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A ce Maure impofant prodiga fes fuffrages.
Combien de citoyens aujourd'hui prévenus
Pour les arts féduifans * que l'Arabe cultive!
Arts trop pernicieux, dont l'éclat les captive,

A nos vrais Chevaliers noblement inconnus.

Que nôtre art foit de vaincre, & je n'en veux point d'autre,
J'espère en ma valeur, j'atends tout de la vôtre;
Et j'aprouve furtout cette févérité

Vengereffe des loix & de la liberté.

Pour détruire l'Espagne il a fuffi d'un traître † ;
Il en fut parmi nous, chaque jour en voit naître,
Mettons un frein terrible à l'infidélité :

Au falut de l'Etat que toute pitié cède:
Combatons Solamir, & profcrivons Tancrède.
Tancrède né d'un fang parmi nous détesté
Eft plus à craindre encor pour nôtre liberté.
Dans le dernier Confeil un decret jufte & fage
Dans les mains d'Orbaffan remit fon héritage
Pour confondre à jamais nos ennemis cachés,
A ce nom de Tancrède en fecret attachés ;
Du vaillant Orbaffan c'eft le jufte partage,
Sa dot, fa récompenfe.

CATAN E.

2.

Oui, nous y foufcrivons.

Que Tancrède, s'il veut, foit puiffant à Bizance;

Qu'une

* En ce temps les Arabes cultivaient feuls les fciences en Oc

cident, & ce font eux qui fondérent l'école de Salerne.

Le Comte Julien, ou l'Archevêque Opas.

Qu'une Cour odieuse honore fa vaillance;
Il n'a rien à prétendre aux lieux où nous vivons.
Tancrède en fe donnant un maître defpotique,
A renoncé lui-même à nos facrés remparts.
Plus de retour pour lui; l'efclave des Céfars
Ne doit rien pofféder dans une république.
Orbaffan de nos loix eft le plus ferme apui,
Et l'Etat qu'il foutient ne pouvait moins pour lui.
Tel eft mon fentiment.

ARGIR E.

Je vois en lui mon gendre;

Ma fille m'eft bien chère, il eft vrai; mais enfin,
Je n'aurais point pour eux dépouillé l'orphelin.
Vous favez qu'à regret on m'y vit condescendre,

LORED A N.

Blâmez-vous le Sénat?

ARGIR E.

Non; je hais la rigueur ;

Mais toûjours à la loi je fus prêt à me rendre,
Et l'intérêt commun l'emporta dans mon cœur.

ORBAS SAN.

Ces biens font à l'Etat, l'Etat feul doit les prendre.
Je n'ai point recherché cette faible faveur.

ARGIRE.

ARGIR E.

N'en parlons plus; hâtons cet heureux hymenée ;
Qu'il amène demain la brillante journée,
Où ce chef arrogant d'un peuple destructeur,
Solamir,à la fin doit connaître un vainqueur.
Vôtre rival en tout, il ofa bien prétendre,
En nous offrant la paix, à devenir mon gendre *;
Il penfait m'honorer par cet hymen fatal.

Allez,
Mes amis

dans tous les temps triomphez d'un rival:

loyons prêts -ma faibleffe & mon âge
Ne me permettent plus l'honneur de commander;
A mon gendre Orbaffan vous daignez l'accorder:
Vous fuivre eft pour mes ans un affez beau partage;
Je ferai près de vous, j'aurai cet avantage ;
Je fentirai mon cœur encor fe ranimer;
Mes yeux feront témoins de vôtre fier courage,
Et vous auront vû vaincre avant de fe fermer.

LOREDAN.

Nous combatrons fous vous, feigneur, nous ofons croire
Que ce jour, quel qu'il foit, nous fera glorieux;

Nous nous promettons tous l'honneur de la victoire,
Ou l'honneur confolant de mourir à vos yeux.

SCENE

Il était alors très-commun de marier les Chrétiennes à des Mufulmans; & Abdalife, le fils de Mufa conquérant de l'Efpagne, époufa la fille du Roi Rodrigues: cer exemple fut imité dans tous les pays où les Arabes portèrent leurs armes victoricufes:

SCENE II.

ARGIRE, OR BASSAN.

ARGIR E.

EH bien, brave Orbaffan, fuis-je enfin vôtre père?

Tous vos reffentimens font-ils bien effacés? Pourrai-je en vous d'un fils trouver le caractère? Dois-je compter fur vous?

ORBAS SAN.

Je vous l'ai dit affez:

J'aime l'Etat, Argire, il nous réconcilie.

Cet hymen nous raproche, & la raifon nous lie.
Mais le nœud qui nous joint n'eût point été formé,
Si dans nôtre querelle à jamais affoupie,
Mon cœur qui vous haït, ne vous eût estimé.
L'amour peut avoir part à ma nouvelle chaine;
Mais un fi noble hymen ne fera point le fruit
D'un feu né d'un inftant, qu'un autre inftant détruit,
Que fuit l'indifférence, & trop fouvent la haine.
Ce cœur que la patrie appelle aux champs de Mars,
Ne fçait point foupirer au milieu des hazards.
Mon hymen a pour but l'honneur de vous complaire',
Nôtre union naiffante à tous deux néceffaire,

La splendeur de l'Etat, votre intérêt, le mien;
Devant de tels objets l'amour a peu de charmes.

H

Il pourra refferrer un fi noble lien;

Mais fa voix doit ici fe taire au bruit des armes.

ARGIR E.

J'eftime en un foldat cette mâle fierté:
Mais la franchise plait, & non l'austérité.
J'espère que bientôt ma chére Aménaïde
Pourra fléchir en vous ce courage rigide,
C'eft peu d'ètre un guerrier; la modefte douceur
Donne un prix aux vertus, & fied à la valeur.
Vous fentez que ma fille au fortir de l'enfance,
Dans nos temps orageux de trouble & de malheur,
Par fa mére élevée à la cour de Bizance,

Pourrait s'effaroucher de ce févère accueil,

Qui tient de la rudeffe, & reffemble à l'orgueil.
Pardonnez aux avis d'un vieillard & d'un pére.

OR BASSA N.

Vous-même, pardonnez à mon humeur auftère:
Elevé dans nos camps, je préferai toujours
A ce mérite faux des politeffes vaines,
A cet art de flater, à cet efprit des cours,
La groffiére vertu des mœurs républicaines.
Mais je fais refpecter la naiffance & le rang
D'un eftimable objet formé de vôtre fang.
Je prétends par mes foins mériter qu'elle m'aime,
Vous regarder en elle, & m'honorer moi-même.

ARGIRE.

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