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XI. DES SPECTACLES.

Y a-t-il apparence qu'un chrétien déserteur pense sérieusement à Dieu en un temps et en un endroit où rien ne lui rappelle le souvenir de Dieu? Est-il croyable qu'on puisse conserver la paix de l'âme, tandis qu'on s'acharne à soutenir le parti d'un gladiateur? Est-il facile d'apprendre les règles de la pudeur, pendant qu'on tient les yeux attachés aux infâmes postures d'un comédien? Ce pas tout peut-on trouver un plus horrible scandale dans toute sorte de spectacles, que ces parures extraordinaires qui y brillent, et les hommes assis pêle-mêle avec les femmes? Monstrueux mélange, qui, donnant aux uns et aux autres occasion de s'entretenir, fait que ces entretiens mutuels soufflent partout les étincelles de la concupiscence. Ajoutez que la première pensée que l'on a en se rendant aux spectacles, c'est d'y voir et d'y être vu. D'ailleurs, est-il aisé, parmi les effroyables hurlements d'un acteur, de penser aux salutaires exclamations d'un prophète ? Est-il aisé de joindre le chant de quelque psaume aux airs efféminés qu'on entend sur la scène? Lorsqu'on regarde deux athlètes se meurtrir à grands coups de poing, est-il facile de se rappeler dans l'esprit la défense qui nous est faite de frapper celui qui nous a frappé? Enfin, peut-on apprendre la douceur et l'humanité, pendant qu'on se divertit à voir des hommes cruellement déchirés par des ours, ou deux gladiateurs s'accrochant l'un l'autre et essuyant avec leurs éponges le sang qu'ils se font répandre? Grand Dieu! ôtez à vos serviteurs le désir de prendre des divertissements si funestes. Car enfin, que l'on considère ce que c'est que passer de l'église de Dieu au temple du diable; d'un lieu sacré à un lieu profane; de l'éclat du ciel, comme

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l'on dit, à l'ordure de la terre! Ces mains que vous avez élevées vers le Seigneur, vous les fatiguez un moment après pour applaudir à un bouffon; de la même bouche dont vous avez répondu amen pendant le sacrifice, vous rendez témoignage à un gladiateur dans l'amphithéâtre; enfin vous osez dire à tout autre qu'à Jésus-Christ notre Dieu, « qu'il vive à jamais! >>

»

Ne soyons point surpris après cela que le démon s'empare de ces chrétiens infidèles. Dieu l'a permis plus d'une fois : témoin l'exemple tragique de cette femme qui, étant allée à la comédie, en revint avec un démon dans le corps. Comme l'on exorcisait l'esprit immonde, et qu'on lui commandait de dire pourquoi il avait osé s'emparer de cette femme : « C'est avec raison, répondit-il, que je m'en suis saisi; je l'ai trouvée chez moi. » Il est constant aussi qu'une autre femme vit en songe un singe, le même jour qu'elle était allée entendre un comédien, et que le nom de ce comédien lui fut souvent répété aux oreilles avec des reproches épouvantables; enfin que cinq jours après cette femme n'était plus en vie. Il y a cent exemples semblables de personnes qui ont perdu le Seigneur pour avoir communiqué avec le démon dans les spectacles; car «< nul ne peut servir deux maîtres. » Quel rapport peut-il y avoir entre la lumière et les ténèbres, entre la vie et la mort? Nous devons anathématiser ces assemblées païennes, soit parce que le nom de Dieu y est blasphémé, soit parce qu'on y demande que nous soyons exposés aux lions, soit parce qu'on y forme le dessein de nous persécuter, soit parce qu'on y choisit les émissaires qui vont découvrir les chrétiens pour les tourmenter.

Que ferez-vous lorsque vous serez surpris dans ce concert furieux de résolutions impies? Ce n'est pas que vous ayez à y redouter la persécution des hommes personne ne vous reconnaît pour chrétien tandis que vous assistez aux spectacles. Mais songez à ce que Dieu décide de vous dans le ciel; c'est de là que vous êtes découvert par

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mille témoins. Au moment que vous êtes dans le temple du diable les anges vous regardent du ciel; et ils remarquent en particulier celui qui a proféré un blasphème, qui l'a écouté, qui a prêté sa langue et ses oreilles au diable contre Dieu même. Ne fuirez-vous donc pas ces assemblées révoltées contre Jésus-Christ, ces chaires remplies de corruption, cet air qu'on y respire tout empesté par la voix de mille scélérats qui y jettent des cris? Je veux que dans ces spectacles il y ait des choses purement agréables, simples, modestes, quelquefois même honnêtes faites réflexion cependant qu'on ne mêle pas d'ordinaire le poison avec le fiel ou avec l'ellébore, mais avec des liqueurs douces et agréables au goût. C'est ainsi qu'en use le démon : il cache son poison mortel en des viandes où se rencontre le plus de délicatesse et d'agrément. Par conséquent, tout ce que vous trouvez dans les spectacles de grand, de poli, de mélodieux, de divertissant, de subtil, d'harmonieux, regardez-le comme un rayon de miel qu'on a empoisonné. Ayez moins d'égard au plaisir de la bouche qu'au danger qui est infailliblement attaché à ce plaisir.

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Laissez aux parasites du démon la vaine satisfaction de s'engraisser des mets qu'il leur offre qu'ils se rendent exactement aux lieux des spectacles où leur patron les invite. Pour nous, le temps de fête et de réjouissance n'est point encore venu. Nous ne pouvons nous divertir avec les gentils, parce que les gentils ne peuvent se divertir avec nous. Chacun a son tour : ils sont maintenant dans la joie, nous sommes dans la tristesse. « Le monde se réjouira, dit Jésus à ses disciples, et vous serez affligés. » Gémissons pendant que les gentils se réjouissent, afin que nous puissions nous réjouir quand ils commenceront leurs gémissements. Prenons garde à ne pas nous divertir aujourd'hui avec eux, de crainte qu'un jour nous ne pleurions comme eux. Disciple de Jésus-Christ, vous êtes trop délicat si vous prétendez avoir du plaisir

dans le siècle, ou plutôt vous êtes insensé si vous regardez la joie de ce monde comme un véritable plaisir. Les philosophes n'ont donné le nom de plaisir ou de volupté qu'au repos et à la tranquillité de l'âme; c'est cette tranquillité qu'ils regardent comme le fondement de leur joie, de leurs divertissements et de leur gloire. Et vous, au contraire, vous ne soupirez qu'après les troubles et les agitations du cirque, du théâtre, de l'amphithéâtre et du stade. Oserez-vous dire que nous ne pouvons vivre sans quelque plaisir, nous dont le plus grand plaisir doit être de cesser de vivre? Car quel doit être notre désir, sinon celui de l'Apôtre, savoir, de sortir du monde et d'aller régner avec le Seigneur? Or notre plaisir est là où est notre désir.

Cependant si vous croyez qu'on ne peut passer cette vie sans quelque agrément, pourquoi êtes-vous assez ingrat pour ne vouloir reconnaître ni goûter tant de différents plaisirs que Dieu a faits, et qui sont plus que suffisants pour vous satisfaire? Quoi de plus heureux pour nous que d'avoir été réconciliés avec Dieu le Père et avec Jésus son Fils? Quoi de plus avantageux que d'avoir connu la vérité, que d'avoir découvert nos erreurs, que d'avoir obtenu le pardon de tant de crimes commis autrefois? Quel plus grand plaisir que l'éloignement du plaisir même, que le mépris du siècle, que la jouissance de la vraie liberté, que le calme d'une bonne conscience, que la sainteté de la vie et l'exemption de la crainte de la mort? Quelle satisfaction que de fouler aux pieds les dieux des nations, que de chasser les démons, que d'avoir le don des guérisons miraculeuses et des révélations célestes, enfin que de vivre toujours pour Dieu ! Voilà les véritables plaisirs des chrétiens; voilà leurs spectacles innocents, perpétuels, et qui ne leur coûtent rien. Représentez-vous dans ces saints spectacles une image des jeux du cirque, considérez-y la course rapide de toutes les choses du siè cle, remarquez-y la vicissitude et la fuite précipitée du

temps, regardez-y le terme de notre consommation, prenez-y le parti des sociétés chrétiennes, animez-vous-y à la vue de l'étendard céleste, éveillez-vous au bruit de la trompette de l'ange, aspirez à la glorieuse palme du martyre. Si vous êtes charmé de la poésie, vous avez assez d'autres livres que ceux des gentils, vous avez assez de beaux vers, assez de belles sentences, assez de cantiques, assez de chœurs de musique. Ce ne sont point des fables grossières, ce sont de saintes vérités; ce ne sont point des ramas de strophes ampoulées, c'est un trésor de sentences pures et sans affectation. Demandez-vous des combats, des luttes, des victoires; le christianisme vous en offre une infinité. Voyez l'impureté abattue par la chasteté, la perfidie vaincue par la foi, la cruauté surmontée par la miséricorde, l'insolence atterrée par la modestie: voilà les combats propres des chrétiens, où nous sommes glorieusement couronnés. Voulez-vous encore du sang répandu, vous avez celui de Jésus-Christ.

Mais surtout quel spectacle que celui où toutes les nations de la terre assemblées verront, et plus tôt qu'on ne pense, paraître le Seigneur au milieu des nues, alors triomphant, alors plein de gloire et de majesté, alors enfin reconnu pour le véritable Fils de Dieu! Quelle sera en ce jour la joie des anges, la gloire des saints, la récompense des justes et la magnificence de cette nouvelle Jérusalem, où ils iront régner éternellement ! Il est vrai qu'il y aura en même temps un spectacle bien différent, je veux dire le terrible jour du jugement, le dernier de tous les jours et le premier de l'éternité; ce jour auquel les gentils ne s'attendent point et dont ils se moquent; ce jour où tant de superbes et antiques monuments de l'orgueil humain seront anéantis, et toute la terre avec ses habitants sera consumée par un déluge de feu. Quelle sera l'immensité de ce spectacle! Quel étonnement, quelle surprise! Ou, si vous voulez, quel objet de joie et de plaisir en entendant tant de célèbres monarques, que l'on disait ré

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