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NOTA. Pour marquer le chemin que l'on a fait depuis 1830, et montrer comment, par un circuit, on est revenu en matière religieuse, en alléguant la liberté, fort au delà du terme où l'on était parvenu sous la Restauration à l'ombre de la censure et sous le patronage avoué de l'ancienne dynastie ; je veux communiquer au public trois lettres qui me furent adressées, en 1824, à l'occasion du petit volume que je publiai à cette époque sur les libertés de Eglise gallicane, la Déclaration de 1682 et la loi organique du concordat, c'est-à-dire tout ce qui forme aujourd'hui la première partie du Manuel, celle contre laquelle on a dirigé toutes les attaques. On verra quelle était la tolérance et l'urbanité de ce temps, comparée aux violences inquisitoriales de l'ultramontanisme actuel.

La première de ces lettres est de M. d'Hermopolis, l'évêque le plus éminent de cette période, qui, loin de condamner mon ouvrage, appelle en quelque sorte mon jugement sur le sien.

La seconde est d'un homme d'État des plus doctes et des plus laborieux de l'Empire, renommé surtout pour la rectitude de son esprit, M. le comte Daru.

La troisième enfin sort de la plume d'un écrivain royaliste trèsspirituel, attaché à la rédaction du Journal des Débats.

En 1824, j'étais simple avocat.

Lettre de M. l'évêque d'Hermopolis.

• MONSIEUR,

Je vous dois bien des remerciments pour la bonté que vous avez eue de me faire cadeau de votre traité des libertés de l'Eglise gallicane. Un jurisconsulte tel que vous a compris aisément qu'une pareille matière était digne d'occuper les meilleurs esprits. -On a tant abusé de ces libertés pour tourmenter, persécuter et détruire, qu'il n'est pas étonnant que quelques esprits en soient effarouchés. Je souhaite que vos occupations vous permettent de parcourir, dans l'écrit que j'ai l'honneur de vous adresser, le chapitre page 48, qui pour objet les libertés de l'Eglise gallicane, et que vous goûtiez la manière dont elles y sont présentées.

» Agréez, Monsieur, étc.

» Le pair de France, premier aumônier du roi, •† D., év. D'HERMOPOLIS.

» 9-août 1824. »

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» J'ai pris la liberté de vous offrir un opuscule dont l'unique mérite est de contenir l'éloge d'un grand citoyen dans la disgrâce; c'était un hommage bien dû à vos talents et au noble emploi que vous en faites; tout le monde vous doit de la reconnaissance; car, en protégeant les intérêts de vos clients, vous défendez toujours quelques-uns de nos droits. Aujourd'hui vous consacrez votre érudition et votre éloquence à soutenir les libertés de l'Eglise gallicane que des insensés voudraient abandonner pour détruire plus facilement les libertés publiques. C'est une belle cause que vous gagnerez au jugement de tous les amis de la raison. Comme vous le dites, cette étude est pleine d'attrait, parce qu'elle se lie aux faits les plus curieux de notre histoire.

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Depuis quelques heures que j'ai reçu votre ouvrage, je l'ai lu en me promettant bien d'y revenir, et je m'empresse de vous remercier de la solide instruction que j'y trouve.

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Agréez, Monsieur, l'assurance de la haute considération que vos talents et votre caractère m'ont dès long-temps inspirée, et avec laquelle j'ai l'honneur d'être votre très-humble et très-obéissant serviteur,

Paris, le 1er août 1824. »

» DARU.

Lettre de M. Fiévée.

. MONSIEUR,

• J'ai reçu l'exemplaire que vous avez bien voulu m'adresser de votre ouvrage sur les libertés de l'Eglise gallicane. Vous ne doutez sûrement pas de l'intérêt avec lequel je me hâterai d'en rendre compte aussitôt que je serai quitte de la grande cause de prétendu crédit public dont je me suis chargé. Il faut que nous soyons gallicans, ou que nous redevenions encore une fois athées ou indifférents à la manière du XVIIIe siècle; car, pour retomber dans l'imbécillité, le siècle ne le peut pas. Pour l'hypocrisie, ce n'est jamais qu'un passage; et c'est à quelque chose de fixe, par conséquent de raisonnable, qu'il faut tendre. Vous y contribuerez comme vous avez fait jusqu'ici sur d'autres objets. Votre mission n'est pas plus étendue que celle des apôtres ; ils mettaient la vérité dans les esprits et laissaient faire au temps.

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J'ai l'honneur d'être bien sincèrement, Monsieur, votre trèshumble et très-obéissant serviteur,

Paris, 10 février 1825. »

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§ 1. Utilité de l'étude du droit canonique.

Depuis long-temps je conseille aux jurisconsultes, aux magistrats, à tous les hommes publics, de reprendre une étude jadis fort cultivée, et qui depuis a malheureusement cessé de faire partie de l'enseignement dans les Facultés de droit je veux parler du droit canonique.

Sans doute il ne s'agit plus des matières bénéficiales, dont la connaissance serait aujourd'hui sans utilité; mais ce qu'aucun jurisconsulte, aucun homme éminent dans l'Etat ne peut ignorer, ce qu'il ne lui suffirait pas de savoir imparfaitement, ce sont les principes sur la nature, le gouvernement, la hiérarchie de l'Eglise et sa discipline; l'histoire des usurpations incessamment renouvelées et toujours croissantes du pouvoir spirituel sur l'ordre civil, et l'histoire corrélative des obstacles et des barrières que nos pères y ont apportés. Il faut qu'il connaisse avec précision ce que la loi politique ne saurait entreprendre sans porter atteinte à la liberté religieuse; et réciproquement, qu'il sache bien ce qu'un roi, eût-il la piété de saint Louis, s'il a en même temps sa sagesse et sa fermeté, ne saurait négliger ni souffrir, sans manquer à sa propre dignité, à l'indépendance de sa couronne, à la protection qu'il doit aux citoyens. Ces principes importants, souvent controversés, rarement bien connus, doivent être étudiés, médités, à l'égal de nos autres lois politiques, sur lesquelles ils exercent tant d'influence. Une connaissance exacte du droit sera toujours le meilleur moyen de confondre l'usurpation et d'y résister avec succès.

Je sais qu'une philosophie qui en cela s'est montrée avec trop de présomption, et dont toutefois je ne prétends pas médire, s'est quelquefois persuadée qu'elle pouvait suffire : seule à repousser les agressions de l'ordre spirituel contre l'ordre civil, et à maintenir la paix des religions dans l'Etat! mais évidemment elle s'abuse. Les arguments purement

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philosophiques, irrésistibles aux yeux des philosophes, n'ont pas la même puissance sur les hommes qui, par conviction, par habitude, ou même par respect humain, tiennent davantage aux croyances et aux pratiques de leur culte. L'ignorance, la mauvaise foi, ou seulement la prévention, accusent bientôt la philosophie d'athéisme, et ses seules doctrines ne font pas toujours autorité. En effet, je n'appelle autorité que ce qui est capable de faire impression sur l'esprit de ceux que l'on prétend convaincre; or, tel est l'avantage que procure la doctrine toute faite des libertés de l'Eglise gallicane. Ces libertés ne sont point une invention moderne; elles sont aussi anciennes que le christianisme parmi nous elles ne constituent pas un privilége ou une exception; elles ne sont qu'un vestige de ce qui, dans l'origine, formait le droit commun de la chrétienté ; elles ont pour elles la sanction du temps, et celle des plus grands rois et des plus grands hommes que la France ait produits. Loin d'être opposées à la religion, elles en font en quelque sorte partie; sachez donc les connaître, afin de pouvoir les invoquer à propos. Les tartufes ne pourront point vous appeler tisons d'enfer, athées ni même héréti– ques, quand, démasquant l'hypocrisie qui trop souvent recouvre un ambitieux désir de domination, et résistant à des entreprises menaçantes pour nos libertés et notre régime intérieur, vous pourrez dire à vos adversaires : Ce n'est pas un ennemi de la religion qui s'exprime ainsi, c'est Arnauld, c'est Pascal, c'est Pithou et Bossuet, c'est toute l'Eglise de France de 1682 qui vous dit : « Conservez ces » fortes maximes de nos pères, que l'Eglise gallicane a trou» vées dans la tradition de l'Eglise universelle ! »

Sur cette ligne imposante vous rencontrerez les plus saintes lois du royaume, tous les actes de la magistrature française, les réquisitoires des avocats-généraux; vous marchez avec la puissance qui s'attache à six siècles de précédents! Je ne cesse donc de le redire à mes contemporains entrez dans cette étude, je vous y convie; elle est d'ailleurs pleine d'attraits, puisqu'elle se lie aux faits les plus curieux de notre histoire, aux questions les plus

élevées de notre droit public, à celles qui influent le plus puissamment sur la marche politique des affaires et sur la constitution de l'Etat.

§ 2. But de l'auteur en publiant cet ouvrage.

Il n'y a pas de sujet qui ait été plus savamment exploré dans tous les sens que le droit canonique. Les in. 4o, les in-folios, les traités ex professo abondent sur toutes les parties de ce droit; les collections les plus riches et les plus étendues tout a été dit et publié. On peut en juger par le catalogue fort abrégé que j'ai fait imprimer à la fin de ce volume, sous le titre de Bibliothèque choisie: il ne contient que les principaux ouvrages, et ce n'est pas la dixième partie de ce qu'on aurait pu indiquer !

Mais, quelque restreint que soit ce catalogue, combien peu de bibliothèques, même parmi celles des ecclésiastiques, renferment les livres que j'ai signalés! et parmi ceux qui les possèdent, combien y en a-t-il qui les aient étudiés à fond?

Dans le désir que j'ai de voir cette étude reprendre faveur, et sachant bien qu'on a peu de dispositions de nos jours à se jeter dans les grandes lectures, j'ai voulu composer une sorte de Manuel de notre droit public ecclésiastique, où je ferais entrer les notions les plus générales, les plus importantes, les plus essentielles un livre où tout serait substantiel; où le temps que j'aurais mis à réduire et à resserrer les matières, serait gagné au profit de ceux qui ne voudraient pas lire tout ce que j'ai lu pour faire un choix et n'offrir que des résultats.

Les hommes déjà instruits n'y trouveront rien qu'ils ne sachent d'avance, mais, en le lisant, ceux qui n'ont encore aucune notion du droit canonique en prendront une idée première, suffisante pour la plupart d'entre eux. Tous, j'en suis sûr, trouveront commode de voir concentré dans un petit volume (où l'imprimerie, entrant dans la pensée de l'auteur, s'est appliquée à rendre compacte ce que sa plume s'était efforcée d'abréger), un recueil où les maximes fondamentales de la science, appuyées sur les actes les plus

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