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HISTOIRE SAINTE

D'APRÈS LA BIBLE,

PAR M. VICTOR DURUY,

Professeur d'histoire au collége, royal de Henri IV'.

Depuis plusieurs années M. Duruy travaille à une Histoire romaine; deux volumes ont déjà été publiés. Laissons-le nous apprendre lui-même comment il a été conduit à interrompre ces études pour composer l'ouvrage que nous annonçons. « Arrivé à l'empire, à cette société immense qui a reçu toutes les civilisations antérieures, tous les cultes, toutes les doctrines, comme un océan où seraient venus tomber tous les fleuves du monde, nous avons dû étudier les influences les plus actives, remonter, si j'ose dire, chacun de ces grands courans d'idées et de croyances. Celui qui part du Sinaï et du Golgotha est lé plus profond et le plus rapide; il a tout inondé, tout recouvert. Pour le mieux comprendre, nous avons rouvert la Bible; mais lorsque nous nous sommes retrouvé en face de ces grandes figures de Moïse, de David et des prophètes, il nous est arrivé ce que les serviteurs de Godefroy de Bouillon racontaient de leur maître. Quand le pieux duc entrait dans une de ces églises aux riches sculptures et aux vitraux resplendissans, quelque affaire qui le pressât, il restait à contempler les vénérables images, et il oubliait les heures à lire les devises des saints, à se faire raconter les merveilleuses légendes ; il regardait, il écoutait et ne parlait plus 2.

M. Duruy s'est donc, lui aussi, laissé surprendre au charme de la Bible; il a mis de côté pour quelque tems son histoire romaine, et lè voilà qui déroule à notre regard les annales du peuple juif. Remar

1 vol, in-12, chez Hachette. L'auteur a publié un abrégé de cet ouvrage, 1 vol. in 18. Prix: 75 centimes.

2 Préface, p. 10. Cf. Guillaume de Tyr, I. ix, c. 2.

quons d'abord l'intérêt tout particulier que présente son ouvrage, Prenez presque tous les abrégés d'histoire sainte qui ont vu le jour depuis Lemaistre de Saci (1672), vous y trouverez, il est vrai, dans leur ordre et avec leurs détails, les événemens des deux Testamens; ils reproduisent aussi leur esprit moral et religieux; mais vous regret tez. trop souvent que la forme vive, animée et pittoresque du recit att disparu. Il n'en va pas ainsi avec M. Duruy : il conserve sa physionomie poétique et grandiose, son allure tantôt simple, tantôt majestueuse et toujours originale. Aussi sa narration offre-t-elle un attrait qui vous plaît, vous séduit et vous enchante. Quand vous avez ouvert le livre, vre, vous en poursuivez la lecture sans fatigue, avec une sorte de curiosité; vous avez sous les yeux un spectacle plein de vie, à chaque instant de nouveaux personnages apparaissent sur la scène ; c'est un yaste drame avec son commencement, son développement, ses com, plications et son dénouement, et ce drame vous présente un intérêt toujours croissant. Vous le concentrez d'abord sur un seul être, puis vous le partagez entre Adam et Eve. Une chute profonde se fait, vous tremblez pour le genre humain, mais bientôt une promesse du Ciel yous rassure, et vous accompagnez les deux coupables dans leur exil. Déjà ils ne sont plus seuls; une postérité nombreuse se presse sur la terre. Et alors vous entendez une voix disant : «Mon esprit ne demeu »rera pas toujours avec l'homme, parce qu'il n'est plus que chair... » J'exterminerai tout de dessus la surface de la terre, depuis l'homme » jusqu'aux animaux, depuis le reptile jusqu'aux oiseaux du Ciel. » Et quand vient le déluge, avec quelle anxiété ne voyez-vous pas flotter sur les eaux l'Arche qui renferme les restes échappés au naufrage! Enfin elle touche au port, et Noé fait monter vers le Ciel l'encens du sacrifice. Vous assistez ensuite à la construction de Babel, à la dispersion des peuples, aux commencemens de l'idolâtrie, à la vocation du fils de Tharé. Quels noms que ceux d'Abraham, d'Isaac, de Jacob, du saint homme Job! Quelles mœurs douces et pures! Quelle vie pleine d'une ravissante poésie. Voici maintenaut les descendans des patriarches en Egypte, puissans d'abord, puis persécutés par les Pharaons, délivrés par Moïse, errants au milieu du désert, recevant au pied du Sinaï les Tables de la Loi, introduits enfin dans la terre de Chanaan. Josué, et après lui les Juges les conduisent à la victoire, tandis

qu'ils restent fidèles au Seigneur; mais lorsque par leur désobéissance ils attirent ses châtimens, alors la verge de sa fureur les frappe. Mais déjà ils ne veulent plus pour Roi le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob; il leur en faut un qui soit semblable à celui des nations voisines, pris parmi les hommes, et Saul leur ést imposé. Nous touchons aux grands règnes de David et de Salomon, à la construction du Temple. Elle est triste et lamentable l'histoire du peuple juif sous les successeurs de ces deux princes; on voit que la main de Dieu s'appesantit de jour en jour sur lui. Des hommes justes, de saints rois, des figures angéliques vous apparaissent encore; mais il semble que les méchans dominent. Et voilà pourquoi Dieu siffle la mouche d'Egypte et la guêpe d'Assyrie, et elles viennent et elles remplissent toutes les vallées du pays, les cavernes et les creux des rochers. Vous avez dono le schisme des dix tribus et les meurtres et le sang qui souillent les royaumes d'Israël et de Juda, et la dure captivité de Babylone. Mais, au milieu de leurs misères, des voix prophétiques s'élèvent qui aleur annoncent le retour dans la patrie. Et, en effet, Cyrus, leur libérateur, vient de paraître ; ils partent donc pour Jérusalem, où ils vont attendre le grand Libérateur du genre humain, le Messie promis à leurs pères, Jésus-Christ.

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M. Duruy nous fait entendre la voix des prophètes qui l'annoncent, -et qui domine le fracas des empires. Quels hommes que ces envoyés de Dieu! Ils ne rédigent pas seulement les annales du peuple juif, ils se font en quelque sorte les historiens du genre humain tout - entier. Voulez-vous savoir d'où il vient? Interrogez Moïse et il vous dira son origine; d'autres vous révéleront son présent et son avenir. Et ce n'est pas assez pour eux de nous apprendre les grands événé-mens qui se sont accomplis, ils veulent aussi nous en donner l'intel!ligence. Cherchez-vous à découvrir les desseins de Dieu sur le monde? Ouvrez le chapitre dans lequel Daniel déroule à nos regards la succession des quatre grands empires qui doivent précéder la venue du Messie.

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Et ces hommes dont l'œil pénètre dans l'avenir pour lui dérober ses secrets, sont aussi, dans toute la force du mot, les vrais amateurs de la sagesse. Ils n'ont pas, il est vrai, comme les philosophes d'Athènes et de Rome, une doctrine pour le vulgaire, et une autre

pour les initiés; ils n'enseignent pas, celui-ci une chose, et celui-là tout le contraire. Loin de là; depuis Adam qui reçut la première promesse du Rédempteur jusqu'à saint Jean-Baptiste qui nous le montre descendu sur la terre, ils annoncent toujours la même doctrine. Et pourquoi ne trouvez-vous pas dans leurs écrits tous ces systèmes opposés qui pullulent dans les livres des philosophes d'Athènes et de Rome? C'est qu'ils ont été instruits par la parole de Dieu, c'est que leur sagesse vient du ciel et ne connaît pas le changement. Aussi, quand ils entendent la voix du Très-Haut qui les appellé, s'empressent-ils de lui répondre: Seigneur, nous voici. Consolans ou terribles, ils vont partout porter ses ordres; souvent la mort est là qui les menace, ils n'en reprochent pas moins leurs prévarications aux grands et aux petits. Ainsi firent et feront toujours les vrais envoyés de Dieu. Pour lui, ils se laissent persécuter, honnir, flageller, enchaîner, torturer et scier; ou bien vous les voyez encore, quand les jours sont mauvais, errer au milieu des forêts et des déserts, se cacher sur le sommet des montagnes, dans les antres et les cavernes, dénués de tout et revêtus à peine de quelques peaux de chèvres et de brebis. N'avons-nous pas maintenant nos missionnaires qui nous rappellent la vie de plusieurs des prophètes d'Israël?

Et puis, lorsque ceux-ci se font ainsi les interprètes de Jéhovah, comment, demande M. Duruy, « n'être pas frappé du sentiment poétique qui colore si vivement leurs pages? Les muses grecques habitent la terre; la poésie hébraïque vit par delà les nuages et les étoiles, elle nage dans l'infini. Aussi, en élévation, en pureté morale et grandeur, rien ne lui est comparable. Que Pindare est loin d'Isaïe! où trouver un rival à Job? quelle élégie, dans aucune langue, vaut les prières d'Ézéchias et de David, les plaintes des captifs ou les lamentations de Jérémie ! et ces chants à la fois si éclatans et si lugubres! dans l'histoire, ces scènes imposantes du désert, ces entretiens avec l'Éternel, cette continuelle et majestueuse intervention du Très-Haut qui voit, anime, dirige la création tout entière, et qui, pour parler avec Moïse, porte et conduit son peuple comme l'aigle lorsqu'il - étend ses ailes puissantes et qu'il instruit ses aiglons à prendre leur essor.» (P. VII.)

Et ce que les prophètes célèbrent avec le plus d'enivrement et

d'enthousiasme, c'est l'apparition future du Messie, avec toutes les circonstances de sa vie et de sa mort... Dieu vient de promettre à David que le Rédempteur du monde sortira de sa race; mais comment le reconnaître parmi ses descendans qui seront aussi nombreux que les sables de la mer? Prêtez l'oreille : voilà que dans le lointain des âges des voix s'élèvent pour nous donner son signalement; le roiprophète le premier saisit sa harpe, et il nous chante ce que l'esprit d'en-haut lui inspire. Regardez : vous ne trouvez d'abord, il est vrai, que quelques traits sur la toile qui doit représenter le Christ du Seigneur; mais laissez les tems s'écouler, les peintres se succéderont sans interruption, et bientôt viendront les grands coups de pinceau qui achèveront le tableau.

M. Duruy nous montre le Messie apparaissant au tems marqué par les prophètes. On connaît l'histoire : Auguste est seul maître de Rome, de Rome, la maîtresse des nations. Il a fermé le temple de Janus; l'univers vit en paix sous sa puissance. Et Jésus-Christ vient alors au monde.

On dirait que M. Duruy a voulu protester, au nom du bon sens et de la vérité, contre les rêveries des exégètes allemands. Il prend donc, dans sa sublime simplicité, le récit évangélique; tous les faits que Strauss s'est efforcé de transformer en mythes, il les accepte, sans paraître douter un instant de leur réalité... Ainsi, nous sommes transportés d'abord au berceau de Bethléem..... puis, quand les jours que le Messie doit passer dans la retraite sont écoulés, nous le voyons commencer sa mission divine, passant sur la terre en faisant le bien. Il guérit les malades, redresse les boiteux, rend le mouvement aux paralytiques, la vue aux aveugles, l'ouïe aux sourds, la vie aux morts, en un mot, il sème les prodiges sur ses pas : les miracles ne semblent pas effrayer M. Duruy. La croix s'élève sur le Golgotha, Jésus expire; on veut le sceller dans un tombeau, mais il en brise la pierre, et monté au ciel, il envoie le Saint-Esprit à ses apôtres. La transformation qui s'opère en eux, M. Duruy nous la fait remarquer. Ce ne sont plus ces hommes timides qui tremblaient à la voix d'une servante, vous avez devant vous des conquérans intrépides qui partent pour aller soumettre le monde à la croix.

Un prophète avait dit : « Toutes les nations connaîtront le Sei

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