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à une raison paroît mauvais et déraisonnable à une autre raison qui doit être également infaillible, il s'ensuit qu'en religion et en morale tout est vrai et tout est faux, ou, en d'autres termes, qu'il n'existe ni vérité, ni erreur, ni lois, ni devoirs envers Dieu ni envers les hommes.

Si la raison n'est pas infaillible, si elle peut se tromper, jamais elle ne sera certaine qu'elle ne se trompe point. Les croyances dès lors deviennent de pures opinions; les opinions, de simples doutes; la religion et la morale, un grand problème éternellement insoluble. Au milieu de ces ténèbres où la foi s'évanouit, quoi de plus absurde que de prescrire aux autres, ou de se prescrire à soi-même une confession de foi invariable, un symbole ? Qui peut dire si ce qui lui paroît aujourd'hui bon et raisonnable, le lui paroîtra demain? Et qu'estce d'ailleurs qu'un symbole qui n'obligeroit point l'esprit, qu'on pourroit modifier, admettre ou rejeter à son gré; un symbole dont chaque article ne seroit pas une vérité certaine, une vérité-loi, mais un doute. On renoncera

donc à tout symbole, comme un ministre de Genève y invite les protestans (1); et, fidèles à leurs principes, les chrétiens raisonnables n'oseront imposer à qui que ce soit l'obligation de prononcer cette parole: Je crois en Dieu!

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Voilà où il en faut venir nécessairement quand on ne reconnoît point d'autorité qui ait le droit de commander la foi. En défendant l'autorité, et non seulement celle de l'Église, mais encore celle du genre humain; en prouvant que la certitude n'a point d'autre base, nous avons donc défendu tout ensemble et la religion et la morale, toutes les lois et tous les devoirs, et la société humaine aussi bien que la société divine.

Au reste, dans un sujet si grave, ce que nous demandons surtout, c'est de l'attention et de la bonne foi. Certes il est étrange qu'il soit nécessaire d'engager les hommes à être attentifs, quand il s'agit d'eux-mêmes et de leur premier intérêt et cependant nous ne

(1) Coup d'œil sur les Confessions de foi; par J. Heyer, pasteur à Genève, 1818.

nous flattons pas de l'obtenir du plus grand nombre. Les préjugés, l'entraînement, les distractions, il n'en faut pas tant à un être d'un jour pour qu'il refuse d'examiner ce qui, après tout, n'est qu'éternel. Espérons pourtant qu'au moins quelques uns comprendront l'importance d'un pareil examen, et l'entreprendront avec les dispositions du cœur qui peuvent le leur rendre utile. Nous vivons dans un temps où tout porte à la réflexion les esprits sérieux. Tout passe, tout s'en va, la terre fuit sous nos pieds: c'est, ce semble, ou jamais, le moment

de s'informer s'il y a pour nous une autre de

meure.

AVERTISSEMENT

DE LA QUATRIÈME ÉDITION

PUBLIÉE EN 1829.

En publiant cette nouvelle édition du second volume de l'Essai sur l'Indifférence, nous ne rentrerons pas dans les discussions que cet ouvrage a fait naître. Le temps, qui juge tout, parce qu'il interroge la raison de tous, décidera la question qu'on a si vivement agitée. Quelques éclaircissemens, quelques réflexions courtes, c'est à cela qu'en ce moment nous avons résolu de nous borner. Du reste, nous renvoyons les lecteurs à notre Défense, qu'il est nécessaire de lire, si l'on veut bien connoître tous les vices et tout le danger de la philosophie cartésienne, l'une de celles que nous avons combattues; et, en même temps, mieux comprendre la méthode que nous y substituons, méthode simple, à la portée de tous les esprits, et la seule certaine

TOME 2.

et universelle, parce qu'elle n'est que la méthode de la société universelle ou catholique.

La méthode opposée est celle de tous les ennemis du christianisme, des hérétiques, des déistes, des athées. Tous cherchent la vérité en eux-mêmes, et n'admettent comme vrai que ce qui paroît vrai à leur raison particulière. Or 'comment le moyen donné à l'homme pour parvenir certainement à la vérité, seroit-il précisément celui qu'emploient tous ceux qui nient quelque vérité ? Comment la méthode qui conduit au scepticisme absolu, conduiroit-elle à la foi parfaite? En dernière analyse, que fait-on, lorsqu'on admet quoi que ce soit pour vrai sur le témoignage de sa seule raison? On croit en soi. Il en faut donc toujours revenir à une croyance dénuée de preuves. Or quel est le plus raisonnable, le plus sûr, de dire: Je crois en moi, ou de dire: Je crois au genre humain? En cas de conflit entre ces deux autorités, quelle est celle qui doit prévaloir, la vôtre, ou celle de tous les hommes? Si c'est la vôtre, tous les hommes ne seront raisonnables qu'autant qu'ils croiront en vous: si c'est la leur,

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