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Ma mére avait penfé qu'il pouvait être encore
L'apui de Syracufe, & le vainqueur du Maure:
Et lorfque dans ces lieux des citoyens ingrats
Pour ce fier Orbaffan contre vous s'animèrent,
Qu'ils ravirent vos biens, & qu'ils vous opprimèrent,
Tancrède aurait pour vous affronté le trépas.
C'est tout ce que j'ai fû.

ARGIR E.

C'est trop, Aménaïde.

Rendez vous aux confeils d'un père qui vous guide.
Conformez vous au temps, conformez vous aux lieux.
Solamir & Tancrède, & la Cour de Bizance,

Sont tous également en horreur en ces lieux.
Vôtre bonheur dépend de vôtre complaifance.
J'ai pendant foixante ans combatu pour l'Etat.
Je le fervis injufte, & le chéris ingrat.
Je dois penfer ainfi jufqu'à ma derniére heure.
Prenez mes fentimens : & devant que je meure,
Confolez mes vieux ans, dont vous faites l'efpoir.
Je fuis prêt à finir une vie orageufe:

La vôtre doit couler fous les loix du devoir;

Et je mourrai content, fi vous vivez heureuse.

A MENA i D E.

Ah Seigneur! croyez moi, parlez moins de bonheur.
Je ne regrette point la cour d'un Empereur.

Je

Je vous ai confacré mes fentimens, ma vie;
Mais pour en difpofer attendez quelques jours.
Au crédit d'Orbaffan trop d'intérêt vous lie;
Ce crédit fi vanté doit-il durer toujours?

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peut tomber; tout change: & ce héros peut-être S'eft trop tôt déclaré vôtre gendre & mon maître.

ARGIR E.

Comment? que

dites-vous ?

A MENA i D E.

Cette témérité

Eft peu refpectueufe, & vous femble une injure.
Je fais que dans les cours mon fexe plus flaté,
Dans vôtre République a moins de liberté:
A Bizance on le fert; ici la loi plus dure
Veut de l'obéiffance, & défend le murmure.
Les Mufulmans altiers, trop longtems vos vainqueurs,
Ont changé la Sicile, ont endurci vos mœurs ;
Mais qui peut altérer vos bontés paternelles?

ARGIR E.

Vous feule, vous, ma fille, en abufant trop d'elles.
De tout ce que j'entends mon efprit eft confus.
J'ai permis vos délais, mais non pas vos refus.
La loi ne peut plus rompre un noeud fi légitime;
La parole est donnée, y manquer eft un crime.
Vous me l'avez bien dit, je fuis né malheureux :
Jamais aucun fuccès n'a couronné mes vœux.
Tous les jours de ma vie ont été des orages.

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Dieu puiffant! détournez ces funeftes préfages
Et puiffe Aménaïde, en formant ces liens,
Se préparer des jours moins triftes que les miens!

SCENE V.

A MENAIDE feule.

TAncrède, cher amant! moi j'aurais la faiblesse

De trahir mes fermens pour ton perfécuteur!
Plus cruelle que lui, perfide avec baffeffe,
Partageant ta dépouille avec cet oppreffeur,
Je pourrais...

SCENE

VI.

A MENAIDE, FA NIE.

A MENA ï DE.

VIens, approche, ô ma chére Fanie:

Vois le trait détefté qui m'arrache la vie.
Orbaffan par mon pére eft nommé mon époux !

FANIE.

Je fens combien cet ordre eft douloureux pour vous.

J'ai vu vos fentimens, j'en ai connu la force.

Le fort n'eut point de traits, la cour n'eut point d'amorce
Qui puffent arrêter ou détourner vos pas,
Quand la route par vous fut une fois choifie.

Vôtre cœur s'eft donné, c'eft pour toute la vie.
Tancrède & Solamir touchés de vos appas,
Dans la cour des Céfars en fecret foupirèrent;
Mais celui que vos yeux justement distinguèrent,
Qui feul obtient vos vœux, qui fut les mériter,
En fera toujours digne; & puifque dans Bizance
Sur le fier Solamir il eut la préférence,
Orbaffan dans ces lieux ne pourra l'emporter ;
Vôtre ame eft trop conftante.

A MENA i D E.

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Ah! tu n'en peux douter;

On dépouille Tancrède, on l'exile, on l'outrage;
C'est le fort d'un héros d'ètre perfécuté;
Je fens que c'est le mien de l'aimer davantage.
Ecoute; dans ces murs Tancrède eft regretté,
Le peuple le chérit?

FANIE.

Banni dans fon enfance,

De fon pére oublié, les faftueux amis

Ont bientôt à fon fort abandonné le fils.

Peu de cœurs comme vous tiennent contre l'absence.

A leurs feuls intérêts les grands font attachés.

Le peuple est plus fenfible.

A MENA ï D E.

Il eft auffi plus jufte.

B 3

FANIE.

FANIE.

Mais il eft affervi: nos amis font cachés;
Aucun n'ofe parler pour ce profcrit augufte.
Un Sénat tyrannique eft ici tout-puiffant.

A MENA i D E.

Qui, je fais qu'il peut tout, quand Tancrède eft abfent, FANIE.

S'il pouvait fe montrer, j'efpérerais encore:

Mais il eft loin de vous.

A MENA i D E.

Jufte ciel, je t'implore!

(à Fanie.)

Je me confic à toi. Tancrède n'eft pas loin;
Et quand de l'écarter on prend l'indigne foin,
Lorfque la tyrannic au comble eft parvenue,
Il eft tems qu'il paraiffe, & qu'on tremble à fa vûe.
Tancrède eft dans Meffine.

FANIE.

Eft-il vrai? juftes cieux!

Et cet indigne hymen eft formé fous fes yeux!

Il ne le fera pas,

A MENA i D E.

non, Fanie; & peut-être

Mes oppreffeurs & moi nous n'aurons plus qu'un maître, Viens, je t'aprendrai tout; mais il faut tout ofer. Le joug eft trop honteux, ma main doit le brifer.

La

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