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même beaucoup plus de pensées et d'expressions sublimes.

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De tous les poètes lyriques anciens et modernes aucun ne peut être comparé à Horace pour la correction, T'harmonie et le bonheur de l'expression. Il a su descendre de l'enthousiasme de Pindare à un juste degré d'élévation, et réunir la justesse et la liaison des pensées au bon sens et aux plus grandes beautés de la poésie. Il ne s'élève pas ordinairement au dessus de cette région moyenne dans laquelle j'ai dit que l'ode pouvait se maintenir; mais quand il monte jusqu'au sublime ce n'est pas toujours avec le même succès (1). Son caractère est surtout l'élégance et la grâce; aucun poète n'approcha plus de la perfection, aucun ne peignit le sentiment avec plus de dignité, aucun n'eut une gaîté plus aimable, ou une plaisanterie plus piquante. Son expression est si heureuse, qu'avec un seul mot ou une seule épithète, il peint à l'imagination. Aussi a-t-il toujours été et sera-t-il toujours l'auteur favori des personnes de goût.

Horace eut un grand nombre d'imitateurs parmi les poètes latins plus récens; l'un des plus distingués est

(1) Il n'est, sans doute, aucune ode d'Horace qui ne renferme de grandes beautés; mais quelque singulière que puisse paraître mon opinion, je ne puis m'empêcher de voir quelque chose de pénible et de forcé dans celles que l'on a le plus admirées pour leur sublimité, comme l'ode iv du ive livre: Qualem ministrum fulminis alitem. Il me semble que le génie de ce poète aimable se déploie avec bien plus d'avantage dans les compositions où règne un ton plus tempéré.

un Polonais nommé Casimir, qui, dans le dix-septième siècle, publia quatre livres d'odes. Il est loin d'Horace pour la grâce et la facilité de l'expression; il veut trop souvent être sublime; et, comme il arrive presque toujours, il sort du naturel, et paraît dur et forcé. Cependant il montre en plusieurs endroits un génie original et une imagination poétique. Quelques-unes des compositions lyriques de Buchanan joignent à beaucoup d'élégance la manière des classiques latins.

Chez les Français, les odes de J.-B. Rousseau jouis. sent d'une très-grande et d'une très-juste célébrité. Elles sont belles de sentiment et d'expression, et pleines de feu sans paraître décousues. On doit les regarder comme l'une des meilleures productions de la poésie française.

Nous avons, en anglais, quelques compositions lyriques d'un très-grand mérite. L'on connaît l'ode de Dryden à sainte Cécile; celles de M. Gray sont remarquables pour la tendresse et le sublime; et l'on en trouve de très-belles dans les mélanges de Dodsley. Quant aux odes pindariques que nous possédons, elles sont, à un petit nombre d'exceptions près, si diffuses, qu'il est presque impossible d'en pénétrer le sens. Cowley, toujours si dur, l'est plus encore dans ses compositions pindariques que partout ailleurs. Ses odes anacréontiques valent beaucoup mieux; elles ne manquent ni de douceur ni d'élégance; elles sont, dans leur genre, ce que ce poète nous a laissé de plus agréable et de plus parfait.

LECTURE XL.

DE LA POÉSIE DIDACTIQUE ET DE LA POÉSIE DESCRIPTIVE.

APRÈS avoir traité de la poésie pastorale et de la poésie lyrique, nous allons nous occuper de la poésie didactique, qui renferme une classe d'ouvrages fort nombreuse. Le principal but de toute espèce de poésie, et même de toute espèce de composition littéraire, est de produire sur l'esprit quelque impression utile. Cette impression est ordinairement produite, en poésie, par des moyens indirects, comme les fables, les récits, les peintures de caractères; mais la poésie didactique, ainsi que son nom nous l'apprend, se propose directement, et avant tout, de répandre les connaissances et l'instruction. Elle ne diffère donc que par la forme, et non par son but et par sa nature, des traités en prose de morale, de philosophie et de critique. D'un autre côté, sa forme même lui donne des avantages sur les écrits instructifs publiés en prose; elle répand sur l'instruction le charme des vers; elle flatte et captive l'imagination par des descriptions, des épisodes, et tous les autres genres d'embellissemens qu'elle peut admettre, et fixe mieux dans la mémoire les détails les plus importans d'un sujet. Aussi elle ouvre une carrière qu'un poète peut parcourir avec honneur, et dans laquelle, tout en donnant l'essor à son génie, il

peut montrer l'étendue de ses connaissances et la profondeur de son jugement.

Ce genre de poésie peut être traité de différentes manières. Ou le poète choisit un sujet instructif auquel il donne un développement régulier et méthodique, ou bien, sans vouloir faire un ouvrage de longue håleine, il peut, comme dans les satires et les épîtres, attaquer quelque vice, ou présenter quelques réflexions sur la vie ou le caractère de l'homme. Ces diverses espèces d'ouvrages se rangent sous la dénomination de poésie didactique.

Dans ce genre de poésie, l'on place au premier rang les ouvrages qui renferment un traité régulier sur quelque sujet utile, sérieux ou philosophique. Nous en avons plusieurs, tant anciens que modernes, d'un mérite très-distingué; tels sont les six livres de Lucrèce de Rerum natura, les Géorgiques de Virgile, l'Essai sur la critique, par Pope; les Plaisirs de l'imagination, par Akenside; le Poëme sur la santé, par Armstrong; ceux d'Horace, de Vida et de Boileau sur l'Art poétique.

Comme l'instruction est le but avoué de ces ouvrages, leur principal mérite consiste dans la justesse des pensées, la clarté et l'exactitude des principes et des explications. Le poète doit chercher à instruire; mais il doit en même temps s'appliquer à prêter des charmes à l'instruction, en introduisant à propos des figures et des détails qui plaisent à l'imagination, cachent la sécheresse du sujet, et l'embellissent d'un vernis poétique. Virgile, dans ses Géorgiques, se pré

sente à nous comme un modèle parfait en ce genre. Il possède l'art d'ennoblir et de rendre agréables les détails les plus ordinaires de la vie champêtre. S'il veut, par exemple, nous dire que les travaux de la campagne doivent commencer avec le printemps, voici commne il s'exprime :

Vere novo, gelidus canis cum montibus humor
Liquitur, et zephyro putris se gleba resolvit;
Depresso incipiat jam tum mihi taurus aratro
Ingemere, et sulco attritus splendescere vomer.

Quand la neige, au printemps, s'écoule des montagnes,
Dès
que le doux zéphir amollit les campagnes,
Que j'entende gémir le bœuf sous l'aiguillon,
Qu'un soc long-temps rouillé brille dans le sillon.

DELILLE.

Au lieu de prévenir simplement le laboureur que sa récolte manquera, s'il cultive mal la terre, il lui fait

prévoir en ces termes le sort qui l'attend:

Heu magnum alterius frustrà spectabis acervum,
Concussâque famem in sylvis solabere quercu.

`Ou bientôt, affamé près d'un riche voisin,

Retourne au gland des bois pour assouvir ta faim.

DELILLE.

Au lieu de l'engager à abreuver son champ, il trace ce

charmant paysage:

Ecce supercilio clivosi tramitis undam

Elicit; illa cadens, raucum per lævia murmur
Saxa ciet; scatebrisque arentia temperat arva.

Si le soleil brûlant flétrit l'herbe mourante,
Aussitôt je le vois, par une douce pente,

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