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unique, l'amour et la connaissance surnaturels de Dieu : il est bien forcé d'avouer que cet amour premier est compris dans la notion de la charité, mais je ne sais pas s'il en parle deux fois, et plus longuement que cela. Dans son système il n'est le motif, ni la cause, ni le but, ni l'objet de rien; quelle théorie, quelle religion ! L'amour de Jésus-Christ n'est pas soupçonné dans le nouvel Evangile; ce divin Sauveur y fait si pauvre figure, il y est réduit à la taille et à la mesure de tous les Sauveurs qui paraissent aujourd'hui sur la scène, jaloux de déraisonner une minute; il n'a pas plus racheté le monde qu'eux; sa mort fut l'effet prévu et accepté de la malice de ses ennemis; elle n'a pas plus de mystère que celle de Socrate. Mais si les Messies du jour n'étaient venus féconder et élucider sa parole, quels fruits aurait-elle produits? Elle serait restée la loi des tyrans, des imposteurs et des bigots, tant elle est indécise entre le bien et le mal. En un mot Dieu ne fait plus rien dans le monde transformé : on semble lui accorder uu bout de Purgatoire, mais ce n'est que pour roussir un peu ceux qui déplaisent au nouveau Christ. Quant à Dieu lui-même, comme il n'a pas promulgué le moindre article de loi, on ne voit pas trop pourquoi il aurait à s'occuper de châtimens et de peines; et après tout, lorsque le règne du nouvel Evangile sera établi sur la terre, et que tous ses ennemis auront mordu la poussière, le mal ancien ayant disparu, et la parfaite organisation de la société prévenant son retour, il n'y aura plus besoin d'un lieu d'expiation.

31. Plus de zèle pour son salut.

On sait que M. de Lamennais n'est point du tout favorable à la piété, à la vertu qui a pour but le salut individuel; dans le nouvel Evangile il appelle cela de l'égoïsme; uniquement préoccupé de la réalisation de ses idées, il ne permet pas qu'aucune forcé s'emploie pour un but étranger à celui-là. Il ne concevrait pas que la conversion d'une âme fût un objet digne d'occuper Jésus-Christ. La pécheresse pleurant aux pieds du Rédempteur ne serait rien si elle n'était la société. C'est fort bien; mais il y a d'autres faits dans l'Evangile ; nous aurions été bien aises de savoir ce que représente le bon larron, par exemple. Voilà un homme qui se préoccupe de son salut indivi

duel; l'égoïste! Ne devait-il pas lui suffire d'être une manifestation de la justice sociale qui punit le crime? C'était certes bien pour JésusChrist le moment de nous apprendre tout cela. Eh bien, tout au contraire, il daigne exercer pour ce pendu les fonctions de son sacerdoce éternel, il donne l'exemple à ces prêtres qui se dévouent au plus désolant et au moins glorieux des ministères, en accompagnant jusque sur les échafauds les misérables que la justice humaine a frappés (au grand scandale du grave et sérieux Sismonde, dont l'austérité se révolte de tant d'indulgence pour les criminels); il lui promet son Paradis pour le jour même, sans attendre que F. Lamennais soit venu le fabriquer. Aussi celui-ci n'est-il pas fort content de cela il consent bien à reconnaître que Jésus a calmé bien des souffrances par la promesse d'une meilleure patrie, il pousse même la bonne grâce jusqu'à le remercier pour le bien fait aux siens, mais il finit par lui montrer la porte. Cela, d'après lui, était une douce chansonnette au moyen de laquelle le Christ, comme une tendre nourrice, endormait les bonnes gens sur son sein. Est-ce clair? Le 19° siècle ne tète plus, il renvoie sa nourrice, il lui faut autre chose que les historiettes du Paradis. C'est du Henri Heine tout pur; mais ce poète obscène et athée, qui fait les délices de l'Allemagne progressiste et démagogique, et ne déplaît point à la France humanitaire, ne se prétend point Chrétien quoiqu'il ait ajouté à sa circoncision rabbinique le baptême de Luther; il serait jaloux que quelqu'un pût se dire plus impie que lui, il revendique hautement le titre de païen, et il ne l'a pas volé. Le Christ disait : «Que sert à un homme de gagner le monde entier, s'il vient à perdre son âme?» L'Anté-Christ dirait: Que sert de sauver son âme si l'on ne sauve pas le monde entier ? Cette parole est celle du nouveau traducteur. Sa doctrine est le contre-pied de celle de J.-C., et elle risque grandement de n'être guère morale.

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Qu'est-ce qui fait en effet la vraie grandeur de l'homme, toute sa dignité et la grandeur et la dignité de tous, si ce n'est la pureté de cœur, le respect pour soi-même et la gloire proportionnée au mérite? La parole sortie de la bouche de celui qui est la bonté suprême, avertit l'homme d'éviter toute souillure pour n'être pas repoussé du séjour où rien d'impur n'entrera; mais si la règle morale du bien, du moins la règle suprême, ne consiste qu'à

III SÉRIE. TOME XIV.- N° 82; 1846.

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ne point faire du tort à la société, l'homme n'est tenu qu'à diriger ses actes à l'utilité commune de la société où il trouve sécurité et protection, c'est-à-dire à lui-même en définitive; il doit finir par penser qu'il suffit de nettoyer le dehors du vase, et c'est sans motifs que M. de Lamennais condamne les mauvaises pensées. Voilà donc où aboutit cette absurdité du salut social opposé au salut individuel c'est un poison qui s'attaque au cœur, à la partie la plus noble et la plus intime de l'âme, et qui désorganise la morale, bien plus sûrement que si l'on se contentait d'en nier quelque précepte, si important qu'il soit.

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Polémique Catholique,

LE DR STRAUSS ET SES ADVERSAIRES.

LE D' KLAIBER.

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Strauss n'a pas in..

Point de Christianisme sans le Christ historique. - Le doute est une marque de faiblesse d'esprit, et non une preuve de science. venté, il n'a fait que répéter certaines objections. et incomplète. Absurdité du Christianisme humanitaire de Hégel. Efforts des théologiens protestans pour limiter le libre examen.

Sa critique est bornée

On croirait, au premier coup d'œil, que le royaume de Wurtemberg, qui a produit Strauss, est de tous les pays protestans le plus avancé dans la voie du Rationalisme. On s'imaginerait volontiers que la Faculté luthérienne de Tubingue, où Strauss a composé son livre, doit être un foyer d'incrédulité. Il est au contraire à remarquer que cette partie de l'Allemagne mieux résisté que les autres à cette renaissance de l'esprit païen qui s'intitule philosophie. Depuis l'invasion des doctrines rationalistes dans les écoles protestantes, plusieurs théologiens du Wurtemberg se sont prononcés contre les nouvelles opinions avec une certaine décision. On doit, selon Zeller, nommer avant tous les autres Storr, Flatt, Susskind et Bengel. Le livre de Strauss qui devait rencontrer plus tard de nombreuses marques de sympathie, fut accueilli dans le Wurtemberg avec une défaveur qui dut être très-pénible à l'ancien professeur de Tubingue. Le docteur Klaiber appartenait comme Strauss au clergé de ce royaume; il était pasteur dans le Remsthal. Le livre qu'on a publié sous son nom a été formé de notes trouvées dans son secrétaire, et surtout à l'aide d'un travail qu'il avait inséré dans le IX volume des Études du clergé évangélique de Wurtemberg. Il a paru à Stuttgard en 1836, sous ce titre Remarques sur la vie de Jésus au point de vue critique du Dr Strauss. L'auteur de ce livre n'était pas exempt de toute espèce de préventions rationalistes. Cependant il a toujours considéré la

doctrine de la Rédemption comme la base essentielle de tout Christianisme véritable. Il ne pouvait s'habituer, comme le font beaucoup de théologiens protestans, à comprendre un Christianisme dont le Fils de Marie ne fût pas la pierre angulaire. Pourtant il n'est pas rare, même en France, de rencontrer ce Christianisme décapité, dont M. Edgar-Quinet s'est si spirituellement moqué dans le Génie des religions'.

Parce qu'on a un sentiment vague de la grandeur morale du Christianisme, parce qu'on se plaît à rêver, le soir, sous la voûte sombre des cathédrales gothiques, parce qu'on ne veut pas traîner aux gémonies le sacerdoce catholique, on se proclame audacieusement et facilement Chrétien. Mais il n'y a point de Christianisme pour qui n'accepte pas les humiliations de la crèche et les angoisses du Golgotha. Le Christ n'est pas une abstraction platonicienne ou bien une entité de la scholastique, c'est un fait, un fait réel. On ne peut déchirer en lambeaux le tissu divin de sa vie merveilleuse. S'il n'est pas le fils de Dieu, il ne peut être rien à nos yeux. On croit le relever en le proclamant bien plus grand que Socrate. On ne s'aperçoit pas qu'en se contentant de le présenter comme le plus grand des hommes, on ne fait que le réduire au rôle d'un imposteur. Quand donc les adversaires de la révélation auront-ils le courage complet de leur odieux système? Sans doute, en les voyant descendre plus avant dans l'abîme du scepticisme, nous ne pourrons nous empêcher de gémir encore sur l'avenir de leur âme égarée. Mais n'en résultera-t-il pas pourtant une grande leçon pour toute la société moderne? Ne saurat-on pas voir enfin que si l'on veut obstinément repousser le Christ historique, on ne saurait rien garder de ces vérités chrétiennes qu'on reconnaît pourtant comme la base sainte et solide de tout le monde nouveau ?

Klaiber, lui, ne comprend pas le Christianisme sans le Christ historique. Dans un jugement général qui sert d'introduction, il s'indigne, avec une sorte de pétulance qui fait plaisir, contre les prétentions de l'exégèse nouvelle : « Le scepticisme, dit-il, a bien grandi » dans le livre de Strauss. Il veut, comme un géant, s'élever jus

Edgar Quinet, Génie des religions, p. 92.

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