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IV. Mais nous avons assez discouru sous le portique; il s'en va temps de pénétrer dans le temple.

Vous me dites que le dogme de l'immortalité de l'âme est très-problématique à vos yeux. Cela ne m'étonne pas. Peut-être même le doute a-t-il été plus avant dans votre âme. Notre raison, en effet, est si faible par elle-même que, lorsqu'elle sort de la foi, elle ne peut plus trouver de port sur le vaste océan du doute. La vérité religieuse, même dans ce qu'elle a de plus familier à l'esprit humain, ne lui apparaît alors que comme ce mirage mouvant et perfide qui simulait à Ulysse errant sur les flots les douces rives de la patrie. Un ébranlement général se fait sentir dans toutes nos convictions. Elles dégénèrent en simples opinions, puis en conjectures, et, dans cet état, elles se refont et se défont sans cesse dans notre esprit sans pouvoir s'y fixer, et le font passer perpétuellement par tons les degrés de l'affirmation et de la négation, depuis l'existence d'un Dieu jusqu'aux plus humbles vérités révélées, sans qu'il puisse s'arrêter à un seul, soit pour l'ad·· mettre, soit pour le rejeter.-Notre entendement ne peut tenir la vérité, et il aspire incessamment à la recevoir; la foi seule peut lui donner un fonds.

Il semble donc que le meilleur moyen pour nous assurer de toutes les vérités religieuses serait de remonter droit à la Religion chrétienne qui en est le centre, et qui les retient toutes par la foi. La preuve historique du fait de la révélation de cette Religion et de la divinité de son auteur emporte

TOME I.

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rait alors nécessairement avec elle et nous dispenserait d'établir toutes les autres vérités du spiritualisme et de la théologie. En embrassant le tronc nous tiendrions toutes les branches.

Mais ce procédé, ordinairement suivi, et que je suis loin de critiquer, me paraît pouvoir être concilié avec le procédé inverse qui consiste à aller de la circonférence au centre, en établissant successivement et progressivement les vérités philosophiques et théologiques, et les faisant toutes converger vers la divinité du christianisme, dont la preuve historique vient ensuite les reprendre et les sceller toutes du sceau de la foi.

Cette méthode me paraît bonne, parce que, sans être exclusive de l'ancienne, elle en double l'effet; parce qu'elle est plus nouvelle et plus variée, et, par cela même, plus attrayante; parce qu'elle ménage davantage notre raison trop ombrageuse pour se soumettre tout à coup à nos mystères sur une simple preuve historique, et qui a besoin d'être conduite pas à pas vers la foi, de manière à se convaincre par elle-même qu'elle y trouve moins un obstacle à son essor qu'un épanouissement de toutes ses facultés, moins une borne qu'une carrière nouvelle ajoutée à ses bornes naturelles, et que ce bandeau dont on la menace n'est qu'un supplément de vue qui, en lui rendant beaucoup plus nettes et plus corrigées toutes les vérités naturelles, lui fait découvrir en outre tout un monde de nouvelles vérités.

Ainsi préparée, la raison reçoit les preuves his

toriques comme une puissante confirmation qui réagit sur l'adhésion à la doctrine avec d'autant plus de force que déjà celle-ci s'est fait aimer de l'intelligence.

Je sais bien que cette méthode exige des développements infinis, puisqu'elle va du général au particulier; mais qu'on ne pense pas que ce soit toujours par la simplicité des preuves que l'esprit soit convaincu. Elles le touchent vivement au moment même, il est vrai; mais elles se perdent bientôt dans le vide de l'intelligence, et viennent mourir sur un fonds d'ignorance et de préjugés. Ce qu'il faut d'abord, c'est déraciner ces préjugés, dissiper cette ignorance; c'est défricher, retourner en tous sens cette terre abandonnée, et y promener longtemps la charrue; c'est enfin faire désirer la vérité en la faisant connaître avant même de la prouver, et la prouver, par cela même déjà, par la preuve la plus persuasive et la plus durable, celle qui se tire de sa propre beauté. Que l'on ne craigne pas que la vérité se compromette à cette épreuve. Le temps de la bonne foi est enfin venu, et que faut-il autre chose à la vérité que la bonne foi pour se présenter sans crainte? Elle se désavouerait elle-même en cette occurrence, si elle ne se livrait si elle ne se livrait pas entièrement; et c'est au contraire en se laissant approcher et regarder dans tous les sens, en se faisant familière et populaire, qu'elle achèvera de ramener les esprits trompés et de remonter au trône de l'intelligence.

Il y a, du reste, aujourd'hui dans les esprits un

goût généralisateur, un besoin spacieux de saisir les choses sous leur aspect le plus large et le plus absolu, qui vient sans doute du vide de convictions qui les dévore, et qui appelle à lui un aliment vaste comme leur capacité. Dans cette disposition, le meilleur moyen de les attacher et de les satisfaire dans l'étude de la Religion, c'est de la leur montrer dans tout son développement, et pour ainsi dire de front; et qui est-ce qui se prête plus que la Religion à cette exigence? elle qui est tout ce qu'il y a de plus général et de plus absolu; qui remplit tous les temps, tous les lieux, toutes les sphères; qui enveloppe toute l'humanité, et qui n'est enveloppée que par Dieu, ou plutôt qui n'est que Dieu lui-même, seul et véritable objet, que, sans le savoir, nous poursuivons.

Telles sont les considérations qui m'ont fait adopter le plan que voici :

L'ouvrage sera divisé en trois parties principales qui, toutes ensemble comme chacune en particulier, aboutiront à la preuve de la divinité du christianisme, de manière à pouvoir être séparées ou réunies à volonté, et à former trois ouvrages dans un seul.

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Ces dernières dénominations de philosophiques, théologiques, historiques, expriment la couleur dominante de chacune des parties; mais il ne faudrait pas les prendre trop à la lettre et dans un sens trop exclusif et trop absolu. Ainsi il se trouvera des aperçus historiques jetés dans la partie des preuves philosophiques et réciproquement. L'embarras d'établir des divisions absolument tranchées est celui de la vérité même, qui, à raison de son unité et de sa simplicité, ne se prête pas à cette décompositiou et finit par se retrouver toujours tout entière, de quelque côté qu'on la prenne et qu'on l'envisage.Au surplus, l'esprit philosophique, dans la bonne acception du mot, c'est-à-dire la pénétration respectueuse des vérités et des fondements de la foi par les lumières naturelles de la raison, ne cessera pas de régner d'un bout à l'autre de l'ouvrage, qui devra justifier son titre d'Études philosophiques sur

le Christianisme.

Déroulons maintenant, par le détail, chacune des trois parties.

1re PARTIE.

Elle se divisera en deux livres, lesquels se subdiviseront comme suit :

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