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entre les diverses parties de leur récit, comme autant de pierres d'attente où les autres viennent s'agencer. Saint Matthieu, parlant des Mages, sans rien dire de la Présentation, place immédiatement l'ordre d'aller en Égypte. Saint Luc, parlant de la Présentation, sans rien dire des Mages et de la fuite en Égypte, a donc à raconter, sans plus attendre, le retour à Nazareth, comme le fera plus tard saint Matthieu. Il y a dans chacun des deux récits une succession de faits qui, si bien liés qu'on les suppose dans la narration, n'exclut aucun fait intermédiaire aussi le champ est-il libre aux systèmes divers que Bossuet touche en passant. Malgré son dédain pour les petites questions qui s'agitent autour des mystères, c'est encore lui qui résout le plus simplement le problème. Il fait suivre immédiatement l'adoration des Bergers de l'arrivée des Mages: « Hérode, continue-t-il, attendait des nouvelles certaines de l'enfant par les Mages, qu'il croyait avoir bien finement engagés à lui découvrir sa demeure. Il était naturel qu'il les attendît durant quelques jours; et pour ne point manquer son coup, sa politique, quoique si précautionnée, se laissa un peu amuser. Durant ce peu de jours, il fut aisé à Joseph et à Marie de porter l'enfant au temple sans se découvrir. Les merveilles qui s'y passèrent pouvaient réveiller les jalousies d'Hérode; mais aussi furentelles promptement suivies de la retraite en Égypte. Les politiques du monde seront éternellement le jouet de leurs propres précautions que Dieu tourne comme il lui plaît; et il faut que tout ce qu'il veut s'accomplisse, sans que les hommes puissent l'empêcher, puisqu'il fait servir leurs finesses à ses desseins '. »

1 Ibid. XIX, 1.

Ainsi, naissance du Sauveur et adoration des Bergers, puis adoration des Mages, six jours après la Circoncision, ou tout le moins un peu avant la Présentation au temple, soit que les Mages soient venus d'une contrée voisine, soit que venus de plus loin ils aient été avertis à l'avance par l'apparition de l'étoile pour arriver au temps voulu ; présentation au temple pendant qu'Hérode attend encore leur retour; fuite en Égypte avant qu'il se reconnaisse trompé et ordonne le massacre des] Innocents; enfin, après sa mort, retour à Nazareth: tel est l'ordre où les éléments divers des deux récits viennent se ranger naturellement et sans effort.

Si la première période, celle de la sainte Enfance, où l'on n'a que deux Evangélistes à concilier, offre déjà matière aux objections, que sera-ce de la mission de Jésus tout entière, lorsqu'il en faudra concilier quatre? Pour aller droit au fond de l'objection, nous dirons qu'on signale une discordance générale entre le quatrième et les trois premiers dans tout le système du récit, soit 1° quant au lieu de la scène, soit 2° quant à la mise en scène et au caractère de Jésus-Christ '.

Ainsi d'abord, le lieu de la scène, dans les trois premiers Évangélistes, depuis le baptême de Jésus jusqu'au temps de la Passion, c'est surtout la Galilée; dans saint Jean, au contraire, c'est la Judée. Quel parti prendre? quel récit suivre de préférence ? Le docteur Strauss hésite, ne sachant pas trop quel récit condamner (il voudrait bien condamner l'un et l'autre). Cependant il est bien forcé d'admettre que le principal lieu de la mission du Sauveur est la Galilée; et, d'autre part, il ne

Voy. Tholuck, p. 295 et suiv.; Hug. II, 49 et suiv.

peut nier que Jésus-Christ ait dû venir aux fêtes à Jérusalem. Il y a donc, dès la première vue, un fond de vérité dans les deux systèmes de récit; y a-t-il incompatibilité réelle dans les détails de leur ordonnance? C'est ce qui est à voir.

Un philosophe (Zénon d'Élée) niant le mouvement, quelqu'un, pour toute réponse, se mit à marcher devant lui. Nous répondrons à ceux qui nient les concordances des Évangiles, en établissant sommairement leur harmonie.

Pour cela, il ne faut pas tout d'abord se préoccuper du menu détail. Dans les nombreuses harmonies qui déjà ont été essayées, on ne s'est que trop souvent laissé guider par des signes tout à fait secondaires, des liaisons purement verbales, comme aussitôt, alors, après cela. Je ne voudrais point retrancher un iota d'aucun des Évangiles; mais quand on les découpe pour les placer dans des rapports où il n'a pas plu à l'Esprit-Saint de les mettre, quand on veut fondre les quatre en un seul, vouloir garder dans cette œuvre factice des liaisons qui sont propres à la composition de chacun d'eux, c'est une œuvre chimérique, impossible, pleine de contrastes bizarres. C'est comme si de quatre figures parfaitement ressemblantes, mais dessinées dans des proportions différentes et sous des aspects divers, on voulait, en les combinant, ne faire qu'une seule tête : on ne ferait qu'un amas informe de nez, de bouches, d'yeux et d'oreilles. Et nous avons des harmonies exécutées sur ce plan-là '!

1 De tous les systèmes de concordance, le mieux raisonné nous a paru être celui de Hug dans son Introduction aux livres du N. T. Nous le suivrons généralement dans cet exposé.

Il faut d'abord prendre les traits généraux, marquer les grandes divisions du sujet ; et ces divisions nous sont données par saint Jean. Les fêtes qu'il a notées dans son récit sont autant d'époques où se partage toute la mission de Jésus-Christ. La première de ces fêtes est la pre-mière Pâque célébrée après le Baptême; la deuxième, une fête appelée la Fête des Juifs (v, 1); la troisième, une fête de Pâque (vi, 1), marquée au temps où Jésus accomplit en Galilée le miracle qui annonçait la Pâque nouvelle, le miracle de la multiplication des pains; la quatrième, la fête des Tabernacles (vii, 2); la cinquième, la fête de la Dédicace; la sixième, la Pâque où il fut lui-même immolé. Si la Fête des Juifs dont il est ques-tion au verset 1 du chapitre v est une Pâque, il y aura donc quatre Pâques, et la mission du Sauveur aura duré trois ans et demi. Si c'est une fête intermédiaire, le nombre des Pâques doit se réduire à trois, et la mission à deux ans et demi environ.. Nous admettrons la pre-mière opinion, et l'on en a vu les raisons dans le chapitre consacré à la chronologie.

Voilà le cadre tracé par saint Jean: pour le remplir, il faut combiner avec les données du même Apôtre celles des trois autres Évangélistes; et pour plus de clarté, nous prendrons celui des trois qui présente le plus grand nombre de faits dans la suite la plus rigoureuse, je veux parler de saint Luc; puis nous reviendrons sur nos pas pour mettre en rapport avec lui saint Matthieu et saint Marc.

Dans cette deuxième partie de la vie du Sauveur, c'est encore saint Luc qui commence. Il commence par raconter la prédication de Jean-Baptiste, le Baptême, la Tentation (Iv, 13). Puis saint Jean donne les divers té

moignages de Jean-Baptiste sur Jésus après le Baptême, auquel il se borne à faire allusion (1, 32). Il raconte la première vocation des Apôtres, le premier voyage de Jésus en Galilée, les noces de Cana, la première visite à Capharnaum (1-1, 12). Mais n'avions-nous pas dit que saint Jean prend pour théâtre principal Jérusalem laissant aux autres la Galilée ? D'où vient que, dès les premiers pas, on le trouve sur leur terrain?-C'est qu'il veut, avant tout, suppléer à leur silence. Il raconte donc ce premier séjour de Jésus en Galilée, comme il s'attachera par la suite à raconter ses voyages à Jérusalem, et pour le même motif: parce que les autres n'en ont point parlé.

Première Pâque. Saint Jean, continuant, nous montre Jésus venant à Jérusalem célébrer la Pâque. Il entre dans le temple d'où il chasse les vendeurs ; il reçoit pendant la nuit Nicodème, puis se rend au Jourdain, et de là retourne par la Samarie en Galilée. En traversant la Samarie, il se révèle à la Samaritaine : une parole qu'il dit, en cette occasion, à ses disciples montre que l'on était à quatre mois de la moisson. La moisson se faisait en avril, on était donc en décembre; et le séjour de Jésus en Judée, depuis la dernière Pâque, avait duré huit mois. De la Samarie il retourne en Galilée. Saint Jean parle d'un second miracle qu'il accomplit à Cana, en faveur d'un officier dont le fils était malade à Capharnaüm; puis il s'arrête (1, 13-v, 1). Le récit des autres Évangélistes explique son silence en continuant som

récit.

Saint Luc le reprend à Nazareth : les habitants de Nazareth demandent à Jésus-Christ de leur faire des miracles comme il en a fait à Capharnaum (Iv, 23)..

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