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Et, au défaut des exhortations d'un chef qu'ils détestaient, leur propre déshonneur du moins, l'opprobre dont ils couvraient la république pour le moment, et le danger où ils l'exposaient par la suite, si l'ennemi eût repris courage, rien ne put les déter miner à accélérer le pas, tout au moins à se montrer en bataille devant un ennemi qui pliait. Sans attendre l'ordre ils ramènent leurs drapeaux, ils rentrent dans le camp avec un air sombre qui les eût fait prendre pour des vaincus, exhalant leur dépit en imprécations, tantôt contre leur général, tantôt contre leur cavalerie qui l'avait servi si mal à propos; et le général ne prit aucune mesure contre la contagion d'un pareil exemple : tant il est vrai que les plus grands hommes ont moins de ressources pour contenir leurs concitoyens que pour vaincre l'ennemi. Fabius revint à Rome avec un surcroît de gloire militaire, qui n'avait fait qu'aigrir et envenimer contre lui la haine du soldat. Toutefois les patriciens obtinrent que la dignité consulaire restât dans la famille des Fabius. Marcus Fabius fut nommé consul (a); on lui donna pour collégue Cnéius Manlius (b).

XLIV. Cette année encore, la loi agraire fut proposée par un des tribuns: c'était Pontificius. Suivant la même marche que Licinius, comme si elle eût réussi à ce dernier, il arrêta un moment les levées. Le sénat perdait de nouveau courage; Appius Claudius les rassure, en leur disant que la victoire qu'ils avaient remportée précédemment sur le tribunat, leur en garantissait de nouvelles à perpétuité; qu'on avait découvert enfin le secret de miner cette puissance par ses propres forces; qu'on ne manquerait jamais de trouver un tribun qui serait flatté, et

(a) Pour la seconde fois,

(a) An de Rome 274; avant J.-C. 478.

» pluribus opus sit, tribunos ad auxilium consulum >paratos fore: et unum vel adversùs omnes satis » esse. Darent modò et consules et primores Patrum » operam, ut si minus omnes, aliquos tamen ex tri» bunis reipublicæ ac senatui conciliarent. » Præceptis Appii moniti Patres, et universi comiter ac benignè tribunos appellare; et consulares, ut cuique privatim aliquid juris adversùs singulos.erat, partim gratiâ, partim auctoritate obtinuêre, ut tribunitiæ potestatis vires salubres vellent reipublicæ esse: quatuorque tribunorum adversùs unum moratorem pu« blici commodi auxilio delectum consules habent. Inde ad Veiens bellum profecti, quò undique ex Etruriâ auxilia convenerant, non tam Veientium gratiâ concitata, quàm quòd in spem ventum erat discordiâ intestinâ dissolvi rem Romanam posse. Principesque in omnium Etruriæ populorum conciliis fremebant: « Æternas opes esse Romanas, nisi inter » semetipsi seditionibus sæviant; id unum venenum, ss eam labem civitatibus opulentis repertam, ut magna » imperia mortalia essent (23). Diu sustentatum id » malum, partim Patrum consiliis, partim patientiâ » plebis, jam ad extrema venisse. Duas civitates ex » una factas : suos cuique parti magistratus, suas

pour lui-même, de remporter un triomphe sur son collégue, et pour le bien public, de s'assurer l'affection du bon parti. Qu'au besoin on en trouverait plusieurs disposés à soutenir les consuls, et qu'un seul suffisait même contre tous. Que les consuls et les principaux sénateurs n'avaient seulement qu'à prendre la peine de gagner, sinon tous les tribuns, du moins quelques uns d'eux, pour les réunir à la bonne cause et aux intérêts du sénat. Le conseil d'Appius fut suivi. Outre que le corps entier redoubla d'égards et de prévenances envers tous les tribuns, les consulaires en particulier firent valoir les droits qu'ils pouvaient avoir sur chacun d'eux, et en partie par amitié, en partie par autorité, ils les firent consentir à ce que les forces du tribunat tournassent désormais à l'avantage de la république. Pour un seul tribun qui traversait des mesures salutaires, on en trouva quatre qui consentirent à les seconder, et les consuls pressèrent l'enrôlement. On marcha aussitôt contre les Véiens, dont les forces s'étaient grossies de toutes celles des peuples de l'Étrurie; ébranlés moins encore par leur affection pour les Véiens que par l'espoir que les dissensions des Romains pouvaient amener la dissolution de leur empire. Dans toutes les assemblées des villes étrusques, les principaux chefs ne cessaient de répéter que peut-être la puissance romaine eût été éternelle, sans les séditions par lesquelles les Romains se déchiraient euxmêmes; que la nature avait mis dans les grands états ce levain de corruption et ce principe de mort, afin qu'ils eussent une fin; que le mal, pallié long-temps et par la prudence du sénat, et par la résignation du peuple, était maintenant parvenu au comble; qu'il y avait dans Rome deux cités dont chacune avait ses lois, ses magistrats à part; que d'abord l'insubordination ne s'était manifestée que pour que pour l'enrôlement, et qu'à l'armée les soldats

» leges esse. Primùm in delectibus sævire solitos » eosdem in bello tamen paruisse ducibus; qualicum» que urbis statu, manente disciplinâ militari, sisti » potuisse; jam non parendi magistratibus morem » in castra quoque Romanum militem sequi. Proxiss mo bello in ipsâ acie, in ipso certamine, consensu > exercitus traditam ultro victoriam victis Equis: » signa deserta, imperatorem in acie relictum, in» jussu in castra reditum. Profectò, si instetur, suo » milite vinci Romam posse. Nihil aliud opus esse, » quàm indici ostendique bellum; cetera suâ sponte » fata et deos gesturos. » Hæ spes Etruscos armaverant, multis invicem casibus victos victoresque.

XLV. Consules quoque Romani, nihil præterea aliud quàm suas vires, sua arma, horrebant: memoriâ pessimi proximo bello exempli terrebantur, ne rem committerent eò, ubi duæ simul acies timenda essent. Itaque castris se tenebant, tam ancipiti periculo aversi : « Diem tempusque forsitan ipsum le»niturum iras, sanitatemque animis allaturum. ss Veiens hostis Etruscique eò magis præproperè agere; lacessere ad pugnam primò obequitando castris provocandoque; postremò, ut nihil movebant, quà consules ipsos, quà exercitum increpando : « Simu» lationem intestinæ discordiæ, remedium timoris ss inventum : et consules magis non confidere, quàm » non credere suis militibus. Novum seditionis ge

avaient du moins reconnu la voix de leurs chefs; que le maintien de la discipline militaire, quelle qu'eût été la situation intérieure de Rome, aurait pu encore maintenir sa grandeur; mais que l'esprit de désobéissance aux magistrats suivait le soldat romain jusque dans les camps; que l'année précédente, sur le champ de bataille, au fort du combat l'armée, d'un concert unanime, avait livré volontairement la victoire à un ennemi vaincu; qu'ils avaient quitté leurs drapeaux, délaissé leur général; qu'ils étaient rentrés dans leur camp sans son ordre; qu'infailliblement, pour peu qu'on fît d'efforts, on pouvait se flatter de vaincre Rome par ses propres soldats; qu'il n'était besoin que de leur déclarer, que de leur montrer la guerre ; que les destins et les dieux se chargeraient du reste. Cet espoir avait mis les armes à la main des Étrusques, éprouvés d'ailleurs par beaucoup d'alternatives, de défaites et de victoires.

XLV. Les consuls pareillement ne redoutaient rien tant que leurs propres soldats. Inquiets des suites du fatal exemple donné dans la dernière guerre, ils craignaient d'avoir à combattre à la fois et les Romains et les Étrusques. Pour échapper à ce double péril, ils se tenaient renfermés dans leur camp, espérant que le temps peut-être adoucirait tout seul les ressentiments, et mettrait du calme dans les esprits. Les Véiens et les Étrusques n'en étaient que plus impatients d'en venir aux mains. Ils harcelaient leurs ennemis de défis injurieux; ils venaient caracoller tout le long du camp; sur la fin, comme ces premières tentatives ne produisaient nul effet, ils en vinrent à insulter et l'armée entière, et les généraux. Ces appréhensions simulées sur leurs dissensions intestines n'étaient qu'un prétexte pour masquer une frayeur réelle. Les consuls se défiaient bien

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