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ARGIR E.

Par mon ordre en ces lieux elle avance vers vous.

SCENE

III.

ARGIRE, ORBASSAN, AMENAIDE.

L

ARGIR E.

E bien de cet Etat, les voix de Syracufe,

Vôtre pére, le ciel, vous donnent un époux;
Leurs ordres réunis ne fouffrent point d'excufe.
Ce noble chevalier, qui fe rejoint à moi,
Aujourd'hui par ma bouche a reçu vôtre foi.
Vous connaiffez fon nom, fon rang, fa renommée:
Puiffant dans Syracufe, il commande l'armée :

Tous les droits de Tancrède entre fes mains remis.....

De Tancrède!

AMENAÏDE à part.

ARGIRE.

.. A mes yeux font le moins digne prix

Qui relève l'éclat d'une telle alliance.

OR BASSA N.

Elle m'honore affez, feigneur, & fa préfence
Rend plus cher à mon cœur le don que je reçois.
Puiffai-je en méritant vos bontés & fon choix,
Du bonheur de tous trois confirmer l'efpérance!

AMENAIDE.

A MENA i D E.

Mon pére, en tous les tems, je fais que vôtre coeur
Sentit tous mes chagrins, & voulut mon bonheur.
Vôtre choix me deftine un héros en partage;

Et quand ces longs débats qui troublèrent vos jours,
Grace à vôtre fageffe ont terminé leurs cours,
Du nœud qui vous rejoint vôtre fille est le gage;
D'une telle union je conçois l'avantage.

Orbaffan permettra que ce cœur étonné,
Qu'opprima dès l'enfance un fort toujours contraire,
Par ce changement même au trouble abandonné,
Se recueille un moment dans le fein de fon pére.

OR BASSA N.

Vous le devez, Madame; & loin de m'opposer
A de tels fentimens, dignes de mon estime,
Loin de vous détourner d'un foin fi légitime,
Des droits que j'ai fur vous je craindrais d'abuser.
J'ai quitté nos guerriers, je revole à leur tète ;
C'eft peu d'un tel hymen, il le faut mériter;
La victoire en rend digne, & j'ofe me flater
Que bientôt des lauriers en orneront la fête.

SCENE

SCENE IV.

ARGIRE, A MENA IDE.

ARGIR E.

Vous femblez interdite : & vos yeux pleins d'effroi,

De larmes obfcurcis, fe détournent de moi.
Vos foupirs étouffés semblent me faire injure.
La bouche obéit mal, lorfque le cœur murmure.

A MENA ï D E.

Seigneur, je l'avoûrai, je ne m'attendais pas
Qu'après tant de malheurs, & de fi longs débats,
Le parti d'Orbaflăn dût etre un jour le vôtre,
Que mes tremblantes mains uniraient l'un & l'autre,
Et que votre ennemi dût paffer dans mes bras.
Je n'oublirai jamais que la guerre civile
Dans vos propres foyers vous priva d'un azile ;
Que ma mére à regret évitant le danger,
Chercha loin de nos murs un rivage étranger;
Que des bras paternels avec elle arrachée,
A fes triftes deftins dans Bizance attachée,
J'ai partagé longtemps les maux qu'elle a foufferts.
Au fortir du berceau j'ai connu les revers:
J'appris fous une mére abandonnée, errante,
A fupporter l'exil & le fort des profcrits,
L'accueil impérieux d'une cour arrogante,
Et la fauffe pitié pire que les mépris.

Dans

Dans un fort avili noblement élevée,

De ma mére bientôt cruellement privée,

Je me vis feule au monde, en proie à mon effrai,
Rofeau faible & tremblant, n'ayant d'appui que moi.
Vôtre deftin changea. Syracufe en allarmes

Vous remit dans vos biens, vous rendit vos honneurs
Se repofa fur vous du deftin de fes armes,
Et de fes murs fanglans repouffa fes vainqueurs.
Dans le fein paternel je me vis rappellée;
Un malheur inouï m'en avait exilée ;

Peut-être j'y reviens pour un malheur nouveau.
Vos mains de mon hymen allument le flambeau.
Je fais quel intérêt, quel efpoir vous anime;
Mais de vos ennemis je me vis la victime.
Je fuis enfin la vôtre : & ce jour dangereux
Peut-être de nos jours fera le plus affreux.

ARGIR E.

Il fera fortuné; c'est à vous de m'en croire.
Je vous aime, ma fille, & j'aime vôtre gloire.
On a trop murmuré, quand ce fier Solamir,
Pour le prix de la paix qu'il venait nous offrir,
Ofa me propofer de l'accepter pour gendre;
Je vous donne au héros qui marche contre lui,
Au plus grand des guerriers armés pour nous défendre,
Autrefois mon émule, à préfent nôtre appui.

A MEN A i D E.

Quel appui ! vous vantez fa fuperbe fortune;

Mes

Mes vœux plus modérés la voudraient plus commune ;
Je voudrais qu'un héros fi fier & fi puiffant
N'eût point pour s'agrandir dépouillé l'innocent. *
ARGIR E.

Du Confeil, il eft vrai, la prudence févère
Veut punir dans Tancrède une race étrangère.
Elle abufa longtems de fon autorité.
Elle a trop d'ennemis.

A MENA i D E.

Seigneur, ou je m'abuse,

Ou Tancrède eft encor aimé dans Syracuse.

ARGIR E.

Nous rendons tous justice à fon cœur indonité;
Sa valeur a, dit-on, fubjugué l'Illirie;

Mais plus il a fervi fous l'aigle des Céfars,
Moins il doit efpérer de revoir fa patrie.
Il eft par un décret chaffé de nos remparts.

A MENA i D E.

Pour jamais! lui Tancrède? *

ARGIR E.

Oui, l'on craint fa préfence.

Et fi vous l'avez vû dans les murs de Bizance,

Vous favez qu'il nous hait.

AMENAIDE.

* Si on joue cette Tragédie dans les Provinces, l'Actrice repréfentant Aménaïde doit favoir que ces vers marqués * doivent être récités avec l'air & le ton d'une froideur contrainte,

Théatre. Tom. V,

B

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