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La loi donnoit aux prêtres de s'abstenir de vin pendant tout le ten ps qu'ils étoient occupés au service du temple. La même défse étoit faite aux Nazaréens pour tout le temps de leur naza at. Les Juifs sabstiennent de plusieurs sortes d'animaux, dont on trouve le détail dans le lévitique et le deutéronome. Saint Paul dit que les Athlètes s'abstiennent de toutes choses pour obtenir une couronne corruptible, c'est-à-dire qu'ils s'abstiennent de tout ce qui peut les affoiblir; et en écrivant à Timothée, il blâme certains hérétiques qui condamnoient le mariage et l'usage des viandes que Dieu a créées. Entre les premiers chrétiens, les uns observoient l'abstinence des viandes défendues par la loi, et des chairs immolées aux idoles; d'autres méprisoient ces observances comme inutiles et usoient de la liberté que Jésus-Christ a procurée à ses fidèles. Saint Paul a donné sur cela des règles très-sages, qui sont rapportées dans les Epîtres aux Corinthiens et aux Romains.

Le concile de Jérusalem tenu par les Apôtres, ordonne aux fidèles convertis du Paganisme, de s'abstenir du sang des viandes suffoquées, de la fornication et de l'idolâtrie.

Saint Paul veut que les fidèles s'abstiennent de tout ce qui a même l'apparence du mal, et à plus forte raison de tout ce qui est réellement mauvais, et contraire à la religion et à la piété.

Orphée après avoir adouci les mœurs des hommes, établit une sorte de vie, qu'on nomma depuis Orphique; et une des pratiques des hommes qui embrassoient cet état, étoit de ne point manger de la chair des animaux. Il est plausible de dire qu'Orphée ayant rendu sensibles aux loix de la société les premiers hommes qui étoient antropophages, il leur avoit imposé la loi de ne plus manger de viande du tout, et cela sans doute, pour les éloigner entièrement de leur première férocité; que cette pratique ayant ensuite été adoptée par des personnes qui vouloient embrasser une vie pius parfaite que les autres; il y eut parmi les payens une sorte de vie qui s'appela pour lors vie Orphique, dont Platon parle dans l'Epinomis, et au sixième livre de ses loix. Les Phoeniciens et les Assyriens, voisins des Juifs, avoient leurs jeûnes sacrés. Les Egyptiens, dit Hérodote, sacrifient une vache à Isis, après s'y être préparés par des jeûnes: et ailleurs il attribue la

même

même coutume aux femmes de Cyrène. Chez les Athéniens les fêtes d'Eleusine et des Tesmophores étoient accompagnées de jeûnes rigoureux, sur-tout entre les femmes, qui passoient un jour entier assises à terre dans un équipage lugubre, et sans prendre aucune nourriture. A Rome il y avoit des jeunes réglés en l'honneur de Jupiter; et les historiens font mention de ceux de Jules-César, d'Auguste, de Vespasien, de Marc-Aurele, etc. Les atheletes en particulier en pratiquoient d'étonnans.

Les Pythagoriciens ne mangeoient ni chair, ni poisson, du moins ceux d'entr'eux qui faisoient profession d'une grande perfection, et qui se piquoient d'avoir atteint le dernier degré de la théorie de leur maître. Cette abstinence de tout ce qui avoit eu vie, étoit une suite de la métempsycose: mais d'où venoit à Pythagore l'aversion qu'il avoit pour un grand nombre d'autres alimens, pour les feves, pour la mauve, pour le vin, etc. On peut lui passer l'abstinence des œufs; il en devoit un jour éclorre des poulets: où avoit-il imaginé que la mauve étoit une herbe sacrée ? Ceux à qui l'honneur de Pythagore est à cœur, expliquent toutes ces choses; ils démontrent que ce philosophe avoit grande raison de manger des choux et de s'abstenir de fèves. Mais n'en déplaise à Laerce, à Eustathe, à Élien, à Jamblique, à Athenée, etc. On n'apperçoit dans toute cette partie de sa philosophie que de la superstition ou de l'ignorance: de la superstition, s'il pensoit que la fève étoit protégée des dieux; de l'ignorance, s'il croyoit que la mauve avoit quelque qualité contraire à la santé. Il ne faut pas pour cela en faire moins de cas do Pythagore son systême de la métempsycose ne peut être méprisé qu'à tort par ceux qui n'ont pas assez de philosophie pour connoître les raisons qui le lui avoient suggéré, ou qu'à juste titre par les chrétiens, à qui Dieu a révélé l'immortalité, de l'ame et notre existence future dans une autre vie. (M. l'abbé MALLET.)

L'ABSTINENCE soumise à la médecine, a des règles trop importantes pour ne pas les exposer ici.

Le mot abstinence, dans le sens des médecins, signifie la privation des alimens succulens ou trop nourrissans, auxquels on en substitue d'autres qui le sont beaucoup moins, L'abs

Tome I.

B

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tinence, qui constitue une partie du régime de vivre, est l'un des premiers moyens employés contre les différentes maladies aigues et chroniques. Celse en a vanté l'extrême utilité; et les témoignages de presque tous les médecins des différens temps s'accordent à la confirmer. Cette pratique universellement adoptée, a malheureusement dégénéré en routine; on a souvent négligé d'éclaircir le but de l'institution et les médecins eux-mêmes trop paresseux, ou trop peu observateurs, ont dédaigné de descendre dans des détails qui leur paraissoient trop peu importans. La nécessité de l'abstinence est devenue une espèce d'axiôme qu'il seroit dangereux d'attaquer, il n'est point de frater ou de garde malades qui ne se crût assuré de la soutenir contre les plus fortes démonstrations. Je n'ai garde de contester l'utilité du moyen dont je parle ; mais c'est contre l'abus que je m'élève : ramenons ce principe aux vues qui le firent imaginer, et puisque les autorités ont tant d'empire sur les opinions, opposons à l'opinion commune la plus respectable des autorités en médecine.

Hippocrate prescrivoit l'abstinence dans quelques maladies, ou dans certains de leurs temps; mais il mettoit autant d'attention à choisir le moment où il falloit l'admettre ou l'exclure, qu'à choisir l'instant où il falloit appliquer un médicament décisif; il expliquoit l'espèce d'aliment qu'il falloit admettre suivant l'état et l'habitude du malade, l'espèce et le temps de la maladie; il n'étoit point réduit à la pitoyable coutume de n'avoir qu'une seule formule de régime applicable à tous les tempéramens, à tous les goûts, à toutes les maladies : il savoit combien il importe de ne pas exténuer des forces à peine suffisantes contre le mal; et son grand art consistoit principalement à déterminer les cas où les forces pouvoient se suffire sans nourriture, et ceux ou elles en exigeoient.

On est surpris de trouver le contraste le plus frappant entre les préceptes de ce père de la médecine et la méthode de la plupart des modernes. Le premier soin d'un médecin auprès d'un malade, est de prescrire un régime sévère, qui doit être le même jusqu'à la fin de la maladie. On s'informe rarement de ses habitudes, de ses goûts, ou de ses besoins dans la vue de modifier le plan du régime; on insiste sur la nécessité d'exécuter ponctuellement tout ce qu'on a ordonné, et les instances les plus vives d'un malade qui s'épuise, ob

tiennent à peine la révocation de cet arrêt. Tant qu'un mouvement de fièvresse fait appercevoir, le médecin, dont l'attention n'est pas toujours excessive, l'attribue à un reste de mal que la diete et les remèdes n'ont pas dompté; mais il est une fièvre de convalescence ou de langueur qui suit les maladies un peu longues, et que l'usage seul des alimens modéré peut dissiper. C'est principalement dans les hôpitaux et autres lieux publics, qu'on voit une foule de ces victimes insensiblement consumées par la rigueur d'une abstinence déplacée elles n'y ont point la ressource d'être entourées de gardes ou de parens complaisans qui veuillent les contenter à l'insçu du médecin.

Les hommes qui se portent le mieux, ne supportent qu'avec peine les changemens trop subits dans la manière de vivre. Osera-t-on prétendre que cet effet n'ait point lieu dans les maladies? . . Il en est qui ne font qu'un seul repas par jour, d'autres en font deux; trois suffisent à peine à la voracité de quelques autres, et la suppression d'un seul repas les réduit aux angoisses, on sait encore combien l'habitude rend le manger indispensable à certaines heures marquées. Un sentiment de faim identifié, pour ainsi dire avec nousmêmes, nous avertit de ce besoin, et ce n'est qu'en souffrant qu'on parvient à l'éluder.

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Il faudroit même pour se conformer aux vues saines d'Hippocrate, choisir par préférence l'heure ordinaire des repas pour donner aux malades les bouillons, les crêmes ou autres nourritures légères, que les circonstances de la maladie ou de l'abattement des forces digestives, ont fait substituer à une nourriture trop succulente.

Il semble, parce que je viens de dire, qu'une diète outrée n'ait d'autre inconvénient que de prolonger une convalescence, ou d'abattre les forces d'un malade qui auroit besoin d'en acquérir, et que tout au moins elle est conforme à la doctrine d'Hippocrate dans les maladies aigues; mais ce qu il y a de plus malheureux, c'est que le choix des bouillons de viande qu'on substitue à la nourriture qu'Hippocrate donnoit à ses malades, est dans la plupart de ces maladies un inconvénient plus redoutable que la nourriture solide. On fait mitonner avec soin de la chair de bœuf, de veau, de mouton, de voTaille; on en rapproche la gelée, on réduit dans le petit vo

lume d'une prise de bouillon, tout ce que ces masses de chair peuvent contenir de substance nourricière, et l'on croit avoir beaucoup fait en épargnant à l'estomac la peine de la séparer. N'est-ce pas un mal que de laisser l'estomac et ses sucs sans action? Croit-on même que le volume d'un aliment, d'ailleurs peu abondant en suc, soit une chose inutile dans l'économie animale? Et n'a-t-on pas à se reprocher la transition subite d'une action continue de ces organes à un repos présque parfait? Qu'on considère ce volume de chyle passant dans les secondes voies, moins accoutumées que, les premières au travail pénible d'un surcroît d'aliment qu'on considère la nature même de cet aliment, son gluant, sa tendance à la putréfaction et l'on verra s'il est de tous ceux qu'on pourroit choisir, le plus convenable dans cet état de chaleur inflammatoire qui fait tout dégénérer. Il est triste pour l'espèçe humaine que l'empire de l'habitude nous aveugle au point de nous rendre indifférens sur les objets les plus importans et les plus familiers. Les hommes se suivent à la piste sans examen: heureux encore si, après des milliers de fautes, ils ouvrent les yeux au vrai, et s'il leur reste assez de courage pour l'adopter.

(M. LAFOSSE, médecin.)

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