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riens et de voyageurs qui n'ont pas assurément les mêmes preuves à nous offrir, pour appuyer les choses singulières qu'ils avancent? Quant à l'impossibilité physique du fait, qui peut la démontrer? On confond trop souvent l'incroyable avec l'impossible. Nous proposerons ici quelques observations, que nous soumettons au jugement de physiciens plus éclairés que nous. 1.o Il ne paraît pas que la nature et lés causes du rhume soient très-connues, et l'on observe qu'il est souvent occasioné par des impressions de l'air, bien légères et très-peu sensibles. 2.° Il y a lieu de croire que le rhume est un peu contagieux, surtout parmi les enfans; on le remarqué particulièrement dans les écoles et les pensions. 3. Saint-Kilda est continuellement chargé de brouillards, l'air y est épais, les étrangers qui y arrivent sont pendant les premiers jours désagréablement affectés de l'odeur qui s'exhale du corps et des vêtemens des habitans: ceux-ci, de leur côté, prétendent qu'ils éprouvent une sensation désagréable à l'approche des étrangers. Ces rapports combinés et rapprochés ne pourraient-ils pas servir à expliquer le fait

dont il s'agit? Est-il absolument impos sible que l'air plus pur et plus rare, que ces étrangers ont respiré, et dont leur haleine et leurs habits sont encore pour ainsi dire imprégnés, ait conservé quelque qualité capable de donner cette espèce de rhume à des hommes vivans dans un air épais et grossier? Nous avouons que ces rapports sont bien subtils, et qu'on ne voit guère de proportion entre cette cause et l'effet que nous y supposons aussi n'avons-nous pas grande confiance en cette explication; mais nous ajouterons qu'il ne faut pas s'arrêter trop rigoureusement sur cette proportion des effets physiques avec leurs causes; n'échappe-t-elle pas en mille cas divers aux recherches des philosophes ? Ceux qui riront en attendant raconter qu'un étranger qui arrive dans une île, enrhume sur-le-champ tous les habitans, riraient sans doute bien davantage, si, n'ayant jamais entendu parler de la peste, ils lisaient qu'une lettre envoyée du Caire à Marseille, a répandu un poison invisible, qui a fait périr dix mille hommes en six semaines. Des peuples de l'Amérique trempent la pointe de leurs flèches dans un suc enve

nimé, dont l'action est aussi prompte que la foudre; une seule goutte presqu'imperceptible, introduite au bout du doigt dans les pores de l'épiderme, donne la mort en une minute. Quelle proportion y a-t-il entre cet effet et sa cause?

Que conclure de tous ces raisonnemens? Que le rhume merveilleux de Saint-Kilda est un fait avéré? Non; mais qu'il faut attendre et douter. Nous connaissons encore trop peu les forces et les moyens de la nature, pour être en état de fixer les limites de son action; d'un autre côté, ne faut pas ajouter trop de foi aux traditions qui paraissent les plus constantes et les plus fidèles. Les témoignages des hommes n'ont jamais qu'une force proportionnée à la probabilité des choses qu'ils

attestent.

il

Terminons cet extrait par quelques observations sur la religion, le caractère et les mœurs des habitans de Saint-Kilda. Ils sont protestants, et n'ont qu'un culte fort simple, auquel ils paraissent attachés sans superstition. Il y a dans l'île une église, et un ministre qui en fait le service, qui prêche, instruit et baptise les enfans, etc.

Ils croient à la fatalité, c'est-à-dire, à une destinée inévitable. En y regardant de bien près, on trouvera que c'est le dogme le plus universellement reçu chez tous les peuples, et dans tous les tems; des nations entières le professent encore aujourd'hui, et c'est peut-être le sentiment intérieur de presque tous les hommes qui n'ont pas réfléchi sur cet objet. S'il y a une question métaphysique qui paraisse intéresser essentiellement la morale, c'est celle de la liberté ou de la nécessité des actions humaines. On voit cependant par le fait qu'elle est assez indifférente à la pratique; et l'homme qui se croit libre, et celui qui se croit entraîné par une invincible nécessité, agiront dans presque toutes les choses de la vie l'un comme l'autre. Rien ne prouve mieux combien les opinions spéculatives, en général, ont peu d'influence sur la conduite des hommes. C'est une vérité qu'il serait important de démontrer, et de rendre bien sensible; ce serait un grand pas de fait pour la perfection de la législation, et la tranquillité des peuples.

La langue qu'on parle à Saint - Kilda

est un mélange corrompu de la langue gallique et de la langue de Norwège. Les habitans ont dans leur prononciation un grassaiement remarquable et incorrigible; ils ne peuvent jamais articuler les lettres liquides.

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Leur langage est emphatique et propre à la poésie; aussi ont-ils des poëtes qui composent non seulement des chansons mais encore des pièces d'un genre élevé. On sent que le cercle des idées et des images poétiques doit être bien resserré. La poésie ne va jamais saus la musique ; le petit peuple de Saint-Kilda l'aime passionnément. Ils ont une espèce de harpe, et dansent au son de cet instrument; l'air le plus médiocre les transporte de plaisir et d'admiration. Les hommes et les femmes chantent ordinairement pour égayer leurs

travaux.

Ils aiment les étrangers, et remplissent, dans toute leur étendue, les devoirs de l'hospitalité. C'est la vertu de tous les peuples barbares, et elle tient peut-être à leur pauvreté même.

Ils sont en général doux, polis, complaisans, humains et officieux. Les femmes Y

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