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Analyse

du premier

miciens, p. 249.

2. Ce qui fut dit dans cette conférence fait livre contre la matière des trois livres contre les acadéles Acadé- miciens. Ils sont adressés à Romanien, ce riche bourgeois de Tagaste, qui logea chez lui saint Augustin et qui l'entretint de tout à Carthage, lorsqu'il y étudiait l'éloquence. Ces trois livres sont écrits en forme de dialogues, à l'imitation de ceux de Cicéron. La dispute commence par Licentius, fils de ce Romanien et Trigétius, après quoi saint Alypius et saint Augustin prennent la parole. Dans le premier dialogue, Augustin, après avoir fait remarquer à Romanien que ni les honneurs, ni les richesses, ni tout ce qu'on appelle biens de la fortune ne peuvent rendre les hommes heureux, à cause de leur fragilité, de leur inconstance, et que ces biens sont toujours mêlés de beaucoup d'adversité, il l'exhorte à se donner tout entier à l'étude de la sagesse, pour laquelle il savait qu'il avait de l'amour, et dont il avait déjà goûté les douceurs. Ensuite il lui fait un détail des trois conférences ou disputes que Licentius et Trigétius avaient eues sur la nature de la béatitude. Le premier soutenait, avec les académiciens, que pour être heureux il suffit de chercher la vérité, et appuyait son sentiment de l'autorité des plus illustres philosophes de cette secte, et en particulier de Carnéades et de Cicéron, qui non-seulement devaient être regardés comme des gens qui avaient été heureux, mais qui avaient encore fait consister la vraie béatitude dans la recherche seule de la vérité. Le second prétendait, au contraire, que pour être véritablement heureux, il ne suffisait pas de rechercher la vérité, mais qu'il fallait aussi la connaître parfaitement. Comme ils convenaient néanmoins tous deux que la sagesse est ce qui fait le bonheur de l'homme, la dispute tomba sur la définition de la sagesse. Trigétius en rapporta plusieurs, et une entre autres, où il disait qu'elle était le droit chemin qui conduit à la vérité. Licentius les rejeta toutes et soutint que la sagesse consistait dans la science et dans la recherche de la vérité, disant que celui-là est sage qui la recherche, et que dès qu'il est sage, il est heureux. Saint Augustin, après les avoir ouïs l'un et l'autre, dit qu'il eût pu terminer leur différend en peu de paroles, s'il n'eût eu principalement en vue de les exercer, et de voir leurs inclinations et la force

1 August., lib. II Cont. Acad., cap. IX.

de leur esprit, et il conclut de tout ce qu'ils avaient dit que, puisque nous ne pouvons être heureux qu'en connaissant ou qu'en cherchant la vérité, nous devons mépriser tout le reste pour nous appliquer uniquement à la rechercher.

An

du de me

3. Vers le dix-huitième ou le dix-neuvième du même mois de novembre de l'an 386, saint Augustin reprit ses conférences sur les pag. académiciens. Licentius y défendit quelque temps le sentiment de ces philosophes contre Trigétius et contre saint Augustin même; mais cédant la place à saint Alypius, saint Augustin traita avec lui cette matière avec beaucoup d'exactitude 1, et l'obligea de convenir que l'opinion des académiciens n'était point soutenable. Cette dispute, qui dura trois jours de suite, fait le sujet du second livre. Ce saint Docteur y exhorte encore Romanien à l'étude de la philosophie, témoignant qu'il ne pouvait mieux que par-là reconnaître la générosité extraordinaire dont il avait usé envers lui, en fournissant à tous ses besoins depuis la mort de son père. Ensuite il rapporte les trois autres conférences dans lesquelles Licentius et Alypius exposent les sentiments des anciens, et ce en quoi ils diffèrent des nouveaux académiciens. Comme ceux-ci soutenaient que malgré l'impossibilité de connaître la vérité, il y avait toutefois des choses que l'on pouvait croire comme vraisemblables, saint Augustin fait. voir le ridicule de cette opinion, par l'impossibilité de connaître si une chose est semblable à la vérité, sans connaître la vérité même; et il demande que l'on recherche avec plus de soin ce que c'est que vraisemblance et probabilité, suivant les principes de ces philosophes; s'ils ont eu un sentiment certain touchant la connaissance de la vérité, ou s'ils n'ont pas encore voulu le faire connaître.

A

du t ine

4. Saint Augustin fait dans le troisième. livre le récit de ce qui se passa dans deux autres conférences tenues vers le 21 ou le pag. 2 22 du même mois. Il commence ce livre par diverses réflexions sur ce qu'on appelle fortune, et par montrer que quoiqu'elle puisse aider un homme dans la recherche de la vérité, elle n'est pas néanmoins nécessaire au sage; et qu'il en est à peu près des biens de la fortune comme des mamelles à l'égard des petits enfants dont ils se passent dans un âge plus avancé. Il montre à cette occasion qu'il y a cette différence entre le sage

et celui qui désire de l'être, que le premier est du moins instruit de la science et qu'on ne peut donner le nom de sage à celui qui ne sait rien. Mais il soutient qu'on ne peut, sans le secours de Dieu, connaître la vérité. Alypius, qui jusque-là avait soutenu le parti des académiciens, l'ayant abandonné sur ce qu'Augustin avait dit pour le réfuter, le Saint en continua la réfutation dans un fort long discours qui termina toute cette dispute. Il y fit voir contre Cicéron et les autres académiciens, qu'il était absurde de dire qu'on ne connaissait rien et qu'il ne fallait rien affirmer c'étaient deux de leurs axiomes; et montra par des exemples sensibles qu'il y avait des choses dont nous étions assurés, comme de l'existence d'un monde et de plusieurs autres choses semblables, sur lesquelles nos sens, quelque faibles qu'ils soient, ne peuvent nous tromper: qu'il y a aussi plusieurs vérités incontestables dans la dialectique, telles que sont celles-ci: L'âme ne peut mourir et être immortelle; l'homme ne peut pas être en même temps heureux et malheureux; ainsi de toutes les propositions disjonctives dont l'une est vraie et l'autre fausse : que du moins on ne peut disconvenir que le sage ne connaisse la sagesse, et qu'en la concevant, il ne donne son consentement à ce qu'elle lui propose. Il combat après cela la pernicieuse maxime de ceux qui assuraient qu'on ne péchait point en suivant une opinion probable, et dit qu'elle ouvre la porte aux adultères, aux parricides, aux sacriléges et à toutes sortes de crimes que les juges ne laisseraient pas de punir sévèrement, sans avoir égard aux sentiments des philosophes sur ce point. Il tâche de montrer que ni les académiciens anciens, ni même Cicéron, n'ont autorisé cette maxime, et que leurs véritables sentiments n'étaient pas de croire qu'on ne pût connaître la vérité; que, quoiqu'ils la connussent, ils ont affecté de passer comme pour ne l'avoir pas connue, afin que leurs successeurs la cherchassent comme un trésor caché, et que probable et vraisemblable était la même chose dans leurs sentiments. Il remarque que de son temps, toutes les diverses sectes des philosophes étaient réduites en une, ayant un système composé des sentiments de Platon et d'Aristote, excepté quelques cyni

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ques que l'amour du libertinage et la licence retenaient encore dans leurs anciennes opinions. Saint Augustin attribue à la miséricorde de Dieu l'avantage qu'il eut de confondre dans cette conférence les partisans des académiciens, celui de se convaincre luimême qu'il pouvait trouver la vérité, et d'avoir reconnu que l'autorité et la raison étant les deux sources de nos connaissances, il devait s'attacher inséparablement à l'autorité de Jésus-Christ comme à la plus forte de toutes, et chercher dans Platon des vérités conformes à la doctrine des auteurs sacrés, avec l'espérance même de les approfondir par la lumière de l'intelligence. C'est par cette dernière réflexion qu'il finit ses livres contre les académiciens. Lorsqu'il en fit la revue, il se condamna d'y avoir donné trop d'éloges à Platon et à ses disciples, de s'y être servi trop souvent du terme de fortune, quoique par-là il n'eût entendu aucune. divinité, mais seulement l'événement fortuit des choses de la vie, soit pour le bien, soit pour le mal, et d'y avoir dit que le souverain bien de l'homme consiste dans l'âme, au lieu de le mettre dans Dieu, qui seul rend l'âme heureuse lorsqu'elle jouit de lui comme du souverain bien. Il y reprend encore quelques autres manières de parler qui lui étaient pardonnables dans un ouvrage purement philosophique, et écrit dans un temps où il était moins instruit des vérités de la religion. Un de ses amis, nommé Hermogénien, ayant vu ces trois livres, lui écrivit 2 qu'il avait vaincu les académiciens. Cette approbation fit d'autant plus de plaisir à saint Augustin, qu'il croyait Hermogénien plus capable que personne d'en juger, et son amitié sans déguisement. C'est pourquoi il le pria, en répondant à sa lettre, d'examiner avec plus d'attention ce qu'il y disait du véritable sentiment des académiciens et de lui marquer ce qu'il en pensait. Il cite lui-même ces livres dans son Manuel à Laurent 3, et dans son quinzième livre de la Trinité, où il dit que ceux qui les liront ne seront point ébranlés par le grand nombre des arguments dont les académiciens appuient leurs opinions. Ils sont écrits avec toute la justesse et toute l'élégance possible, et les matières y sont traitées avec beaucoup de méthode et de netteté.

3 Enchirid, cap. xx.

Lib. XV de Trinit., cap. XII.

Ce livre fut écrit en 386.

§ IV.

Du livre de la Vie bienheureuse.

1. Le livre de la Vie bienheureuse est de
la même année que les précédents, c'est-à-
dire, de 386. C'est le fruit des conférences
que saint Augustin eut avec ses amis et ses
parents pendant les sept jours qui s'écou-
lèrent depuis celles qui font la matière du
premier livre contre les académiciens, jus-
qu'aux autres qui font le sujet du second.
Saint Alypius ne s'y trouva pas, parce qu'il
était absent c'est pourquoi il n'y est rien
dit de lui. La première de ces conférences
se tint le 13 de novembre, jour de la nais-
sance de saint Augustin. Il avait donné ce
jour-là à tous ceux qui demeuraient avec
lui un diner si frugal, qu'il laissait à l'esprit
la liberté entière de ses fonctions. Ayant
donc, après dîner, rassemblé toute sa com-
pagnie, du nombre desquels étaient sa mère
et son fils Adéodat, il leur fit diverses ques-
tions touchant la béatitude, dans le dessein
de leur procurer le moyen d'y arriver. Il
s'entretint avec eux sur la même matière
les deux jours suivants, savoir, le 14 et le 15
de novembre, et finit ces entretiens par un
discours sur la Trinité. Ce livre est adressé
à un nommé Théodore Manlius, le même qui
fut préfet des Gaules et d'Italie, puis consul
en 399.

2. Dans le prologue, saint Augustin dis-
tingue trois sortes de personnes. Les unes,
pour éviter les troubles dont cette vie est
sans cesse agitée, se retirent dans le port,
aussitôt qu'elles ont atteint l'usage de raison,
pour y passer leurs jours dans le repos et
la tranquillité; les autres, après avoir été
enveloppées quelque temps dans les orages
du siècle, et séduites par leurs passions, se
trouvent heureusement repoussées dans le
port par quelques vents contraires; et les
dernières, au milieu des tempêtes, ont tou-
jours fixé leur vue sur quelque astre, dans
le dessein de revenir dans leur patrie, et
sont, en effet, ramenées par quelque adver-
sité temporelle. Le plus grand écueil qui se
rencontre dans cette navigation lui semble
celui de la vaine gloire, où il est très-difficile
de ne pas y faire naufrage. S'appliquant ces
réflexions à lui-même, il représente com-
ment, après avoir été longtemps enveloppé.
dans les erreurs des manichéens, puis agité
par les incertitudes de la philosophie aca-

démicienne, il était enfin abordé au port de la philosophie, ayant trouvé une heureuse étoile, dont la lumière lui avait fait connaître la vérité dans les discours de l'Évêque Ambroise et de Théodore lui-même il prie ce dernier par le lien et le commerce que les âmes ont entre elles, de l'aimer, et de s'assurer que de son côté il l'aime et le chérit. « C'est vous, lui dit-il, que je regarde comme le seul qui puissiez me donner le secours dont j'ai besoin. Si j'obtiens cette faveur de votre vertu, j'arriverai très-facilement, avec un peu d'efforts, au calme de la vie heureuse, dont je crois que vous jouissez déjà. »

3. Entrant ensuite en matière, il pose pour principe qu'étant composé de corps et d'âme, ces deux parties ont également besoin de nourriture; comme le corps, lorsqu'il ne reçoit pas une nourriture convenable et suffisante, devient infirme et sujet aux maladies, de même l'âme qui n'est pas nourrie dans les sciences, n'est remplie que de vices et de mauvaises affections; l'esprit a ses dégoûts comme le corps a les siens; et en vain il entreprendrait de nourrir les esprits de ceux qui l'écoutaient, s'ils ne le souhaitaient eux-mêmes. Tous ayant témoigné être bien disposés, saint Augustin proposa le sujet de la conférence. « Puisque tous les hommes, dit-il, souhaitent d'être heureux, il est question de savoir si ceux-là sont heureux, qui n'ont pas ce qu'ils veulent ou si l'ayant, ils le sont en effet. » A l'égard de la première proposition, tous convinrent qu'on ne peut être heureux sans avoir ce qu'on désire. Sur la seconde, la mère de saint Augustin ayant dit que ceux qui ont tout ce qu'ils souhaitent sont heureux, pourvu que ce qu'ils souhaitent soit bon, il lui répliqua aussitôt qu'elle avait trouvé le plus grand secret de la philosophie. Mais comme parmi les choses créées. qui sont toutes bonnes, il y en a même dont la possession est légitime, saint Augustin demanda si elles pouvaient rendre l'homme heureux et il fut convenu que non, parce qu'étant fragiles et périssables, il y a toujours lieu de craindre qu'on ne vienne à les perdre. D'où on conclut que pour être véritablement heureux, il fallait souhaiter et posséder un bien permanent, et qui ne pût nous être enlevé. Or, ce bien est Dieu seul. Ainsi, l'on doit dire que celui qui possède Dicu est heureux, et que celui-là le possède qui vit bien, c'est-à-dire, qui fait sa volonté.

Suite.

L'académicien, au contraire, ne peut passer pour heureux, puisqu'il n'a pas la vérité qu'il cherche; et dès là qu'il n'est pas heureux, il ne peut être regardé comme sage, puisqu'il est inouï que celui-là soit sage qui n'est pas véritablement heureux. Saint Augustin traite la même matière dans la seconde conférence, et après y avoir répété ce dont on était convenu dans la première, que celui-là possède Dieu, qui fait sa volonté, qui vit bien, et qui n'est point possédé de l'esprit impur, il s'arrête sur ce dernier point, et distingue deux sortes de mauvais esprits, l'un, qui trouble l'âme et les sens; l'autre, qui consiste dans la mauvaise disposition de l'âme lorsqu'elle se trouve souillée par le vice et par l'erreur. On chasse le premier par l'imposition des mains et par les exorcismes qui se font en conjurant le malin esprit par tout ce qu'il y a de plus sacré. Pour se défaire du second, il faut vivre chastement, ce qui demande que l'on s'abstienne non-seulement des péchés d'impureté, mais encore de tout autre péché, parce qu'il n'y en a point qui ne souille l'âme. Or, celui-là vit chastement qui pense à Dieu et qui ne s'attache qu'à lui. Comme donc tout homme qui a trouvé Dieu, et à qui Dieu est propice, doit passer pour heureux; celui-là, au contraire, qui, par ses vices et ses péchés s'éloigne de Dieu, non-seulement n'est point heureux, mais il n'a pas même Dieu propice.

On examine dans la troisième conférence, comment il est vrai que tout homme qui est dans l'indigence soit malheureux, et comment tout malheureux est dans l'indigence. Le riche, à ne regarder que les biens temporels, est même plus misérable que le pauvre, en ce que, non-seulement il est toujours avide de nouvelles richesses, mais encore dans la crainte et l'inquiétude de perdre celles qu'il a dernière espèce de misère dont le pauvre n'est point affligé. De toutes les indigences, la plus grande est de manquer de sagesse; au contraire, celui qui possède la sagesse, ne peut avoir besoin de rien « Or, continue-t-il, il n'y a point de sagesse véritable sinon celle de Dieu, puisqu'il est lui-même la sagesse et la vérité, selon qu'il nous en assure dans le chapitre XIV de saint Jean. Celui donc qui ne possède pas la sagesse ne possède pas Dieu, et par

1 Lib. Il De Ord., cap. xv, num. 43.

conséquent n'est pas heureux; et celui-là, au contraire, est heureux qui possède la sagesse, parce qu'il possède Dieu. » Il finit cette conférence, en exhortant ceux qui étaient présents à chercher Dieu avec toute l'ardeur possible, afin de parvenir à le connaître parfaitement, en quoi consiste la satiété de l'esprit et la vie bienheureuse.

Saint Augustin, en écrivant son premier livre des Rétractations, corrigea cet endroit et quelques autres semblables, où il avait mis la béatitude dès cette vie, en la faisant consister dans l'âme seule, en quelque état que fut le corps; et il convient que, suivant la doctrine de l'Apôtre, l'homme ne pouvant connaitre Dieu parfaitement qu'en l'autre vie, lorsque son corps, devenu incorruptible et immortel sera parfaitement soumis à l'esprit, il ne pouvait être entièrement heureux en cette vie. Il se repent, dans le même livre, d'avoir trop donné à Théodore, en disant de lui qu'il jouissait déjà de la vie heureuse, et de s'être trop souvent servi du terme de fortune. Il y dit encore qu'il n'avait point entier le livre de la Vie bienheureuse; toutes les copies qu'il en avait, et celles des autres s'étant trouvées imparfaites, en sorte qu'il y manquait quelque chose qui en interrompait la suite. On n'y remarque aujourd'hui aucune interruption.

§ V.

Des deux livres de l'Ordre.

Livres de l'Ordre,

1. Les deux livres de l'Ordre suivent, dans les Rétractations de saint Augustin, celui de faits en 386. la Vie bienheureuse. Aussi ce Père fit le premier de ces deux livres avant de travailler au second contre les académiciens, c'est-àdire, avant le dix-huit ou dix-neuvième de novembre de l'an 386. Mais il ne commença le second livre de l'Ordre qu'après avoir achevé le troisième contre les académiciens, qui y est cité 1. Ces deux livres sont encore un fruit des conférences qu'il faisait avec ses deux disciples Licentius et Trigétius. Sa mère s'y trouva quelquefois et Alypius qui n'avait pu assister à celles qui font la matière du premier livre, fut présent à celles dont le second livre est composé. Ils sont adressés l'un et l'autre à Zénobius, ami de saint Augustin, et avec lequel ce saint Docteur s'était souvent entretenu sur la matière qui s'y est traitée. Zénobius était homme de

Analyse du premier livre, pag. 315.

Analyse du second

livre, pag.

329.

beaucoup d'esprit, et grand amateur de tout ce qu'il y avait de beau.

2. Le premier livre de l'Ordre renferme ce qui se passa dans deux conférences sur cette matière. On voit dans la première, que tous les biens et tous les maux sont compris dans l'ordre de la Providence, en sorte qu'il ne se passe rien dans le monde, sans que la providence de Dieu n'y ait part. On y fait voir aussi que les sciences humaines ont leur utilité, et qu'elles servent beaucoup à former l'esprit, pourvu qu'on en use sagement. On recherche, dans la seconde conférence, ce que c'est que l'ordre, et on l'y définit ce par quoi on fait toute chose en la manière que Dieu l'a ordonné 2. Saint Augustin y dit en passant, quelque chose contre l'amour de la vaine gloire, et il y parle aussi de la manière dont on doit modérer l'ardeur de l'émulation et de la vanité qui se trouvent d'ordinaire parmi les jeunes étudiants. Pendant qu'il en faisait l'application à Licentius et à Trigétius, qui s'étaient laissés aller à quelques légèretés, sainte Monique entra et saint Augustin en prit occasion de démontrer que l'on ne devait pas interdire aux femmes l'étude de la sagesse; qu'il y avait eu des femmes chez les anciens qui s'étaient mêlé de philosopher; et que les divines Écritures ne condamnent point en général tous les philosophes, mais seulement ceux de ce siècle, c'est-à-dire, les faux sages. Afin que sa mère n'ignorât point ce que le terme de philosophie signifie en grec, il lui rendit ce terme en latin, et dit qu'il signifiait l'amour de la sagesse.

3. Le second livre est aussi composé de deux conférences. Dans la première, on examine la définition de l'ordre; ce que c'est qu'être avec Dieu et dans l'ordre de Dieu; et en quel sens on peut dire que le sage demeure avec Dieu sans pouvoir être ébranlé.

Être avec Dieu, c'est être gouverné par lui, c'est le comprendre. Le sage le comprend, il s'en occupe seul ou lorsqu'il converse avec les hommes. Il ne suit pas de là que la folie soit aussi avec Dieu, parce que le sage la comprend; la folie est à l'égard de l'âme ce que les ténèbres sont à l'égard des yeux, qui ne les voient pas, quelque sains qu'ils puissent être. Quoique les in

1 Lib. I De Ord., cap. II. Le texte porte ordo est per quem aguntur omnia quæ Deus constituit. On pourrait traduire : « L'ordre est ce par quoi est conduit tout ce que Dieu a établi. »

sensés agissent contre l'ordre, leurs actions ne laissent pas d'entrer dans l'ordre de la Providence; et beaucoup de choses qui ne nous paraissent pas dans l'ordre, y sont néanmoins et concourent également à la beauté de l'univers, suivant les règles de la loi éternelle, quoique nous en jugions autrement. Qu'y a-t-il de plus cruel et de plus odieux qu'un bourreau? Quoi de plus déshonnête que les femmes publiques? L'un est nécessaire pour le maintien de la police; les autres empêchent de plus grands désordres. » Il y a deux voies que l'on doit suivre pour s'éclairer sur la vérité des choses, lorsqu'elles nous paraissent obscures: la raison et l'autorité : l'autorité est la révélation par laquelle Dieu nous fait connaître les mystères que notre raison seule ne pourrait découvrir. Dans la seconde conférence, le saint Docteur traite de la justice qu'il dit consister à rendre à chacun ce qui lui est dû. Quoique Dieu ne l'ait exercée que depuis qu'il y a des bons et des mauvais, il était néanmoins juste avant qu'il y en eût, parce qu'il pouvait distinguer le bien du mal, s'ils eussent existé. Le mal s'est introduit contre l'ordre de Dieu, mais la justice divine l'a soumis à ses ordres.

De ces questions métaphysiques, il passe aux préceptes de morale, et prescrit, en ces termes, la manière dont ses disciples doivent se conduire, soit dans leurs mœurs, soit dans les emplois où ils pourraient être occupés à l'avenir. « Qu'ils évitent, dit-il, les débauches et les excès; qu'ils méprisent les parures et les ajustements immodestes; qu'ils ne perdent pas leur temps au jeu, ou à des amusements inutiles; qu'ils ne soient ni paresseux, ni adonnés au sommeil, ni jaloux, ni envieux, ni ambitieux, ni avides de louanges; qu'ils regardent l'amour de l'argent comme le poison le plus dangereux dont leurs cœurs puissent être infectés; qu'ils évitent également d'être lâches et téméraires. S'il arrive qu'ils soient offensés par quelques-uns des leurs, qu'ils retiennent leur colère, en sorte qu'il n'en paraisse rien; qu'ils ne haïssent personne; qu'il n'y ait aucun vice qu'ils ne prennent à tâche de corriger; qu'ils ne soient ni trop sévères, ni trop complaisants; qu'ils ne punissent que

Saint Augustin donne en effet une définition semblable de l'ordre, au livre II, chap. 1, num. 2. et au livre IV, chap. x, num. 28. (L'éditeur.)

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