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avec la vie,un funeste héritage de vicieux
penchans et de douleurs, qu'il transmet-
tra, de race en race, à son dernier des-
cendant. Ainsi, par ce qu'il tient du Créa-
teur, l'homme participe aux perfections
de la Divinité dont il est l'image: intel-
ligence et amour, un désir infini d'aimer
et de connoître, l'élève incessamment
vers le ciel, où, dans la contemplation de
la vérité qui ne meurt point, il goûte
comme les douces prémices de sa propre
immortalité. La simple apparence du bien
le ravit de joie. Imaginez, s'il se peut,
une action magnanime, un généreux
mouvement qui ne soit pas naturel à son
coeur. S'agit-il d'embrasser, pour une
noble fin, quelque grand sacrifice? un
sublime instinct, plus prompt que la
pensée, le fait palpiter d'allégresse; il
n'hésite point, il ne calcule point, il bé-
nit son sort et se dévoue. Que l'huma-
nité, que
la conscience parle, aussitôt
vous le verrez, le nom sacré de Dieu sur
les lèvres, voler chez les peuples sauva-

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ges, au bout du monde, pour éclairer ses semblables, soulager leurs maux, adoucir leurs moeurs, pour étendre le saint empire de la vérité; vous le verrez descendre au fond des cachots, aller audevant des tortures, pour lui rendre un éclatant témoignage, et mourir avec joie pour préparer son triomphe.

Il y a donc dans chaque homme, et, par une liaison nécessaire, dans chaque peuple, deux puissances qui se combattent, les sens et la raison, ou, pour parler le langage profondément philosophique de nos Livres saints, la chair et l'esprit (1); et selon que l'un ou l'autre prévaut, la vérité ou l'erreur, la vertu ou le crime, domine dans la société et dans l'individu."

Par sa raison, en effet, l'homme aspire à la possession de la vérité, noble aliment de son intelligence, et tend avec une force

(1) Caro enim concupiscit adversùs spiritum : spiritus autem adversus carnem : hæc enim sibi invicem adver¬ santur. Ep. ad Galat. v, 17.

invincible vers l'ordre conservateur des êtres. De là le penchant qu'il manifeste pour les croyances généreuses, pour les doctrines élevées et sévères et les dogmes les plus spirituels; de là encore cette insatiable ardeur de connoître, cette soif d'immortalité, cet instinct religieux, cette foi, d'autant plus éclairée qu'elle est plus simple, à tout ce qui est beau, sublime, utile, et par là même plein de réalité ; de là enfin cet étonnant empire qu'il exerce sur lui-même, sur ses sentimens, sur ses passions, et jusque sur ses pensées; ce mépris des plaisirs frivoles et des jouissances matérielles; ce dégoût insurmontable pour tout ce qui passe; ces élans vers un bien immuable, infini, que le coeur pressent, quoique l'esprit ne le comprenne pas encore; cet amour immense de la vertu, et ces inexprimables angoisses lorsqu'il s'en est écarté; cette tendre compassion pour tous les genres de misères physiques et morales, et cette disposition constante à se sacrifier à au

trui, source unique de ce qu'il y a de grand, de touchant et d'aimable dans la vie humaine.

Par les sens, au contraire, l'homme, incliné vers la terre, enseveli dans les jouissances physiques, et sans goût pour les plaisirs intellectuels, ressemble à la brute, et se complaît dans cette ressemblance. Son intelligence s'obscurcit, mais trop lentement à son gré: aussi, avec quelle ardeur il travaille à l'obscurcir encore! On diroit que la vérité est son supplice, tant est vive et profonde la haine qu'elle lui inspire. Il la poursuit sans relâche, l'attaque avec fureur, tantôt dans les autres, tantôt en lui-même, dans son esprit, dans son coeur, dans sa conscience. Inutiles efforts! Au moment même où il se croit vainqueur, au moment où, plein d'orgueil, il s'applaudit d'avoir enfin terrassé, anéanti cette vérité implacable, l'imposante vision, plus menaçante et plus formidable, revient de nouveau le désoler.

Mais si l'homme, esclave des sens, est ennemi de la vérité, et par conséquent des hautes doctrines qui émanent du ciel et qui l'y rappellent, il n'est pas moins ennemi des lois éternelles de l'ordre, parce que l'ordre n'est au fond que l'ensemble des vérités qui résultent de la nature des êtres et de leurs rapports, vérités qu'on nomme devoirs, à cause qu'elles ne sont pas seulement l'objet de l'intelligence, mais doivent encore influer sur la conduite qu'elles règlent, en imposant la double obligation de s'interdire certains actes et d'en produire de contraires. Or, toutes les vérités tenant l'une à l'autre, et se confondant en quelque sorte dans leur source, Phomme est contraint, quoiqu'il fasse, de les attaquer toutes, dès qu'une fois l'intérêt dé ses passions l'a porté à en ébranler une. Ainsi, par une liaison nécessaire, la corruption des moeurs enfante la corruption de l'esprit; le désordre dans les actions amène le désordre dans les pensées, ou

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