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ses lecteurs à ne parler qu'avec une réserve scrupuleuse. Il devait leur suffire, en effet, d'envisager sérieusement la responsabilité et le danger attachés à la parole, pour en user avec plus de sobriété dans leurs assemblées. « Nous bronchons tous en plusieurs choses, dit Jaques ; si quelqu'un ne bronche pas en paroles, c'est un homme parfait, capable de tenir en bride tout son corps, » c'està-dire celui qui sait, en toute occasion, gouverner ses paroles saura aussi se gouverner pour tout le reste.

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Puis, par plusieurs exemples familiers, il montre que les objets les plus insignifiants en apparence, exercent souvent une incalculable puissance, d'où il tire la conclusion qu'il est d'une importance suprême de maîtriser la langue « Voici, les freins des chevaux, nous les leur mettons à la bouche afin qu'ils nous obéissent, et par là nous dirigeons tout leur corps. Voici, les navires aussi qui sont si grands et poussés par des vents violents, on les conduit avec un très petit gouvernail dans toutes les directions, selon la volonté du pilote. De même aussi la langue est un petit membre qui néanmoins est fière de ce qu'elle peut. Voici, un petit feu, quelle forêt n'allume-t-il pas! La langue aussi est un feu, » c'est-à-dire de même qu'une étincelle peut incendier toute une forêt, de même une seule parole qu'articule la langue, peut causer le plus grand mal: «c'est le monde de l'iniquité; c'est ainsi qu'est posée, au milieu de nos membres, la langue qui souille le corps entier et enflamme tout le cours de la vie, étant

enflammée elle-même par la géhenne 1. » La pensée de Jaques est celle-ci : comme le feu des mauvaises passions embrase la langue; ainsi celle-ci, à son tour, embrase toute la vie. Il montre combien il est illusoire et absurde que l'homme se dise le maître du monde, lorsque ses passions l'asservissent lui-même à ce monde qu'il prétend dominer; il est honteux pour celui qui aspire à réduire sous sa puissance tous les animaux de la terre, de ne pas savoir même gouverner sa langue. « Des animaux de toute nature, oiseaux, reptiles, poissons, sont domptés et ont été domptés par l'homme; mais la langue, il n'est pas un seul homme qui puisse la dompter; c'est un mal irrésistible; elle est pleine d'un poison mortel. » C'est ainsi que Jaques attaque et bat en brèche, de tous les côtés, la piété formaliste. Il en indique encore une autre manifestation : c'est cette religiosité de paroles qui nous fait louer et bénir Dieu de notre langue, tandis qu'en même temps nous nous permettons des jugements amers, des paroles de condamnation contre le prochain en qui nous devrions respecter l'image de Dieu. C'est cette contradiction, ce mensonge véritable (voyez verset 14) qu'il met en lumière : « Par la langue, nous bénissons Dieu notre père, et par elle, nous maudissons les hommes créés à l'image de Dieu. De la même bouche sort la bénédiction et la malédiction; il ne faut pas, mes frères, qu'il en soit

1 Voyez note 16.

ainsi; une fontaine verse-t-elle, par la même ouverture, le doux et l'amer? Un figuier peut-il, mes frères, produire des olives, ou une vigne des figues? De même, une source salée ne peut produire de l'eau douce. » Jaques rappelle ici cette grande maxime qui est la pensée fondamentale de toute l'Epître, savoir, que tout revient à la disposition intérieure, puisque celle-ci imprime à toute la vie sa direction et en inspire tous les détails; vérité souverainement méconnue par ces chrétiens formalistes qui ne considéraient guère que l'extérieur, l'apparence, les actes isolés.

§ XI.

LA FAUSSE ET LA VRAIE SAGESSE.

(Chap. III, 13-18.)

13 Y a-t-il quelqu'un de sage et d'intelligent parmi vous? Que par sa bonne conduite il montre ses œuvres dans la douceur qui convient à la sagesse. 14 Mais si vous nourrissez dans votre cœur un zèle amer et un esprit de contestation, ne vous glorifiez pas, et ne mentez point contre la vérité; 15 ce n'est point là la sagesse qui descend d'en haut, mais c'en est une terrestre, charnelle, diabolique; 16 car partout où se trouve ce zèle, cet esprit de contestation, là est le trouble et toute sorte de mal. 17 Mais la sagesse d'en haut est premièrement pure, ensuite paisible, débonnaire, traitable, pleine de miséricorde et de bons fruits, impartiale, sincère. 18 Or, le fruit de justice se sème dans la paix par ceux qui répandent la paix.

Jaques vient de combattre la foi vaine qui ne se manifeste pas par la pratique. Poursuivant le même ordre d'idées, il attaque maintenant une fausse science des choses divines, à laquelle ne correspond point une conduite sainte. Il demande que toute connaissance religieuse procède non de l'intelligence, mais de la vie intérieure de l'âme, et que par conséquent elle se reflète dans la conduite, puisque celle-ci n'est que la manifestation de l'état du cœur : « Y a-t-il quelqu'un de sage et d'intel« ligent parmi vous? qu'il le montre par sa bonne con«< duite. » Parmi les différents traits qui servent à prouver la réalité de cette sagesse spirituelle à laquelle prétendaient ces églises, Jaques relève celui qui leur faisait le plus défaut, la douceur; tel est le caractère de la véritable sagesse, avertissement solennel qui était en même

temps un reproche pour ces congrégations dont les membres cherchaient, quelquefois avec violence, à faire valoir leur sagesse propre. Il faut, dit Jaques, que les œuvres de la piété soient accomplies avec une douceur digne de la vraie sagesse. « Mais si vous nourrissez dans votre cœur « un zèle amer et un esprit de contestation, ne vous glo« rifiez pas et ne mentez point contre la vérité. »

C'est encore dans la disposition intérieure que Jaques place la vraie science, la sagesse véritable; celle-ci ne peut venir que du ciel; elle ne procède que de la communion avec Dieu et se manifeste dans la vie qui en porte nécessairement l'empreinte. La sagesse qu'il oppose à cellelà procède au contraire d'un principe charnel, non d'un principe divin'. L'Ecriture sainte désigne souvent par le mot chair tout ce qui est mal, tout ce qui s'oppose à l'esprit de Dieu et à la sainteté de la vie; employé dans cette acception générale, il s'applique non seulement à la partie matérielle de l'homme, mais aussi aux éléments spirituels qu'il porte en lui, à sa raison, à son âme, en tant que celle-ci au lieu de servir d'organe à l'esprit divin, se sépare volontairement de Dieu, persiste à demeurer isolée, et cherche à se faire une vie indépendante, sans Dieu et par conséquent en opposition avec Lui. On voit que dans le langage biblique cette expression s'étend bien au delà de ce qu'on nomme communément et dans un sens restreint: « chair » ou « sensualité. » L'E

1 Voyez note 17.

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