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L'HIERO PHA NTE.

Hélas! tous les humains ont befoin de clémence.
Si Dieu n'ouvrait fes bras qu'à la feule innocence,
Qui viendrait dans ce temple encenfer les autels ?
Dieu fit du repentir la vertu des mortels.

Tel eft l'ordre éternel à qui je m'abandonne,
Que la terre eft coupable, & que le ciel pardonne.
STATIR A.

Eh bien, fi vous favez pour quel excès d'horreur,
Il demande fa grace, & craint un Dieu vengeur,
Si vous êtes inftruit qu'il fit périr fon maître,

(Et quel maître, grands Dieux!) fi vous pouvez con

naître,

Quel fang il répandit dans nos murs enflammés,

Quand aux yeux d'Alexandre à peine encor fermés
Ayant ofé
percer fa veuve gémiffante,

Sur le corps d'un époux il la jetta mourante;
Vous ferez plus furpris, lorfque vous apprendrez
Des fecrets jufqu'ici de la terre ignorés.
Cette femme élevée au comble de la gloire,
Dont la Perfe fanglante honore la mémoire
Veuve d'un demi-Dieu, fille de Darius,
Elle vous parle ici, ne l'interrogez plus.

Les prêtres & les prêtresses élèvent les mains, & s'in-
clinent.)

L'HI E

L'HIERO PHANTE.

O Dieux! qu'ai-je entendu ! Dieux que le crime outrage,
De quel coups vous frappez ceux qui font vôtre image!
Statira dans ce temple! Ah! fouffrez qu'à genoux
Dans mes profonds refpects...

STAT IR A.

Grand-Prêtre, levez vous.

Je ne fuis plus pour vous la maitreffe du monde ;
Ne refpectez ici que ma douleur profonde.
Des grandeurs d'ici-bas voyez quel est le fort.
Ce qu'éprouva mon père au moment de fa mort,
Dans Babilone en fang je l'éprouvai de mème.
Darius, Roi des Rois, privé du diadème,
Fuiant dans des déferts, errant, abandonné,
Par fes propres amis fe vit affaffiné.

Un étranger, un pauvre, un rebut de la terre,
De fes derniers momens foulagea la mifère.
(Montrant la prêtresse inférieure. )

Voyez-vous cette femme, étrangère en ma cour?
Sa main, fa feule main m'a confervé le jour.
Seule elle me tira de la foule fanglante
Où mes lâches amis me laiffaient expirante.
Elle eft Ephéfienne; elle guida mies pas
Dans cet augusté afyle au bout de mes Etats.
Je vis par mille mains ma dépouille arrachée,
De mourans & de morts la campagne jonchée,
Les foldats d'Aléxandre érigés tous en Rois,

Et

Et les larcins publics appellés grands exploits.

J'eus en horreur le monde, & les maux qu'il enfante:
Loin de lui pour jamais je m'enterrai vivante.

Je pleure, je l'avoue, une fille, une enfant
Arrachée à mes bras fur mon corps tout fanglant.
Cette étrangère ici me tient lieu de famille.
J'ai perdu Darius, Aléxandre & ma fille;
Dieu feul me refte.

L'HIER OPHANT E.

Hélas! qu'il foit donc vôtre appui !

Du trône où vous étiez, vous montez jufqu'à lui.
Son temple eft vôtre cour. Soyez -y plus heureuse
Que dans cette grandeur aùgufte & dangereuse,
Sur ce trône terrible, & par vous oublié,
Devenu pour la terre un objet de pitié.

STAT IR A.

Ce temple quelquefois, Seigneur, m'a confolée.
Mais vous devez fentir l'horreur qui m'a troublée,
En voyant que Caffandre y parle aux mêmes Dieux
Contre fa tête impie implorés par mes vœux.

L'HIER OPHANT E.

Le facrifice eft grand, je fens trop ce qu'il coûte;
Mais nôtre loi vous parle, & vôtre cœur l'écoute.
Vous l'avez embraffée.

STATIR A.

Aurais-je pu prévoir,

Qu'elle

Qu'elle dût m'impofer cet horrible devoir ?
Je fens que de mes jours, ufés dans l'amertume,
Le flambeau pâliffant s'éteint & fe confume.

Et ces derniers momens que Dieu veut me donner,
A quoi vont - ils fervir ?

L'HIER OPHANT E.

Peut-être à pardonner.

Vous-même vous avez tracé vôtre carrière;
Marchez y fans jamais regarder en arrière.
Les mânes affranchis d'un corps vil & mortel
Goûtent fans paffions un repos éternel.

Un nouveau jour leur luit, ce jour eft fans nuage;
Ils vivent pour les Dieux, tel eft nôtre partage.
Une retraite heureufe améne au fond des cœurs
L'oubli des ennemis, & l'oubli des malheurs.

STATIR A.

Il eft vrai; je fus Reine, & ne fuis que prêtreffe.
Dans mon devoir affreux foutenez ma faibleffe.

Que faut-il que je faffe?

L'HIER OPHANT E.

Olimpie à genoux

Doit d'abord en ces lieux fe jetter devant vous,
C'eft à vous à bénir cet illuftre himénée.

STATIR A.

Je vais la préparer à vivre infortunée:

C'eft

C'eft le fort des humains.

L'HIER OPHANT E.

Le feu facré, l'encens,

L'eau luftrale, les dons offerts aux Dieux puiflans
Tout fera présenté par vos mains refpectables.

STATI R A.

Et pour qui, malheureufe! Ah! mes jours déplorables
Jusqu'au dernier moment font-ils chargés d'horreur!
J'ai cru dans la retraite éviter mon malheur;
Le malheur eft partout; je m'étais abusée.
Allons, fuivons la loi par moi-même impofée.

L'HIER OPHANT E.

Adieu, je vous admire autant que je vous plains.
Elle vient près de vous.

SCENE III.

(Il fort.)

STATIRA, OLIMPIE. ( Le Théatre tremble. )

STATI R A.

Lleux funèbres & faints,

Vous frémiffez! - J'entends un horrible murmure;
Le Temple est ébranlé! — Quoi! toute la nature
S'émeut à fon afpect! Et mes fens éperdus

Sont dans le même trouble & reftent confondus!

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