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fortune; (vous qui ne savez pas ce que sera le lendemain ! car qu'est-ce que votre vie? certes, elle est une vapeur qui paraît pour un peu de temps, mais qui disparaît ensuite ;) au lieu de dire: Si le Seigneur le veut et que nous soyons en vie, alors nous ferons telle ou telle chose. » La pensée de Jaques n'est évidemment pas que ces expressions de doute et de pieuse réserve dussent toujours être répétées, mot à mot; un tel langage aurait pu facilement dégénérer en vaine forme, et déjà la tendance générale de ces églises ne les portait que trop au formalisme. Mais nous trouvons ici une nouvelle confirmation de cette remarque que dans son style Jaques préfère toujours le particulier au général; dans le cas actuel, par exemple, au lieu de rappeler, d'une manière générale, que la vie terrestre est incertaine, et qu'elle ne dépend nullement de nous, il n'exprime cette pensée que dans son application spéciale à la circonstance dont il s'agit. De cette exhortation particulière, il passe à un blâme général et attaque de front cette confiance mensongère et charnelle dont il vient de condamner une des manifestations. « Mais au contraire vous vous enorgueillissez dans vos vanteries, tout orgueil de cette sorte est mauvais. » Jaques termine en rappelant à ses lecteurs qu'il ne suffit pas de reconnaître la vérité qu'il vient d'exposer, mais que l'essentiel est de l'avoir toujours présente à l'esprit et d'y conformer toute sa conduite: « Si donc quelqu'un sait faire le bien et ne le fait pas, il y a du péché en lui. » C'était mettre le doigt sur la plaie.

§ XV.

LES RICHESSES INIQUES.

(Chap. V,.1-6.)

1 A vous maintenant, riches! lamentez-vous et poussez des cris sur les malheurs qui vous attendent! 2 Votre trésor est pourri et vos habits sont devenus la proie des vers! 3 Votre or et votre argent sont rongés par la rouille, et leur rouille s'élèvera contre vous en témoignage et dévorera votre chair comme un feu; vous avez amassé un trésor pour les derniers jours! 4 Voici, le salaire des ouvriers qui ont moissonné vos champs, retenu par vous, crie, et les clameurs des moissonneurs sont parvenues aux oreilles du Seigneur des armées. 5 Vous vous êtes livrés aux plaisirs sur la terre et vous avez assouvi vos voluptés; vous vous êtes engraissés comme pour un jour de tuerie 1; 6 vous avez condamné le juste, vous avez été ses meurtriers, sans qu'il vous résistât.

Jaques s'adresse maintenant aux riches entièrement plongés dans les préoccupations et les poursuites mondaines. «A vous, leur dit-il, à vous, riches, lamentez-vous et poussez des cris! » Il désigne trois genres de richesses: les produits de la terre, les vêtements splendides, l'or et l'argent; tout cela, les riches l'amassent en vain. Leurs trésors, leur or, leur argent, dont ils ne font point d'usage, seront rongés par la rouille, et cela même sera un témoignage de leur culpabilité, puisque alors il apparaîtra à tous que les biens qu'ils devaient employer au service d'autrui, ils les ont laissé pourrir inutilement. Cette rouille dévore leur propre chair comme un feu, car la fragilité de leur existence et la vue du jugement

1 Mot à mot: « Vous avez engraissé vos cœurs »; cœurs dans le même sens que Luc XXI, 34. (N. du T.)

final qui les menace leur rappellent que les trésors qu'ils ont amassés et qui tombent en rouille, bien loin d'être durables, ne font que recouvrir un autre trésor terrible, celui de la condamnation divine1.

Jaques dépeint ensuite l'oppression cruelle que faisaient peser sur les chrétiens pauvres et chétifs ces mêmes personnes opulentes dont nous ne savons pas avec certitude si elles appartenaient ou non à l'église nouvelle. « Voici, le salaire des ouvriers qui ont moissonné vos champs, retenu par vous, crie, et les clameurs des moissonneurs sont parvenues aux oreilles du Seigneur des armées. Vous vous êtes livrés aux plaisirs sur la terre et vous avez assouvi vos voluptés; vous vous êtes engraissés comme pour un jour de tuerie; » c'est-à-dire : comme on engraisse le bétail avant de le mener à la tuerie, de même vous, en vous abandonnant sans réserve et en pleine sécurité à l'esclavage de vos passions et de vos jouissances charnelles, vous vous êtes comme préparés d'avance pour le jour du jugement qui s'approche: « Vous avez condamné le juste, vous avez été ses meurtriers, sans qu'il vous résistât. » La résignation pieuse du juste qui souffre est opposée à l'arrogance du riche qui le fait souffrir.

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S XVI.

LA PATIENCE.

(Chap. V, 7-11.)

7 Soyez donc patients, mes frères, jusqu'à la venue du Seigneur. Voici, le laboureur attend les précieux fruits de la terre; il patiente, à leur égard, jusqu'à ce qu'elle reçoive la pluie de la première saison et celle de la dernière. 8 Vous aussi, soyez patients, affermissez vos cœurs, car la venue du Seigneur est proche. 9 Ne murmurez point les uns contre les autres, mes frères, de peur que vous ne soyez jugés; voici, le juge se tient à la porte. 10 Prenez, mes frères, comme exemple de souffrance et de patience les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur. 11 Voici, nous estimons heureux ceux qui ont été patients; vous avez été instruits de la patience de Job et vous avez vu l'issue des voies du Seigneur; car le Seigneur est plein de compassion et miséri.. cordieux.

Jaques s'adresse maintenant à ses frères en la foi qui avaient à souffrir de si cruels traitements de la part des grands et des riches. Il les exhorte à supporter patiemment l'injustice et à attendre, dans un esprit de soumission, que le Seigneur lui-même paraisse pour délivrer les siens, rendre à chacun ce qui lui est dû et exercer le jugement universel. Il ne faut pas oublier que la fin de l'économie actuelle était alors considérée comme très prochaine; il était naturel qu'à l'époque apostolique on envisageât les choses ainsi; Jésus-Christ n'avait voulu donner sur ce moment final aucune indication précise; il avait dit que le Père seul s'était réservé de le déterminer et que nul ne le connaît, pas même le Fils (Marc XIII, 32). Cependant l'église primitive soupirait ardemment après l'avénement du Seigneur et ne regardait

toute l'économie chrétienne que comme une transition rapide vers la consommation de toutes choses. Comme un voyageur qui entrevoit dans le lointain le but de sa course et croit y toucher déjà, sans songer à toutes les sinuosités de la route qui lui reste à parcourir, ainsi l'église primitive, les yeux fixés sur le glorieux but de l'économie chrétienne, négligeait de mesurer la distance qui la séparait encore de cet entier accomplissement 1. C'est à ce point de vue que se place l'écrivain sacré : « Soyez donc patients, mes frères, jusqu'à la venue du Seigneur. Voici, le laboureur attend les précieux fruits de la terre; il patiente, à leur égard, jusqu'à ce qu'elle reçoive la pluie de la première saison, et celle de la dernière. Vous aussi, soyez patients; affermissez vos cœurs, car la venue du Seigneur est proche.: >>>

Jaques qui, à l'exemple des Orientaux, aimait à vivre au milieu des scènes de la nature, transporte dans le domaine de l'histoire les lois du développement progressif auquel est soumise la création entière. Comme les fruits ne mûrissent que lentement, comme le cultivateur est forcé d'attendre avec patience les pluies de la première et de la dernière saison, de même l'humanité se développe sans cesse ; elle ne s'avance que par degrés vers le but final que Dieu lui a assigné, et dont la réalisation n'est promise qu'à une inaltérable patience. Ici, comme dans le règne de la nature, chaque chose a son temps

1 Voyez note 23. 2 Voyez note 24.

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