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moyen âge une autre institution tout aussi célèbre alors, tout aussi oubliée à notre époque. Je veux parler des consuls sur mer que l'on trouve établis sur la Méditerranée du treizième au quinzième siècle..

Qu'étaient ces consuls maritimes? M. de Mas-Latrie a donné sur ce point dans son Introduction aux chartes inédites de Bougie et de Bône, des renseignements que je vais essayer de compléter au moyen du livre du Consulat de la mer et de plusieurs ordonnances et statuts relatifs au commerce. On voit par le livre du Consulat de la mer que les magistrats en question allaient avec le navire et qu'ils avaient mission de sauvegarder les effets des passagers morts pendant la traversée 2. C'étaient ici des fonctions de surveillance qu'ils exerçaient, fonctions qui dépendaient entièrement des circonstances.

Ordinairement 3, le navire n'était pas forcé d'avoir un consul. Cela ressort du passage cité du Consulat et de la comparaison des rubriques XI et XLVII des statuts d'Ancône ".

Les statuts de Venise n'obligeaient à avoir un consul que les navires de plus de 200 tonneaux 5.

Ces magistrats étaient ou élus par le conseil de la ville, comme à Aigues-Mortes, à Gênes, à Ancône, à Montpellier, à Marseille, ou choisis par les marchands et par l'équipage du navire, comme à Venise et à Barcelone ".

Leur nombre variait de 1, chiffre que porte une lettre des consuls de la ville de Montpellier aux magistrats de Chypre, à 5, nombre qu'exigeait le statut de Venise 9.

Ils étaient choisis parmi les marchands qui accompagnaient le

navire.

1. Bibliot. de l'École des Chartes, t. II, p. 393.

2. Consulat de la mer, ch. LXXIV, Pardessus, t. II, p. 119.

3. Sauf à Gênes, où l'office de Gazarie devait munir d'un consul tout navire.

4. Voir à ce sujet la note de M. Pardessus, t. V, p. 156.

5. Statuts de Venise, Pardessus, t. V, p. 46.

6. Statuts d'Aigues-Mortes, Pardessus, t. II, p. 119; Statuts de l'office de Gazarie, t. IV, p. 464; Statuts d'Ancóne, t. V, rub. 17; Histoire de Chypre, par M. de Mas-Latrie, t. II, p. 208; Chartes éditées par M. de Mas-Latrie, Bibl. de l'École des Chartes, t. II, p. 392.

7. Statuts de Venise, au lieu cité; Ordonnance de Jacques de Barcelone de 1258, Pardessus, t. V, p. 345.

8. Hist. de Chypre, au lieu cité.

9. Statuts de Venise, Pardessus, au lieu cité.

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Leur pouvoir était partout considérable. Ici, ils avaient le droit navigandi, armizandi, vellum ponendi, et timonarios elligendi ';» là, ils devaient surveiller les patrons et les dénoncer, s'ils avaient chargé ou déchargé une partie de leurs marchandises en longeant les côtes. Souvent ils pouvaient connaitre de toutes contestations entre marchands pendant la traversée, les juger et faire exécuter leurs jugements, soit immédiatement après avoir pris l'avis de conseillers 2, soit à leur retour de voyage, comme on le voit par le serment d'un consul de mer de Montpellier et dans les statuts d'Ancône 3.

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Le voyage terminé, les fonctions consulaires cessaient, et le marchand qui en avait été revêtu redevenait simple citoyen.

Je ne crois pas qu'il y ait eu des villes commerçantes qui se soient privées de cette utile institution; on en usait surtout dans les pays où la nomination de ce chef presque absolu dépendait du suffrage universel des marchands et des matelots.

Le silence des statuts de quelques villes ne prouve pas qu'elle n'y ait pas existé. Car à Venise, par exemple, qu'y avait-il de commun entre les lois de la ville et cette magistrature tout à fait indépendante? Et les statuts de Venise auraient-ils été incomplets s'ils s'étaient tus au sujet des consuls sur mer, dont le pouvoir dictatorial ne pouvait s'exercer qu'au dehors de la cité?

Il n'en était pas tout à fait ainsi lorsque c'était au conseil qu'appartenait le droit de nommer ces consuls. Il y avait en ce cas des comptes à rendre et un examen à subir.

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La Table d'Amalfi dit un mot du consul sur mer 5.

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M. Pardessus pense que Marseille avait ses consuls sur mer, en convenant que les statuts ne les mentionnent pas. Dans une autre partie de son ouvrage, il affirme que le chapitre 24 du Ive livre des mêmes statuts fait connaître longuement ce qu'étaient ces consuls. Voici ce passage :

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1. Statuts de l'office de Gazarie, ch. Ix, Pardessus, t. IV.

2. Chartes inédites, publiées par M. de Mas-Latrie, Bibl. de l'École des Chartes, t. II, p. 393.

3. Hist. de Chypre, par M. de Mas-Latrie, t. II, p. 208, et Statuts d'Ancône, rubr. 47, Pardessus, t. V, p. 156.

4. Voir les statuts précités de Montpellier, Ancône, etc.

5. Table d'Amalfi, §§ 12 et 13.

6. Pardessus, t. V, p. 157.

7. Pardessus, t. II, p. 119.

« bunt et cum consilio consulis, si tunc invenerint in hoc onere ' (ou plutôt, selon MM. Méry et Guindon, in Achonem).

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Je me permettrai de n'être de l'avis de M. Pardessus ni dans l'un ni dans l'autre cas, parce que: 1o la mention du chapitre 24 est équivoque, et peut très-bien s'appliquer au consul d'outre-mer ou au consul de la ville; et 2° que le ms. 4660 porte à la suite des statuts la mention expresse de consul sur la mer 2.

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Du reste, une charte de 1268, publiée par M. de Mas-Latrie dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes, ne laisse aucun doute à cet égard. A la suite de l'énumération des droits du consul sur mer, on lit que le consul a libre et plein pouvoir de faire, statuer et ordonner « secundum formam statutorum et consuetudi<< nem Massilie. »

Ici se termine cet essai sur les consuls de mer et sur mer.

Ainsi, pour résumer les faits qui résultent de ce travail, les consuls de mer, qu'on voit paraître pour la première fois en Italie au onzième siècle, possédaient, pour les contestations maritimes et commerciales, une juridiction étendue, assez analogue à celle de nos tribunaux actuels de commerce; souvent, ils avaient de plus le pouvoir de poursuivre eux-mêmes l'exécution de leurs jugements; on retrouve sous les noms de cour de la mer en Orient, de consuls de marchands à Cagliari, d'alcades à Séville, des magistrats analogues, chargés de protéger la liberté du commerce et les droits des marchands. Enfin, dans certaines villes, telles que Montpellier et Venise, le nom de consul de mer n'était donné qu'à des magistrats secondaires et privés de toute juridiction. Le nombre des consuls de mer et le mode de leur nomination variait selon les usages des villes. Ils étaient encore en vigueur à Malte au dix-huitième siècle.

Quant au consul sur mer, c'était un magistrat maritime, marchant avec le navire, et muni de pouvoirs qui faisaient de lui le chef presque absolu de l'expédition; ces pouvoirs duraient pen

1. Statuts de Marseille, Pardessus, t. IV, p. 121. 2. Ms. lat. de la Bibl. imp., no 4660, p. 118.

3. Tom. II, p. 393. — Il me semble évident, d'après ce texte, que nous n'avons pas les statuts complets de la ville de Marseille, et on doit vivement désirer que des recherches soient faites aux lieux où une constante tradition nous apprend que ces statuts ont été transportés après le sac de la ville par les Aragonais, au quinzième siècle.

dant tout le voyage, mais ils cessaient lors de l'arrivée au point de départ. Il pouvait être choisi, soit par le suffrage des matelots et des marchands, soit par le conseil de la ville, et, dans ce dernier cas, il rendait compte à ce conseil de la manière dont il avait accompli sa mission. Le nombre des consuls sur mer varie dans les documents de un à cinq; institués au treizième siècle, ils n'ont pas duré au-delà du quinzième.

LOVIS BLANCARD.

DOCUMENTS

RELATIFS

AU COMMERCE DES GÉNOIS

SUR LA COTE D'AFRIQUE

AU MOYEN AGE.

M. de Sacy a publié, dans le tome XI des Notices et extraits de manuscrits, un traité de commerce conclu l'an 4250 entre la république de Gênes et Abou-Abdallah, roi de Tunis. Un mémoire manuscrit du P. Semini, conservé autrefois aux archives de Gênes, où M. de Sacy en prit communication 1, transféré depuis aux archives du royaume à Turin, où il se trouve aujourd'hui, renferme un traité arrêté entre les mêmes États, l'an 1236, antérieur par conséquent de quatorze ans à celui du règne d'Abou-Abdallah. Je donne plus loin le traité de 1236, d'après la copie de Semini, n'ayant pu retrouver l'original ni à Gênes ni à Turin. C'est le plus ancien privilége commercial obtenu par les Génois en Barbarie que nous connaissions textuellement, car on a une simple mention d'un traité précédent, lequel aurait été conclu en 12302. Bien que l'on doive la connaissance de la convention de 1236 aux recherches de Semini, je ne puis me dispenser de remarquer l'erreur commise par le savant religieux dans son mémoire, en considérant cet acte comme émané du roi de Tripoli, et les Moadii, dont il y est parlé, comme des Tripolitains. C'est incontestablement du roi de Tunis et de ses sujets qu'il est question dans notre pièce.

Le traité de 1236 renferme en principe toutes les franchises et fa

1. Voy. Mémoires de l'Académie des inscriptions, nouv. série, t. III, p. 87 et suiv.

2. Voy. Tableau de la situation de l'Algérie en 1840, Appendices, p. 412; Tableau de la situation en 1843-1844, Appendices, p. 452,

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