X I I. L'ALLÉG Αλληγορία, L'ALLÉGORIE a beaucoup de raport avec la métaphore; l'allégorie n'est même qu'une mé- mutátio, fitaphore continuée. gúra quâ áliud díci Αλλο L'allégorie est un discours qui est d'abord tur, áliud siprésenté sous un sens propre, qui paroît tout gnificátur, autre que ce qu'on a dessein de faire entendre, R. Aλo, et qui cependant ne sert que de comparaison pic, vel pour doner l'intelligence d'un autre sens qu'on apú, n'exprime point. narro con ciónor, vel cio, orátio. La métaphore joint le mot figuré à quelque, ália ; terme propre; par exemple, le feu de vos yp, cónyeux; yeux est au propre, au lieu que dans l'allégorie tous les mots ont d'abord un sens figuré; c'est-à-dire, que tous les mots d'une phrase ou d'un discours allégorique forment d'abord un sens litéral qui n'est pas celui qu'on a dessein de faire entendre: les idées accessoires dévoilent ensuite facilement le véritable sens qu'on veut exciter dans l'esprit; elles démasquent, pour ainsi dire, le sens litéral étroit, elles en font l'aplication. Quand on a comencé une allégorie, on doit conserver, dans la suite du discours, l'image dont on a emprunté les premières expressions. Madame des Houlières, sous l'image d'une bergère qui parle à ses brebis, rend compte à ses enfans de tout ce qu'elle a fait pour leur procurer des établissemens, et se plaint ten drement, sous cette image, de la dureté de la fortune. Dans ces prés fleuris Cherchez qui vous mène, J'ai fait pour vous rendre Et sans mon secours, Brebis mes amours. Hélas! il le sait; Je prens Ces bois, ces prairies, Du Dieu des pasteurs Toute sa parure; Cette allégorie est toujours soutenue par des images qui toutes ont raport à l'image principale par où la figure a comencé; ce qui est essentiel à l'allégorie (1). Vous pouvez entendre (1) Id quoque imprímis est custodiéndum, ut quo ex genere cœperis translatiónis, hoc désinas. Multi enim, à la lettre tout ce discours d'une bergère, qui, touchée de ne pouvoir mener ses brebis dans de bons pâturages, ni les préserver de ce qui peut leur nuire, leur adresseroit la parole, et se plaindroit à elles de son impuissance; mais ce sens, tout vrai qu'il paroît, n'est pas celui que madame des Houlières avoit dans l'esprit; elle étoit ocupée des besoins de ses enfans, voilà ses brebis : le chien dont elle parle, c'est son mari qu'elle avoit perdu : le dieu Fan c'est Ale roi., Dacier, d Horace, Cet exemple fait voir combien est peu juste Euvres la remarque de monsieur Dacier, qui prétend t. 1, p. 211, qu'une allégorie qui rempliroit toute une trais. edit. pièce, est un monstre, et qu'ainsi l'ode 14 du I. livre d'Horace, O navis referent, etc., n'est Quint. 1. 8, point allégorique, quoi qu'en ait cru Quinc.6, alleg. tilien et les comentateurs. Nous avons des 1709. pièces entières toutes allégoriques. On peut voir dans l'Oraison de Cicéron contre Pison (1), 'un exemple de l'allégorie, où, come Horace, Cicéron compare la république romaine à un vaisseau agité par la tempête. cum inítium à tempestáte sumpsérunt, incendio aut (1) Neque tam fui tímidus, ut qui in máximis turbinibus ac fluctibus Reipública navem gubernassem, salvámque in portu collocássem; frontis tuæ nubéculam, tum collégæ tui contaminátum spíritum pertiméscerem. Alios ego vidi ventos, álias prospéxi ánimo procéllas áliis impendéntibus tempestátibus non cessi, sed his unum me pro ómnium salúte óbtuli. Cic. in Pis. n. ix, aliter, 20 et 21. L'allégorie est fort en usage dans les proverbes. Les proverbes allégoriques ont d'abord un sens propre qui est vrai, mais qui n'est pas ce qu'on veut principalement faire entendre: on dit familièrement, tant va la cruche à l'eau, qu'à la fin elle se brise; c'est-à-dire, que, quand on afronte trop souvent les dangers, à la fin on y périt; ou que quand on s'expose fréquenment aux ocasions de pécher, ou finit par y succomber. Les fictions que l'on débite come des histoires pour en tirer quelque moralité, sont des allégories qu'on apèle apologues, paraboles, ou fable's morales; telles sont les fables d'Esope. Ce fut par un apologue que Ménénius Agrippa rapela autrefois la populace romaine, qui, mécontente du sénat, s'étoit retirée sur une montagne. Ce que ni l'autorité des lois, ni la dignité des magistrats romains n'avoient pu faire, se fit par les charmes de l'apologue. Souvent les anciens ont expliqué, par une histoire fabuleuse, les éfets naturels dont ils ignoroient les causes, et dans la suite on a doné des sens allégoriques à ces histoires. Ce n'est plus la vapeur qui produit le tonerre Cette manière de philosopher flate l'imagina- Boileau, Art. Poët. chant III. |