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II. L'homme n'a pas commencé par parler, mais par crier. La parole suppose des sons articulés.

Des mouvemens violens et subits de frayeur, d'étonnement, de douleur ou de joie, lui ont arraché des cris diversement modifiés, selon la nature et le degré de sentiment qui les produisaient.

Ces cris, répétés en différentes occasions, devinrent les signes communs qui firent bientôt connaître distinctement à chaque individu de la même société les affections qui les inspiraient. Les enfans répétèrent par imitation ceux de leur père et de leur mère. Ce fut d'abord un langage de famille, mais non articulé.

Ces cris ne se bornèrent pas long-tems à exprimer des affections violentes; ils servirent bientôt à exprimer des sentimens plus doux, des besoins habituels; à indiquer des objets physiques, le soleil, la mer, des arbres, des animaux, etc. La mère eut un cri pour appeler son enfant; il y en eut un pour annoncer l'approche d'une bête féroce, le bruit du tonnerre, la tempête, etc.

Ces voix n'étant point articulées, ne pou

vaient être distinguées que par les modifications particulières du sou même et par les degrés de grave et d'aigu: or ces modifications devaient être très-sensibles, pour être aisément reconnues; les sons devaient donc être lents et prolongés, avec des intonations très - marquées. Ces caractères durent se conserver dans le langage, lorsque le progrès naturel des choses y introduisit des sons articulés ; et l'on sent par-là comment les premières langues ont dû être musicales.

Les premiers mots ne furent composés que de voyelles; et les sons les plus naturels, comme les plus sensibles, durent y dominer. Ainsi, dans les langues encore sauvages, les a et les o sont plus nombreux que les autres voyelles. Cela se remarque d'une manière frappante dans les dialectes des fles nombreuses, nouvellement découvertes dans la mer du Sud. Cela est frappant encore dans la langue basque, l'un des monumens les plus curieux de l'antiquité.

III. C'est une des plus belles productions de l'industrie humaine que la parole. Il s'en faut beaucoup que l'homme forme naturel

lement des sons articulés, comme on l'a cru. On en peut juger par les efforts que sont obligés de faire les sourds et muets, lorsqu'on leur apprend à parler.

L'art de la parole s'étendant et se perfectionnant par degrés, on eut bientôt épuisé la combinaison des noms simples; et il fallut pour former de nouveaux signes vocaux, trouver quelques moyens de varier ces combinaisons.

Les accens et les articulations offrirent deux sources fécondes de combinaisons. Il serait assez naturel de croire que les accens ont précédé les articulations; car il paraît plus vraisemblable qu'on chercha à varier les intonations par les accens divers, avant de trouver les articulations, qui sont un effort des organes de la parole.

On sait que dans la langue chinoise, qui est incontestablement très - ancienne, un même monosyllabe exprime différentes choses, suivant l'accent dont il est affecté ; et ces monosyllabes sont en grand nombre. Dans les dialectes sauvages de l'Amérique, les mêmes mots prennent aussi différentes acceptions par la variété des accens.

IV. Les premières articulations qui ser

la connaissance. Voyez l'IoN de Platon. Poëte et prophète (Vates) étaient deux noms synonymes. Dans le huitième livre de l'Odissée, Démodocus ayant amusé ses hôtes du récit de quelques aventures de la guerre de Troie, Ulysse lui dit : «< Vous << avez chanté ces faits d'une manière très«< intéressante, et comme si vous en aviez « été témoin; mais chantez à présent l'aven«ture d'Ulysse dans le cheval de bois, telle << qu'elle s'est passée, et je reconnaîtrai que << les dieux vous ont inspiré vos chants. » Démodocus se met à chanter cet évènement, et Ulysse en pleurant reconnaît la vérité.

Dans les tems plus modernes, les califos et les autres princes de l'Orient avaient leurs Bardes. Le chevalier Maundeville, qui voyageait dans le Levant en 1340, rapporte dans sa relation, que lorsque l'empereur du Cathay, ou le grand khan de Tartarie est à table avec les grands de sa cour, personne n'est assez hardi pour lui adresser la parole, excepté ses musiciens chargés de le divertir. Le même voyageur dit que ces chanteurs de cour étaient des officiers distingués de l'empereur. Leon

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l'Africain parle aussi des poëtes de cour (poetae curiae), qui étaient à Bagdad vers l'an 990. Ces rapports entre les usages du midi et ceux du nord, ont pu faire croire que l'institution des Bardes avait été transportée de l'Orient en Europe.

C'est une circonstance remarquable, que les Bardes celtiques, ainsi que les anciens Bardes de l'Orient et de la Grèce, se distinguaient par la richesse de leurs vêtemens. Hérodote nous dit qu'Arion sauta dans la mer avec les riches habits qu'il portait ordinairement en public (Clio ). Suidas parle de la robe élégante, dans la forme milésienne, que portait le rapsode Antégénide (Str, in Antegen). Virgile, toujours si vrai dans ses peintures, ne manque pas de décrire la robe flottante qui distinguait Orphée, dans son triple emploi de prêtre, de législateur, et de musicien (Enéid.I, 645.)

Les Bardes ne négligeaient aucun moyen de fortifier et d'étendre l'espèce d'empire que les charmes de leur art leur donnaient sur des peuples ignorans et barbares..

Suivant une ancienne tradition du pays

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