années. Qu'y a-t-il de possible maintenant, sinon de longues souffrances.... de longues souffrances avec beaucoup d'excitation, un défaut absolu d'autorité? Ah! arrêtez-vous, il en est temps. La concurrence enfin paraît funeste, et l'on veut la remplacer par le monopole de l'État; mais qu'est-ce que ce monopole? c'est la tyrannie et l'impôt. D'ailleurs, qu'a jamais produit l'intervention de l'État dans l'industrie? M. Gratiot montre, à cette occasion, ce que sont l'administration des tabacs et celle de la poste, faisant payer au quadruple leurs services, on l'avouera, passablement mauvais. Il aurait pu tout aussi bien parler de nos routes, de nos canaux, de nos ports, et que sais-je? Rien ne remplace, dans la sphère des intérêts matériels, le stimulant de l'intérêt personnel, la responsabilité. Et la concurrence, c'est la liberté dans le travail, c'est-à-dire dans la vie de chacun et de chaque heure. Hors de la concurrence, il n'y aurait que tyrannie, avilissement, apathie et misère. Au chène, la secousse des vents; à l'homme, les chances de la vie. Il est libre, il est responsable; dans tous ses emplois, dans toutes les directions qu'il choisit, sa nature doit être satisfaite. Chose bizarre! on veut détruire la liberté de l'industrie au moment où l'on proclame d'une facon absolue les libertés de la pensée, de la presse, de la tribune. L'émulation, la lutte détestable là, sont excellentes ici! Au moins Méhémet-Ali est conséquent : il dirige, dans toutes les brauches du travail, l'activité de ses sujets, et l'on sait ce qu'il a fait de l'Égypte et ce qu'est le sort des fellahs; mais il ne laisse aucune autre franchise. Ce qui me plait surtout dans l'écrit de M. Gratiot, c'est la dignité que, à l'exemple de M. Schmit, il y conserve en parlant aux ouvriers. Je ne sache rien de plus méprisable, de plus odieux que ces viles flatteries qu'on leur adresse en ce moment de toute part, les croyant apparemment assez corrompus déjà pour s'en réjouir ou assez insensés pour y croire. Que le peuple dédaigne assez ses nouveaux courtisans pour ne pas trop s'irriter contre eux, quand il s'apercevra de toute leur bassesse et de toute leur impuissance. M. Gratiot ne se recommande pas seulement comme publiciste, il se recommande encore comme véritable philanthrope. Directeur de la papeterie d'Essonne, après avoir été imprimeur, il s'est dévoué au bien-être de ses ouvriers. Chacun d'eux aujourd'hui a un logement et un jardin. Une salle d'asile ainsi qu'une école est entretenue, près de l'usine, pour leurs enfants, auxquels, en outre, une sœur fait le catéchisme, quand vient le moment de leur première communion. Les jeunes files et les femmes sans ménage ont un dortoir commun, où elles trouvent, saus rien payer, un lit, des matelas, des draps et du feu en hiver. Un réfectoire, également chauffé, reçoit les ouvrières du dehors aux heures de repas. Si quelques-uns des gens employés dans la fabrique tombent malade, le premier médecin de la ville vient les soig er; s'il en meurt, aucun des frais d'enterrement n'est supporté par leur famille. Enfin, dans cette belle papeterie, une caisse de secours existe; on en organise une autre sur de plus larges bases, et l'on se propose d'y assurer prochainement une retraite aux vieillards. Cela ne vaut-il pas mieux que tous les plans plus ou moins chimériques d'organisation du travail? Seulement, par de tels moyens, on fait le bien, on rend d'immenses services sans faire beaucoup parler de soi. FIN DU TOME PREMIER. A. JACQUES. TABLE DES MATIERES DU TOME PREMIER. PREMIÈRE LIVRAISON, Avant-propos, par Amédée Jacques. De l'indifférence de la jeunesse, par M. H. Baudrillart. De la réforme électorale, par Jules Simon. BULLETIN: Histoire de la philosophie moderne, de M. de Gérando. DEUXIÈME LIVRAISON, L'université devant la chambre et le pays. Pages. 1 7 32 65 106 113 Cas de conscience d'un philosophe, à propos des cas de conscience de De l'imagination en matière philosophique, par Amédée Jacques. 129 142 Le révérend père Loriquet, sa vie et ses écrits, par Clarigny. De la réforme parlementaire et de la centralisation administrative par 213 Le christianisme et le cartésianisme au XVIIe siècle, et la renaissance ca- L'auteur des Provinciales et le cheva- Élections académiques : M. Vatout, par Émile Marguerin.. La révolution de 1848, par Jules Simon. De l'origine et de la formation du christianisme à l'occasion du livre de Pages. De la colonie agricole et pénitentiaire de Mettray, par Gustave Vapereau. 371 Un mot sur la philosophie et la révolution française, par A. Vera. 391 BULLETIN: Édition de 1816 de l'histoire de France du P. Loriquet.... 398 CINQUIÈME LIVRAISON. Observations sur la constitution des États-Unis, par Francis de Castelnau. De l'organisation du travail, par H. Baudrillart. L'Europe et la révolution, par E. Marguerin. Les politiques et les philosophes, par J. Brisbarre. De la neutralité, par Teyssier-Desfarges.. Souvenirs d'Espagne. L'Escurial, par Alex. Léon. BULLETIN: De l'enseignement de la philosophie dans les lycées natio- Constitution de la France, depuis 1789, par P. Janet. De l'abus du mot de Providence dans la langue politique et religieuse, |