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soyez calme et joyeux; vos péchés seront effacés, et vous pourrez aller au-devant de la mort avec courage et consolation. Croyez-moi, car je vous parle d'après la foi de l'Église catholique, qui ne peut se tromper.

Autrefois les Thraces pleuraient à la naissance d'un homme, et témoignaient de la joie quand il mourait; n'avons-nous pas plus raison d'en agir ainsi, nous qui croyons à une éternité, à un paradis pour notre âme? Ne devons-nous pas regarder la mort comme une naissance nouvelle à une vie heureuse, ineffable, qui sera le terme de toutes les misères que nous endurons dans ce corps de mort? Ceux qui n'ont pas cette foi ardente meurent tourmentés par l'appréhension et la crainte; mais les serviteurs de Dieu, que la foi éclaire, s'éteignent doucement; ils soupirent même après la mort; ils l'attendent avec joie, parce qu'ils connaissent l'inconstance du monde, les persécutions de la chair, et les dangers de la vie.

Combien y en a-t-il qui avoueraient n'avoir jamais eu un jour heureux pendant toute leur existence! Le monde est rempli de piéges, d'impostures et d'infidélités un homme ne peut se fier à son semblable, parce que tous cherchent leurs intérêts particuliers. Si quelqu'un désire la vie pour acquérir de plus grands mérites, qu'il songe que l'avenir est incertain, et qu'au lieu de gagner, peut-être il s'endettera davantage. Quel bonheur de pouvoir, en mourant, contempler la splendeur divine de Jésus-Christ, et se réjouir dans la compagnie de ses saints! Celui qui n'est pas prêt à mourir aujourd'hui, le sera peut-être encore moins demain ;

parce que les péchés s'amassent toujours, et qu'ordinairement les années nous font plus mauvais, au lieu de nous rendre meilleurs.

Ainsi donc, mon fils, élevez votre cœur, vos mains, vos yeux vers le ciel, et saluez de toute l'affection de votre âme votre céleste patrie; soumettez votre volonté au bon plaisir de Dieu, et brisez tous les liens du corps et de la vie. Dieu fera de vous ce qu'il voudra; mais que ce soit la vie ou que ce soit la mort, recevez tout de ses mains comme ce qui est le meilleur pour vous, et soyez sans aucune inquiétude. Oui, les anges qui vous assistent vous protégeront, vous défendront; et Dieu, dans sa très-grande miséricorde et dans son amour plus que paternel, vous délivrera de toute peine, parce que vous aurez eu confiance dans son infinie bonté. Adieu.

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LETTRE VII

Le Bienheureux écrit à un de ses amis, supérieur d'un couvent, et lui apprend comment il doit remplir sa charge.

Il est bien évident, mon cher Père, que celui qui se soustrait à l'obéissance, se rend la vie malheureuse et insupportable. Le peu qu'il fait contre sa volonté, est plus dur et plus pénible que tout ce qu'il fait avec amour et empressement. Recevez donc la charge que Dieu vous impose, et remplissez-la de manière à ne pas offenser votre Maître, ni blesser votre conscience: j'avoue que dans une pareille charge, les chagrins et les dégoûts ne

vous manqueront pas ; et là où vous devriez trouver la soumission, vous rencontrerez souvent la révolte et la méchanceté. De nos jours, celui qui veut remplir consciencieusement une dignité ne doit pas espérer de repos, mais compter au contraire sur des fatigues, des ennuis, sur une vie de misère et d'amertume. Ainsi donc, pour l'amour de Jésus-Christ, prenez cette croix et ne vous excusez pas sur votre faiblesse et votre incapacité; fatiguez-vous au contraire sous le poids de cette charge, et tâchez de faire ce qui vous paraît le mieux et le plus parfait; c'est en ne suivant pas les timides inspirations de son cœur qu'on remplit parfaitement son devoir.

En toute chose, considérez plus le service de Dieu que l'avantage temporel ; et dans l'observance des règles monastiques, soyez le même pour tous, montrez-vous aussi sévère pour vos amis que pour ceux qui vous sont opposés; c'est là le grand moyen pour avoir la paix. Maintenez rigoureusement la jeunesse, parce qu'une jeunesse mal élevée est la ruine de la religion. Soyez grave et modeste, mais doux et affable, pour être plus aimé que redouté; et faites en sorte que vos ordres soient exécutés plutôt par affection que par crainte.

Dans ce qui surpassera vos forces, ayez recours aux supérieurs qui sont élevés au-dessus de vous; et quant aux abus qu'il faut combattre, si vous ne pouvez les détruire, élevez-vous au moins contre eux. Si vous ne pouvez rappeler la règle à son ancien état, faites en sorte au moins que, sous votre administration, elle ne

tombe et ne périsse pas davantage. Si on ne répare un habit vieux et déchiré, il s'en ira bientôt en lambeaux; là où le spirituel est négligé, le temporel finit par se perdre lui-même.

Conduisez ceux qui vous sont confiés par de saints exemples, plutôt que par des paroles. Dans une fonction quelconque, il est impossible de plaire à tous sans offenser Dieu et la vérité; mais lorsque vous aurez rempli votre devoir, lorsque ce que vous aurez fait dans de bonnes intentions ne réussira pas, et que ceux auxquels vous aurez fait du bien vous déchireront et vous accableront d'ingratitude, supportez tout avec patience; et souvenez-vous que ce qui fait la gloire des saints prélats, c'est le mépris, la malveillance et la calomnie des

méchants.

Prenez garde que dans le monastère il ne se trouve des personnes scandaleuses, des compagnies mauvaises; et veillez surtout avec le plus grand soin à dissiper les amitiés dangereuses, autant que vous le pourrez et que la prudence le permettra. Voyez ce qui arrive aux couvents et aux monastères où règnent ces deux abus; le premier détruit toute paix, et le second déshonore les communautés. Mais, me direz-vous, si je le fais, il faudra tout troubler et tout bouleverser. Et moi je vous répondrai Oh! l'heureux bouleversement, qui sera la source d'une paix éternelle! N'est-ce pas pour les supérieurs qui sont faibles et mous afin d'éviter les reproches et d'avoir la paix, que Jérémie a dit : « Et ils pansaient honteusement les plaies de la fille de mon << peuple, en disant: La paix, la paix; et il n'y avait

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<< point de paix (1). » Ces supérieurs vendent leur tolérance à leurs inférieurs; ils se délectent dans les honneurs temporels, et ils les achètent en sacrifiant la règle et la sainteté monastique. Mais malheur à eux, parce qu'ils ont reçu leur récompense.

N'imitez pas de tels exemples, et ayez toujours pour but l'honneur, la gloire et la louange de Dieu, comme Jésus-Christ l'a fait lui-même, puisque, pour obéir et pour glorifier son Père, il s'est laissé clouer à la Croix. Vous désireriez peut-être avoir un peu de repos et de tranquillité pour étudier, méditer et vous livrer à la contemplation; mais, dit saint Grégoire, celui qui est revêtu d'une fonction doit se consacrer à la vie active, et ne se livrer à la contemplation qu'autant que le lui permettra son emploi, et jamais davantage. Vous aurez peut-être bien des fatigues à supporter, mais comment vous plaindre? Avez-vous le corps tout déchiré de blessures? Le sang vous couvre-t-il le visage, comme il arrivait aux saints martyrs, dans ces temps où l'on n'élevait aux dignités que les hommes les plus parfaits et les plus courageux, ceux qui ne se recherchaient jamais eux-mêmes ?

Ce que je vous recommande par-dessus toutes choses, c'est une véritable humilité, c'est de bien reconnaître intérieurement votre bassesse, le néant de votre puissance, les misères de votre corps et la multitude de vos péchés. Lorsque vous aurez à reprendre quelqu'un, reprenez-vous d'abord vous-même; et puis faites vos

(1) Et curabant contritionem filiæ populi mei cum ignominia, dicentes: Pax, pax; et non erat pax. (Jérémie, vi, 14.)

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