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proportions, le crime n'en est pas moins odieux, mais il a pu se perdre parmi tant d'horreurs qui ont ensanglanté les dernières années d'Hérode. Que de crimes de Tibère Tacite rapporte, sans que Suétone en dise rien ! que de crimes mentionnés par Suétone, et passés sous silence par Tacite et par Dion Cassius! Il a pu en arriver de même de ce massacre d'Hérode : son caractère n'y répugne point. Josèphe a constaté combien il était cruel quand il craignait pour son autorité, et ses défiances croissaient avec l'âge : rien de moins invraisemblable, que, trompé une première fois par les Mages, il n'ait plus voulu s'en remettre à personne du soin de trouver sa victime, et qu'il ait cru l'étouffer ainsi dans le sang. Ce crime aura pu rester comme enseveli dans le village où il s'exécuta; ou si le bruit en parvint au dehors, comme on pouvait n'en pas savoir les motifs, il aura été facilement confondu parmi tant d'autres cruautés, peut-être dans ce massacre des Pharisiens coupables d'avoir annoncé l'avénement du nouveau roi qui devait supplanter la race d'Hérode: histoire assez confuse dans Josèphe, qui la rattache aux intrigues de Phéroras, et cherche dans sa famille le roi promis'. Mais, à la violence avec laquelle il s'élève à ce propos contre les Pharisiens, Lardner a supposé qu'il pourrait bien être question d'une tout autre royauté, de celle du Messie lui-même 2; et, quoi qu'il en soit, le fait se rapporte, nous l'avons vu, au temps de la naissance de Jésus-Christ.

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1 Ant. XVI, 11, 4 et Hug, II, 74, no 5; cf. Képler, de Anno nat. Chr. XII, p. 127.

2 Lardner, II, II, 3 et 1, 2, § 3.

CHAPITRE IV.

L'AN XV DE TIBÈRE ET LES ANNÉES DE JÉSUS-CHRIST.

Ce ne sont pas seulement les faits, ce sont les dates qui ont provoqué des objections dans l'histoire du Sauveur. Saint Luc n'en marque point pour la naissance de Jésus-Christ: il s'est borné à la rattacher au temps du recensement de la Judée. Mais il en donne une pour la mission de saint Jean-Baptiste; et cette date, par ses rapports avec le temps de la naissance et de la mort du Sauveur, est comme la clef de voûte de tout le système chronologique des Évangiles. Nous établirons sommairement ce système : c'est la voie la meilleure pour aborder et pour résoudre en leur lieu les difficultés qu'on y trouve. Après tant de dissertations écrites sur cette matière, nous n'avons pas la prétention d'apporter des solutions bien nouvelles. Pour la naissance de JésusChrist, par exemple, toutes les années ont été proposées et défendues, jusqu'aux limites les plus invraisemblables, depuis l'an 22 avant l'ère vulgaire jusqu'à l'an 9 de cette même ère. Mais la multiplicité même de ces conclusions veut qu'on les débatte, et, s'il se peut, qu'on les juge. Nous le ferons aussi brièvement que possible, en nous bornant à ce qui sera strictement nécessaire pour justifier notre détermination '.

II

y a trois grandes époques dans l'histoire évangé

1 Voy. en particulier Képler, de Anno natali Christi; Petau, Doctrina

lique la naissance, le baptême et la mort du Sauveur. Elles sont liées entre elles par les textes sacrés et par la tradition, mais non pas au point que l'une étant établie doive entraîner nécessairement les deux autres : elles ont seulement des relations d'influence réciproque, en sorte qu'il faut avoir touché à toutes, pour conclure sur chacune. Nous les prendrons dans leur ordre, laissant la conclusion en l'état que la marche de la discussion comporte, trop heureux si après les avoir mises l'une après l'autre en lumière nous pouvions, en les reprenant dans leur ensemble, parvenir à les fixer.

Jésus-Christ est né sous Hérode (Matth. 1, 1), à la suite d'un recensement ordonné par Auguste (Luc. II, 1-5). Telles sont les deux données de l'Évangile qui marquent les limites du temps cherché. La limite extrême est l'époque de la mort d'Hérode : or, l'époque de la mort d'Hérode est déterminée, 1° par le commencement et la durée de son règne; 2o par la fin et la durée des règnes de ses trois fils et successeurs, Archélaüs, Philippe et Hérode-Antipas.

Rappelons d'abord que les Juifs, à l'exemple des Orientaux, et à la différence des Romains en ce qui touche les empereurs, comptaient les années de leurs rois, non du jour vrai de l'avénement de chacun d'eux, mais du premier jour de l'année dans laquelle ils

temporum; Huet, Dem. Evang. prop. IX, ch. vIII; Noris, de Numo Herod. Antipa et Cenotaph. Pisana, II, 6 et 16. Opp. t. II et III (1729); Fréret, Mémoire de l'Acad. des Inscr. t. XXI, p. 278 et suiv.; Fontenu, ibid. t. V, p. 270; de La Nause et de La Barre, ibid. t. IX, p. 91 et suiv.; Magnan, de Anno nativ. Christi (Rome, 1772); Sanclemente, de Vulgate æræ emendatione (Rome, 1793); Ideler, Handbuch der mathem. und techn. Chronologie; Patritius, de Evangel. (1853): il expose dans une dissertation particulière (III, XIX) les opinions des anciens sur ce sujet, qu'il a discuté lui-même dans les dissertations suivantes,

étaient arrivés au trône, c'est-à-dire du premier Nisan, premier mois de leur année sacrée, qui comprenait une partie de mars et d'avril' : en telle sorte qu'un prince parvenu au pouvoir huit jours, par exemple, avant le premier Nisan, comptait la seconde année du neuvième jour de son règne, et que mourant le 8 de ce même mois, ces huit jours de l'année nouvelle lui faisaient une dernière année, l'année commencée étant réputée entière. Ainsi, à moins qu'un prince ne meure exactement le dernier jour de l'année, une même année doit figurer tout à la fois dans le calcul, comme la dernière du mort et la première de son successeur3.

Cela posé, entrons dans l'examen de la question. Hérode, selon Josèphe, a régné trente-sept ans, depuis la déclaration du sénat qui le fit roi, ou trentequatre ans, depuis sa rentrée à Jérusalem, marquée par la mort d'Antigone'. Or, la déclaration du sénat est, selon Josèphe, du consulat de Cn. Domitius Calvinus et de C. Asinius Pollion, l'an 714 de R., 40 av. l'È.V.; la reprise de Jérusalem par Hérode, et la

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Voy. la note XXVII à la fin de ce volume.

2 Prima dies mensis Nisan est novus annus Regum... adeo ut quamvis uno tantum mense, una hebdomade vel uno die ante Nisan in Regem electus et confirmatus fuerit, dies ille, hebdomas vel mensis pro integro anno reputati fuerint, et secundum regni sui anni Nisan ille denuo inchoaverit. (Talmud, trad. de Buxtorf. Synag. Judaic. c. 17, ap. Fréret, Mém. de l'Acad. des inscr. t. XXI, p. 295.

3 Sanclemente, de Vulg. æræ emendat. p. 268, etc.

Jos. Ant. XVIII, vi, 1 et B. Jud. I, xxxviii, 8.

5 Ibid. XIV, XIV, 5. Pour la commodité du calcul, dans une période qui comprend des années avant et après l'ère vulgaire, nous emploierons communément l'ère de Rome, en admettant que l'an 1 de Rome répond à l'an 753 avant l'ère vulgaire, et l'an 1er de l'ère vulgaire à l'an 754 de Rome, selon le mode des chronologistes: Jésus-Christ étant né le 25 décembre, les astronomes, on le sait, comptent O l'année de la naissance, 1 l'année qui précède et + 1 l'année qui suit. Les chronologistes n'ont point l'année 0; ils comptent · 1 l'année même vers la fin de laquelle Jésus-Christ est né, et +1 l'année qui suit à partir du 1er jan

mort d'Antigone eurent lieu sous le consulat de M. Vipsanius Agrippa et de L. Caninius Gallus, l'an 717 de R. (37 av. l'E.V.) '. La déclaration du sénat paraît être de la fin de l'automne; la prise de Jérusalem, du mois d'octobre, trois ans plus tard2: la première année du roi, selon l'usage des Juifs, datera donc du 1er Nisan 714 ou 717 de R., selon qu'on aura en vue l'un ou l'autre de ces deux avénements; et la dernière (la trenteseptième année, dans le premier système, et la trentequatrième, dans le second) commencera au 1er Nisan de l'an de R. 750 (4 av. l'È.V.). Il est donc mort après le 1er Nisan 750.

Mais il n'a pas vécu l'année entière: car si nous tenons compte des données analogues de l'histoire sur la durée et sur la fin des règnes de ses trois fils, nous verrons qu'il les avait eus pour successeurs avant le 1er Nisan 751.

En effet, Archélaüs fut accusé et déposé en la dixième année de son règne3, et Quirinius, envoyé en mêmetemps pour prendre possession de ses biens et faire le recensement de la Judée. Or, ce recensement se fit l'an 37 depuis la bataille d'Actium, c'est-à-dire du 2 septembre 759 au 2 septembre 760 de R. : l'ère actiaque datant du jour même de la bataille d'Actium (2 septembre 723 de R.). Archélaüs est-il resté sur le trône jusqu'au delà du 1er Nisan (deuxième moitié de mars),

vier. Quand nous indiquerons les années avant ou après Jésus-Christ, il s'agira toujours de l'ère vulgaire.

1 Ant. XIV, xvi, 4.

2 Voy. la note XXVIII à la fin de ce volume.

3 Jos. Ant. XVII, XIII, 2. Dans la Guerre des Juifs (II, VII, 3), il dit qu'Archélaüs fut envoyé en exil en la neuvième année de son règne; mais un passage du livre de sa Vie, § 1, prouve qu'Archélaüs avait commencé sa dixième année. — 4 Jos. Ant. XVIII, 11, 1.

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