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ce passage et de deux autres de la grande chronique de Tours, qui n'en sont que l'abrégé ', il ressort de la manière la plus positive 1° que la construction de l'église de la Bazoche eut lieu à l'endroit même où la châsse de saint Martin avait été apportée pendant le siége; 2° que cette église fut bâtie sur les ruines du palais de Valentinien. Sala, d'après le glossaire de Du Cange, signifie le plus ordinairement un grand édifice, un palais. La qualification de Salle Maudite serait due alors au souvenir de l'injure que l'empereur Valentinien fit essuyer au saint évêque. Malgré l'ancienneté et l'autorité de ces textes, la plupart des auteurs qui se sont occupés de l'histoire de Touraine 2, se fondant uniquement sur le nom de Basilica, Bazoche, qui fut donné à cette église, pensent qu'elle fut construite sur l'emplacement de la basilique romaine de la cité antique; c'était le lieu où se rendaient les jugements et où se traitaient les affaires du commerce à ce double titre, l'édifice pouvait avoir mérité de a justice du peuple le nom de Salle Maudite. Sala, dans la latinité du moyen âge, a été employé quelquefois dans l'acception de tribunal, palais des plaids.

Une troisième opinion veut que l'église de Saint-Martin de la Bazoche, ou Notre-Dame de Consolation, car elle portait ces deux noms, ait été rebâtie sur les ruines d'une vieille église 3; Maan dit que cette église était celle de Notre-Dame, commencée par Ommatius et terminée par Injuriosus, et M. Vicart est du même sentiment. Le double vocable de l'église semble donner quelques probabilités à cette opinion.

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Quoi qu'il en soit de ces diverses attributions, il me paraît

mordia initiavit, erant ruinæ maceriarum antiquarum, in quibus ferebant aulam fuisse Valentiniani, in qua sedens nequaquam assurgere est dignatus beato Martino antistiti, donec regiam sellam ignis operiret ipsumque regem, ea parte corporis qua sedebat, afflaret incendium, solioque suo superbus excuteretur et Martino invitus assurgeret. Ibi archiepiscopus cum populo devoto ecclesiam, quæ sancti Martini Basilica dicitur, in honore itidem ipsius sancti instauravit. Supplément aux Chroniques de Touraine, p. 20.

1. Recueil des Chroniques de Touraine, p. 69 et 97.

2. Carreau, Hist. ecclésiast. de Touraine, fol. 17 et 68, ms. faisant partie de ma collection. D. Houss., t. XIV et XXIV de sa collection.

Touraine, t. I, p. 72 et 248; t. III, p. 478.

3. Chalmel, Hist. de Touraine, t. I, p. 248.

4. Ecclesia Turonensis, p. 33.

Chalmel, Histoire de

5. Mémoires de la Société archéol. de Touraine, t. III, p. 195.

incontestable, comme je l'ai déjà dit, que l'église Saint-Martin de la Bazoche fut élevée aussitôt après la victoire, pour consacrer l'endroit de l'exposition des reliques pendant l'assaut des Normands; que si elle remplaça un édifice ancien, ce ne put ètre qu'une église et non point la Salle Maudite, qui resta encore longtemps debout. Celle-ci ayant été purifiée en quelque sorte par la présence du corps saint, on avait changé son nom en celui de Maison-Dieu ou Hôtel-Dieu, Domus Dei. Les hospices, placés autrefois sous la surveillance du clergé, occupaient toujours le voisinage des églises. C'est ainsi qu'à Tours l'Hôtel-Dieu était situé vis-à-vis de l'entrée de l'église cathédrale, et qu'à Châteauneuf les hospices de Saint-Clément, de Saint-André et de SaintJacques, se groupaient autour de l'église de Saint-Martin.

L'église de la Bazoche fut démolie de 1787 à 1789, à cause de sa vétusté et de l'insuffisance des revenus du chapitre pour la réparer ou la relever. Tous les anciens plans de Tours la placent à peu près à égale distance entre la tour du Petit Cupidon et le grand bastion qui fait saillie sur la muraille méridionale de Cæsarodunum, à quelques pas de la seule porte antique encore intacte de l'enceinte gallo-romaine. Le fief de la Bazoche se trouve aussi sur plusieurs anciens plans; il embrasse un grand terrain limité au midi et à l'est par la muraille antique, au nord par la rue du Faubourg-Saint-Pierre-des-Corps, à l'intersection de laquelle se trouvait la porte d'Orléans; enfin, à l'ouest par la rue Montaigne, qui, tournant à son extrémité sud à angle droit, court dans la direction de l'est à l'ouest et se termine à la rue de la Bazoche, qui a tiré son nom de l'église où elle conduisait. Ce fief de la Bazoche, qui appartenait naguère à l'établissement des Orphelines, représente certainement le terrain de quatre-vingtseize perches dont parle le diplôme de Charles le Simple. Entre la rue de la Bazoche, à l'extrémité nord-ouest et le mur au midi, ce fief est encore borné à l'ouest par un vaste ensemble de constructions, tant antiques que modernes, rayonnant toutes vers un centre commun; déprimé vers le milieu, il s'élève progressivevement sur les bords en formant une enceinte circulaire. C'est bien là l'emplacement que le diplôme de l'an 919 désignait sous le nom d'Arènes, celui que la configuration des lieux indiquait

1. Tour d'angle à l'intersection de la muraille de l'est et de la muraille du midi de a cité gallo-romaine. Elle prit son nom d'une statue de Cupidon qui y fut trouvée au siècle dernier.

aux recherches des antiquaires; et là effectivement ont été retrouvées les ruines souterraines d'un vaste amphithéâtre dont le grand axe avait 135 mètres et le petit 120.

Les détails minutieux dans lesquels je viens d'entrer m'ont paru nécessaires pour mieux faire comprendre jusqu'à quel point les termes du document carlovingien conviennent à l'état actuel des lieux.

J'arrive à la deuxième partie du texte qui a été cité précédemment. Elle ne me semble pas exiger de longs commentaires. Il y est question de quatre-vingts-seize perches de terrain du côté de la Loire, avec une église, le mur et une poterne, que les chanoines cèdent à Hugues, leur abbé, ad comitatum. Ce dernier mot est le seul sur lequel on puisse hésiter, parce qu'il avait plusieurs significations'. La plus commune était celle de comté, domaine du comte, et aussi le territoire sur lequel s'étendait sa juridiction. La seconde, que j'ai adoptée, fait de comitatus le palais, l'habitation du roi ou du dignitaire qui gouvernait le pays en son nom; or c'est sur le bord de la Loire, à l'extrémité orientale des murailles, que s'élevait la Tour-Feu-Hugon. On la trouve désignée dans plusieurs chartes du onzième siècle, sous le nom de Tour-du-Comte. Elle prit certainement son premier nom de ce qu'elle fut construite par l'un des comtes de Touraine qui portèrent le nom de Hugues, à savoir, Hugues Ier, fils de Conrad, comte de Paris; Hugues II, le Grand, fils du roi Robert, et Hugues III, qui régna sous le nom de Hugues Capet; mais je n'ai trouvé aucun indice qui puisse préciser auquel des trois elle doit être attribuée. Dans l'hypothèse où elle aurait été bâtie par Hugues Ier, l'emplacement des quatre-vingt-seize perches de terrain, donné en échange par les chanoines, serait parfaitement déterminé, et l'on trouverait même dans le voisinage la petite église de Saint-Libert, construite sur les murailles antiques de la ville, du côté de la Loire. L'architecture de cet édifice religieux, encore debout aujourd'hui, ne semble pas, à la vérité, remonter au delà du onzième siècle, mais il a dû remplacer une église plus ancienne, qui serait celle dont parle le diplôme de 919. Enfin, dans une troisième acception, on entendait par comitatus, l'assise ou assemblée qui était présidée par le comte. Plusieurs chartes, en effet, et, entre autres, une

1. Voyez Du Cange, au mot Comitatus.

de l'année 908, publiée par M. Cartier', témoignent que les plaids des comtes se tinrent souvent sur les murs de la ville.

Il ne me reste plus qu'un seul point à éclaircir; c'est de déterminer quel fut l'abbé Hugues avec qui les chanoines de SaintMartin de Tours firent cet échange, pour en déduire la date à laquelle il fut conclu. Parmi les abbés de Saint-Martin de Tours, antérieurs à l'an 919, il n'en est qu'un du nom de Hugues qui réunisse la double qualité de comte et d'abbé : c'est Hugues, fils de Conrad, comte de Paris et d'Auxerre. Le plus ancien acte où il figure comme abbé de Saint-Martin est du 27 décembre 867, et il mourut vers l'année 887, après avoir abdiqué la dignité abbatiale. L'échange entre les chanoines de Saint-Martin et leur abbé Hugues eut donc lieu entre les années 867 et 887. Ce n'était point comme abbé, mais à raison de son comté, que Hugues possédait les terrains où était située la Salle Maudite, puisque ceux qui lui sont concédés par cet acte sont affectés à cette destination.

Ce simple raisonnement suffirait pour se mettre en garde contre l'assertion de Carreau et de D. Housseau, qui avancent que l'église de la Bazoche fut donnée au chapitre de Saint-Martin de Tours par Charles le Chauve, « comme il appert par les titres de la pancarte Noire. » Leur erreur vient de ce qu'ils ont attribué à cet empereur un diplôme publié par D. Martène 3, tandis qu'il appartient à Charles le Simple, et ne remonte qu'à l'année 903; j'en parlerai bientôt. Chalmel, enfin, mieux inspiré que ses prédécesseurs, place la dotation et la fondation de l'église de la Bazoche en l'année 885, sous Charles le Gros; mais, suivant son habitude, il n'apporte aucune preuve à l'appui de son assertion. Bien plus, les passages de ses ouvrages où ce fait est mentionné sont tellement contradictoires, qu'il est impossible de ne pas en conclure qu'il n'a jamais vu la donation dont il parle. Il dit, en effet, tantôt que c'est à l'église de la Bazoche, tantôt que c'est aux habitants de Tours, que Charles le Gros fait concession de

1. Mémoires de la Soc. des Antiq. de France, nouv. sér. t. V, p. 435.

2. Gallia Christiana, t. XIV, col. 167-168.

3. Histoire ecclés. de la Touraine, fol. 68 vo.

4. Mém. de la Soc. archéol. de Touraine, t. IV, p. 59.

5. Amplissima collectio, t. I, col. 258.

6. Conf. Tablettes chronol. de Touraine, p. 55, et Hist. de Touraine, t. I, p. 72, 248, et t. III, p. 478.

quatre-vingt-seize perches de terrain, avec les murs, le chemin de ronde et l'emplacement de la Salle Maudite, tandis que le diplôme de l'an 919, ainsi que les autres documents que nous allons citer tout à l'heure, prouve que le terrain où était situé la Salle Maudite appartenait primitivement au comte Hugues, et non pas à l'église de la Bazoche ou aux habitants de Tours.

Le diplôme de l'an 919 n'est pas le seul acte des archives de Saint-Martin de Tours par lequel cet échange ait été confirmé; mais aucun n'entrait dans autant de détails sur la topographie des lieux; aucun surtout ne mentionnait les Arènes, qui font le sujet de cette étude. Je vais maintenant en présenter les divers textes, et en tirer encore quelques notions.

Le plus ancien document où soient mentionnés ces terrains est un diplôme de l'an 903, dans lequel on trouve l'énumération des domaines dont la possession est confirmée an chapitre de Saint-Martin par Charles le Simple. On y trouve cette désignation Areas cum sala, quæ quondam dicebatur Maledicta, quæ modo propter receptionem sancti Martini domus Dei dicitur, intra muros Turonicæ urbis sitas, in quibus fratres nunc monasterium constructum habent. Ce sont les termes mêmes de l'acte de 919; mais on y voit, de plus, que les chanoines de SaintMartin y avaient construit avant 903 un monastère. Postérieurement à l'année 919, deux autres diplômes confirment encore cet échange. Le premier est daté du 22 ou du 24 mars 931; il est ainsi conçu Areas quoque in civitale, quas commutaverunt fratres cum domno Hugone piæ recordationis abbate, cum terra quæ est juxta murum, sicut in charta commutationis exaratum est, perpetuo teneant 2. Il en résulte que la charte d'échange existait encore; j'en ai vainement cherché l'analyse ou la mention dans les inventaires de Saint-Martin. Le deuxième diplôme a été donné par Hugues Capet, et on y retrouve les mêmes expressions que dans celui qui précède, sauf que dans celui-ci le copiste a mis par erreur cum terra quæ est extra murum, tandis qu'il faut lire juxta, ou mieux intra murum 3.

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1. Martène, Ampliss. collectio, t. I, col. 258. Bouquet, Galliæ scriptores, t. IX, p. 497.

2. Martène, Thesaurus anecdot., t. I, p. 63.—Bouquet, Galliæ scriptores, t. IX, p. 573.

3. Martène, Ampliss. collectio, t. I, col. 340.—Bouquet, Galliæ scriptores, t. X, p. 550.

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