Obrazy na stronie
PDF
ePub

justice absolue ici-bas, sont du reste la preuve la plus irrécusable et pour ainsi dire les grands témoins de notre immortalité.

Qu'est-ce, en effet, que la paix de la conscience, sinon le sentiment de notre mérite et le pressentiment qu'il sera rétribué? qu'est-ce que le remords, si ce n'est l'ajournement de la conscience devant la souveraine justice, et la sourde appréhension de ses châtiments? Mais, qui dit pressentiment et appréhension suppose nécessairement un objet à venir, comme terme, comme expectative de l'un et de l'autre, et comme l'a fort bien dit Sénèque, mériter c'est attendre'. Or, la paix et le remords, la confiance et la crainte, nous suivent, nous escortent jusque dans les bras de la mort; c'est même là,— chose admirable! c'est sur le seuil du tombeau, dont la pierre devrait être un refuge assuré contre tous les traits de la justice de ce monde, s'il n'y avait rien au delà; c'est à cet instant suprême dis-je, que la paix ou le remords se réveillent plus vivement que jamais, et que la conscience flétrie par le crime ou le malheur ressuscite et reverdit sur les ruines de tous nos intérêts temporels. Il faut donc nécessairement que cette justice, objet à venir de nos craintes et de nos espérances, de la confiance ou du remords, soit au delà du tombeau. et que cette âme, qui en est tant préoccupée, survive elle-même pour la rencontrer 3.

[ocr errors][merged small]

Quisquis meruit, expectat. Epist. cv.

«S'il était possible que, dans un âge de raison, j'eusse

[ocr errors]

Résumons-nous et concluons:

La vérité de l'immortalité de l'âme prend ses ra

cines dans tout notre être; on ne peut l'en arracher qu'en le détruisant.

Sa première notion part du sens intime; c'est une voix intérieure de la nature, ratifiée par l'instinct universel, contre toute apparence sensible, et par conséquent en dehors de toute illusion.- La mort n'est qu'une décomposition, l'âme étant simple est donc immortelle. Sa nature et ses opérations sont tellement distinctes de celles du corps, que la séparation de leurs destinées se conçoit encore mieux que leur association. On ne peut admettre que l'âme, reine du corps, ait une destinée pire, et

[ocr errors]

» manqué essentiellement à mon père, je serais malheureux » toute ma vie, parce qu'il n'est plus et que ma faute serait aussi » irréparable que monstrueuse. On pourrait dire, il est vrai, » qu'un mal fait à celui qui ne le sent plus, qui n'existe plus, » est actuellement chimérique, comme le sont les choses tout à » fait passées. Je ne saurais le nier; cependant j'en serais incon» solable. La raison de ce sentiment est bien difficile à trouver. » S'il n'était autre que le sentiment d'une chute avilissante, » dont on a perdu l'occasion de se relever avec une noblesse »> qui puisse consoler intérieurement, on trouverait ce même » dédommagement dans la vérité de l'intention. On voit pour» tant le sentiment de cette injustice, dont les effets ne subsis» tent plus, nous accabler encore, nous avilir, nous déchirer, » comme si elle devait avoir des résultats éternels. On dirait » que l'offensé n'est qu'absent, et que nous devons retrouver » les rapports que nous avions avec lui, mais dans un état qui · » ne permettra plus de rien changer, de rien réparer, et où le mal » sera perpétuel malgré nos remords. » ( Obermann, p. 154.)

qu'elle soit annihilée, alors que le corps survit, non-seulement dans sa substance, mais dans sa forme même, qui résiste encore quelque temps à la

mort.

[ocr errors]

Les lois les plus constantes de la nature et de notre organisation morale en particulier seraient bouleversées si l'âme ne survivait pas au corps. S'il est vrai, en effet, que chaque être participe de la nature de ce dont il s'alimente, l'âme est immortelle, car la vérité l'est. Si le perfectionnement des êtres est en raison des principes de leur nature, l'âme porte dans son fonds un principe d'immortalité; car son perfectionnement ou sa dégradation sont en raison du culte ou de l'abandon de ce principe. S'il est vrai que l'organisation des êtres est en rapport avec leur destination, l'âme n'est pas faite uniquement pour cette vie, car les choses de cette vie ne peuvent la satisfaire, et tous ses instincts l'emportent au delà du temps. S'il est vrai, enfin, qu'il y ait une justice, et que la conscience qui nous la révèle ne soit pas une chimère, l'âme est immortelle, car cette justice n'est pas ici-bas, et le bon et le méchant s'en vont sans l'avoir rencontrée.

[ocr errors]

Il faut donc se jeter dans la conviction de notre immortalité, si l'on ne veut heurter aveuglément la raison et la nature. Il faut croire que tant et de si forts arguments ne peuvent nous faire illusion, car ils sont tous puisés dans le fond des choses; et l'ordre adorable qui règne dans ce grand univers, à la

tête duquel nous sommes placés par l'intelligence, révèle une sagesse infinie qui ne peut avoir voulu nous tromper en nous induisant dans une erreur qui serait son propre ouvrage, et en se démentant ellemême, dans son chef-d'œuvre, par un chaos de contradictions.

« Il faut, comme dit Platon, croire les législa» teurs et les traditions antiques, et particulièrement » sur l'AME, lorsqu'ils nous disent qu'elle est tota>>>lement distincte du corps, et que c'est elle qui » est le moi; que notre corps n'est qu'une espèce » de fantôme qui nous suit; que le мoi de l'homme » est véritablement immortel; que c'est ce que nous >> appelons AME, et qu'elle rendra compte aux Dieux, » comme l'enseigne la loi du pays, ce qui est éga>>lement consolant pour le juste et terrible pour le

méchant. Nous ne croirons donc point que cette » masse de chair que nous enterrons soit l'HOMME ; » sachant que ce fils, ce frère, etc., que nous >> croyons inhumer, est réellement PARTI pour un >> autre pays, après avoir terminé ce qu'il avait à » faire dans celui-ci. Cela est certain, quoique >> la preuve exige de longs discours, et il faut croire » ces choses sur la foi des législateurs et des tra>> ditions antiques, a moins qu'on n'ait PERDU l'es» PRIT 1. »

[ocr errors]

Plato, de leg. x11. opp. tom. 1x, edit. Bip., p. 212, 213.

CHAPITRE IV.

UNE RELIGION NATURELLE.

Nous avons une âme, il y a un Dieu, —notre âme est immortelle. Ces trois vérités sont éta

blies.

De leur rapprochement va jaillir maintenant cette quatrième vérité, qu'il y a une Religion naturelle, c'est-à-dire des rapports naturels et obligatoires de l'homme à Dieu.

S Ier.

I. La première sensation de notre être est le plaisir d'en jouir, de voir et de contempler ce bel univers, l'harmonie imposante de son ensemble, et la profondeur inépuisable de perfection qui règne dans ses plus petits détails. Nous sentons que notre âme est faite pour ce plaisir, pour ce sentiment de l'ordre; que plus elle s'y livre, plus elle se sent, elle se dilate, plus elle vit.

plus

Mais il est dans notre nature de nous rendre raison des choses, de donner un but à nos pensées et à nos sentiments. Or, cette extase vague, et flottante

« PoprzedniaDalej »