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Nos galans y voyoient double profit à faire, Leur bien premiérement; & puis le mal d'autrui. Bertrand dit à Raton: Frere, il faut aujourd'hui Que tu faffes un coup de maître.

Tire-moi ces marons: Si Dieu m'avoit fait naître Propre à tirer marons du feu,

Certes marons verroient beau jeù.
Auf-tôt fait que dit: Raton avec sa patte,
D'une maniere délicate,

Ecarte un peu la cendre, & retire les doigts,
Puis les reporte à plufieurs fois,

Tire un maron, puis deux, & puis trois en efcroque,

Et cependant Bertrand les croque.
Une fervante vient: adieu mes gens: Raton
N'étoit pas content, ce dit-on.

Auffi ne le font pas la plupart de ces Princes
Qui flattés d'un pareil emploi,

Vont s'échauder en des Provinces,
Pour le profit de quelque Roi.

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FABLE XVIII.

Le Milan & de Roffignol.
Après que le Milan, manifefte voleur,

Eut répandu l'alarme en tout le voisinage,
Et fait crier fur lui les enfans du village,
Un Roffignol tomba dans (es mains par malheur.
Le Héraut du Printemps lui demande la vie.
Auffi bien que manger en qui n'a que le fon?
Ecoutez plutôt ma chanfon;

Je vous raconterai Terée & fon envie.
• Qui, Terée? Eft-ce un mets propre pour les

Milans?

Non pas,
c'étoit un Roi, dont les feux violens
Me firent reffentir leur ardeur criminelle :
Je m'en vais vous en dire une chanson si belle
Qu'elle vous ravira : mon chant plaît à chacun,
Le Milan alors lui replique.

Vraiment nous voici bien, lorfque je fuis à jeun,
Tu me viens parler de musique.

J'en parle bien aux Rois. Quand un Roi te prendra,

Tu peux lui conter ces merveilles ;

Pour un Milan, il s'en rira;

Ventre affamé n'a point d'oreilles.

FABLE XIX.

Le Berger & fon Troupeau.
Quor toujours il me manquera

Quelqu'un de ce peuple imbécille!
Toujours le Loup m'en gobera!

J'aurai beau les compter; ils étoient plus de

mille,

Et m'ont laiffé ravir notre pauvre Robin,
Robin mouton, qui par la ville

Me fuivoit pour un peu de pain,

Et qui m'auroit suivi jusques au bout du monde.
Hélas de ma muferte il entendoit le fon :
Il me fentoit venir de cent pas à la ronde.
Ah le pauvre Robin mouton !

Quand Guillor eut fini cet oraison funebre ;
Et rendu de Robin la mémoire célebre,
Il harangua tout le troupeau,

Les chefs, la multitude, & jusqu'au moindre agneau ;

Les conjura de tenir ferme:

Cela feul fuffiroit pour écarter les Loups.
Foi de peuple d'honneur ils lui promirent tous,
De ne bouger non plus qu'un terme.
Nous voulons, dirent-ils, étouffer le glouton
Qui nous a pris Robin mouton,

Chacun en répond fur la tête.
Guillot les crut, & leur fit fête.
Cependant devant qu'il fût nuit,
Il arriva nouvel encombre.

Un Loup parut, tout le troupeau s'enfuit. Ce n'étoit pas un Loup, ce n'en étoit que l'ombre.

Harranguez de méchans foldats,
Ils promettront de faire rage;

Mais au moindre danger, adieu tout leur courage:
Votre exemple & vos cris ne les retiendront pas.

Fin du neuvième Livre.

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LIVRE DIXIEME.

FABLE PREMIERE.

Les deux Rats, le Renard & l'Euf.

DISCOURS

A MADAME DE LA SABLIERE.

TRIS,

RIS, je vous loûrois, il n'eft que trop aifé: Mais vous avez cent fois notre encens refufé, En cela peu femblable au refte des mortelles Qui veulent tous les jours des louanges nouvelles. Pas une ne s'endort à ce bruit fi flatteur.

Je ne les blâme point, je fouffre cette humeur ; Elle eft commune aux Dieux, aux Monarques, aux Belles.

Ce breuvage vanté par le Peuple rimeur,
Le Nectar que l'on fert au Maître du Tonnerre
Et dont nous enivrons tous les Dieux de la terre,
C'eft la louange, Iris: vous ne la goûtez point.

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