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Etonné de moi-même, & confus de la rage
Où mon père emporta mon aveugle courage,
J'en ai long-tems gémi.

ANTIGONE.

Mais quels motifs fecrets

Redoublent aujourd'hui de fi cuifants regrets?
Dans le cœur d'un ami j'ai quelque droit de lire ;
Vous diffimulez trop.

CASSANDRE.

Ami- que puis-je dire!

Croyez... qu'il eft des tems où le cœur combattu
Par un inftinct fecret revole à la vertu,
Où de nos attentats la mémoire paffée
Revient avec horreur effrayer la pensée.

ANTIGONE.

Oubliez, croyez moi, des meurtres expiés ;
Mais que nos intérêts ne foient point oubliés.
Si quelque repentir trouble encor vôtre vie,
Repentez-vous furtout d'abandonner l'Afie
A l'infolente loi du traître Antiochus.

Que mes braves guerriers, & vos Grecs invaincus,
Une feconde fois faffent trembler l'Euphrate.
De tous ces nouveaux Rois dont la grandeur éclate,
Nul n'eft digne de l'être, & dans fes premiers ans
N'a fervi, comme nous, le vainqueur des Perfans.
Tous nos chefs ont péri.

CAS

CASSANDRE.

Je le fais, & peut-être

Dieu les immola tous aux mânes de leur maître.

ANTIGONE.

Nous reftons, nous vivons, nous devons rétablir
Ces débris tout fanglants qu'il nous faut recueillir.
Aléxandre en mourant les laiffait au plus digne.
Si j'ofe les faifir, fon ordre me défigne.
Affurez ma fortune, ainfi que vôtre fort.

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Le plus digne de tous fans doute eft le plus fort.
Relevons de nos Grecs la puiffance détruite :
Que jamais parmi nous la difcorde introduite
Ne nous expofe en proye à ces tirans nouveaux,
Eux qui n'étaient pas nés pour marcher nos égaux.
Me le promettez-vous ?

CASSANDR E.

Ami, je vous le jure;

Je fuis prêt à venger nôtre commune injure.
Le fceptre de l'Afie eft dans d'indignes mains,
Et l'Euphrate, & le Nil ont trop de Souverains.
Je combattrai pour moi, pour vous, & pour la Grèce.

ANTIGONE.

J'en crois vôtre intérêt, j'en crois vôtre promeffe ;
Et furtout je me fie à la noble amitié

Dont le noud refpectable avec vous m'a lié.

Mais de cette amitié je vous demande un gage,

Ne me refufez pas.

CASSANDRE.

Ce doute eft un outrage.

Ce que vous demandez, eft-il en mon pouvoir?
C'est un ordre pour moi, vous n'avez qu'à vouloir.

ANTIGONE.

Peut-être vous verrez avec quelque furprise
Le peu qu'à demander l'amitié m'autorife.
Je ne veux qu'une esclave.

CASSANDR E.

Heureux de vous fervir,

Ils font tous à vos pieds; c'est à vous de choisir.

ANTIGONE.

Souffrez que je demande une jeune étrangère (*)
Qu'aux murs de Babilone enleva vôtre père.
Elle est vôtre partage; accordez moi ce prix
De tant d'heureux travaux pour vous-même entrepris.
Vôtre père, dit-on, l'avait perfécutée :

J'aurai foin qu'en ma cour elle foit refpectée:

Son nom eft... Olimpie.

CASSAN DR E.

Olimpie!

ANTI

(*) L'A&eur doit ici regarder attentivement Caffandre.

1

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ANTIGONE.

Oui, Seigneur.

CASSANDRE à part.

De quels traits imprévus il vient percer mon cœur !

Que je livre Olimpie?

ANTIGONE.

Ecoutez, je me flatte

Que Caffandre envers moi n'a point une ame ingrate.
Sur les moindres objets un refus

peut bleffer,
Et vous ne voulez pas, fans doute, m'offenfer?

CASSANDRE.

Non; vous verrez bientôt cette jeune captive;
Vous-même jugerez s'il faut qu'elle vous fuive,
S'il peut m'ètre permis de la mettre en vos mains.
Ce temple eft interdit aux profanes humains.
Sous les yeux vigilants des Dieux & des Déeffes,
Olimpie eft gardée au milieu des prêtresses.
Les portes s'ouvriront quand il en fera temps.
Dans ce parvis ouvert au refte des vivants,

Sans vous plaindre de moi, daignez au moins m'attendre.
Des mistères nouveaux pourront vous y furprendre ;

Et vous déciderez fi la terre a des Rois

Qui puiffent affervir Olimpie à leurs loix.

(Il rentre dans le temple, & Softène sort. )

SCENE

SCENE III.

ANTIGONE, HERMAS (dans le périftile. )

HERMA S.

Seigneur, vous m'étonnez: quand l'Afie en allarmes

Voit cent trônes fanglants difputés par les armes,
Quand des vaftes Etats d'Alexandre au tombeau
La fortune prépare un partage nouveau,
Lorfque vous prétendez au fouverain empire,
Une efclave eft l'objet où ce grand cœur afpire!

ANTIGONE.

Tu dois t'en étonner. J'ai des raifons, Hermas,
Que je n'ofe encor dire, & qu'on ne connait pas.
Le fort de cette efclave eft important peut-être
A tous les Rois d'Afie, à quiconque veut l'être,
A quiconque en fon fein porte un affez grand cœur,
Pour ofer d'Alexandre être le fucceffeur.

Sur le nom de l'efclave, & fur fes avantures,
J'ai formé dès longtemps d'étranges conjectures.
J'ai voulu m'éclaircir: mes yeux dans ces remparts
Ont quelquefois fur elle arrêté leurs regards.

Ses traits, les lieux, le temps où le Ciel la fit naître,
Les refpects étonnants que lui prodigue un maître,
Les remords de Caffandre, & fes obfcurs discours,
A ces foupçons fecrets ont prêté des fecours.

Je

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