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de toute beauté, il est aisé de voir, dans cette division des différentes natures, ce qui possède l'être souverainement; ce qui est dans le plus bas degré de l'être, mais qui ne laisse pas d'avoir une véritable existence, et ce qui est entre deux, au-dessus du plus bas genre des êtres, et au-dessous de l'être souverain.

Cet être souverain est la félicité par essence. Cet être du plus bas genre est incapable de bonheur et de malheur. L'être intermédiaire est malheureux quand il penche vers les êtres du dernier genre, et heureux quand il se porte vers l'être souverain.

Or, qui croit en Jésus-Christ ne se laisse point aller à l'amour de ce qui est dans ce bas étage des êtres, et ne s'enorgueillit point en s'arrêtant avec complaisance dans la région du milieu, et c'est par là qu'il devient capable de s'unir au souverain être. Voilà tout ce que la religion demande de nous; voilà à quoi tendent tous ses préceptes; voilà de quoi elle tâche de nous inspirer l'amour.

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III. DE LA CONNAISSANCE DE DIEU.

Lorsque je considérais quel est le propre de la vie humaine, de quelle manière il en faut consacrer l'emploi, quel but lui assigne la nature, ou le consentement des sages, qui soit digne de la divine intelligence que nous avons reçue en partage, beaucoup d'objets se présentaient à moi, lesquels, d'après l'opinion commune, semblaient rendre la vie utile et désirable, et, par-dessus tout, ces deux choses qu'aujourd'hui comme autrefois les mortels ont toujours préférées, le loisir à la fois et l'opulence, parce que l'un sans l'autre est plutôt une occasion de souffrances qu'une source de biens; car le loisir sans l'opulence est regardé comme une sorte d'exil de la vie, et l'opulence sans le loisir est d'autant plus attristante qu'on s'indigne davantage de se voir privé de tous les agréments qu'on avait désirés et recherchés. Or, quoique ces biens renferment en eux-mêmes les suprêmes délices de la vie, néanmoins il ne paraît pas que la délectation qu'ils procurent diffère beaucoup de celle des bêtes, qui, errant à leur gré à travers des bois ombreux et de gras pâturages, trouvent une sécurité sans fatigue, et se rassasient de nourriture. En effet, s'il est vrai que le souverain et définitif usage de la vie consiste à se reposer et à jouir, il est nécessaire que cette même fin, diversifiée mais non changée suivant les organisations, nous soit commune avec les bêtes, lesquelles sont privées de raison; puisque la nature ellemême leur assure abondance et sécurité, et qu'elles connaissent la jouissance sans avoir les soucis de la possession.

Aussi voit-on que la plupart des hommes rejettent pour cux-mêmes avec mépris et blâment chez les autres ce genre de vie grossier et bestial. Car la nature leur crie

qu'il est indigne de l'homme de se croire né pour ne s'occuper que de son ventre et languir dans la mollesse, au lieu de songer qu'ils n'ont été appelés à cette vie que pour y faire de belles actions et y cultiver les arts, que cette vie, en un mot, ne leur a été accordée que comme un moyen de s'acheminer vers l'éternité. Sans cela, en effet, pourrait-on regarder comme un bienfait d'un Dieu cette existence misérable, affligée de tant de malaises, enveloppée de tant de chagrins, qui se consume en elle-même et par elle-même, depuis l'enfance qui n'est qu'une ignorance, jusqu'à la vieillesse qui n'est qu'un délire? C'est pourquoi les hommes enseignent et s'appliquent à pratiquer certaines vertus: la patience, la continence, la clémence, parce qu'ils jugent que bien agir et bien penser c'est là tout ce qui s'appelle bien vivre, n'estimant pas d'ailleurs qu'un Dieu immortel leur ait donné la vie seulement pour mourir, parce que ce ne serait point un bienfait véritable que de leur avoir fait connaître toute la douceur qu'on trouve à vivre, pour les pousser aux accablantes tristesses qu'inspire la mort.

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Et bien que je ne crusse pas que ce fût chez ces hommes une maxime indifférente et inutile, que de conserver sa conscience pure de toute faute, que de prévoir avec prudence, ou éviter avec sagesse, ou supporter avec patience tous les chagrins de la vie humaine, cependant il ne me semblait pas qu'ils connussent la droite voie qui condu au souverain bien. Ces préceptes, en effet, qui s'accommodent au sens de l'homme, n'ont rien que de banal ne pas les comprendre est bestial; et, quand on les a compris, ne pas les pratiquer, c'est surpasser les bêtes ellesmêmes en brutalité. Mon âme donc avait hâte, non pas seulement de pratiquer ces préceptes, qu'on ne peut négliger sans crime et sans des douleurs infinies, mais de connaître Dieu, son bienfaiteur et son père, pour se donner entièrement à lui, s'ennoblir en le servant, mettre en lui toutes ses espérances, se reposer dans sa bonté

comme dans un port sûr et connu, où elle serait à l'abri des calamités innombrables du présent. Ainsi mon âme était enflammée du plus ardent désir de comprendre et de pénétrer Dieu.

Plusieurs, en effet, imaginaient de nombreuses familles de dieux incertains, et, pensant que la nature divine admet la distinction des sexes, prétendaient qu'il y a chez les dieux génération et succession. D'autres parlaient de grands dieux et de petits dieux, les différenciant d'après leur puissance. Quelques-uns affirmaient qu'il n'y a absolument pas de Dieu, et se contentaient d'adorer cette force aveugle qui se manifeste dans les êtres par des mouvements et un concours fortuits. La plupart, s'accommodant à l'opinion publique, parlaient d'un Dieu, mais déclaraient qu'il n'a aucun souci des choses humaines et qu'il les néglige. D'autres adoraient, dans les éléments terrestres et célestes, les formes corporelles et visibles des créatures. Quelques-uns enfin plaçaient leurs dieux dans les simulacres des hommes, des animaux, des bêtes féroces, des oiseaux, des serpents, et resserraient le Seigneur de l'univers et le Père de l'infini dans les étroites limites des métaux, des pierres et des troncs d'arbres. Comment croire, dès lors, ces singuliers docteurs, qui, adonnés à un culte ridicule, honteux et impie, ne s'ac"córdaient pas même entre eux sur leurs vides maximes? Au milieu donc de ces ténèbres, mon âme inquiète, s'efforçant de démêler la vraie route qui la pût sûrement conduire à la connaissance de son Seigneur, n'estimait pas qu'il fût digne de Dieu de négliger les choses qu'il avait créées, non plus qu'elle ne pouvait comprendre qu'une puissante et incorruptible nature admît la distinction de dieux de différents sexes et comme une filia→tion et une succession de dieux; elle tenait au contraire pour certain que ce qui est divin et éternel est nécessairement unique et indistinct; elle s'assurait au contraire qu'én Dieu il n'y a rien à vénérer que d'éternel et de puissant.

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Telles étaient les pensées que je roulais dans mon esprit, lorsque je tombai par hasard sur ces livres que la religion des Hébreux enseigne avoir été écrits par Moïse et les prophètes et là je vis que le Dieu créateur luimême se rend à soi-même témoignage en ces termes : « Je suis celui qui suis, » et encore : « Voici ce que vous direz aux fils d'Israël Celui qui est m'a envoyé vers vous. » Je fus rempli d'une parfaite admiration à ces paroles si nettes sur Dieu, qui expriment l'incompréhensible idée de la nature divine d'une manière si appropriée à l'intelligence humaine. On ne conçoit pas, en effet, qu'il y ait autre chose qui soit plus le propre de Dieu, que l'être; parce que cela même qui est n'est point d'un être qui cesse jamais d'être, ou qui commence à être; loin de là, ce qui se perpétue avec la puissance d'une incorruptible béatitude n'a pas pu ou ne pourra jamais ne pas être; car tout ce qui est divin n'est assujetti ni à la mort ni à la naissance. Et comme, en tout ce qui est de soi, se trouve l'éternité de Dieu, cela seul qui est dénote et marque dignement son incorruptible éternité.

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Et ainsi l'infinité de Dieu semblait suffisamment indiquée par les paroles de celui qui dit : « Je suis celui qui suis »; mais il me fallait comprendre les œuvres de sa magnificence et de sa puissance. Car si l'être est le propre de celui qui subsiste toujours sans avoir jamais commencé, c'est encore une parole digne d'un Dieu éternel et incorruptible que celle-ci : « Celui qui tient le ciel dans la paume de sa main et la terre dans ses doigts; et ailleurs : « Le ciel est mon trône, et la terre l'escabeau de mes pieds. Quelle demeure me construirez-vous, ou quel sera le lieu de mon repos? N'est-ce pas ma main qui a fait ces choses?» La totalité du ciel est contenue dans la main de Dieu, et il n'a qu'à fermer les doigts pour saisir la totalité de la terre. Or, ces paroles de Dieu, bien qu'elles servent à augmenter l'opinion que nous avons de sa puissance, sont d'autant plus expressives qu'on ven

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