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ni démériter que par un acte libre; un acte ne peut être libre qu'autant qu'il est volontaire; il ne peut être volontaire qu'autant qu'il se fait avec connaissance, ce qui ne saurait avoir lieu dans le cas d'une ignorance invincible. « Non tibi deputatur ad culpam, << dit le Docteur de la grâce, quod invitus ignoras, sed quod negligis « quærere quod ignoras (1); » ou, comme s'exprime saint Thomas: << Si sit talis ignorantia, quæ omnino sit involuntaria, sive quia est «< invincibilis, sive quia est ejus quod quis scire non tenetur, talis ignorantia omnino excusat a peccato (2). » Ce qui est vrai même de l'ignorance en matière de droit naturel, comme l'a décidé le pape Alexandre VIII, en condamnant cette proposition : « Tametsi « detur ignorantia invincibilis juris naturæ, hæc in statu naturæ lapsæ operantem ex ipsa non excusat a peccato formali (3).

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19. L'ignorance vincible est celle qu'on peut moralement surmonter, en prenant les moyens que prennent communément les personnes sages et prudentes de la mème condition, vu l'importance ou la gravité des obligations qu'on est obligé de connaître. L'ignorance vincible a lieu dans celui qui, ayant quelque doute, quelque soupçon sur la malice de son action, et sur l'obligation d'examiner si elle est réellement bonne ou mauvaise, néglige cependant cet examen. « Vincibilis est quæ, cum debeat et possit vinci « ab operante, vel quia errorem jam advertit, vel saltem dubitat « de errore, advertitque simul ad obligationem illum vincendi, negligit illum vincere. » Telle est la notion que saint Alphonse de Liguori nous donne de l'erreur ou de l'ignorance vincible (4). On voit que cette ignorance vient de la négligence. Si la négligence est grave, l'ignorance qui en est la suite est une ignorance crasse ou grossière. Si, outre cette négligence, il y a dessein formel ou propos délibéré d'éloigner les moyens de s'instruire, l'ignorance devient affectée. Le caractère de cette ignorance est la crainte de connaître des obligations qui contrarient nos penchants; on désire de les ignorer, afin de s'en affranchir plus facilement : « Scientiam via« rum tuarum nolumus (5); » ou, comme dit le Prophète : « luit intelligere ut bene ageret (6). »

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20. L'ignorance vincible n'excuse pas entièrement du péché; car elle n'empêche pas que l'action dont elle est la cause ne soit volontaire : « Non totaliter excusat a peccato, dit saint Thomas (7): ce

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qui suppose toutefois qu'elle excuse en partie. En effet, cette ignorance diminue le volontaire, et par conséquent la malice du péché : << Talis ignorantia diminuit voluntarium, et per consequens pecca<< tum. » C'est toujours le même docteur qui parle (1).

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Mais il n'en est pas de même de l'ignorance affectée; elle augmente le volontaire et la malice du péché. « Contingit quandoque.

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quod talis ignorantia directe et per se est voluntaria; sicut cum

« aliquis sua sponte nescit aliud, ut liberius peccet; et talis igno«<rantia videtur augere voluntarium et peccatum; ex intentione « enim voluntatis ad peccandum provenit (2). »

ARTICLE II.

De la Concupiscence.

21. La concupiscence, en général, est un désir ardent, un mouvement intérieur, un penchant qui nous porte plus ou moins fortement vers un objet sensible et agréable à la nature.

On distingue, dans l'école, la concupiscence antécédente et la concupiscence subséquente. La première est ainsi appelée, parce qu'elle prévient le consentement de la volonté. Si la volonté la fait naître ou l'excite, ou se soumet à son empire, on la nomme concupiscence, passion subséquente.

La concupiscence de sa nature n'est point un péché; les mouvements déréglés qu'elle produit, sans que la volonté y prenne part, ne sont point libres; ils ne peuvent par conséquent nous être imputables. Aussi l'Église a-t-elle condamné cette proposition de Baïus « Concupiscentia, sive lex membrorum, et prava ejus desideria, quæ inviti sentiunt homines, sunt vera legis inobe« dientia (3).

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22. La concupiscence excuse de tout péché les actes qui en sont la suite, lorsqu'elle est d'une telle violence qu'elle nous ôte la présence d'esprit, l'usage de raison; à moins cependant que la passion qui produit ces actes ne soit volontaire dans sa cause. Mais si la concupiscence ne fait que troubler l'esprit sans suspendre l'usage de la raison, elle n'excuse point entièrement du péché. Voici ce que dit le Docteur angélique : « Si talis sit passio quæ totaliter in« voluntarium reddat actum sequentem, totaliter a peccato excu

(1) Sum. 1. 2. quæst. 76. art. 4. — (2) Ibidem. — (3) Voyez les Constitutions de S. Pie V, de Grégoire XIII et d'Urbain VIII, contre les erreurs de Baïus.

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sat; alioquin non totaliter. Circa quod duo consideranda videntur. Primo quidem, quod aliquid potest esse voluntarium, vel secundum se, sicut quando voluntas directe in ipsum fertur, vel secundum suam causam, quando voluntas fertur in causam et non in effectum, ut patet in eo qui voluntarie inebriatur : ex hoc « enim quasi voluntarium ei imputatur quod per ebrietatem com« mittit. Secundo considerandum est quod aliquid dicitur volun« tarium directe vel indirecte; directe quidem id in quod voluntas fertur; indirecte autem illud quod voluntas potuit prohibere, sed << non prohibet: secundum hoc igitur distinguendum est, quia a passio quandoque quidem est tanta quod totaliter aufert usum rationis, sicut patet in his qui propter amorem vel iram insa<< niunt; et tunc si talis passio a principio fuerit voluntaria, impu« tatur actus ad peccatum, quia est voluntarius in sua causa, sicut << etiam de ebrietate dictum est. Si vero causa non fuerit volun« taria, sed naturalis, puta cum aliquis ex ægritudine, vel aliqua hujusmodi causa incidit in talem passionem quæ totaliter aufert « usum rationis, actus omnino redditur involuntarius, et per con« sequens totaliter a peccato excusatur. Quandoque vero passio non « est tanta quod totaliter intercipiat usum rationis, et tunc ratio ⚫ potest passionem excludere divertendo ad alias cogitationes, vel impedire ne suum consequatur effectum, quia membra non applicantur operi nisi per consensum rationis ; unde talis passio non « totaliter excusat a peccato (1).

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23. Mais si la concupiscence antécédente, quand elle n'est pas tellement forte qu'elle domine les facultés de notre âme, n'excuse pas entièrement du péché, elle en affaiblit au moins la malice, sans toutefois le rendre toujours véniel. « Si igitur accipitur passio << secundum quod præcedit actum peccati, sic necesse est quod « diminuat peccatum.... in quantum minuit voluntarium (2). »

Ce que nous disons de la passion qui nous porte au mal s'applique également au penchant qui nous porte au bien. Les actes qui en dépendent ne sont pas aussi louables, toutes choses égales d'ailleurs, que s'ils étaient faits par un choix tout à fait libre. « Si « bona passio præcedat judicium rationis, ut scilicet homo magis ex passione quam ex judicio rationis moveatur ad bene agendum, « talis passio diminuit bonitatem et laudem actus (3).

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24. Pour ce qui regarde la concupiscence appelée subséquente,

(1) Sum. part. 1. 2. quæst. 76. art. 7.- (2) Ibid. art. 6.

(3) Ibid. art. 6.

loin de rendre un acte moins volontaire, elle est au contraire une preuve de la force ou de l'intensité avec laquelle la volonté s'y porte, et ne peut par conséquent qu'en augmenter le mérite ou la malice. «< Bona passio consequens judicium rationis augmentat me« ritum (1). Passio autem (mala) consequens non diminuit pecca « tum, sed magis auget, vel potius est signum magnitudinis ejus, «< in quantum scilicet demonstrat intentionem voluntatis ad actum « peccati; et sic verum est quod quanto aliquis majori libidine, vel concupiscentia peccat, tanto magis peccat (2). »

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ARTICLE III.

De la Crainte et de la Violence.

25. La crainte, en général, est une inquiétude de l'âme, un trouble de l'esprit, un mouvement de répulsion, occasionné par la vue d'un mal dont on est ou dont on se croit menacé. On distingue la crainte qui vient d'un principe intérieur, et celle qui est imprimée par une cause extérieure.

La crainte qui provient d'une cause purement intérieure ou naturelle n'empêche pas qu'un acte ne soit volontaire. Un homme, étant dangereusement malade, promet à Dieu de faire une aumône aux pauvres, s'il revient en santé. Quoiqu'il agisse par la crainte de la mort, il agit volontairement et librement. De même, quand un marchand, ne croyant pas avoir d'autre moyen d'échapper au danger que de jeter à la mer les effets dont le navire est chargé, se résout à prendre ce dernier parti pour sauver sa vie, cette résolution est un acte volontaire; c'est une détermination libre, une démarche à laquelle il se porte de lui-même et avec choix (3).

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26. La crainte qui est imprimée par une cause extérieure peut être grave ou légère. Elle est grave, lorsqu'elle a pour objet un mal qui est de nature à faire impression même sur une personne forte telle est la crainte d'une mort probable et prochaine, dont on est sérieusement menacé de la part d'un ennemi; telle est encore la crainte de perdre sa réputation, son honneur, sa liberté, une partie notable de sa fortune, par suite de la méchanceté d'un homme. La crainte est légère quand son objet n'est pas un mal considérable, ou que, lorsqu'il est considérable, on ne le craint que faiblement, soit parce que les menaces ne paraissent pas sé

(1) Sum. part. 1. 2. quæst. 76. art. 6. — (2) Ibid. — (3) S, Thomas, 1. 2. quæst 6. art. 6.

rieuses, soit parce qu'elles ne peuvent que difficilement avoir des suites.

Pour juger si la crainte est grave ou légère, il faut avoir égard à l'âge, au sexe, à la condition et à la délicatesse des personnes qui peuvent en être affectées. Telle crainte qui ne serait pas jugée suffisante pour intimider un homme fort peut l'être à l'égard d'un enfant, d'un vieillard, d'un malade, d'une femme, surtout si elle est naturellement timide.

27. La crainte dont il s'agit est ordinairement l'effet de la violence. On entend par violence une force majeure, venant d'une cause extérieure et libre, qui nous porte à faire une chose que notre volonté désavoue. La violence est communément accompagnée de quelques menaces ou de quelques mauvais traitements, de la part de celui qui en est l'auteur. C'est ainsi que ceux qui persécutaient les premiers chrétiens leur faisaient souffrir les plus cruels tourments, pour les forcer à renoncer au christianisme.

La violence ou contrainte peut être plus ou moins grande, comme aussi la résistance de notre volonté peut être plus ou moins forte ou plus ou moins faible.

28. La violence n'atteint point les actes intérieurs de la volonté. Elle ne peut être forcée de vouloir une chose malgré elle << Invitus « nemo potest velle; quia non potest velle, nolens velle,» dit saint Anselme (1): ou, comme s'exprime saint Thomas, il est contre la nature d'un acte de la volonté que cet acte soit forcé : « contra rationem ipsius actus voluntatis est quod sit coactus vel vio« lentus (2). »

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Mais il n'en est pas de même des actes extérieurs : le plus fort peut contraindre le plus faible à faire une chose malgré lui, ou l'empêcher de faire ce qu'il veut faire : « Per violentiam exteriora « membra impediri possunt ne imperium voluntatis exsequantur (3).»

29. La violence à laquelle on résiste autant que possible, détruit le volontaire. Dieu ne nous impute point les actes extérieurs qu'on nous arrache, et auxquels la volonté ne prend aucune part. « Hinc « fœmina quæ omni modo resistit violentiæ, quæ illi infertur contra virginitatem, non peccat, etiamsi stuprum patiatur invita. » Ainsi s'exprime saint Alphonse de Liguori, d'après saint Augustin (4). Mais celui qui ne résiste pas de toutes ses forces, celui qui, se laissant ébranler par les menaces, par la crainte même de la mort,

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