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Le méchant par le prix au crime encouragé,
Le mari par sa femme en son lit égorgé,

Le fils tout dégouttant du meurtre de son père,
Et, sa tête à la main, demandant son salaire.

On voit que, malgré la plénitude et l'énergie continuelle de ces beaux vers, l'expression 'portera naturellement sur les mots qui sont les grands traits de l'image, et s'appuiera sur la syllabe de ces mots qui peut le mieux soutenir la

voix.

C'est une des raisons pour lesquelles il est vrai de dire, en général, que personne ne lit mieux un ouvrage que son auteur. Il arrive pourtant quelquefois que, par l'envie de faire tout valoir, ou dans ses vers ou dans sa prose, le lecteur pèse sur tous les mots; et sa lecture, à-la-fois maniérée et monotone, produit un effet tout contraire à celui qu'il s'est proposé; il articule tout, et ne distingue rien; ses couleurs n'ont plus de nuances; nulle ombre ne les fait briller; il veut que tout soit en relief; et il relève tout si bien, qu'il n'y a plus rien de saillant.

ACHÈVEMENT.. Dans la poésie dramatique, on appelle ainsi la conclusion qui suit l'événement par lequel l'intrigue est dénouée.

L'art du poëte consiste à disposer sa fable, de façon qu'après le dénouement il n'y ait plus aucun doute, ni sur les suites de l'action ni sur

Élém. de Littér. I.

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le sort des personnages. Dans Rodogune, par exemple, dès que le poison agit sur Cléopâtre,

tout est connu ce vers,

Sanve-moi de l'horreur de mourir à leurs pieds,

finit tragiquement la pièce.

Mais souvent il n'en est pas ainsi; et la catastrophe peut n'être pas assez tranchante, pour ne laisser plus rien attendre.

Britannicus est empoisonné; mais que devient Junie? C'est cet éclaircissement qui allonge et refroidit le cinquième acte de Britannicus.

L'action des Horaces est finie au retour d'Horace le jeune, et même avant sa scène avec Camille. Cette scène et tout ce qui suit, fait une seconde action dépendante de la première, et qui en est l'achèvement.

L'achèvement de Phèdre et celui de Mérope est long, mais il est passionné; et il ne fait pas duplicité d'action, comme celui des Horaces.

Si l'achèvement a quelque étendue, il faut qu'il soit tragique, et qu'il ajoute encore aux mouvements de terreur ou de pitié que la catastrophe a produits.

OEdipe, dans la tragédie de Sophocle, après s'être reconnu pour le meurtrier de son père et pour le mari de sa mère, et s'être crevé les yeux de désespoir, est encore plus malheureux lorsqu'on lui amène ses enfants.

Le poëte français n'a pas osé risquer sur notre

scène ce dernier trait de pathétique : il a fini par des fureurs. OEdipe, les yeux crevés et encore sanglants, était souffert sur un théâtre immense; sur nos petits théâtres, il eût révolté. Le tragique, en s'affaiblissant, a observé les lois de la perspective; et pour savoir jusqu'à quel degré on peut pousser le pathétique du spectacle, il faut en mesurer le lieu.

Comme l'achèvement doit être terrible ou touchant dans la tragédie, il doit être plaisant dans la comédie, et d'une extrême vivacité. Pour peu qu'il soit lent, il est froid. C'est un défaut qu'on reproche à Molière.

Le poëme épique est susceptible d'achèvement, comme le poëme dramatique; et, comme lui, il peut s'en passer.

L'achèvement de l'Iliade est long, et trop long, quoiqu'il renferme le plus beau morceau du poëme, la scène de Priam aux pieds d'Achille. L'achèvement de l'Odyssée est traînant, quoique plus animé que tout le reste du poëme. L'Énéide finit au moment de la catastrophe: dès que Turnus est mort, le sort des Troyens est décidé; et l'on ne demande plus rien.

Quelques critiques ont prétendu que l'Énéide était tronquée. Ils auraient voulu voir Énée donnant des lois au Latium. Ces critiques ne savent pas que, lorsqu'on cesse de douter et de craindre, on cesse de s'intéresser, et que l'action doit finir au moment que l'intérêt cesse, sans

quoi tout le reste languit. Rien de plus importun que le faux bel esprit, quand il veut juger le génie. Voyez DÉNOUEMENT, Intrigue, etc.

ACTE. Vossius, en marquant la division d'une pièce de théâtre en cinq actes, nous dit que dans le premier on expose, que dans le second on développe l'intrigue, que le troisième doit être rempli d'incidents qui forment le nœud, que le quatrième prépare les moyens du dénouement, auquel le cinquième doit être uniquement employé.

Et si la fable est telle qu'une scène l'expose, et qu'un mot la dénoue, comme il arrive quelquefois, que devient la division de Vossius?

Quelle est la tragédie, la comédie bien composée, dont le nœud ne commence qu'au troisième acte, et dont le cinquième acte en entier soit employé à dénouer?

Le noeud est la partie de l'intrigue qui doit occuper le plus d'espace. C'est comme un labyrinthe dont l'exposition fait l'entrée, et le dénouement la sortie.

Les poëtes habiles dans leur art commencent le noeud le plutôt possible, et le prolongent de même, en le serrant de plus en plus. Voyez IN

TRIGUE.

Avant la fin du premier acte de l'Iphigénie en Aulide, la situation a changé deux fois, en

devenant toujours plus tragique :

Non, tu ne mourras point, je n'y puis consentir....
Et si ma fille vient, je consens qu'on l'immole....
Je cède, et laisse aux dieux opprimer l'innocence....

Iphigénie est arrivée, Achille demande sa main, et Calchas demande son sang: voilà déja le nœud formé. C'est le modèle des gradations que le péril, le malheur, la crainte, la pitié, l'intrigue, en un mot, doit avoir.

En effet, qu'est-ce qu'un acte? Son nom l'exprime un degré, un pas de l'action. C'est par cette division de l'action totale en degrés que doit commencer le travail du poëte, soit dans la tragédie, soit dans la comédie, lorsqu'il en médite le plan.

Il s'agit, par exemple, de démasquer Tartuffe, ou de le voir, maître de la maison, diviser le fils et le père, dépouiller l'un, amener l'autre à lui donner tout son bien et la main de sa fille. Que fait Molière dans son premier acte? Il met sous nos yeux le tableau de cet intérieur domestique. L'ascendant que Tartuffe a sur l'esprit d'Orgon, la prévention aveugle de celui-ci et de sa sœur en faveur d'un fourbe hypocrite, et la mauvaise opinion qu'a de lui tout le reste de la famille, se manifestent dès la première scène : le combat s'engage; l'action commence avec chaleur.

Dès le second acte, après avoir tiré, de la

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