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de vraisemblance, que les Ebionites n'ont commencé à être connus qu'au fecond fiècle, vers l'an 103, ou même plus, tard, fous le règne d'Adrien, après la ruine entière de Jérusalem, l'an 119; qu'ainfi les Ebionites & les Nazaréens font deux fectes différentes; c'eft le fentiment de Mosheim, Hift. Chrift. fæc. 1, §. 58; fæc. 2, §. 39: il paroît le plus conforme à celui de S. Epiphane & des autres Pères plus anciens qui en ont parlė.

Cet hiftorien conjecture qu'après la ruine entière de Jérufalem, une bonne partie des Juifs qui avoient embraffé le Chriftianifme, & qui avoient obfervé jufqu'alors les cérémonies judaïques, y renoncèrent ennn, lorfqu'ils eurent perdu l'efpérance de voir jamais le Temple rebati, & afin de ne pas être enveloppés dans la haine que les Romains avoient conçue contre les Juifs. Eutèbe le témoigne, Hijl. Ecclef. 1. 3, c. 35. Ceux qui continuèrent de judaïler formèrent deux partis; les uns demeurerent attachés à leurs cérémonies, fans en imposer l'obligation aux Gentils convertis au Chriftianifme; on les toléra comme des Chrétiens foibles dans la foi, qui ne donnoient d'ailleurs dans aucune erreur; ils retinrent le nom de Nazaréens qui avoit été commun jufqu'alors à tous les Juifs devenus Chrétiens les autres, plus obftinés, foutinrent que les cérémonies mofaïques étoient néceffaires à tout le monde; ils firent un fchifme, & devinrent une fecte hérétique; ce font les Ebionites.

Les premiers recevoient l'Evangile de Saint Matthieu tout entier; ils confeffoient la divinité de Jéfus-Chrift & la virginité de Marie; ils refpectoient S. Paul comme un véritable Apô tre; ils ne tenoient point aux traditions des Pharifiens: les feconds avoient retranché les deux premiers chapitres de S. Matthieu, & s'étoient fait un Evangile particulier; ils avoient forgé beaucoup de livres fous le nom des Apôtres; ils regardoient Jésus-Chrift comme un pur homme né de Jofeph & de Marie; ils étoient attachés aux traditions des Pharifiens; ils déteftoient S. Paul comme un Juif apoftat & déferteur de la loi. Ces différences font effentielles. Mais comme il n'y eut jamais d'uniformité parmi les hérétiques, on ne peut pas affurer que tous ceux qui paffoient pour Ebionites penfoient de même.

Outre ces erreurs, Saint Epiphane les accufe encore d'avoir foutenu que Dieu avoit donné l'empire de toutes chofes à deux perfonnages, au Chrift & au Diable; que celui-ci avoit tout pouvoir fur le monde préfent, & le Chrift fur le fiècle futur; que le Chrift étoit comme l'un des Anges, mais avec de plus grandes prérogatives; erreur qui a beaucoup de rapport à celle des Marcionites & des Manichéens. Ils confacroient l'Euchariftie avec de l'eau feule dans le calice; ils retranchoient plufieurs chofes des faintes Ecritures; i's rejettoient tous les Prophètes depuis Jofué; ils avoient en horreur David, Salomon,

Ifaïe, Jérémie, &c. ils ne mangeoient point de chair, parce qu'ils la croyoient impure. On dit enfin qu'ils adoroient Jérufalem comme la maifon de Dieu, qu'ils obligeoint tous leurs fectateurs à fe marier, même avant l'âge de puberté, qu'ils permettoient la polygamie, &c. Fleury, Hift. Ecclef. tom. 1, liv. 2, tit. 42. Mais la plupart de ces reproches font révoqués en doute par les Critiques modernes. En effet, S. Epiphane n'attribue point toutes ces erreurs à tous les Ebionites, mais à quelques uns d'entre-eux.

Le Clerc, qui, dans fon Hifloire Eccléfiaftique des deux premiers fiècles, foutient que les Ebionites & les Nazaréens ont été toujours la même fecte, diftingue ceux qui parurent l'an 72 d'avec ceux qui firent du bruit l'an 103; il croyoit avoir découvert les opinions de ces derniers dans les Clémentines, dont l'Auteur, dit-il, étoit Ebionite. Or, celui-ci rejette le Pentateuque, prétendant qu'il n'a pas été écrit par Moïfe, mais par un Auteur beaucoup plus récent. 2° 11 dit qu'il n'y a de vrai dans l'Ancien Teftament que ce qui eft conforme à la doctrine de Jéfus Christ. 3°. Que ce divin Maître est le feul vrai Prophète. 4°. Il cite non-feulement l'Evangile de S. Matthieu, mais encore les autres 5°. Il parle quelquefois de Dieu d'une manière orthodoxe; mais il foutient ailleurs que Dieu eft corporel, revêtu d'une forme humaine & visible. 6o. Il n'ordonne point l'obfervation de la loi de Moïfe. Ajoutons que cet impofteur ne croyoit point la divinité de Jésus-Chrift, & qu'il en parle comme d'un pur homme; mais le Clerc, Socinien déguifé, n'a pas voulu faire cette remarque; il reproche avec aigreur à S. Epiphane de n'avoir pas fu diftinguer les anciens Ebionites d'avec les nouveaux. Hift. Ecclef. p. 476, 535 & fuiv.

Mosheim a réfuté complertement cette opinion, Differt. de turbatá per recentiores Platonicos Ecclefiá, S. 34 & fuivans. Il attribue les Clémentines à un Platonicien d'Alexandrie, qui n'étoit, à proprement parler, ni Païen, ni Juif, ni Chrétien, mais qui vouloit, comme les autres Philofophes de cette école, concilier ces trois religions, & réfuter tout à la fois les Juifs, les Païens & les Gnoftiques. Il penfe que cet ouvrage a été fait au commencement du troifième siècle, & qu'il eft utile pour connoître les opinions des fectaires de ces tems-là. Par conféquent il perfifte à diftinguer les Ebionites d'avec les Nazaréens, comme nous l'avons vu ci-deffus; il obferve, avec raifon, que de fimples conjectures ne fuffifent pas pour contredire le témoignage formel des anciens touchant un fait hiftorique; il feroit à fouhaiter que lui-même n'eût pas oublié fi fouvent cette maxime. Voyez NAZARÉENS.

Beaufobre, Hift. du Manich. 1. 2, c. 4, §. 1, a comparé les Ebionites aux Docètes, & il en a montré la différence; les premiers nioient la divinité de Jéfus-Chrift, les feconds fon

humanité. L'Ebionifme fut embraffe principalement par des Juifs convertis au Chriftianifine; élevés dans la foi de l'unité de Dieu, ils ne voulurent pas croire qu'il y eût en Dieu trois perfonnes, & que le Fils fût Dieu comme fon Père; ils foutinrent que le Sauveur étoit un pur homme, & qu'il étoit devenu Fils de Dieu dans fon Baptême, par une communication pleine & entière des dons du Saint-Esprit : ce n'étoit là par conféquent qu'une filiation d'adoption. Le Docétifme, au contraire, régna principalement parmi les Gentils qui avoient reçu l'Evangile; ils ne firent aucune difficulté de reconnoître la divinité du Sauveur, mais ils ne voulurent pas croire qu'une perfonne divine eût pu s'abaiffer jufqu'à fe revêtir d'un corps & des foibleffes de l'humanité; ils prétendirent qu'elle n'en avoit pris que les apparences. Voy. DOCÈTES.

Mais l'on peut tirer de l'erreur même des Ebionites des conféquences importantes. 1°. Quoique Juifs opiniâtres, ils reconnoiffoient cependant Jéfus-Chrift pour le Meffie; ils voyoient donc en lui les caractères fous lefquels il avoit été annoncé par les Prophètes. 2°. Ceux même qui n'avouoient pas qu'il fût né d'une Vierge, prétendoient qu'il étoit fils de Jofeph & de Marie; fa naiffance étoit donc univerfellement reconnue pour légitime. 3°. On ne les accufe point d'avoir révoqué en doute les miracles de Jéfus Christ, ni fa mort, ni fa réfurrection; S. Epiphane attefte, au contraire, qu'ils admettoient tous ces faits effentiels; ils étoient cependant nés dans Ja Judée, avant la destruction de Jérufalem; plufieurs avoient éré fur le lieu où ces faits s'étoient paflés; ils avoient eu la facilité de les vérifier.

Quelques incrédules ont écrit que les Ebionites & les Nazaréens étoient les vrais Chrétiens, les fidèles Difciples des Apôtres, au lieu que leurs adverfaires ont embrasse un nouveau Chriftianifme forgé par Saint Paul, & font enfin demeurés les maîtres. Cette calomnie fera réfutée à l'article PAUL, §. 2.

E C

ECCLÉSIARQUE, c'est ce qu'on appelle à préfent Marguillier, & dans quelques Provinces Scabin; mais les fonctions des Ecclefiarques étoient plus étendues: ils étoient chargés des veiller à l'entretien, à la propreté, à la décence des Eglifes, de convoquer les Paroiffiens, d'allumer les cierges pour l'Office divin, de chanter, de quêter, &c.

ECCLÉSIASTE, nom grec qui fignifie Prédicateur; c'eft le titre d'un des livres de l'Ecriture-Same, parce que l'Auteur y prêche contre la vanité & la fragilité des chofes de ce monde.

Le

Le plus grand nombre des Savans l'attribue à Salomon, parce que l'Auteur fe dit fils de David & Roi de Jérufalem & parce que plufieurs paffages de ce livre ne peuvent être appli qués qu'à ce Prince. Grotius pense qu'il a été fait par des Ecrivains poftérieurs qui le lui ont attribué; « on y trouve " dit-il, des termes qui ne fe rencontrent que dans Daniel "dans Efdras, & dans les Paraphrafes Chaldaïques ». Alléga tion frivole. Salomon, Prince très-inftruit, a pu avoir con noiffance du Chaldéen. Dans le livre de Job, il y a plufieurs mots dérivés de l'Arabe, du Chaldéen & du Syriaque; il ne s'enfuit rien. Selon d'autres, Grotius jugeoit que, pour le tems de Salomon, l'Auteur de l'Eccléfiafle parle trop clairement du jugement de Dieu, de la vie à venir & des peines de l'enfer ; mais ces mêmes vérités se trouvent auffi clairement énoncées dans les livres de Job, dans les Pfeaumes, dans le Pentateu que, livres certainement antérieurs à Salomon.

Quelques anciens hérétiques ont cru au contraire que l'Ecclefiafle avoit été composé par un impie, par un Saducéen, par un Epicurien, ou par un Pyrrhonien, qui ne croyoit point d'autre vie; c'est auffi l'opinion de plufieurs incrédules. Soup çon très-mal fondé.

Après avoir fait l'énumération des biens & des plaifirs de ce monde, l'Eccléfiafte conclut que tout eft vanité pure & affliction d'efprit; ce n'eft point là le langage des Epicuriens anciens ni modernes.

Parce qu'un Ecrivain raisonne avec lui-même & propose des doutes, il n'eft pas pour cela Pyrrhonien, fur-tout lorf qu'il en donne la folution; c'eft ce que fait l'Ecclefiafte. Il rap→ porte les différentes idées qui lui font venues à l'efprit, fur le cours bizarre des événemens, fur la conduite inconcevable de la Providence, fur les fort des bons & des méchans dans ce monde; il conclut que Dieu jugera le jufte & l'impie, & qu'alors tout fera dans l'ordre. Si fes réflexions femblent fouvent fe contredire, fi quelquefois il femble préférer le vice à la vertu, & la folie à la fageffe, il enfeigne bientôt après qu'il vaut mieux entrer dans une maison où règne le deuil, que dans la falle d'un feftin; dans la première, dit-il, l'homme apprend à penser à la deftinée qui l'attend, & quoique plein de fanté, il envifage fa fin dernière. Ecclef. c. 3, . 17; c. 7, . 3, &c.

Plus loin, il confeille à un jeune homme de fe livrer à la joie & aux plaifirs de fon âge; mais à l'inftant même il l'avertit que Dieu entrera en jugement avec lui, & lui en demandera compte; il lui repréfente que la jeuneffe & la volupté font une pure illufion. Il l'exhorte, dans le chapitre fuivant, à fo fouvenir de fon Créateur dans fa jeuneffe, avant qu'il foit courbé fous le poids des années. Parlant de la mort, il dit : Théologie. Tome III

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L'homme ira dans la maifon de fon éternité, la poussière rentrera dans la terre d'où elle a été tirée, & l'efprit re» tournera à Dieu qui l'a donné ». La conclufion du livre eft fur-tout remarquable: Craignez Dieu & gardez fes comman> " demens, c'est la perfection de l'homme. Dieu jugera toutes " nos actions bonnes ou mauvaises", c. 1, V. 9; c. 12, ✯. 1, 7, 13. Un Epicurien, un homme qui ne croit point d'autre vie, un Pyrrhonien, qui affecte d'être indécis & indifférent fur le préient & fur l'avenir, n'ont jamais parlé de

.

cette manière.

ECCLÉSIASTIQUE, nom d'un des livres de l'Ancien-Teftament, que l'on appelle auffi la Sapience de Jefus, fils de Sirach. L'an 245 avant Jésus-Chrift, fous le règne de Ptolomée Evergète, fils de Ptolomée Philadelphe, Jéfus, fils de Sirach, Juif de Jérufalem, s'établit en Egypte, y traduifit en grec le livre que Jéfus, fon aieul, avoit compofé en hébreu, & qui porte, dans nos Bibles, le nom d'Ecclefiaftique. Les anciens le nom moient Panareton, trésor de toutes les vertus. Jéfus l'ancien l'avoit écrit vers, le temps du Pontificat d'Onias Ier.; le fils de ce Pontife, nommé Simon le Jufte par Jofeph, eft loué dans le chapitre cinquantième de ce même livre. L'original hébreu est perdu; mais il fubfiftoit encore du tems de Saint Jérôme : ce Père dit, dans fa Préface des livres de Salomon, & dans fa lettre 115, qu'il l'avoit vu fous le titre de Paraboles.

Les Juifs ne l'ont point mis au nombre de leurs livres canoniques, foit parce que le Canon étoit déja formé lorsque l'Eccléfiaftique a été écrit, foit parce qu'il parle trop clairement du myftère de la Sainte-Trinité, c. 1, v. 9; c. 24, V. 5 ; c. 51,

14. Grotius a foupçonné que ces paffages pouvoient être des interpolations faites par les Chrétiens, mais ce foupçon eft fans fondement.

Dans les anciens catalogues des livres facrés reconnus par les Chrétiens, celui-ci eft feulement mis au nombre de ceux qu'on lifoit dans l'Eglife avec édification; Saint Clément d'Alexandrie & d'autres Pères des premiers fiècles le citent fous le nom d'Ecriture-Sainte; Saint Cyprien, Saint Ambroife & Saint Auguftin le tiennent pour canonique; il a été déclaré tel par les Conciles de Carthage, de Rome, fous le Pape Gélafe, & de Trente.

Plufieurs Critiques penfent, mais affez légèrement, qu'il y a dans la traduction grecque des chofes qui n'étoient pas dans l'original, que la conclufion du chap. 30, . 27 & fuiv., & la prière du dernier chapitre, font des additions du Traducteur. Ce qu'il dit du danger qu'il a couru de perdre la vie par une fauffe accufation portée au Roi contre lui, ne peut pas, difentils regarder le grand-père de Jéfus, qui demeuroit à Jérufa

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