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menaçaient. S'il s'était adressé à une autre église, il eût sans doute choisi d'autres exemples. « Si quelqu'un se « persuade être pieux, sans mettre un frein à sa langue « et tout en séduisant son cœur, la piété de cet homme est « vaine. » Jaques, partant de ce principe chrétien que la religion doit embrasser toute la vie, appelle illusoire, fausse et vaine celle qui laisserait subsister les anciennes habitudes de péché, comme par exemple, dans le cas actuel, les violences de langage et la difficulté à maîtriser sa langue. Quant à ceux qui continuent à vivre dans ces vices et néanmoins se persuadent être pieux, ils se trompent, se séduisent eux-mêmes, leur piété est vaine.

A cette religion fausse Jaques oppose la véritable, celle qui se montre dans la vie, et prend encore pour cela un exemple de détail, qu'il choisit tout exprès dans le but de répondre aux besoins particuliers de ces églises. Prendre soin des orphelins et des veuves, les protéger contre l'oppression cruelle des riches, telle est la marque d'une piété sincère et pure. « Une piété sincère « et sans tache devant Dieu notre père, la voici : visiter « les orphelins et les veuves dans leur affliction; se con« server pur des souillures du monde. » C'est par cette réflexion générale, qui s'applique à l'ensemble de la vie chrétienne, qu'il termine ces avertissements. En les exhortant à se garantir de toute souillure du monde, il n'entend pas parler d'une séparation extérieure et souvent si mal comprise d'avec le monde; comment le chrétien pourrait-il être alors le sel de la terre, le le

vain du monde? comment d'ailleurs s'accorderait cette maxime avec l'activité chrétienne exercée dans toutes les sphères de la vie et que Jaques recommande tout le long de son épître? C'est intérieurement qu'il faut se garantir de tout contact avec les souillures du monde, de telle sorte que tout en agissant sur lui, on soit à l'abri de son influence impure, et qu'en même temps qu'on se mêle au monde pour l'améliorer, on reste néanmoins élevé au-dessus de lui.

La véritable piété se compose donc, d'après Jaques, de deux éléments étroitement unis: d'une part, la lutte perpétuelle contre le mal qui est dans le monde, lutte d'activité et d'amour; de l'autre, le soin de se conserver toujours pur soi-même des souillures qui y règnent. La pratique du premier de ces préceptes dépend de l'observation du second.

§ VII.

LA PARTIALITÉ.

(Chap. II, 1-7.)

1 Mes frères, que la foi en notre Seigneur de gloire Jésus-Christ ne soit pas mêlée à des acceptions de personnes! 2 Car s'il entre dans votre assemblée un homme avec des bagues d'or, en habits magnifiques, et qu'il entre aussi un pauvre, en méchant habit, 3 et que, levant le yeux vers celui qui porte les magnifiques habits, vous lui disiez: << toi, assieds toi ici honorablement !» Puis que vous disiez au pauvre : «< toi, tiens-toi là, ou assieds-toi ici, au-dessous de mon marchepied !»- 4 n'êtes vous pas alors divisés au dedans de vous-mêmes et n'êtes-vous pas des juges à pensées iniques? 5 Ecoutez, mes frères bien-aimés : Dieu n'a-t-il pas choisi les pauvres du monde, qui sont riches en foi et héritiers du royaume qu'il a promis à ceux qui l'aiment? 6 Mais vous, vous avez méprisé le pauvre. Ne sont-ce pas les riches qui vous oppriment, eux qui vous traînent devant les tribunaux? 7 Ne sont-ce pas eux qui blasphèment le beau nom dont vous avez été appelés?

Il a déjà été question de la disproportion qui existait dans ces communautés chrétiennes entre le grand nombre de pauvres et le petit nombre de riches. Les diversités et inégalités naturelles soit de fortune, soit de condition, ne devaient pas, il est vrai, disparaître entièrement sous l'économie de l'Evangile, mais elles devaient devenir moins sensibles, être en partie nivelées par l'amour qui rapproche tous les hommes, et même devenir pour beaucoup une occasion heureuse d'exercer cet amour. Si la première effusion de l'esprit chrétien fit naître, pour un moment, une communauté de biens proprement dite, ce qu'il est difficile de déterminer, toujours est-il que cette organisation ne pouvait être que momentanée; elle

répondait à la première explosion de ce sentiment d'amour réciproque qui, fondé sur une communauté de foi, d'espérance et de vie, absorba d'abord toutes les diversités secondaires. Mais un tel état de choses ne pouvait être durable. Après cette période d'enthousiasme et d'entraînement général, causés par ce sentiment si nouveau et si puissant de la fraternité chrétienne, l'inégalité qui est dans la nature même des choses, ne tarda pas à reparaître et l'instinct de la propriété reprit ses droits. Mais ce qui ne devait point passer, c'est l'amour chrétien qui, réunissant tous les frères en un seul corps, les habituait à n'être qu'un cœur et qu'une âme, et qui attentif à tous les besoins, faisait en quelque sorte du bien de chacun le patrimoine de tous. Or, cet amour faisait défaut parmi les chrétiens auxquels s'adresse Jaques. Le sentiment de l'égale et sublime dignité dont sont revêtus indistinctement tous les chrétiens, bien loin de faire disparaître les inégalités de position et de fortune, disparaissait souvent lui-même devant elles. Jaques s'élève contre cette aristocratie anti-chrétienne : « Mes bien-aimés frè« res, que la foi en notre Seigneur de gloire Jésus-Christ « ne soit pas mêlée à des acceptions de personnes. » Il montre ici combien, en estimant les chrétiens d'après leurs avantages terrestres, on s'éloigne de l'esprit de l'Evangile et de la foi en Jésus-Christ, le Seigneur de gloire. En effet, quiconque reconnait Jésus-Christ comme tel, doit considérer comme un si grand honneur de lui appartenir, qu'auprès de cette gloire-là tous les avanta

ges extérieurs, quels qu'ils soient, s'effacent et s'anéantissent. Telle est la gloire qui est en Jésus-Christ, et qu'il offre à tous ses disciples, qu'elle éclipse à elle seule tout éclat terrestre.

Jaques entre alors dans les détails du reproche général qu'il vient de leur adresser: « Car s'il entre dans « votre assemblée un homme avec des bagues d'or, des ha« bits magnifiques, et qu'il entre aussi un pauvre en méa chant habit, et que levant les yeux vers celui qui porte « les magnifiques habits vous lui disiez : Toi, assieds-toi « ici honorablement; puis que vous disiez au pauvre : « Toi, tiens-toi là, ou assieds-toi ici, au dessous de mon « marchepied, n'êtes-vous pas alors divisés au dedans de « vous-mêmes; et n'êtes-vous pas des juges à pensées «iniques? » Le terme original que nous avons traduit par « être divisé en soi-même » indique l'état d'une âme tourmentée par des hésitations, des incertitudes, des pensées qui se combattent entre elles, comme il arrive lorsque la simplicité de la foi est troublée et que des considérations qui lui sont étrangères, des préoccupations mondaines viennent étouffer l'intérêt suprême qui devrait seul fixer les regards du chrétien. Dans le cas actuel, par exemple, il s'agit de ce point de vue mondain d'après lequel on accorde à l'un une préférence non motivée, tandis que l'on retire à l'autre l'estime à laquelle il a droit, comme membre de l'Eglise chrétienne. Rien de plus opposé à l'esprit évangélique qui doit faire considérer tous ceux qui appartiennent à l'Eglise comme

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