguer pour un temps, forcer l'obéissance, l'admiration; ils ne se font point aimer. Les Épitres de saint Paul nous le montreront d'une grandeur tout autre: l'égal des plus puissants par l'aspect, la vigueur de l'action, la maîtrise des âmés; mais, en même temps, homme comme nous, aussi attachant par l'infirmité que par les générosités de sa nature. Avec la même loyauté qu'il nous découvrira les élans de son cœur, sa charité embrassant le monde et se donnant à tous, il ne cachera rien de ses misères, des disgráces physiques qui mêlent à sa fierté native une touchante humilité. C'est par lui que nous connaîtrons l'état constant de maladie qui rendait son âme compatissante, prompte aux larmes, à toutes les émotions; l'effroi qui le saisissait aux heures critiques; « l'aiguillon de la chair, l'ange de Satan qui « le souffletait ». II Cor. XII, 7. » (1).

Mais la lecture de ces lettres est difficile.

Emporté par son ardeur, sans aucun souci de littérature, quoique doué d'une éloquence naturelle et pleine de mouvement,

(1) Abbé C. Fouard, Saint Paul, ses Missions, XV.

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envahi par une foule de pensées qui se pressent dans son esprit comme pour sortir toutes à la fois, obligé d'ailleurs de créer une sorte de langue nouvelle la langue chrétienne —, écrivant,

ou plutôt, dictant en grec quoiqu'il fût hébreu de naissance et d'éducation, saint Paul nous déconcerte souvent par ses obscurités, ses tours embarrassés, chargés d'incidentes ou inachevés, ses argumentations, ses répétitions, ses citations, ses parenthèses, ses ellipses, ses allusions, ses incorrections, sa « phrase qui sent l'étranger ».

Aussi, a-t-on multiplié les commentaires, les paraphrases, les traductions, avec ou sans notes explicatives, de ces Épitres du grand Apôtre.

Voici un autre essai.

Après avoir professé l'Écriture Sainte pendant de longues années dans les Séminaires de Viviers et de Luçon, et constaté tout à la fois l'attrait qu'inspire partout Saint Paul et la difficulté qu'on a de suivre sa pensée, M. l'abbé P. Lanier, dans sa laborieuse retraite d'Issy, a voulu mettre les écrits de l'immortel Apôtre des Gentils à la portée de tous, par une traduction à la fois littérale et expliquée.

Ce double résultat est obtenu, d'abord, par une traduction nette et précise, faite directement sur le texte grec; mais le texte latin de la Vulgate est reproduit, à cause de l'usage courant qu'on a l'habitude d'en faire.

Puis, faisant corps avec le texte, et figurant entre crochets, un bref commentaire comble les lacunes, éclaire les passages obscurs, et réunit souvent en quelques mots la quintessence des travaux anciens et modernes les plus estimés.

Chaque Epitre a son introduction particulière. Outre les preuves d'authenticité, quand il y a lieu de les donner, on y trouve des notices historiques qui intéressent beaucoup les lecteurs : ce sont les pages les moins connues de l'Histoire primitive de l'Eglise. Elles ont l'avantage de mieux faire saisir l'importance et l'état des questions traitées.

Enfin, les Épitres sont placées dans le cadre historique de la

vie de l'Apôtre et selon l'ordre chronologique dans lequel elles ont été écrites.

Ainsi, la pensée de saint Paul se déroule tout au long de son apostolat, telle qu'elle est sortie de ses lèvres inspirées, depuis ses premières missions jusqu'aux prisons de Rome, sans être exposée à se trouver plus ou moins déformée sous l'interprétation de commentaires souvent très remarquables, mais, parfois aussi, très longs, plus ou moins diffus, ou même inutiles.

Si l'on veut avoir le sens exact d'un texte, soit pour la prédica tion, soit pour la controverse, on le trouvera donc là immédiatement, avec, s'il y a lieu, le bref commentaire qui l'explique en le complétant.

Mais ce travail sera surtout précieux à ceux qui feront de Saint Paul une lecture suivie et attentive:

Aux simples Chrétiens, désireux d'entrer en contact avec ce grand Chrétien, si sincère et si vaillant ;

Aux Séminaristes, heureux de se mettre à l'école de ce Direcrecteur incomparable, qui consacra dix années à l'étude, à la réflexion et à la prière (34-45), avant de se donner à la vie active ;

Aux Prêtres appelés au même ministère que ce vrai Prêtre de Jésus-Christ, tout vibrant de l'amour de Dieu et des âmes:

Aux Missionnaires enfin dispersés dans le monde infidèle et continuant, aux frontières de l'Église toujours militante, le travail commencé par ce premier des Missionnaires, qui, sous l'inspiration de l'Esprit-Saint, semble avoir écrit pour tous les pays et pour tous les ages.

C'est à eux surtout, aux Missionnaires catholiques, que, dans une pensée généreuse, M. Lanier a voulu dédier et offrir ces lettres de saint Paul. Au nom de tous ceux qui sauront profiter de son beau travail, qu'il soit félicité et remercié !

Paris, 2 octobre 1910.

ALEXANDRE LE ROY,
Evêque d'Alinda,

Supérieur général de la Congrégation du Saint-Esprit.

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