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Que vois-je ? mes tyrans!

SCENE DERNIERE.

LOREDAN, Chevaliers, Suite, AMENAIDE, ARGIRE, FANIE, ALDAMON, TANCREDE dans le fond porté par des foldats.

LORED A N.

O Malheureux Argire!

O fille infortunée! on conduit devant vous
Ce brave Chevalier percé de nobles coups.
Il a trop écouté fon aveugle furie;

Il a voulu mourir, mais il meurt en héros.
De ce fang précieux verfé pour la patrie
Nos fecours empreffés ont fufpendu les flots;
Cette ame qu'enflammait un courage intrépide,
Semble encor s'arrêter pour voir Aménaïde;
Il la nomme; les pleurs coulent de tous les yeux,
Et d'un jufte remord je ne puis me défendre.
(Pendant qu'il parle on approche lentement Tancrède vers
Aménaïde, prefque évanouie entre les bras de fes femmes ;
elle fe débarrasse précipitamment des femmes qui la foutien-
nent Je retournant avec horreur vers Lorédan,
dit :)

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Barbares, laiffez là vos remords odieux :

(puis courant à Tancrède fe jettant à ses piés, ) Tancrède, cher amant, trop cruel & trop tendre, Dans nos derniers inftants, hélas! peux-tu m'entendre? Tes yeux appefantis peuvent-ils me revoir ? Hélas! reconnais moi, connais mon défefpoir. Dans le même tombeau fouffre au moins ton épouse, C'est là le feul honneur dont mon ame eft jalouse. Ce nom facré m'eft dû; tu me l'avais promis; Ne fois point plus cruel que tous nos ennemis. Honore d'un regard ton époufe fidelle.

(il la regarde.)

- C'est donc là le dernier que tu jettes fur elle! De ton cœur généreux fon cœur eft.il hai?

Peux-tu me foupçonner?

TANCREDE (Se foulevant un peu. )

Ah! vous m'aviez trahi!

A MENA ï D E.

Qui! moi? Tancrède !

ARGIRE (Se jettant auffi à genoux de l'autre côté,& embraffant Tancrède, puis fe relevant. )

Hélas! ma fille infortunée,

Pour t'avoir trop aimé fut par nous condamnée,

Et nous la puniffions de te garder fa foi.

Nous fumes tous cruels, envers elle, envers toi.

Nos loix, nos Chevaliers, un tribunal auguste;

Nous

Nous avons failli tous; elle feule était juste.
Son écrit malheureux qui nous avait armés,
Cet écrit fut pour toi, pour le héros qu'elle aime.
Cruellement trompé, je t'ai trompé moi-même.
TANCRED E.

Aménaïde!ô ciel! eft-il vrai? vous m'aimez !

A MENAID E.

Va, j'aurais en effet mérité mon fuplice,
Ce fuplice honteux dont tu m'as fçû tirer,
Si j'avais un moment ceffé de t'adorer,

Si mon cœur eût commis cette horrible injustice.
TANCRED E.

(en reprenant un peu de force, & élevant la voix.)
Vous m'aimez! ô bonheur plus grand que mes revers!
Je fens trop qu'à ce mot je regrette la vie.
J'ai mérité la mort, j'ai crû la calomnie.

Ma vie était horrible! hélas! & je la perds,

Quand un mot de ta bouche allait la rendre heureuse.

A MENA i D E.

Ce n'eft donc, jufte Dieu! que dans cette heure affreufe, Ce n'eft qu'en le perdant que j'ai pû lui parler!

Ah, Tancrède!

TANCRED E.

Vos pleurs devraient me confoler.

Mais il faut vous quiter, ma mort est douloureuse!
Je fens qu'elle s'aproche. Argire, écoutez moi.
Voilà le digne objet qui me donna sa fói;
Voilà de nos foupçons la victime innocente.

A

A fa tremblante main joignez ma main fanglante;
Que j'emporte au tombeau le nom de fon époux.

Soyez mon père.

ARGIRE prenant leurs mains.

Hélas! mon cher fils, puiffiez-vous

Vivre encor adoré d'une épouse chérie !

TANCRED E.

J'ai véçu pour venger ma femme & ma patrie;
J'expire entre leurs bras, digne de toutes deux,
De toutes deux aimé, j'ai rempli tous mes vœux. ...
Ma chére Aménaïde! -

A MENA ïD E.

Eh bien !

TANCRED E.

Gardez de fuivre

Ce malheureux amant, & jurez moi de vivre....

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CATAN E.

(il retombe.)

Il expire. & nos cœurs de regrets pénétrés...
Qui l'ont connu trop tard....

AMENAÏDE (Se jettant fur le corps de Tancrède.)
Il meurt, & vous pleurez...
Vous cruels, vous tyrans qui lui coûtez la vie !
(elle fe releve & marche.)

Que l'enfer engloutiffe & vous & ma patrie !
Et ce Sénat barbare, & ces horribles droits
D'égorger l'innocence avec le fer des loix !
Que ne puis-je expirer dans Syracufe en poudre,

Sur

Sur vos corps tout fanglans écrafés par la foudre!

(elle fe rejette fur le corps de Tancrède. Y Tancrède, cher Tancrède! ( elle fe relève en fureur.) Il meurt, & vous vivez?

Vous vivez, je le fuis, je l'entends, il m'appelle,
Il fe rejoint à moi dans la nuit éternelle.

Je vous laiffe aux tourmens qui vous font réservés.
(elle tombe dans les bras de Fanie.)

Ah, ma fille!

ARGIR E.

AMENAIDE égarée le repoussant.

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O! ma fille! 6 ma chère Fanie!

Qu'avant ma mort hélas! on la rende à la vie.

Fin du cinquiéme acte,

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